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La guerre froide débute réellement en 1947. Les actes fondateurs en sont la doctrine Truman (mars 1947), le plan Marshall
(juin 1947) et le rapport Jdanov (septembre 1947). Truman dénonce la menace terrible que fait peser sur l’Europe occidentale
le totalitarisme stalinien. Il part du principe que le communisme se développe sur les ruines et la pauvreté. Il convient donc pour
les États-Unis d’aider l’Europe de manière significative afin d’empêcher l’essor du communisme dans cette région. Sans doute
pense-t-il alors, même s’il ne les mentionne pas explicitement dans son discours, à la France, à l’Italie où les partis
communistes sont politiquement importants au lendemain de la guerre, et à la Grèce qui s’enfonce alors dans une guerre civile
où les forces gouvernementales sont massivement soutenues par les E.U. contre la guérilla communiste. Le Plan Marshall,
proposé à la totalité des pays d’Europe, y compris l’URSS, en juin 1947 par le secrétaire d’État américain donne lieu, en
particulier en France et en Italie, à de violentes luttes politiques où les partis communistes locaux dénoncent par voie d’affiches,
par des manifestations plus ou moins violentes l’impérialisme américain cherchant à « acheter » l’Europe. La réponse
soviétique n’arrive qu’en septembre 1947, lors du congrès de fondation du Kominform, en Pologne. Le ministre Andreï Jdanov y
prononce un discours où il prend également acte de la division du monde en deux blocs. Inversant les termes de la doctrine
Truman, il fait de l’URSS et de ses alliés le camp de la liberté, les E.U. étant décrits comme une puissance impérialiste qui
cherche à imposer au monde un pouvoir de type fasciste.
C’est cependant dans l’année 1948 que les mots cèdent la place aux confrontations directes. La Tchécoslovaquie demeurait le
seul pays d’Europe orientale où les communistes n’avaient pas encore éliminé toute opposition. En février 1948, c’est le « Coup
de Prague ». Les milices du parti communiste tchécoslovaque s’emparent du pouvoir par un coup d’État, contraignant le
président Benès à quitter le pouvoir.
La première confrontation majeure survient peu après avec le blocus de Berlin. En juin 1948, Staline veut mettre fin à
l’apparente anomalie de la présence de troupes occidentales à Berlin-Ouest, au cœur de la zone d’occupation soviétique. Afin
d’éviter une confrontation armée qui aurait signifié la guerre, il décide de forcer les Occidentaux au départ en isolant totalement
Berlin-Ouest, faisant bloquer les routes et les voies ferrées. Pris au dépourvus, les Américains, aidés de leurs alliés européens
et en particulier des Britanniques, décident d’organiser un pont aérien qui leur permet de ravitailler par les airs leurs soldats et la
population berlinoise. Faute de résultats, Staline décide de lever le blocus en mai 1949 mais les tensions demeurent vives. Dès
avril 1949, les Américains mettent en place une alliance militaire avec leurs alliés européens, le Canada et la Turquie. C’est
l’O.T.A.N. (Organisation du traité de l’Atlantique nord) clairement tournée contre l’URSS. En mai 1949, à l’initiative des États-
Unis, les trois zones d’occupation occidentales sont réunies pour céder à la place à un nouvel État allemand, la République
fédérale d'Allemagne dont le premier chancelier est Konrad Adenauer. En réponse, les Soviétiques créent à leur tour une
Allemagne dans leur propre zone d’occupation, c’est la République démocratique allemande (R.D.A.). L’Europe en général et
l’Allemagne divisée en deux États, incarnent alors la division du monde en deux blocs antagonistes.
La mort de Staline, le 5 mars 1953 va cependant marquer un premier apaisement dans la confrontation entre l’Est et l’Ouest
comme nous allons le voir maintenant.
Une fois la question de la succession de Staline réglée, Khrouchtchev s’impose comme le véritable maître de l’URSS. Ce n’est
cependant qu’en 1956 que le nouveau dirigeant soviétique amorce un changement majeur en matière de politique étrangère en
défendant l’idée que l’URSS et les E.U. doivent trouver la voie d’une coexistence pacifique afin d’éloigner le spectre de la
guerre nucléaire. Celle-ci doit prendre la forme d’un respect mutuel entre les deux « super-grands », c’est-à-dire que chacun
d’entre eux doit respecter la zone d’influence de son rival et s’engager à ne pas chercher à semer le trouble et la subversion
chez son voisin. Ainsi, lorsque les chars soviétiques écrasent dans le sang la révolution hongroise de 1956, l’Occident proteste
mais cela ne remet pas fondamentalement en cause le rapprochement soviéto-américain. L’URSS et les E.U. se retrouvent de
fait sur une ligne politique voisine lorsqu’ils condamnent l’expédition franco-britannique de Suez
(Remarque, il ne s’agit pas pour vous de développer en détail la crise de Suez, vous seriez alors hors sujet) et forcent les deux
puissances européennes à se retirer d’Egypte. En 1959, Khrouchtchev est le premier dirigeant soviétique à se rendre en visite
officielle aux États-Unis, visite qui, au moins symboliquement, semble montrer que l’Europe n’est plus forcément le cœur de la
guerre froide.
La coexistence pacifique montre cependant rapidement ses limites. En Europe, c’est encore et toujours la question de
l’Allemagne et plus particulièrement celle de Berlin qui divise le continent. Du côté de la R.F.A., le chancelier Adenauer continue
à refuser toute légitimité à la R.D.A., mais c’est surtout la division de Berlin qui va aboutir à la cristallisation de nouvelles
tensions. Entre 1949 et 1961, c’est entre 2,5 et 3,5 millions d’Allemands de l’Est qui fuient la R.D.A. pour se rendre à l’Ouest, le
plus souvent en se rendant à Berlin-Ouest. Le passage d’une partie de la ville à l’autre demeure en effet relativement libre,
notamment en prenant le métro, jusqu’en 1961. Désireux de mettre fin à cette situation, le dirigeant communiste est-allemand
Walter Ulbricht obtient de Khrouchtchev la construction d’un mur qui, désormais, divisera les deux parties de Berlin de manière
totalement hermétique. C’est le 12 août 1961 que débute la construction du « Mur » dans une atmosphère particulièrement
tendue où les troupes occidentales et les troupes soviétiques en armes se font face à la limite de leurs secteurs respectifs.
C’est pourtant la crise de Cuba en 1962 qui va fermer la parenthèse de la coexistence pacifique. Cette crise, la plus grave de la
guerre froide, va amener les E.U. et l’URSS au bord du conflit armé. On notera à ce propos que ce n’est pas l’Europe qui est à
l’origine de cette confrontation mais Cuba, île des Caraïbes. L’Europe où les positions semblent désormais figées n’est plus,
dans cette deuxième phase du conflit, qu’un espace parmi d’autres.