Notice sur un livre d`astrologie de Jean, duc de Berri

NOTICE
SUR UN
LIVRE D'ASTROLOGIE
JEAN DUC DE BERRI
PAR
M. LÉOPOLD DELISLE
Membre de linsti lut
Administrateur général de la Bibliotbéque Nationale.
PARIS
LIBRAIRIE TECHENER
(n. LECLBRC ET P. COItNUAU, )
219, rue Saint-Honoré, au coin de la rue d'Alger.
Document
1896
II II Il II II III 1111111110 111111
((iil3THEQUE1
0000005539659
NOTICE
SHU (J&
LIVRE D'ASTROLOGIE
DE
JEAN DUC DE BERRI
à
u mois de novembre dernier, MM. Leclerc
et Cornuau voulurent bien nie mettre en
rapport avec M. Court, de Dijon, et 111e
faire communiquer un manuscrit que ce
bibliophile avait recueilli dans la succes-
sion de son grand-père, M. Baudot.
Ce volume est un livre d'astrologie, divisé en deux
parties, l'une intitulée:
De quatuor elementis et duodecim
signis,
l'autre:
De plan etis. Il
est orné d'un grand nombre
(le peintures dont l'origine est facile à établir. Au bas de
la dernière page on lit:
LIIBERTUS ABBAS BRUGENSIS PRE-
DIcTAS YMAGJNES ATQUE FIGURAS ORDINAVIT.
Cela suffisait pour arriver à connaître la date, l'origine
et le nom du premier possesseur du livre. Les peintures
qui en couvrent beaucoup de feuillets sont assez belles
6
UN LIVRE D'ASTROLOGIE
pour autoriser à supposer qu'il a fait partie d'une librai-
rie princière du XV
O
siècle. J'eus doué l'idée de parcourir
les principaux inventaires de ces librairies qui nous sont
parvenus, et dans l'un des plus curieux, celui de Jean,
duc de Berri, je trouvai la mention d'un livre d'astrolo-
gie, en latin, que l'abbé de Bruges avait donné à oc
prince le 7juin 1403 et qui contenait 1° Les quatre élé-
ments et les douze signes figurés; 2° les planètes
Item un petit livre d'astrologie en latin, ouquel sont les
quatre eleineus et les douze signes figurez et les planètes;
où il n eseript au commancement du second feuillet noniiuurn
itaque; couvert de cuir vermeil empraint, à cieux fermouers
de cuivre; lequel livre l'abbé de Bruges donna à monseigneur,
-
è Paris, le vue jour de juing l'an dessus dit mil cccc etHi (1).
Évidemment le volume possédé par le duc (le Berri
était un exemplaire du traité copié dans le manuscrit (le
M. Court, et ce qui met ce rapprochement hors de toute
contestation, c'est que, dans le manuscrit de M. Court,
comme dans celui du duc de Berri, le deuxième feuillet
commence par les mots norninurn
i/o
que. On pourrait, à
la rigueur, supposer que l'abbé de Bruges avait fait
exécuter deux exemplaires dii même recueil astrologique,
et que dans les deux exemplaires le lexie avait été copié
page pour page, de façon que, dans l'un et l'autre, le
second feuillet commençait pareillement par les mots
norninum
itaque.
Mais il n'aurait pas fallu s'arrêter à
celte hypothèse lors même qu'une circonstance imprévue
ne serait pas venue en démontrer péremptoirement la
fausseté.
En retournant sous tous les angles de lumière la
dernière page du manuscrit de M. Court, au-dessus des
(1)
inventaires
de
Jean,
duc de Berrl;
(1101-1415), publiés et annotés
aIr
J
u
les
le,
Gnhlrrcy, L. I, p. 245. orlicie 933. - Cet article correspond aLt il' 177 du cota-
ogue des livres du risie de Berri, inséré dans
Le cabi,,ef
IteS
iiia,uiscrits,
t. III,
P. 185.
DE JEAN DUC DE BERRI
7
mots
Luberius, abbas Brugensis, predictas yrnagines alque
figuras ordinavit,
je remarquai la trace de deux lignes
soigneusement grattées et dans lesquelles je crus distin-
guer les vestiges de certains traits familiers à quiconque
a travaillé sur les manuscrits du duc de Berri. Je m'em-
pressai de passer délicatement sur l'endroit gratté une
solution de sulphydrate d'ammoniaque concentré, et je
vis aussitôt revenir au jour ces mots tracés d'une main
très ferme
CE LIVRE EST AU DUC DUC
(sic)
DE BERRY
JEHAN
On ne pouvait plus avoir l'ombre d'un doute. Le
volume que M. Court m'avait communiqué est bien celui
que le duc de Berri avait reçu en présent le 7 juin 1403
de l'abbé de Bruges. Voyons maintenant quel était cet
abbé de Bruges.
