Samedi 30 avril 2016 Société Le Quotidien 7 Rage «Les dents de la terre» font des ravages • Augmentation des attaques pendant la saison estivale Le phénomène des chiens errants qui ont envahi nos rues et nos artères ne cesse de faire des victimes. Les citoyens sont, souvent, des proies faciles avec toutes les conséquences préjudiciables qui s’ensuivent. I • La vaccination des chiens comme des personnes attaquées est fondamentale ls sont environ 50 mille personnes sur l’ensemble du territoire tunisien qui ont été prises en charge par le ministère de la Santé publique, dans les centres de prévention antirabique, rien que pour l’année 2015, assure Dr Ichraf Hammami Zaouia, coordinatrice du programme national de lutte antirabique. «Toute personne présentant un risque de contamination rabique est une personne à prendre en charge par nos points et centres antirabiques pour bénéficier d’un protocole préventif de traitement spécifique. La vaccination est gratuite. Par ailleurs, j’invite tous les citoyens à vacciner leurs chiens et c’est gratuit aussi», ajoute Dr Zaouia en précisant qu’une augmentation de 20% du nombre de personnes agressées traitées dans les centres a été enregistrée. Notre interlocutrice affirme que le virus de la rage en Tunisie demeure très virulent et cause la mort dans une période de trois mois au maximum. «Généralement, 40% des personnes agressées sont des enfants de moins de 14 ans. On a enregistré la mort de 6 personnes en 2015 et de 2 personnes pour l’année en cours et de 350 animaux. Parmi les victimes, figurent des enfants», enchaîne Dr Zaouia en soulignant l’augmentation des attaques pendant les périodes estivales. Chiens errants Dans l’objectif de limiter les contacts avec les chiens errants, Dr Zaouia a insisté sur l’importance de mettre les déchets ménagers et les poubelles dans les endroits qui leur sont réservés. «Les déchets sont une source d’alimentation pour les chiens errants et une source de prolifération et de transmission du virus de la rage. On a constaté une augmentation du nombre de chiens errants, ainsi qu’une certaine démission de la part des citoyens. Le nombre de chiens vaccinés a diminué d’une façon considérable, ce qui a engendré une augmentation du nombre d’attaques. Dans le cadre du Programme national de lutte contre la rage, nous organisons des campagnes annuelles gratuites de vaccination de masse des chiens pour la prévention de la maladie chez l’animal et nous contrôlons la population canine essentiellement par l’organisation de campagnes d’abattage des chiens errants et l’élimination des déchets ménagers», renchérit-elle. La rage, ce phénomène mondial, est à l’origine de 55 000 décès par an, le plus souvent, suite à une infection transmise par un chien enragé. En Tunisie, grâce à la prévention, des milliers de vies sont sauvées, mais il reste beaucoup à faire pour éviter que d’autres vies ne soient sacrifiées sur l’autel de l’inconscience et de l’indifférence. Hattab FEZAÏ L’Institut Pasteur de Tunis sur la ligne Cause et symptômes de la rage Contacté à ce sujet, Hichem Ben Hassine, chargé de la communication à l’Institut Pasteur, nous a révélé les chiffres pour l’année 2015, issus du rapport d’activité du service des vaccinations de l’Institut. Le rapport révèle 17151 actes de vaccinations antirabiques qui ont été effectués pour 6846 sujets exposés, avec une stabilité par rapport à l’année dernière. Selon notre source, les 3/4 des sujets agressés ont reçu un traitement d’observation vu qu’ils ont été mordus par un animal connu et observable. Le rapport révèle, par ailleurs, que la majorité des personnes (82 %) se présentent pour la vaccination dans les 24 heures qui suivent l’agression. Cependant 6 % des sujets ne consultent qu’au-delà du 3e jour. 11 % des personnes traitées ont reçu le jour même une sérothérapie antirabique associée au vaccin. Environ 12 % des sujets traités n’achèvent pas leur traitement bien qu’ils soient convoqués systématiquement en cas de défaillance. Le rapport précise que la mise de l’animal agresseur sous observation vétérinaire est systématiquement exigée, cependant elle reste très faible, seulement 2,3 % des personnes agressées ont présenté le certificat vétérinaire au 1er jour. Le virus de la rage (genre Lyssavirus) est présent dans la salive de l’animal (chien, animal sauvage...) en fin de maladie. La transmission survient le plus souvent après la morsure par un animal contaminé, par griffure ou encore léchage sur la peau excoriée ou sur une muqueuse. La contamination d’homme à homme reste exceptionnelle (greffes, transplantations d’organes). Le virus rabique est neurotrope: il modifie le fonctionnement du système nerveux. Il ne provoque pas de lésions physiquement visibles dans le cerveau mais perturbe les neurones, notamment ceux qui régulent des fonctionnements rythmiques comme l’activité cardiaque ou respiratoire. Après quelques jours à quelques mois d’incubation, l’individu atteint développe un tableau d’encéphalite. La phase symptomatique débute souvent par une dysphagie (difficulté à avaler) et des troubles neuropsychiatriques variés, notamment l’anxiété et l’agitation. L’hydrophobie est parfois présente. L’évolution se fait vers le coma et la mort (souvent par arrêt respiratoire) en quelques jours à quelques semaines. L’issue est toujours fatale en l’absence de traitement après exposition ou lorsque la maladie est déclarée.