L’Information psychiatrique 2012 ; 88 : 759–70 HISTOIRE DE LA PSYCHIATRIE De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens* Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Henri Vermorel, Madeleine Vermorel RÉSUMÉ Écrit à l’occasion du 150e anniversaire du CHS de Bassens, cet article retrace la création de l’asile dans la suite des idées des Lumières puis sa dégradation progressive à la fin du xixe siècle et au début du xxe avant que ne se dessine un renouveau s’exprimant dans les réformes de 1936, bientôt emportées par la guerre qui entraîne en France la mort de dizaines de milliers de patients. La seconde révolution psychiatrique qui s’appuie, avec la psychothérapie institutionnelle, sur un changement des mentalités, est favorisée par l’essor économique du pays après la Libération, l’introduction des idées de la psychanalyse et la découverte de nouveaux médicaments. La politique de secteur a connu à Bassens un développement précoce et exemplaire. La période actuelle, marquée par des difficultés économiques, est confrontée à la crise de la société comme à celle de la psychiatrie. Mots clés : histoire de la psychiatrie, hôpital psychiatrique, sectorisation psychiatrique, psychothérapie institutionnelle, centre hospitalier de Bassens ABSTRACT From the asylum to sector policy: the evolution of institutions and psychiatric care at Bassens Hospital. Written on the occasion of the 150th anniversary of the Bassens Central Specialized Hospital, this article traces the creation of the asylum based on the ideas of the Enlightenment and then its gradual decline in the late 19th and early 20th centuries. The article continues up to the renewal of its policy mirrored in the reforms of 1936, which was soon swept away by the war in France, resulting in the death of tens of thousands of patients. The second psychiatric revolution which was built on institutional psychotherapy, produced a change of mentality, bolstered by the country’s economic boom after the Liberation. This included the introduction of the ideas of psychoanalysis as well as the discovery of new drugs. During this period, Bassens Central Specialized Hospital experienced an early and exemplary development. The current situation, confronted by economic difficulties, is facing a society crisis as in the case of psychiatry. doi:10.1684/ipe.2012.0983 Key words: history of psychiatry, psychiatric hospital, psychiatric sectorization, institutional psychotherapy, Bassens hospital Les Capucins, 7, rue Jules-Ferry, 73000 Chambéry <[email protected]> ∗ Une première version de ce texte a été présentée lors d’un colloque pour le 150e anniversaire de cette institution, le 19 septembre 2008 (De l’asile de Bassens au centre hospitalier spécialisé de la Savoie). Tirés à part : H. Vermorel L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 759 Pour citer cet article : Vermorel H, Vermorel M. De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens. L’Information psychiatrique 2012 ; 88 : 759-70 doi:10.1684/ipe.2012.0983 H. Vermorel, M. Vermorel RESUMEN Del asilo a la política del sector : la evolución de las instituciones y de los cuidados psiquiátricos en Bassens. Escrito con ocasión del 150 aniversario del CHS de Bassens, este artículo reseña la creación del asilo en la estela de las ideas de la Ilustración, luego su progresiva degradación al final del siglo XIX y a principios del XX antes de que se diseñara un renacer plasmado en las reformas de 1936, que pronto iba a llevarse la guerra de la que se deriva en Francia la muerte de decenas de miles de pacientes. La secunda revolución psiquiátrica que se apoya, con la psicoterapia institucional, en un cambio de mentalidades, se ve favorecida por una bonanza económica del país tras la Libération, la introducción de las ideas del psicoanálisis y el descubrimiento de nuevos medicamentos. La política del sector ha conocido en Bassens un desarrollo precoz y ejemplar. El periodo actual, marcado por dificultades económicas, se enfrenta con la crisis de la sociedad como a la de la psiquiatría. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Palabras claves : historia de la psiquiatría, hospital psiquiátrico, sectorización psiquiátrica, psicoterapia institucional, centro hospitalario de Bassens « C’est pour les hommes chez qui réside cette sensibilité sympathisante aux maux d’autrui que j’ai composé cet écrit. » (Joseph Daquin, La Philosophie de la folie, 1791.) « Je les ai vus, grossièrement nourris, privés d’air pour respirer, d’eau pour étancher leur soif et des choses les plus nécessaires à la vie. Je les ai vus n’ayant que de la paille pour se garantir de la froide humidité du pavé sur lequel ils sont étendus. Je les ai vus livrés à de véritables geôliers, abandonnés à leur brutale surveillance [. . .] Je les ai vus dans des réduits étroits, sales, infects, sans air, sans lumière, enchaînés dans des antres où l’on craindrait de renfermer les bêtes féroces [. . .]. Voilà ce que j’ai vu presque partout en France, voilà comme sont traités les aliénés presque partout en Europe. » (Jean-Étienne Dominique Esquirol, 1818.) « La plupart de ces malades n’ont pas de famille et souvent ne sont pas sorties de l’hôpital, parfois même du pavillon, depuis des années, enfoncées dans un état de passivité tel qu’elles passent leurs journées dans la salle de séjour, leur fauteuil en face d’un poste de télévision éteint, lui tournant le dos si on le met en marche, comme dans l’attente d’un spectacle impossible à voir [. . .] l’ensemble des personnes vivant de la vie de l’hôpital, malades ou soignants considèrent les malades de ces deux pavillons comme irrécupérables, étendant cette impression d’être des sous-développés au personnel qui travaille dans ces pavillons. C’est cette impression d’abandon moral et matériel qu’on éprouve lorsque l’on visite ce service plus que l’état réel des malades. » (Madeleine Vermorel, Rapport médical, 1964.) Préambule À chaque époque, le destin de la psychiatrie dépend de la société. Par exemple, le niveau d’éducation des gardiens – qui sont devenus par la suite des infirmiers – est en relation étroite avec le niveau d’éducation de l’ensemble de la popu- 760 lation : ainsi, au xixe siècle, quand la majorité du pays est illettrée, les gardiens sont eux aussi, en majorité, illettrés. Dans les cinquante dernières années, le niveau de recrutement des infirmiers est passé du certificat d’études au brevet élémentaire puis au bac et à un niveau d’études universitaires, parallèlement à l’évolution du niveau de l’instruction dans le pays, ce qui a permis des soins plus évolués. Les possibilités thérapeutiques à l’hôpital dépendent aussi de l’économie. Ainsi, les réformes importantes réalisées en psychiatrie après la seconde guerre mondiale ont été grandement accompagnées par l’essor économique dans la période dite des Trente Glorieuses, ce qui a permis d’affecter des sommes beaucoup plus importantes