Nicopolis d`Épire Histoire de la ville La fondation de la « cité de la

Nicopolis d'Épire
Nicopolis d’Épire, Actia Nicopolis ou encore Nicopolis
ad Actium (en grec ancien Νικόπολις / Nikópolis,
littéralement « la cité de la victoire »), est une cité grecque
fondée par Auguste pour commémorer sa victoire navale
d'Actium contre Marc Antoine le 2 septembre 31 av. J.-C. à
l’embouchure du golfe Ambracique. La ville est située sur
l’isthme de la péninsule qui sépare le golfe ambracique de
la mer Ionienne, à l’opposé du promontoire d’Actium,
environ 6 km au nord de la ville moderne de Prévéza.
Nicopolis a connu un développement florissant pendant la
période romaine et l’Antiquité tardive, avant de péricliter à
l’époque byzantine.
Histoire de la ville
La fondation de la « cité de la victoire »
Bien que la bataille d'Actium proprement dite ait
été plutôt confuse, et n'ait tourné à son avantage qu'en
raison de la fuite prématurée d'Antoine et Cléopâtre, elle
n'en permet pas moins à Octavien de devenir le seul maître
du monde romain. C'est pour cette raison qu'il célèbre sa
victoire avec un faste particulier lors de son retour à Rome,
et qu'il entreprend d'en perpétuer le souvenir sur place par
une série de trophées et de monuments dressés sur les lieux
de la bataille, ou plutôt, puisqu'il s'agissait d'une bataille
navale, à l'emplacement des camps fortifiés abritant les
forces terrestres des belligérants. Sur le site de son propre
quartier général, une colline au nord du village actuel de
Smyrtoula, il fait ainsi construire un sanctuaire à Apollon,
considéré comme son dieu tutélaire, et des trophées à deux
autres dieux, Neptune et Mars, pour leur contribution à sa
victoire[3].
Au sud du sanctuaire, il établit une nouvelle ville,
baptisée Nicopolis, « cité de la victoire », reprenant ainsi
une tradition remontant à Alexandre le Grand, plus
récemment illustrée par Pompée, fondateur d'une Nicopolis
en Petite Arménie (60 av. J.-C.). Au-delà du symbole
politique, la fondation répond à une série d'objectifs clairs :
assurer la domination romaine sur la région, qu'il s'agit
simultanément de réorganiser et de revitaliser, car elle ne
s'est jamais remise de sa destruction par Paul Émile à l'issue
de la Troisième guerre de Macédoine (171-167 av. J.-C.) ;
établir un centre commercial et portuaire important sur cette
position stratégiquement située sur les routes maritimes
méditerranéennes ; créer une capitale religieuse, un des
hauts lieux du nouvel ordre impérial et du culte d'Auguste
qui l'accompagne.
À la différence des autres fondations romaines en
Grèce contemporaines de Nicopolis (fig. 1), telles Patras,
Philippes, et en Épire même, Buthrote et Dyrrachium, la
ville n'est pas ou du moins pas seulement une colonie
romaine mais une cité libre, la civitas libera Nicopolitana,
autrement dit une polis (une cité grecque), libre et
autonome, liée à Rome par un traité (foedus) : sa création
procède du synœcisme des cités voisines d'Épire et d'Étolie-
Acarnanie, dont les populations sont déplacées pour venir
peupler, probablement avec des colons et des vétérans de
l'armée romaine, la nouvelle ville. L'originalité de
l'opération, outre le fait que l'autorité romaine en soit
l'instigatrice, tient en la très vaste zone concernée, et au
nombre important de cités participantes (fig. 3) : les sources
mentionnent ainsi Cassopée, Ambracie, Anactorion, Alyxia,
Argos Amphilochique, Thyrion, Oinéa, Palairos, Leucade
et Calydon d'Étolie. Le territoire (chôra) de Nicopolis
s'étend ainsi des rives de l'Achéloos à l'est, à l'île de
Leucade comprise, au sud-ouest, du Thyamis au nord, au
golfe de Patras au sud, et comprend l'essentiel des régions
antiques de Thesprotie, Amphilochie, Dryopis et Acarnanie.