Quan'dje commençai, il
y
a plus detrente ans, àm'occu-
per de la librairie du duc de Berri, j'avais bien constaté
les rapports du prince avec un abbé de Bruges. La lec-
ture des inventaires m'avait appris que cet abbé avait
donné an duc de Berri un livre latin d'astrologie et qu'il
en avait reçu deux livres français la Vie des Pères et
une Histoire des comtes de Flandre (1). Mais j'avais dû
avouer que j'ignorais quel était cet abbé de Bruges, et
(1) Les deux articles suivants se lisent clans un inventaire des années
1401-1403, sous les n'' 1001 et 1019 de la publication de M.
cjuiffrey(IcsuefltalrcS
de Jean, duc de Berry,
t. II, p. 128 et 129)
« item un livre de la Vie des Pères, eseript en françoys, de lettre de forme,
ystorié ccl aucuns lieux, couvert mauvaisernent d'un cuir vermeil empreint,
à
un Iremouer de cuyvre, sur chascune ays cinq polis clos de cuyvr.
e Datura
Brugensi, ut apparat per compotum dieU Robineti.
Item un livre en françois, escript en lettre de court, de l'Istoire des
contes de Flandres, couvert et garni de fremouers, coinhtie le précddeut.
[Couvert de cuir vermeil emprniut, A deux petits ferinouers de cuivre.]
q
Datant nbbati Brugensi, ut apparet per cosnpotuns dicti Bobineti '.
8
UN
LIVRE D'ASTROLOGIE
M. Jules Guif&ey ne l'a pas non plus idenlitié dans la
savante édition
qu'il
Vient d'achever des
Juvenlaires de
Jean, duc de Berry.
C'est la communication de M. Court
qui nous a donné le mot de l'énigme. Après avoir lu la
souscription
Luberlus, abbas Bru qensis...,
j'ouvris la
Bio-bibliographie de M. le chanoine Ulysse Chevalier,
mais
j
'
y
cherchai vainement le nom de
Luberlus.
Je ne
fus pas plus heureux en consultant la table du tome V du
Gallia cliris!iana, qui
renferme l'histoire des abbayes du
diocèse de Bruges. Mais je savais de longue date à qui
l'on doit s'adresser pour être mis au courant des uioin-
dres détails de l'histoire de la ville (le Bruges. J'écrivis à
mon savant ami M. W. H. James MTeale, bibliothécaire
du South-Kensington Museum, à Londres. Par le retour
du courrier, il me disait quel plaisir lui faisait éprouver
la découverte d'une oeuvre jusqu'alors inconnue d'un
brugeois dont il avait souvent rencontré le nom au cours
de ses recherches, et dont la vie et les travaux l'intéres-
saient au plus haut degré. Ce mystérieux personnage
s'appelait LUBERTUS HAUTSCHILD, et c'est au mot
HAUTS-
CHILD que j'aurais dû en chercher la mention dans le
Répertoire de M. le chanoine Chevalier (col. 1003). Les
Bénédictins l'ont enregistré sous la forme ANScHILT dans
la table du tome V du Gaflia christiana.
En même temps qu'il tue donnait le nom de Lubert
Flautsehild, abbé de Saint-Barthélemi de l'Eeckhout à
Bruges, de l'ordre de Saint-Augustin, M. James Weale
me renvoyait à la notice qu'il avait publiée en 1869 sur
les abbés de l'Eeckhout (1). J'y trouvai tous les renseigne-
(1)
La Plandre, Revue des
i:ro,,uiite,tts,
d'il Istoire et d'antiquités,
flnnée
1869-
1870
(Bruges,
1869, itt'8, p. 274
.
382. M.
Weale
n
encore parlé de
Ltbert
à
la
p. 58
de la très curieuse monographie
qu'il
vient de consacrer
à
Gôrnrd
flovid,
(
The
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publlsuied inontititj,
n
.
24,
decetuber
1895,
Gérard David, painter und illunil-
natot'. London.
In-8).
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