à la santé, en particulier aux hôpitaux psychiatriques qui étaient alors très sous-développés. Mais, surtout, l’évolution de la psychiatrie dépend étroitement de la mentalité collective, tout particulièrement de l’image que l’homme se fait de lui-même, de ses sentiments, de son psychisme et de la représentation, en partie inconsciente, que la société se fait du fou. La peur de la folie a ainsi provoqué la ségrégation du fou et son exclusion de la société jusqu’à une période récente. En conséquence, les possibilités d’évolution en psychiatrie résultent surtout d’un changement des mentalités vis-à-vis de la folie. La pensée médicale et philosophique sur la folie Et dans ce changement, l’évolution de la pensée philosophique et médicale sur la folie joue un rôle essentiel en contribuant à modifier le regard que la société porte sur elle. Ainsi, ce sont des médecins du xviiie siècle, imprégnés de la philosophie des Lumières comme Daquin et Pinel, qui ont amené à penser autrement le traitement des « insensés » de l’époque, le plus souvent enchaînés dans des prisons ou des loges. De nos jours, ce rôle est dévolu aux personnes ayant un intérêt pour la souffrance mentale et plus particulièrement aux médecins, psychologues, infirmiers et autres soignants qui approchent de près la folie. La façon dont ils comprennent le psychisme et la folie peut L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens ouvrir des possibilités de changement dans les soins psychiatriques et dans la relation au patient. La connaissance plus approfondie de la maladie mentale diffère souvent de l’opinion commune ; aussi, les soignants ont-ils à accomplir un effort permanent pour éclairer l’opinion publique sur la maladie mentale et à mener un combat incessant pour qu’une organisation des soins adaptés soit mise en œuvre et que des moyens suffisants soient attribués aux institutions psychiatriques. La première révolution psychiatrique Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Le mouvement philanthropique Succédant à l’asile du Betton, insalubre et inadapté, l’asile de Bassens ouvre ses portes en 1858. Pour saisir la portée de cet événement, il faut remonter quelques années en arrière car la construction des asiles s’inscrit dans un mouvement de pensée qu’on appelé après coup la première révolution psychiatrique. Dès 1770, se développe en France, sous l’influence des philosophes des Lumières1 , un courant « philanthropique » basé sur la raison mais aussi, à la manière de Rousseau, sur un élan du cœur et une répugnance à voir souffrir son semblable. Déjà en 1785, l’Instruction sur la manière de gouverner les insensés et travailler à leur guérison dans les asiles des inspecteurs généraux Colombier et Doublet [1] et en 1788 le Mémoire sur les hôpitaux de Paris de Tenon [2] marquent une nouvelle façon de penser la folie et de la traiter. Joseph Daquin (1732-1815) à Chambéry2 déplore le triste état dans lequel se trouvent les malades enchaînés à l’Hospice des incurables dans des loges qui « font reculer d’horreur l’homme de l’humanité la plus courageuse ». Il préconise de traiter avec bienveillance ces patients trop souvent confondus avec des coupables [3], « il ose déchaîner les furieux, les entoure de propreté, de soins et d’air pur ». Daquin pense qu’on « réussit infiniment mieux, auprès des malades par la patience, avec beaucoup de douceur, par une prudence éclairée », et on obtient plus de succès par ces « secours moraux » que par « ce fatras de drogues dont on surcharge généralement les malades » [4]. À Paris, Philippe Pinel (1745-1826) [5] est nommé en 1793 à l’hospice de Bicêtre où il rencontre Jean-Baptiste Pussin (1745-1811), « gouverneur des insensés », ancêtre des infirmiers psychiatriques ; aidé de sa femme, Pussin avait pu se passer des chaînes, même auprès des patients les plus agités, en les traitant avec attention et humanité (Didier M.) [6]. Sur ce point, Pinel s’inspire de l’expérience 1 Ils ont été précédés par l’humanisme de la Renaissance, illustrée par un médecin comme Jean Wier, qui affirmait que la folie ne relevait pas de la démonologie mais de la médecine. 2 Il avait connu Jean-Jacques Rousseau, lors de son séjour à Chambéry, avec lequel il herborisait. de Pussin et la poursuit. En pleine Révolution française, à une époque où apparaît une idée nouvelle du sujet, avec la liberté et l’égalité de tous les citoyens, Pinel apporte avec l’esprit philanthropique une autre façon de concevoir la folie. Auparavant, on considérait les insensés, privés d’humanité, comme des animaux. Pour Pinel, ce sont des hommes, même s’ils sont temporairement privés de raison ; ils sont momentanément aliénés – étrangers à euxmêmes – mais les soins peuvent les aider à recouvrer la raison. La reconnaissance de l’aliéné comme sujet permet l’identification de tout homme sensé à l’aliéné et donne la possibilité d’un traitement moral et d’une communauté de vie dans un milieu où il n’est plus isolé dans une loge [7]. Comme Daquin, Pinel préconise la construction d’asiles spécialement destinés aux soins aux aliénés. L’ouverture de l’asile de Bassens est donc la réalisation des vœux de ces médecins, pionniers de nouvelles façons de penser la folie ; mais il a fallu plus d’un demi-siècle pour en arriver là car on ne change pas si facilement les mentalités collectives. L’institution psychiatrique et les moyens thérapeutiques à l’ouverture de Bassens en 1858 Du temps de Pierre-Joseph Duclos (1810-1851) – directeur-médecin de l’asile du Betton, qui conçut le projet de Bassens – la psychiatrie est, par rapport à celle d’aujourd’hui, bien dépourvue de moyens efficaces. Pauvreté de la pharmacopée Les médecins de l’époque ne croient plus aux médicaments comme l’ellébore, censée au Moyen Âge guérir la folie – ou l’émétique et la saignée, qui évoquent les médecins de Molière – et n’ont guère à leur disposition que l’opium, un sédatif assez largement employé à l’époque, faute de mieux. L’asile comme moyen de traitement À défaut de moyens spécifiques pour traiter la folie, on accorde à l’asile lui-même une grande importance pour isoler le patient, l’occuper et le soigner. « La fondation d’un asile d’aliénés [. . .] doit se proposer avant tout un but moral » (Duclos P.-J.) [8]. Pour Esquirol (1772-1840), successeur de Pinel et inspirateur de la loi de 1838, l’asile lui-même est un moyen de traitement : « Une maison d’aliénés est un instrument de guérison dans les mains d’un médecin habile ; c’est l’agent le plus puissant contre les maladies mentales » [9]3 . Duclos (1851) [10] préconise de construire l’asile dans une localité isolée – Bassens était alors à la campagne – dans un endroit calme et salubre, avec « une perspective 3 Cette idée sera reprise plus tard dans le mouvement de psychothérapie institutionnelle dans le but de transformer la mentalité asilaire avec d’autres moyens. