Pour aider / Accompagnement thérapeutique 32 _VIVRE_DÉCEMBRE 2010 Pour une meilleure qualité de vie Apparus dans les années quatre-vingt-dix, les soins dits de support améliorent la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer. Ils peuvent être prodigués tout au long de la maladie, en établissements de soins, mais aussi sur le lieu de vie. VIVRE_DÉCEMBRE 2010_ 33 Pour aider / Accompagnement thérapeutique Q uand on souffre d’un cancer, le plus important est de combattre la maladie au moyen de traitements ciblés. Pendant des décennies, les oncologues se sont attachés à sauver la vie de leurs patients. Puis les malades ont légitimement réclamé quelque chose en plus : une meilleure qualité de vie. C’est ainsi que le concept de soins de support est apparu (voir p. 35). Traitements de la douleur, soutien psychologique, rééducation fonctionnelle, accompagnement social, soutien nutritionnel… Autant de prises en charge pour réduire les effets secondaires des traitements et restaurer une image de soi altérée par la maladie. Certes, les oncologues sont plus ou moins investis dans ces domaines. Et certains « experts » de ces spécialités font progressivement leur entrée dans les services de cancérologie. Les soins de support doivent s’appuyer sur une parfaite coordination : « Ils nécessitent une organisation transversale. Les équipes hospitalières doivent donc travailler main dans la main », explique le Dr Ivan REPÈRES Les soins de support désignent l’ensemble des soins et soutiens proposés à une personne atteinte d’un cancer, à côté des traitements spécifiques (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie) destinés à soigner la maladie. Leur objectif est de diminuer les conséquences de la maladie et des traitements. Les malades peuvent bénéficier de soins de support dès l’annonce de la maladie, pendant et après les traitements. A noter que les soins palliatifs (initiaux ou terminaux) font partie intégrante des soins de support. Les soins de support, brochure éditée par la Ligue, disponible sur www.ligue-cancer.net/rubrique publications/autres publications ou contacter votre Comité le plus proche de chez vous au 0810111101. 34 _VIVRE_DÉCEMBRE 2010 Krakowski, oncologue médical à Nancy et président de l’Afsos 1. Pour mieux répondre aux besoins des patients, certains hôpitaux ont créé un département entièrement dédié aux soins de support. Avec un numéro de téléphone unique. Les soins de support mis en œuvre à l’hôpital ou en ville sont d’autant plus nécessaires que les malades passent de moins en moins de temps à l’hôpital (91 % des chimiothérapies ont lieu en ambulatoire), et qu’ils vivent plus longtemps avec leur cancer, grâce aux progrès thérapeutiques. « Certes, on sait mieux traiter les cancers métastatiques, mais encore faut-il que les malades aient le moins de souffrances possible », souligne le Dr Krakowski. Evaluer les besoins des malades Les soins de support n’ont plus rien de « complémentaires ». Ainsi, la douleur, la malnutrition, les handicaps et l’état dépressif peuvent presque anéantir les succès thérapeutiques s’ils ne sont pas contrôlés, notamment chez les malades guéris. Des études scientifiques ont montré qu’un malade qui parvient à conserver une alimentation équilibrée supporte mieux ses traitements et augmente ses chances de guérison. Autre exemple : la réadaptation fonctionnelle, essentielle pour récupérer au mieux son autonomie dans les actes quotidiens. Le point fort des soins de support ? Une prise en charge personnalisée et globale. Au moment de l’annonce de la maladie, les malades n’ont pas forcément de besoins particuliers car ils sont souvent dans un état de sidération. « Il est important d’évaluer ces besoins dès leur arrivée à l’hôpital, afin de dépister certaines fragilités familiales, sociales ou psychologiques, mais également tout au long de la maladie », informe le Dr Patrick Michaud, responsable du L’évolution des soins de support Le terme « soins de support » apparaît pour la première fois dans les années quatre-vingt-dix, d’abord dans les pays anglosaxons (« supportive care »). En France, les 1ers Etats généraux des malades du cancer, initiés par la Ligue en 1998, vont donner un coup d’accélérateur à cette nouvelle manière de penser les soins et le soutien aux malades. Pour les médecins, un constat : les patients veulent une prise en charge globale et non uniquement centrée sur leur corps malade. Le premier Plan cancer 2003-2007 intègre cette dimension. Il insiste sur la nécessité d’accroître les possibilités pour les patients de bénéficier de soins de support et de prendre en compte la douleur et le soutien psychologique et social (mesure 42). Ce plan a permis une amélioration significative de l’organisation des soins. Désormais, lors de l’annonce de son cancer, la personne malade devrait être informée de l’existence des différents soins de support et de leurs particularités. Mais des efforts restent à faire en ce domaine : une enquête récente1 montre qu’en 2010, l’accès à l’information aux soins de support ne va pas toujours de soi ! Dans la continuité du Plan cancer, l’Afsos, créée il y a deux ans, promeut la mise en œuvre et la connaissance des soins oncologiques de support auprès de tous les professionnels qui travaillent auprès des malades. « Nous souhaitons améliorer la qualité de vie des malades et augmenter leurs chances de guérison, dans un contexte de progrès technique. Nous sensibilisons les professionnels francophones de la cancérologie aux différentes pratiques des soins de support et ce, en lien avec différentes sociétés savantes », ajoute le Dr Krakowski. 