Nicopolis ne possède pas seulement un vaste
territoire, mais aussi un prestige religieux sans égal dans la
région, qui en fait une véritable capitale sacrée de la Grèce
continentale : Octavien réorganise les Actia, les jeux locaux
célébrés antérieurement par les Acarnaniens au sanctuaire
d'Apollon Actios, et les transfère dans sa nouvelle ville[8].
Ces concours stéphanites pentétériques, les Nea Actia, ont
lieu dans les édifices de spectacle construits à cet effet dans
le proasteion, le faubourg qui sépare la ville du nouveau
sanctuaire d'Apollon. Considérés comme isolympiques, ils
figurent parmi les manifestations de ce type les plus
prestigieuses du monde romain, et sont encore célébrés au
milieu du IIIe siècle, comme en témoigne une inscription du
musée de Ioannina. Auguste modifie également
l'organisation de l'amphictyonie delphique de façon à y
donner la prééminence à Nicopolis : la nouvelle cité fait son
entrée dans le conseil amphictyonique avec dix
hiéromnémons sur vingt-quatre, en ayant hérité des
représentants des Magnètes, Maliens, Ainianes, Phthiotes et
Dolopes, qui en avaient deux chacun auparavant.
Nicopolis à l’époque romaine
Ainsi pourvue par son fondateur d'atouts
considérables, la ville nouvelle se développe rapidement à
l'époque romaine : Auguste lui-même l'a parée de
monuments financés par le butin de la guerre, mais elle doit
aussi beaucoup à l'évergétisme de son ami, le roi de Judée
Hérode Ier. Les deux ports, l'un sur le golfe ambracique,
probablement à Vathy, et l'autre sur la mer Ionienne à
Komaros (fig. 4), assurent le développement commercial de
la ville, construite sur le plan orthogonal propre aux
fondations romaines de l'époque, et qui se signale par son
étendue considérable (environ 180 ha).
On possède cependant peu d'informations sur
l'histoire de la ville à l'époque romaine. Germanicus, en
route vers la Syrie, visite la ville et y célèbre son second
consulat en 18 ap. J.-C. L'empereur Néron s'y rend en 66,
lors de sa tournée en Grèce, et se fait couronner dans
l'épreuve de course de chars des Actia. Après 89, la ville
gagne un résident de renom en la personne du philosophe
stoïcien Épictète de Hiérapolis, qui s'y réfugie pour
échapper à la persécution de l'empereur Domitien : il y
fonde sa propre école, et sous le règne de Trajan compte
parmi ses étudiants Arrien, grâce aux notes duquel on
connaît sa philosophie. C'est sous le règne du même
empereur, peu après 108, qu'il faut probablement placer la
création de la province procuratorienne d'Épire, dont
Nicopolis devient la capitale. Deux décennies plus tard,
c'est au tour de l'empereur Hadrien de visiter la ville en
compagnie de son épouse Sabine, à l'occasion de son
second voyage en Orient (128-134). Le couple impérial est
reçu avec les plus grands honneurs : de petits autels élevés
dans la ville attestent d'un culte rendu à Hadrien et à
Sabine, assimilés respectivement à Zeus Dodonaios (fig. 5),
la divinité la plus importante d'Épire, et à Artémis Kelkaia,
une manifestation de la déesse inconnue en dehors de
Nicopolis, mais qui devait y tenir une place importante.
Hadrien profite de son séjour pour faire construire un
temple à son protégé défunt, Antinoüs.
Nicopolis est exposée très tôt à la doctrine
chrétienne : c'est de cette ville que saint Paul adresse son
épître à Tite en 63, comme il le mentionne lui-même (3,
12). À partir de cette fondation apostolique se développe
probablement une communauté chrétienne importante : en
est originaire le pape Éleuthère (175-189), l'un des premiers
pontifes originaires de la partie grecque de l'Empire, et l'on
sait par Eusèbe de Césarée qu'Origène d'Alexandrie se rend
dans la ville, dans la première moitié du IIIe siècle, et y
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