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 761 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. H. Vermorel, M. Vermorel riante et variée », d’un abord facile, à proximité d’un centre important ; le site est en effet dans un cadre magnifique avec en toile de fond la montagne du Nivolet. L’un des grands problèmes des asiles de l’époque, c’est l’approvisionnement en eau, en un temps où la distribution d’eau courante n’existe pas et où les besoins de la population étaient restreints. Néanmoins, pour l’alimentation et l’hygiène de plusieurs centaines de personnes, il en faut une quantité importante. Aussi, son approvisionnement sera une préoccupation constante à Bassens, d’autant plus qu’on fait un large usage des bains et des douches, un des moyens privilégiés de la psychiatrie d’alors4 . Duclos propose de construire des locaux adaptés pour 350 aliénés, car un plus grand nombre de patients « ralentirait les soins ». C’est malheureusement ce qui va se passer dans les années suivantes. L’asile de Bassens sera ordonné autour d’une cour centrale entourée d’arcades qui n’est pas sans rappeler le cloître d’un monastère et suggère un retrait du monde ; car pour Duclos, l’asile est là pour isoler le patient de la société, l’enlever à l’influence des causes qui l’ont mis dans cet état et à ses habitudes de désordre pour le soumettre à une discipline d’ordre et d’autorité. À cette coupure avec le monde, répond en dedans, outre la séparation des hommes et des femmes5 , le placement dans des pavillons distincts des « curables », des « incurables » et des « idiots » (Ibid.), réalisant une sorte de ségrégation interne : c’est un point faible de ce système qui ira en s’aggravant. Il faut à l’asile des terres cultivées car le travail est préconisé comme moyen d’occupation et de traitement ; d’où l’acquisition du domaine de Bressieux et la construction d’une ferme ; mais c’est aussi une nécessité économique, vu la modestie des moyens alloués à l’asile qui vit dans une sorte d’autarcie économique : l’hôpital cultive ses légumes, moud son grain, presse le vin de ses vignes – il paraît que c’était un bon cru ! – et possède des bovins et des chevaux jusqu’aux années 1960. Parmi les autres thérapeutiques, on préconise les activités artistiques comme le théâtre ou la musique ; Bassens, au xixe siècle, a une fanfare avec les malades et le personnel. Le traitement moral L’asile comme moyen de traitement se complète du « traitement moral » (ce qui signifie psychique à l’époque) sorte d’ébauche des psychothérapies futures. On accorde à la personne, fût-elle « aliénée », une attention particulière. On cherche à établir avec le patient une relation avec les moyens de l’époque, le langage de la bienveillance et de 4 Les Arabes, qui avaient organisé au Moyen Âge les premiers établissements psychiatriques, faisaient un large usage de bains. Aujourd’hui, on les emploie dans les stations thermales spécialisées comme Divonne. 5 Séparation en accord avec la culture de l’époque, dans des bâtiments placés de façon symétrique à cet axe central, marqué par la chapelle, dans une Savoie profondément catholique. 762 la raison. Il faut, écrit Esquirol, y mettre de l’intelligence et du cœur ; on cherche à réprimer la fougue du maniaque, rassurer ceux qui sont effrayés, encourager les déprimés. La maladie provenant d’un dérèglement des passions, on peut provoquer une « secousse morale » pour contrecarrer les passions déchaînées. Le traitement moral vise à imposer au malade l’autorité rationnelle, « au besoin par le moyen de la terreur », ce qui paraît plus discutable [11]. Le traitement devient alors un affrontement entre deux volontés ; partant de bonnes intentions, il va dégénérer dans les années suivantes en devenant moralisateur et en engendrant une véritable oppression du malade. La loi de 1838 Peu après l’ouverture de Bassens, la Savoie devient française en 1860 et la loi de 1838 y est appliquée. C’est une loi de progrès : loi d’assistance, prévoyant le financement de l’hospitalisation, y compris pour les indigents, nombreux à l’époque ; loi de protection de la personne du malade et des biens ; c’est aussi une loi de sécurité envisageant la privation de liberté pour les malades pouvant troubler l’ordre public ou être dangereux pour eux-mêmes (elle est soigneusement réglementée pour éviter les abus car les législateurs avaient à l’esprit l’arbitraire des lettres de cachet de l’Ancien Régime). Mais elle ne mentionne pas les soins qui étaient l’objectif essentiel des médecins qui avaient proposé la création des asiles, c’est de mauvais augure pour l’avenir. L’asile de Bassens à la fin du xIxe siècle et au début du xxe siècle. Décadence et tentatives de renouveau Aggravation des conditions d’hospitalisation Bassens avait été ouvert sous les auspices d’idées généreuses qui vont se heurter à des dures réalités. Tout d’abord, l’augmentation rapide du nombre de malades : 280 en 1861, 596 en 1882 pour atteindre et dépasser par la suite 1 000 lits, alors que la capacité de départ était de 400. Cela crée une situation qui devient rapidement désastreuse, d’autant plus que le nombre des soignants est tout à fait insuffisant, voire dérisoire. Un seul directeur-médecin assume à la fois les charges administratives et médicales, pour ces dernières assisté d’un élève-interne puis de deux. En 1906, on nomme un directeur et il y aura ensuite un médecinchef pour les hommes et un médecin-chef pour les femmes, chacun d’entre eux ayant la responsabilité de plusieurs centaines de malades, situation qui ne s’améliorera que dans les années 1960, avec la nomination d’un plus grand nombre de médecins. Ce sous-développement s’exprimait aussi dans le nombre très réduit des gardiens. Le plus souvent illettrés, ils ne reçoivent aucune formation et sont mal payés ; ils L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens sont en quelque sorte internés avec les malades dans les pavillons, devant loger avec eux 24 heures sur 24 et rester célibataires ; certains brutalisent les malades et ont des habitudes alcooliques, le Dr Coulenjon souhaitant, en 1912, que ces habitudes disparaissent « au moins chez ceux qui suivent les cours » [12]. Le turnover est élevé, une partie notable du personnel travaillant à titre temporaire ; certains descendent de la montagne pour travailler l’hiver à Bassens, retournant garder leurs troupeaux au printemps. Il y eut certainement à toutes les époques des surveillants de qualité et des médecins compétents, mais les conditions sont telles que la situation de l’asile se détériore ; d’autant plus que le prix de journée est très insuffisant (il ne dépasse guère un franc par jour6 au xixe siècle). Enfin, l’époque n’est guère favorable. Si on avait mis au début l’accent sur l’individu et le traitement moral, la fin du siècle est l’avènement de l’ère des masses et la société, comme les élites, ne manifestent pas, sauf exception, un grand intérêt pour la condition des malades mentaux, laissés à leur