1 Enquête patients « L’évaluation de l’impact du dispositif d’annonce », à l’initiative de la Ligue contre le cancer. LA LIGUE CONTRE LE CANCER AYANT FORTEMENT SOUTENU LE DÉVELOPPEMENT DES SOINS DE SUPPORT À L’HÔPITAL DÉVELOPPE AUJOURD’HUI DANS SES ESPACES LIGUE UNE OFFRE TRÈS LARGE (SOUTIEN PSYCHOLOGIQUE, SOINS ESTHÉTIQUES, ACTIVITÉS PHYSIQUES ADAPTÉES, ETC.). VIVRE_DÉCEMBRE 2010_ 35 Pour aider / Accompagnement thérapeutique LES MALADES PEUVENT BÉNÉFICIER DE SOINS DE SUPPORT DÈS L’ANNONCE DE LA MALADIE, PENDANT ET APRÈS LES TRAITEMENTS. département soins de support à l’Institut de cancérologie de la Loire (près de SaintEtienne). Viviane, 65 ans, a appris en 2009 qu’elle souffrait d’un cancer du sein. Elle a été opérée, puis a eu des séances de chimiothérapie et de radiothérapie. Elle consulte une psychologue spécialisée en psycho-oncologie depuis le début de l’année : « Je pensais qu’après les traitements, tout serait comme avant. Mais je me suis retrouvée seule chez moi, fatiguée et en proie à des douleurs. J’ai craqué psychiquement. Ces séances m’ont permis de mettre des mots sur l’épreuve que je traversais. » Yvette, 66 ans, a eu un cancer du rein en 2002 et des métastases osseuses en 2006. Un an plus tard, elle a fait de la gym douce grâce à la Ligue. « Avec la gym, j’ai repris confiance en moi. Dans la rue, je marchais en me redressant. Et j’avais moins de coups de blues. » Des associations prennent le relais Les soins de support ne sont pas l’apanage de l’hôpital. Forte de ses 103 Comités 36 _VIVRE_DÉCEMBRE 2010 départementaux, la Ligue contre le cancer ayant fortement soutenu le développement des soins de support à l’hôpital développe aujourd’hui dans ses Espaces Ligue une offre très large (soutien psychologique, soins esthétiques, activités physiques adaptées, sans oublier les activités de sophrologie, les séances de relaxation, les ateliers de nutrition, etc.). Comme à l’hôpital, ces soins de support proposés par la Ligue sont gratuits pour les malades. Les besoins à couvrir sont importants. Aux côtés de la Ligue, d’autres acteurs associatifs développent une offre sur des soins spécifiques : exemple de l’association Etincelle2, basée à Issy-les-Moulineaux, en région parisienne, qui prodigue aux femmes souffrant d’un cancer des soins esthétiques. « Ces associations ont toute leur place, car certains malades ayant séjourné à l’hôpital n’ont pas forcément envie d’y retourner pour leurs soins de support, ajoute le Dr Krakowski. Il est important que les professionnels de santé puissent les orienter vers des structures où officient des professionnels formés. » L’intérêt des patients, encore et toujours. De son côté, le Dr Patrick Michaud réfléchit à la mise en place d’un nouveau soin de support : la méditation, cette spiritualité laïque, dont le regretté Bernard Giraudeau s’est fait l’écho. Une façon de répondre à la quête de sens présente chez tant de malades : « Les neurosciences ont prouvé le pouvoir de l’esprit sur le corps et réciproquement. Du coup, c’est plus facile de convaincre les oncologues ancrés dans l’evidence-based medicine, la médecine fondée sur les faits, des bienfaits de ce type d’activité », conclut le médecin. Christine Angiolini 1 2 Association francophone pour les soins oncologiques de support. www.etincelle.asso.fr Apeseo: un projet-pilote de la Ligue Consciente des répercussions corporelles du cancer et de ses traitements, la Ligue a initié en 2007, grâce au soutien du laboratoire pharmaceutique Mylan, le projet-pilote Apeseo (activités physiques et soins esthétiques en oncologie). L’objectif initial de ce projet : développer une nouvelle forme de soutien aux personnes atteintes de cancer axée sur la prise en compte des répercussions corporelles de la maladie et de ses traitements, à partir des soins esthétiques et de l’activité physique adaptée. Le tout en lien avec un établissement de santé, afin de garder une continuité dans la prise en charge. Les soins esthétiques s’avèrent en effet précieux puisque les différents traitements peuvent avoir un impact sur la peau, les cheveux et les ongles. Par ailleurs, les activités physiques adaptées aident les patients à retrouver des capacités à l’effort et à reprendre confiance en un corps qui les a « lâchés » à un moment donné. Ce programme a fait l’objet d’une évaluation sur les six premiers mois de l’année. « Les patients nous disent à quel point ces deux soins de support leur ont procuré du réconfort, affirme Giulietta Poillerat, déléguée aux Actions pour les malades au siège de la Ligue. Ils leur ont permis de reprendre leur vie en main. » « Cela me permet de mieux accepter mon corps diminué », avoue l’un des participants. « Je me sens apaisée », dit une autre. Alors quels enseignements tirer de cette expérience-pilote ? Tout d’abord, mieux structurer les conditions d’accueil et de prise en charge des personnes malades dans les Espaces Ligue. La Ligue prend part aux travaux de l’Afsos qui visent à établir des référentiels pour les différents soins de support. Ensuite, organiser au niveau associatif une coordination des soins de support afin de proposer aux personnes malades un programme d’accompagnement personnalisé intégrant des soutiens tant sur le plan thérapeutique que social. D’où l’idée de transformer le projet initial Apeseo en une offre de soins de support à part entière. « Ce projet nous a aussi permis de faire émerger de nouvelles possibilités d’intervention pour venir en aide aux personnes malades », complète Giulietta Poillerat. Affaire à suivre. Pour en savoir + • Découvrez la vidéo de deux sites pilotes d’Apeseo (Nantes et Montpellier) sur www.ligue-cancer.net, rubrique « Ligue TV ». • 0 810 111 101 (prix d’un appel local). VIVRE_DÉCEMBRE 2010_ 37