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POINT DE VUE...
Jean-Yves Le Heuzey, Président de la Société
Française de Cardiologie : l’essor fabuleux
de la rythmologie !
J
Hôpital Européen Georges Pompidou − Paris. [email protected]
ean-Yves Le Heuzey, Professeur de Cardiologie
à l’Université Paris-Descartes succède à Yves
Juillière à la présidence de la Société Française
de Cardiologie.
Au cours de son mandat, il souhaite privilégier
les actions innovantes de formation auprès de
tous les cardiologues francophones.
Jean-Yves Le Heuzey, voulez-vous
nous rappeler brièvement votre
parcours professionnel ?
Après mes études de médecine à Paris, j’ai fait mon
internat essentiellement en Cardiologie, en particulier à
l’hôpital Broussais dans le service du Professeur Maurice
où j’ai été chef de clinique et où je me suis particulièrement
orienté vers la rythmologie, puis j’ai exercé comme
praticien hospitalier de 1984 à 1990 à l’Hôpital SaintAntoine dans le service du Professeur Valty. En 1990,
j’ai rejoint l’Hôpital Broussais comme Professeur des
Universités dans le service du Professeur Guize. Depuis
2000, j’exerce à l’hôpital Européen Georges Pompidou,
dans le département de Cardiologie.
La rythmologie apparait
actuellement comme une des
sur-spécialités de cardiologie
les plus dynamiques.
Quelle est en quelques mots votre
analyse sur cette évolution ?
La rythmologie a longtemps été considérée comme
une sur-spécialité à part, une sorte de « ghetto », et son
exercice était confidentiel, réservé à quelques uns. A la
longue période des seules électrophysiologie diagnostique
et stimulation cardiaque a succédé l’avènement de la
spécialité actuelle, beaucoup plus vaste, de la rythmologie
dite « interventionnelle » devenue partie intégrante
et l’un des centres principaux de la Cardiologie : les
techniques d’ablation notamment en cas de fibrillation
atriale, la resynchronisation ventriculaire dans certaines
formes d’insuffisance cardiaque sont devenues des
interventions routinières dans de nombreuses équipes.
Voici quelques chiffres pour illustrer cette évolution: il
y a seulement 30 ans, dans un service de rythmologie
étaient effectuées chaque semaine 4 à 5 explorations
électrophysiologiques, et quelques implantations de
stimulateur cardiaque, d’ailleurs plus souvent déléguées
à un chirurgien ! Aujourd’hui, l’activité moyenne dans
nos services de rythmologie comporte de l’ordre de 3 à 5
explorations électrophysiologiques, l’implantation de 3 à
5 défibrillateurs et d’au moins 5 pacemakers, ainsi que 5 à
7 ablations pour un trouble du rythme supra ventriculaire
ou parfois ventriculaire. Ce développement a été absolument colossal, très souvent d’ailleurs avec pas ou peu
d’augmentation du personnel médical !
J’en profite pour chaleureusement remercier nos équipes
de tous leurs efforts au service du patient.
La Cardiologie est une spécialité parmi les plus attractives
et les plus prisées par les internes à l’issue de l’Examen
Classant National. Toutes spécialités confondues, elle
arrive en 2ème position, après l’ophtalmologie, ce qui
traduit son dynamisme et l’intérêt qu’y portent les plus
jeunes.
Vous venez de prendre
vos fonctions de Président de
la SFC, quels sont vos projets ?
Tout d’abord je tiens à dire que c’est un honneur et un
plaisir d’avoir été élu Président de la SFC. Je suis très
conscient de l’évolution réalisée et du travail accompli
ces dix dernières années par mes prédécesseurs et j’ai
bien l’intention de poursuivre cette tâche.
Les maître-mots de l’action que je souhaite mener sont
la défense de la Cardiologie et le développement de la
formation à toutes ses étapes. Je pense que la Société
doit être au service de tous les Cardiologues, afin de leur
apporter l’information la plus actualisée possible. De
nombreuses études cliniques effectuées en Cardiologie
démarrent avec un « rationnel » scientifique qui peut
se trouver partiellement périmé à la fin de l’étude ou
au moment de sa publication, tellement l’évolution des
idées, des résultats et des pratiques est rapide. C’est
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LA PAROLE À...
à mon sens l’une des spécialités où l’évolution est la
plus rapide. Il peut donc exister un réel décalage entre
les connaissances sur lesquelles reposent les études et
l’actualité au moment de la parution de leurs résultats.
Il est important de fournir aux confrères les clés pour
interpréter ces avancées rapides.
Je souhaite également poursuivre auprès des plus
jeunes les actions initiées depuis plusieurs années par la
Société Française de Cardiologie. Ils ont beaucoup de
contraintes dans leurs diverses activités professionnelles.