triste sort d’exclusion. Le renfermement asilaire Tous ces facteurs conditionnent une période sombre de la psychiatrie, particulièrement à la fin du siècle. La visite médicale quotidienne tourne au simulacre : le surveillantchef rassemble les malades ayant besoin de soins ; alignés debout, en rang, ils attendent la visite du médecin-chef qui les passe rapidement en revue en dictant le traitement au surveillant : aspirine, chloral, aspirine, chloral, etc. Ce dernier est un sédatif employé largement, faute de mieux ; il fait partie des médicaments nouvellement découverts, avec le gardénal, efficace chez les épileptiques ; mais ils sont sans effet sur les psychoses. Le traitement moral proposé par les pionniers n’est plus qu’un souvenir mais il faut dire que la psychiatrie de l’époque manque de bases solides pour promouvoir une psychothérapie plus évoluée ; les théoriciens de l’asile avaient voulu en faire un instrument de guérison mais cela reste une utopie ; l’autorité des soignants était censée contenir la folie par la raison mais, dépourvu de moyens, l’asile sombre progressivement dans l’autoritarisme, voire la violence. Aux chaînes ont succédé les camisoles de force ; les patients perdent toute individualité : on appelle les femmes mariées par leur nom de jeune fille, les patients sont habillés dans des uniformes souvent médiocres et, au repas, ils ne disposent que d’une cuillère, les fourchettes et les couteaux étant prohibés pour des raisons supposées de sécurité, etc., toutes ces pratiques se perpétuant jusqu’aux années 1960. Le « gâtisme », aggravé par le manque d’attention aux personnes âgées ou démentes, se développe et amène 6 C’est le prix de journée pour les « indigents ». la création de pavillons spécialisés où ces patients restent couchés en permanence, macérant souvent dans leurs excréments. Le climat d’autoritarisme, voire de répression, ne peut contenir l’agressivité et l’agitation de certains malades ; on crée des pavillons d’agités où ces patients sont placés en cellule comme dans une prison, souvent sur la paille, leur rassemblement en un même lieu ne pouvant qu’aggraver la situation. L’isolement avec l’extérieur s’est aggravé, comme la ségrégation interne, avec une sorte de hiérarchie de la folie, depuis les patients calmes et travailleurs (les « bons malades ») jusqu’aux « incurables » et aux « agités ». Conservatisme et immobilisme7 La psychiatrie française s’honore d’avoir eu dans ses rangs des médecins de qualité qui ont fait de fines descriptions cliniques des affections mentales auxquelles on peut encore se référer (Falret, Chaslin, Sérieux et bien d’autres). Mais, dans la pratique asilaire, les observations médicales sont succinctes et les certificats administratifs se limitent à des descriptions stéréotypées, le diagnostic de maladie mentale devenant synonyme d’incurabilité. L’asile, comme on l’a dit plus tard, sécrète une sorte de maladie asilaire qui aggrave et chronicise la maladie initiale. De l’isolement préconisé au début pour créer un meilleur climat de soins, on est passé à un véritable enfermement. Faute de contact avec les familles, nombre de patients restent à l’hôpital des dizaines d’années sans sorties ni visites. Dans leur excellent livre sur l’histoire des hôpitaux en Savoie, Francis Stéfanini et Georges Dubois ont bien décrit la situation dégradée à Bassens à cette époque : « L’asile de Bassens était resté prisonnier de ses murs, enfermant non seulement les aliénés mais aussi les médecins et le directeur, plus préoccupés de “faire tourner” l’institution que de remettre en cause ses principes fondateurs et les pratiques en résultant, à savoir l’enfermement, la séparation des malades de leur famille et de leur milieu professionnel et le “collectivisme thérapeutique” ». Ces auteurs évoquent les rapports administratifs surtout centrés sur l’équilibre financier et les problèmes matériels et relèvent l’immobilisme dans les rapports médicaux qui se préoccupent de statistiques, de classification nosologique ou de recherche biologique et ignorent les critiques du système asilaire [14]. Nous ajoutons que l’asile français est plus centralisé et autoritaire que ceux d’Allemagne ou de GrandeBretagne. L’asile allemand est un asile-village avec de petits pavillons, sans aucune clôture. En Grande-Bretagne, John Conolly (1856) [15] préconise l’open-door et arrive à se passer de la contrainte grâce à l’éducation et au nombre 7 C’est ainsi que l’historien de la psychiatrie Zilboorg a caractérisé la psychiatrie française au xixe siècle [13]. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 763 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. H. Vermorel, M. Vermorel des soignants. Les Anglais comme les Allemands prônent le no-restraint – l’absence de moyens de contrainte – mais en France, les appels en ce sens de Morel et de Magnan, les cris de révolte de Marandon de Montyel clament dans le désert. Le rapport de Sérieux, inspecteur général des asiles, sonne en 1903 un cri d’alarme : « Nous sommes trop respectueux de la vérité pour dissimuler une situation quelque peu humiliante [. . .] Depuis une quarantaine d’années, il semble qu’une ère nouvelle ait été inaugurée : ère de satisfaction, d’ignorance des réformes réalisées au-delà de nos frontières, ère de décadence ou pour le moins de progrès insuffisants », en relation avec « l’esprit de routine ». « Il n’est que temps de procéder à une réforme radicale de la constitution matérielle de nos asiles et à une réorganisation sérieuse du service médical » [16]. Les tentatives de renouveau de 1900 aux années 1930 La situation de l’asile, particulièrement celle du personnel infirmier, reste longtemps précaire ; Daumézon [17] note en 1935 qu’il y a encore des infirmiers illettrés et que peu possèdent le certificat d’études primaires. Cinquante pour cent du personnel infirmier loge encore sur place, avec interdiction du mariage. À Bassens, on relève autour des années 1930 des progrès matériels avec l’installation de W.-C. (qui remplacent les « tinettes »), du chauffage central avec des « chaufferies », des lavabos dans les pavillons remplaçant les bornes-fontaines dans la cour, la construction de salles de jour et de réfectoires pour agrandir les pavillons ; on détruit des quartiers cellulaires vétustes mais c’est pour construire deux pavillons de 40 cellules. La société évolue mais l’asile reste le plus souvent exclu : le diplôme d’État d’infirmière est créé en 1922 mais bien peu d’entre elles travaillent à l’hôpital psychiatrique. La Chambre des députés vote, en 1927, l’extension de la loi sur les accidents du travail aux hôpitaux y compris psychiatriques, mais elle est repoussée par le Sénat. En 1935, sur proposition du directeur, la commission administrative s’oppose à l’application de la journée de huit heures et instaure la journée de 12 heures [18]. Cependant, un certain nombre de médecins font entendre leur voix pour des réformes et commencent même à en promouvoir quelques-unes. Bassens avait organisé une école d’infirmiers psychiatriques en 1903, date à retenir [19]. D’autres initiatives voient le jour : dans les années 1920, la Ligue d’hygiène mentale est fondée ; on parle d’ouvrir l’asile ; Édouard Toulouse [20] à Paris propose et met en œuvre à Sainte-Anne toute une série de réformes qui ne seront appliquées ailleurs que beaucoup plus tard : création en 1920 d’un service de prophylaxie mentale pour dépister les maladies mentales, les prévenir et les soigner, ouverture d’un service libre, le premier du genre, et de dis- 764 pensaires pour le dépistage et la post-cure ; en 1928, le Dr Cornu demande la création d’un service libre à Bassens [21]. Nouvelles voies thérapeutiques Il faut attendre les années 1930 pour qu’apparaissent des thérapeutiques nouvelles : le choc cardiazolique (von Meduna, 1932), la cure de Sakel (1936), l’électrochoc (Bini, 1938), qui n’entreront à Bassens qu’après la guerre. Ce sont des méthodes biologiques plutôt barbares, l’électrochoc causant par le courant électrique des crises convulsives et la cure de Sakel provoquant, avec des injections d’insuline, des comas insuliniques répétés. Mais elles ont un certain effet : les électrochocs améliorent la mélancolie et certains schizophrènes sortent de leur maladie lors de la cure insulinique. Cette dernière suppose un personnel médical et infirmier formé car il n’est pas sans danger, les soignants se mobilisant autour du patient qui reçoit une plus grande attention, d’où un effet sur le climat de l’institution8 . La seconde révolution psychiatrique (1936-1975) À la veille de la seconde guerre mondiale La situation reste précaire à Bassens ; en 1937, on compte environ 150 soignants dont deux médecins et deux internes pour près de 1 100 patients [22]. Mais les efforts de renouveau qui se montraient çà et là vont trouver une expression législative, commençant à affecter profondément la structure asilaire. En 1936 et 1937, les ministres du Front Populaire Henri Sellier et Marc Rucart promulguent une série de lois et de circulaires : l’asile change de nom et devient « hôpital psychiatrique », le personnel infirmier est doté d’un statut avec une échelle de salaires, des congés annuels, une garantie des risques professionnels ; la loi de 40 heures, votée en 1936, s’applique aux hôpitaux psychiatriques et fait de l’infirmier un travailleur comme les autres, loin de toute ségrégation asilaire. On propose de créer dans les centres importants des dispensaires d’hygiène mentale et des postes d’assistantes sociales (ces dernières n’apparaîtront à Bassens qu’après 1950). Une circulaire veut développer et moderniser les services fermés et propose de réduire l’hospitalisation par la prévention, le traitement ambulatoire et la post-cure ; on instaure des services libres, sans internement. On commence à s’intéresser à la psychiatrie des enfants, jusqu’alors quasi inexistante. C’est à cette époque que se situent, pour Bassens, les projets d’installer des services psychiatriques ouverts 8 Selon André Rèquet, la cure de Sakel agirait par dissolutionreconstruction en ébranlant la maladie à condition que les soignants soient là pour aider à cette reconstruction par un environnement favorable. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. au château de la Croix, une clinique au château de Bressieux, malheureusement non réalisés. Le Dr Stoerr, en 1936, se préoccupe d’hydrothérapie, de soins aux tuberculeux et obtient la création d’une consultation chirurgicale [23]. Ces changements ne vont pas sans résistances : dès 1937, un décret remet en cause l’application de la loi de 40 heures aux hôpitaux psychiatriques pour la porter à 45 heures. Malgré les retours en arrière, ce furent des progrès incontestables annonçant la psychiatrie future ; mais ils seront anéantis par la seconde guerre mondiale, une période qui, avec le nazisme, pousse à l’extrême l’inhumanité et l’horreur de la guerre. La guerre Des dizaines de milliers de malades meurent de faim dans les hôpitaux psychiatriques français pendant la seconde guerre mondiale. Quand l’ensemble de la population souffre de la faim par suite des privations du fait de l’Occupation, la situation est pire pour les malades hospitalisés sans visites ni autre moyen de compléter les rations officielles ; comme elles sont insuffisantes, cela conduit à la famine et à la mort de beaucoup d’entre eux. Les travaux de Patricia Legg [24] et d’Isabelle von Bueltzingslœuven ont montré l’excès des propos de quelques auteurs prétendant que cette hécatombe résultait d’une « extermination douce » planifiée9 [25]. Déjà, lors de la guerre de 1914-1918, il y eut une surmortalité à Bassens du fait des perturbations de l’approvisionnement à cause des hostilités, mais dans une moindre proportion [26]. La situation est beaucoup plus dramatique en 1939-1945 [27]. Ces morts par milliers, ces patients décharnés par la malnutrition sont rapprochés des déportés cadavériques rentrant, en 1945, des camps de déportation nazis. L’inhumanité de l’asile, portée à son comble dans les circonstances de la guerre, suscite l’indignation, en particulier des jeunes psychiatres qui étaient entrés à l’hôpital peu avant la guerre. Ils seront les promoteurs du changement qui s’opère après la Libération : mettre fin à l’asile inhumain par une psychiatrie humaine, ouverte sur la cité. hospitaliers, un moment privilégié qui trace des voies pour le changement ; il sera accompli dans les années qui suivent avec la collaboration active de psychiatres10 et de cadres administratifs tant à Paris que dans les départements ; au ministère de la Santé, le Dr Aujaleu, directeur de l’Hygiène sociale, Mlle Mamelet au Bureau des maladies mentales et le Pr Jean ont eu un rôle décisif pour la réalisation de ces réformes. En Savoie, le développement extrahospitalier doit beaucoup aux responsables de l’action sanitaire et sociale, M. Dupont et le Dr Simone Boyer. Cette politique se propose d’améliorer les conditions hospitalières, de moderniser les locaux, inadaptés, souvent vétustes, voire délabrés, de réduire l’internement au minimum en privilégiant le placement libre, d’ouvrir la psychiatrie sur l’extérieur et de réintégrer le malade dans la communauté en assurant la « continuité des soins », avec une même équipe psychiatrique prenant en charge un secteur de population – à l’époque 75 000 habitants, hommes et femmes – et assurant aussi bien les soins hospitaliers que la post-cure. Ce programme se réalise progressivement, mais avec vigueur, en Savoie. Cela débute par la création de dispensaires dans les principales villes de Savoie et de Haute-Savoie, parallèlement à la modernisation des anciens locaux et à la construction de nouveaux pavillons de service libre. Mais c’est surtout un travail de changement des mentalités asilaires, qui suppose une mutation de la formation du personnel