Les durées moyennes de séjour ont diminué, le nombre de
patients qu’ils prennent en charge a augmenté, les tâches
administratives également ; il faut donc leur faciliter
l’accès aux réunions de formation et aux nouveautés
pour aiguiser leur esprit critique.
La poursuite des actions vers la francophonie est
essentielle : les pays d’Afrique du Nord et de l’Afrique
subsaharienne arrivent à un tel niveau de développement
qu’ils se trouvent aujourd’hui confrontés à des
pathologies devenues très proches de celles rencontrées
en Europe occidentale. Nous souhaitons développer
avec eux des actions dans différentes directions, telles
que des projets de recherche clinique ou l’établissement
de registres sur les pathologies cardiovasculaires qui
nous sont communes. Je souhaite également favoriser les
échanges pour la formation des plus jeunes.
Concernant notre principal congrès annuel, les JE-SFC,
je désire fédérer le plus de structures possibles via
les sociétés scientifiques correspondantes. Au delà
des sessions communes déjà organisées depuis
plusieurs années avec certaines spécialités comme
la Société Française de Médecine d’Urgence ou la
Société Française de Radiologie, on peut parfaitement
imaginer l’organisation, en étroite collaboration avec
d’autres spécialités de « minicongrès » accolés aux JE,
juste avant, juste après ou même pendant. J’en ai déjà
parlé aux urgentistes et aux anesthésistes qui sont très
intéressés, car chez eux se développent également les
notions de sur-spécialités ayant des points communs
avec la Cardiologie, telle que la prise en charge de
l’arrêt cardio-respiratoire par exemple et l’on connaît
depuis longtemps le rôle bien spécifique que jouent
les anesthésistes-réanimateurs dans la période péri
opératoire de chirurgie cardiaque. L’organisation de
ces « mini congrès » leur permettrait d’assister aussi
à la totalité du congrès. C’est ainsi qu’au cours de la
dernière session de l’AHA a été organisé un congrès
satellite sur la « ressuscitation », qui a suscité beaucoup
d’intérêt.
Depuis quelques années, de nouveaux modes d’échanges
ont été développés pendant les JE SFC: ateliers, « villages »,
« training centers ». Je suis ouvert à toutes les nouvelles
idées et propositions sur des modes différents de communication pour compléter les sessions de présentation
et de mises au point qui constituent pour l’instant l’essentiel du contenu du congrès. Cette année le thème
général est celui de la « Cardiologie connectée », pour
tenir compte de l’irruption dans le champ quotidien
du cardiologue mais aussi des patients de nombreux
« objets connectés » ou de logiciels disponibles sur les
ordinateurs et autres tablettes ou « smart phones ».
En rythmologie, une des applications déjà anciennes et
figurant maintenant dans la loi hospitalière est la télésurveillance des pacemakers et des défibrillateurs.
Comment aimez-vous occuper
vos rares instants de loisir ?
Passionné d’opéra, je suis avide de toute découverte,
sans exclusive, du baroque au contemporain. Je m’y
rends, le plus souvent possible, dans les salles françaises
ou européennes. Mes préférences vont aux compositeurs
allemands, en particulier Mozart et Wagner et dans
l’opéra italien à Donizetti et Puccini (ah le 3e acte de
Tosca !). Mais je prends toujours beaucoup de plaisir
à écouter l’opéra français dont certaines œuvres sont
maintenant souvent « exhumées ».
J’attends avec impatience de pouvoir assister au 4e
opéra de Meyerbeer, les trois premiers que j’ai écoutés
(Robert le diable, Les Huguenots, L’Africaine) m’ont
passionné alors que ce compositeur a été souvent
décrié et ses opéras rarement montés car à très grand
spectacle.
Mon autre passion est la mer, découverte avec mon
père dont les vacances se passaient exclusivement à
la pêche sur son Doris. Par la suite, j’ai pris plaisir à
naviguer avec les différents types de bateaux que j’ai
pu avoir : dériveur avec un 470, croiseurs, Ecume de
Mer que j’ai gardée 32 ans (un cadeau de mon père
pour mon internat !), un Bavaria 32 puis maintenant,
bateau à moteur (sacrilège pour les « voileux »),
c’est un Targa 32, bateau finlandais fantastique et très
marin !.
Tous ces bateaux m‘ont permis de tracer mon sillage
depuis 45 ans sur les côtes d’Europe occidentale, de
la Hollande au Portugal, en passant par l’Angleterre,
l’Irlande et l’Espagne mais mon « jardin », c’est l’une
des plus belles côtes du monde, même si elle est souvent
inhospitalière et « piégeuse », celle du Cotentin et des iles
Anglo-Normandes.
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