soignant et l’augmentation de ses effectifs, ainsi que sa diversification avec l’apparition des assistantes sociales et des psychologues (à Bassens, ces derniers seulement à la fin des années 1960). Le Dr Leconte, arrivé à Bassens en 1947, dresse un état sévère de la situation hospitalière et dénonce l’insuffisance des soins, le laisser-aller, l’alcoolisme et la brutalité de certains infirmiers ; il estime que le travail des malades n’a rien de thérapeutique, car il est devenu l’un des rouages du fonctionnement de l’hôpital : les « travailleurs » font le ménage, la couture, le jardinage, la boulangerie et sont même croquemorts11 ! Il fait donner aux infirmiers des blouses à la place des uniformes, limite le recours aux moyens de contention, crée une ergothérapie plus adaptée et une sociothérapie avec des activités culturelles et sportives ; mais sa manière autoritaire et conflictuelle n’a pas laissé que de bons souvenirs [30]. Les débuts du renouveau et la politique de secteur Ce sera la « politique de secteur », une innovation française reprise ensuite dans plusieurs pays, dont l’Italie [28] et le Québec [29]. Peu après la fin de la guerre, les États Généraux de la psychiatrie avaient rassemblé dans un même élan le ministère de la Santé publique, les sociétés savantes et les psychiatres 9 En revanche, dans les départements d’Alsace-Lorraine, soumis aux lois du IIIe Reich, le programme nazi d’extermination des malades mentaux reçut un commencement d’exécution. 10 Parmi eux, Henri Ey, figure principale de la psychiatrie de cette époque, président de la Commission de maladies mentales au ministère de la Santé publique et président du syndicat des médecins des hôpitaux psychiatriques ; à Paris, Georges Daumézon, Lucien Bonnafé, Paul Bernard, le Pr Paul Sivadon, Hubert Mignot, Louis Le Guillant, sans oublier l’expérience exemplaire du XIIIe arrondissement de Paris avec Philippe Paumelle, Serge Lebovici et René Diatkine (Béquart P., 1965) ; François Tosquelles à Saint-Alban ; Paul Balvet, André Rèquet, Maurice Beaujard à Lyon et tant d’autres qui animent la « désasilification » et la création de structures nouvelles. 11 La ségrégation du malade mental s’étend à la mort, l’hôpital ayant son cimetière propre avec des tombes anonymes. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 765 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. H. Vermorel, M. Vermorel Arrivé à Bassens en 1953, le Dr Pierre Lambert a été l’un des principaux promoteurs du progrès à Bassens. Ayant trouvé dans le service qui lui était attribué des conditions matérielles et humaines très dégradées, il rédige un rapport au ministère de la Santé, à la suite duquel est créé en 1956 un secteur de psychiatrie qui, « pour la première fois en France », attribue à une équipe hospitalière la responsabilité des soins à une population, aussi bien les hommes que les femmes, qui étaient auparavant dans des services séparés [31]. C’était avant la circulaire du 15 mars 1960 qui organise la politique de secteur sur la base de ces premières expériences. Il étudie aussi la relation médecin-malade au cours des chimiothérapies [32]. Le Dr Pierre Bailly-Salin, arrivé peu après, apporte toute son énergie à la rénovation de l’hôpital, faisant tomber les murs du pavillon Pinel et ouvrant de nombreux dispensaires en Savoie et Haute-Savoie. Rénovation et ouverture de l’hôpital L’hôpital s’ouvre. Un travail est fait auprès des familles pour renouer des liens parfois rompus depuis des années. Il n’est pas facile de faire sortir un malade hospitalisé depuis 20 ou 30 ans et qui n’a plus de relations avec les siens. Parfois, le conjoint a refait sa vie et les enfants, qui n’ont pas vu leur parent depuis des lustres, ne le reconnaissent pas. La sortie se heurte parfois à la peur de la famille, voire du village, surtout quand le patient était en placement d’office et avait eu un comportement violent. Il faut alors se rendre sur place, travailler avec la famille, avec le maire, pour un travail psychologique de réinsertion dans la cité : à cette occasion, certaines familles et des élus locaux deviennent des alliés d’une psychiatrie nouvelle. Il faudrait parler ici du travail de l’équipe psychiatrique avec les assistantes sociales de secteur et aussi des liens qui se tissent, à une époque où il y a peu de psychiatres, avec les médecins de médecine générale pour collaborer à la post-cure. Les activités ergo- et sociothérapiques12 se développent et on crée une association, Solidarité savoyarde, qui rassemble des personnalités extérieures (comme le Dr François Boyer, actif président), des membres du personnel, des familles de malades ainsi que des malades et d’anciens malades pour participer à la gestion de ces activités et à leur développement. Changement des mentalités Tout cela suppose un changement profond des mentalités figées par des années de routine. La hiérarchie asilaire était autoritaire, les malades vivaient dans leur coin et il n’y avait souvent que des contacts formels entre le chef de service 12 Il n’est pas possible, dans le cadre de ce court exposé, de rendre compte de l’ampleur et de la diversité des activités ergothérapiques d’alors. Dans le domaine culturel, entre autres, un atelier de dessin et de peinture fonctionnait à partir des années 1960 avec un professeur extérieur (Mme Ketteler). 766 et les infirmiers. La hiérarchie est assouplie ; on cherche à créer des véritables équipes de travail. Il faut du temps car on ne passe pas d’un jour à l’autre de l’asile d’antan à une psychiatrie moderne et cela ne va pas sans quelques résistances. Le rôle des infirmiers psychiatriques et l’évolution de l’enseignement Je voudrais souligner que les réformes à Bassens pendant les 30 années qui ont suivi la seconde guerre mondiale ont été réalisées avec le concours actif du personnel infirmier, dans l’hôpital et aussi à l’extérieur avec l’apparition des infirmiers-visiteurs en 1964. Leur statut a évolué, l’enseignement des infirmiers a été officialisé et réorganisé. Dans les années 1950, les élèves-infirmiers, dans les pavillons, étaient souvent affectés à des tâches subalternes et non à une formation auprès du malade. Madeleine Vermorel, qui dirigeait l’école d’infirmiers de Bassens, s’était entendue avec l’école d’infirmières de la Croix-Rouge à Chambéry pour organiser à Bassens un enseignement des soins médicaux digne de ce nom13 , auquel s’ajoute un enseignement de la pathologie et des soins psychiatriques. Jusque dans les années 1960, l’école de Bassens ne disposait pas de locaux ; lors des cours, les élèves, assis dans les premiers rangs de la vaste salle des fêtes de l’hôpital, peu chauffée, écrivaient sur leurs genoux, faute de tables. Un réfectoire de malades, inoccupé en dehors des repas, fût affecté comme salle de cours en attendant des jours meilleurs. À l’époque, les cours aux infirmiers étaient donnés par les seuls médecins, alors que le métier d’infirmier a une dimension spécifique. Le but était donc d’amener les infirmiers à diriger leur enseignement comme dans les écoles d’infirmières, une étape importante ayant été la création à Bassens, en 1968, de moniteurs de l’école d’infirmiers psychiatriques, une des premières initiatives en France. La réunion d’équipe L’un des instruments du changement a été la « réunion d’équipe », organisée dans chaque pavillon avec le concours des différents membres du personnel soignant : infirmiers, surveillants, psychologue, assistante sociale, interne et médecin [33]. On y discute du cas des malades entrants, des traitements à instituer, chacun fait part de ses observations et de ses contacts avec le patient ; on évoque le suivi des soins. On y parle sur le vif de la psychopathologie de telle ou telle affection à propos d’un malade sous un angle psychodynamique, sorte de formation quotidienne « sur le tas » qui complète celle donnée à l’école. Dans ces réunions, on parle aussi des événements de la vie quotidienne et de leur 13 En échange, à l’école d’infirmières de Chambéry, les psychiatres participaient à l’enseignement de la psychopathologie. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens retentissement sur le personnel, ce qui permet d’éponger parfois des angoisses suscitées par le rapprochement avec les patients psychotiques. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. La psychothérapie institutionnelle Les psychothérapies individuelles avec les malades psychotiques, inspirées par la psychanalyse, débutent aussi à cette époque Mais, pour changer les mentalités de l’institution, un travail de groupe est nécessaire avec les soignants mais aussi avec les malades, chez qui le renfermement a créé passivité et résignation. Pour notre part [34, 35], nous nous étions inspirés du courant de psychothérapie institutionnelle de Tosquelles ainsi que de la communauté thérapeutique de Maxwell Jones ; nous avons aussi activement collaboré avec un psychanalyste franco-américain, Michael Woodbury, qui exerçait alors en Suisse14 , tous ces courants représentant une extension des idées de la psychanalyse à l’institution [36-44]. L’organisation de réunions avec les patients pour créer des nouveaux liens avec les soignants fût l’un des instruments de transformation du climat asilaire. La relation pouvait s’étayer sur des objets intermédiaires, comme les activités ergothérapiques mais aussi culturelles. Un exemple dans un pavillon de patients dits chroniques qui se trouvait là parfois depuis des années où on voulait combattre la routine née de l’enfermement : une fois par mois, le personnel soignant se réunissait avec les malades, ce qui amena la création d’un journal – Le Canard déchaîné – chacun pouvant écrire ce qu’il voulait : un poème, une réclamation, une lettre à sa famille, la relation d’un événement. . . L’auteur venait lire au cours de la réunion son article qui était discuté ; le journal, édité dans le service était distribué aux patients et aux familles, ce qui donnait de la valeur à la production de chacun. J’ai été frappé par la qualité de certains écrits de grands malades psychotiques, « asilifiés » depuis des années et souvent sans grande instruction qui, tout à coup, produisaient un texte poétique de toute beauté. Derrière le masque de la folie, il subsiste toujours une étincelle de créativité, à développer et cela créait un mouvement dans une structure figée. Une autre modalité groupale était la réunion communautaire, marquée par un esprit de psychothérapie de groupe. Elle associait les patients aux soignants, en général une fois par semaine. On y parlait de la vie quotidienne, de la nourriture, des soins, des médicaments, des incidents, de l’état de tel ou tel patient, etc. Les soignants gardent leur rôle ; ce sont eux qui décident et distribuent les médicaments, mais les malades qui les reçoivent peuvent donner 14 Racamier l’avait appelé aux Rives-de-Prangins pour développer la psychothérapie institutionnelle et nous devons beaucoup au séminaire qu’il avait organisé dans les années 1960 avec Woodbury, comme à l’ensemble de ses travaux sur les psychoses. leur point de vue, celui du consommateur en quelque sorte. On s’est aperçu alors que nombre de prescriptions de neuroleptiques n’étaient pas entièrement respectées, beaucoup de médicaments se retrouvant dans les déchets de nourriture destinés aux cochons de la ferme ; les neuroleptiques favorisaient l’engraissement des animaux, mais ils étaient devenus somnolents du fait de l’excès de ces rejets de médicaments ! En parlant avec les patients, on a pu mieux définir les doses utiles de médicaments, les réduire parfois et les rendre mieux acceptées. Mais ce travail ne se limitait pas aux seuls médicaments, les patients étant associés aux décisions concernant la vie pavillonnaire. D’une façon plus large, le travail communautaire vise à susciter la participation des patients à leur traitement, et aussi celle de leurs familles ; c’est là une dimension essentielle de cette orientation thérapeutique. Ces modalités institutionnelles [45] suscitent la créativité aussi bien des soignants que des patients et annoncent les psychothérapies de groupe et les thérapies familiales du futur qui débutent à cette époque. Ce genre de travail, que nous avons seulement survolé, réalise une formation psychothérapique sur le tas pour les soignants. Les facteurs du changement La Sécurité sociale Si cette évolution a pu se réaliser, grâce au dynamisme des équipes soignantes, ce fût grâce à des conditions favorables. La période qui a suivi la guerre a été une période ascendante, avec un élan dans beaucoup de domaines, avec des réformes dans la société telles que l’instauration de la Sécurité sociale qui a permis un progrès considérable des soins médicaux et, tout particulièrement, des hôpitaux, notamment psychiatriques. Sans le financement par la Sécurité sociale du prix de journée à l’hôpital, tous ces progrès auraient été impossibles. L’influence de la psychanalyse Ce changement de mentalité a été influencé par les idées de la psychanalyse, sous-jacente à ces psychothérapies institutionnelles, bien que très peu de soignants eussent à l’époque une formation psychanalytique ; ce fût au départ plutôt une influence indirecte. La notion de transfert – un lien psychique et émotionnel à racine inconsciente entre le thérapeute et le patient ayant une action thérapeutique – a suscité un autre type de relation avec le malade à l’hôpital. Si, du temps de Pinel, la relation médecin-malade était une relation d’autorité, cela devient, avec la psychanalyse, une relation entre deux personnes égales. Les concepts d’inconscient et de conflit psychique influencent une psychiatrie dynamique et relationnelle, supposant chez les soignants un regard sur eux-mêmes dans la relation à l’autre et suscitant une formation individuelle ou groupale. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 767 H. Vermorel, M. Vermorel Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Les neuroleptiques La découverte des neuroleptiques et des antidépresseurs, médicaments ayant enfin une réelle efficacité, a été un véritable événement en psychiatrie. On a vu des schizophrènes hospitalisés depuis des dizaines d’années reprendre vie et même pouvoir sortir de l’hôpital. Ces médicaments ont permis d’approcher des patients jusqu’ici inaccessibles et les antidépresseurs ont permis de se passer des électrochocs dans la mélancolie [46]. On a souvent attribué aux neuroleptiques la cause essentielle du changement en psychiatrie. Mais ils ne sont pas seuls en cause. Le changement institutionnel avait commencé avant l’introduction des neuroleptiques et la diminution du nombre des malades hospitalisés n’a vraiment débuté que lorsque la politique de secteur a été suffisamment établie [47]. C’est donc un ensemble de facteurs qui ont permis de passer de l’asile à la politique de secteur : nouvelle organisation des soins et introduction d’une dimension psychothérapique dans l’institution permettant un changement des mentalités, période économique favorable et découverte de médicaments efficaces. Épilogue Cette période a donc connu de grands changements, passant du renfermement à une psychiatrie moderne, ouverte sur la communauté, malgré les imperfections et l’inachèvement. La psychiatrie en Savoie a connu un développement particulièrement exemplaire avec la mutation de l’asile : augmentation notable du nombre15 et de la qualification des soignants, ce qui ouvre à de nouvelles possibilités thérapeutiques, jadis inconnues ; diminution importante du nombre des patients hospitalisés16 avant même l’ouverture d’institutions diversifiées dans le département de Haute-Savoie ; et aussi extension notable de la politique extrahospitalière qui a fait reculer l’exclusion du fou. La politique de secteur s’est alors mieux implantée et s’est diversifiée (hôpital de jour, hôpital de nuit, appartements thérapeutiques, développement de la psychiatrie infantile, etc.)17 . Cette évolution ne va pas sans difficultés ni résistances devant le changement [48]. En conclusion, nous aimerions reprendre quelques lignes d’un article que nous avions écrit en 1966 : « C’est à l’humanisme et à ses oscillations dans l’histoire que sont liés le chemin et les combats de la psychiatrie, ses périodes de faste et ses périodes de stagnation ou de recul. Mais 15 À noter que c’est le travail de changement de l’institution qui a amené une augmentation du nombre des soignants, celle-ci donnant à son tour de nouvelles possibilités. 16 Plus importante que dans le reste de la France (rapport administratif et médical pour l’année 1968, archives du centre hospitalier de Bassens). 17 Il faudrait encore parler de l’amélioration des soins médicaux à l’hôpital, avec la venue de médecins spécialistes, l’entrée de kinésithérapeutes, etc. 768 en ce domaine, celui de la conquête de l’homme par luimême, rien n’est jamais gagné. L’humanisme est un combat toujours ouvert : ainsi en va-t-il de la psychiatrie et de la reconnaissance réelle des malades mentaux comme des hommes » [49]. Aujourd’hui L’évolution des institutions psychiatriques au cours des 30 ou 40 dernières années est marquée, comme a tenté de le caractériser avec humour Jacques Hochmann, par un « déclin de l’empire psychiatrique » [50]. À une période socioéconomique de croissance et d’optimisme de l’aprèsguerre ont succédé des temps de crise, de chômage et de perte de l’espoir pour diverses catégories de population. Dans le même temps, les modes de gouvernance des structures hospitalières ont évolué dans un sens de rationalisation, sans doute nécessité par la hausse considérable des dépenses de santé, mais s’accompagnant d’une emprise administrative croissante avec un réduction notable du rôle des soignants dans les prises de décision. On peut même se demander si les réformes engagées il y a 40 ou 50 ans auraient été possibles avec le système actuel. On s’en tient essentiellement – cela fait partie de tout un mode de pensée qui s’est introduit à bas bruit dans les rouages de la société – à une notion comptable, comme si les données humaines pouvaient se réduire à des chiffres. De la psychiatrie, on glisse à la santé mentale où la souffrance humaine tend à être oblitérée et les hôpitaux deviennent des « usines à soins » où le patient, avec sa condition de souffrance humaine, est dénié. Le sujet, avec son autonomie, risque d’être réduit au rôle d’individu interchangeable et manipulable. En psychiatrie, cette idéologie se traduit par les différentes versions du DSM, venues d’Outre-Atlantique, où la psychopathologie classique qui se préoccupait de la « maladie », donc de la souffrance, disparaît au profit de données floues tandis que tendent à être préconisées des schémas thérapeutiques de « consensus » tendant à une uniformité thérapeutique où la liberté du patient et du thérapeute est abolie. Le management dans les entreprises privées ou publiques a tendance à user de méthodes autoritaires, voire violentes, dont on a vu les conséquences fâcheuses sur la santé des employés, avec des épidémies de suicides dans certaines entreprises ; et les structures psychiatriques ne sont pas à l’abri de pareilles dérives. On voit, çà et là, le climat se détériorer tandis qu’on revient à des pratiques d’antan comme l’isolement et la contention, en même temps que le personnel passe plus de temps à rendre des comptes sur son ordinateur que de communiquer avec les patients. La suppression de la formation spécialisée des infirmiers psychiatriques a été une énorme erreur dont on voit aujourd’hui les effets négatifs sur le climat thérapeutique. L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 88, N◦ 9 - NOVEMBRE 2012 De l’asile à la politique de secteur : l’évolution des institutions et des soins psychiatriques à Bassens Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Certes, tout n’était pas rose jadis et tout n’est pas noir dans la situation actuelle où un certain nombre d’unités de soins peuvent profiter des acquis, les développer et continuer un chemin thérapeutique. Mais la situation de la psychiatrie appelle, devant l’état actuel de la société, de l’évolution des pathologies – ne serait-ce que l’importance prise par les problèmes de dépendance des personnes âgées – une réflexion nouvelle et un élan renouvelé pour sortir des difficultés actuelles. La réforme de l’enseignement des infirmiers psychiatriques, une place plus grande aux soignants dans les décisions des problèmes de santé avec une réforme du management hospitalier sont parmi les thèmes à débattre, ce qui exige une réflexion en profondeur sur l’idéologie latente de la déshumanisation des rouages de la société, y compris ceux de la psychiatrie. Conflits d’intérêts : aucun. Références 1. Colombier J, Doublet F. 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