Mais d’o`u vient cette force de gradient d’intensit´e ?
Dans un premier temps pla¸cons nous dans le cas de
l’optique g´eom´etrique et consid´erons un objet de taille
caract´eristique sup´erieure `a la longueur d’onde du laser
utilis´e. Supposons que l’objet pi´eg´e est une bille d’un
diam`etre de 1µm soumise `a un gradient d’intensit´e de
profil gaussien (fig 1). La bille r´efracte les rayons lu-
mineux dont l’intensit´e est diff´erente suivant leur posi-
tion, c’est cette diff´erence d’intensit´e qui cr´ee une dis-
sym´etrie dans les transferts de quantit´e de mouvement.
Ces transferts se font par d´eviation des rayons lumi-
neux lors de la r´efraction (fig 1a.), on obtient ainsi une
force nette dirig´ee vers le point de plus forte intensit´e,
car ici l’indice optique de la bille est plus grand que ce-
lui du milieu. Pour compenser la pression de radiation
qui pousse l’objet dans la direction de propagation de
la lumi`ere, le laser est tr`es fortement focalis´e grˆace `a un
objectif de grande ouverture num´erique. En r´efractant
les rayons les plus convergents (fig 1b.) la bille subit un
nouveau transfert de quantit´e de mouvement dont la
force r´esultante est dirig´ee dans le sens oppos´ee `a celui
de propagation de la lumi`ere, ce qui compense en par-
tie la pression de radiation. Cr´eant ainsi un v´eritable
pi`ege optique dans la zone de plus forte intensit´e : le
point de focalisation.
Fig. 1 – Figure d’optique g´eom´etrique montrant
l’origine de la force de gradient exerc´ee sur une
bille par un laser pr´esentant un profil d’intensit´e
gaussien. a. origine de la force transversale, la fl`eche
la plus ´epaisse repr´esente le rayon le plus intense,
qui subit un transfert de quantit´e de mouvement
plus important d’o`u l’orientation de la force vers le
point de plus forte intensit´e. b. origine de la force
longitudinale, la focalisation du faisceau implique
un transfert de quantit´e de mouvement dirig´e vers
ce point de focalisation ; la pression de radiation
qui repousse la bille fait que cette derni`ere est en
´equilibre dans un plan situ´e juste apr`es le point de
focalisation.
Consid´erons cette fois que la taille caract´eristique
de l’objet `a pi´eger est tr`es inf´erieure `a la longueur
d’onde [2], on consid`ere alors cet objet comme un
milieu di´electrique dans lequel se propage une onde
´electromagn´etique haute fr´equence : le rayon lumineux
issu du laser. Un milieu di´electrique est caract´eris´e par
sa polarisabilit´e α, ainsi le champ traversant l’objet
le polarise, et chaque dipˆole cr´e´e est alors lui mˆeme
soumis `a une force exerc´ee par le champ variable,
ce sont ces forces int´egr´ees sur l’ensemble de l’objet,
en consid´erant `a nouveau le gradient d’intensit´e, qui
m`enent `a la force de gradient (−→
Fgrad). Cette force
peut ˆetre quantifi´ee puisque l’on connait son expres-
sion litt´erale, en effet on a :
−→
Fgrad =−1
2.α.−−→
grad(E2)
o`u αest la polarisabilit´e de la bille de rayon r donn´ee
par :
α=r3.nb
2.n2−1
n2+ 2
Avec nbl’indice du milieu et nl’indice de la bille (pour
assurer la stabilit´e du pi`ege il faut nb> n). Il existe
ainsi des r´egimes o`u la force de gradient domine sur
la force tendant `a pousser l’objet dans la direction de
propagation de la lumi`ere, on a alors un v´eritable pi`ege
optique, qui pousse ou tire les objets vers le point de
focalisation, lieu de plus forte intensit´e.
Les deux explications pr´ec´edentes ne sont appli-
cables que dans le cas o`u la longueur d’onde du laser et
la taille caract´eristique de l’objet ne sont pas compa-
rable. Lorsque ce n’est pas le cas la force de pression de
radiation d´epend de la forme pr´ecise de l’objet, ceci fait
appel alors `a la th´eorie de Mie, th´eorie non d´evelopp´ee
dans cet article.
Une propri´et´e remarquable de ce syst`eme est que
le potentiel ainsi cr´e´e est harmonique, la pince agit
donc exactement de la mˆeme fa¸con qu’un ressort ! On
est donc en mesure de connaitre directement la force
exerc´ee en connaissant la position de la bille dans le
pi`ege optique. Il est n´ecessaire pour cela de connaitre
la raideur de la pince (par analogie au ressort), chaque
exp´erience n´ecessite donc un ´etallonage pr´ealable de
la pince. Ceci se fait en g´en´eral par une analyse de
la position de la bille `a l’int´erieur du pi`ege lorsqu’elle
n’est soumise qu’au mouvement brownien, en utilisant
le th´eor`eme de fluctuations-dissipations. Typiquement
les pinces optiques permettent d’exercer des forces tr`es
faibles, de 1 `a environ 100 pN, et ce en utilisant des
lasers d’une puissance ´egale `a la centaine de milliwatt.
En ce qui concerne les appplications en biologie il faut
faire tr`es attention `a ne pas endommager voire d´etruire
les ´echantillons observ´es, il faut ainsi choisir des lasers
dont la longueur d’onde ne correspond pas `a celle d’un
rayonnement absorb´e par les substrats biologiques, on
choisit donc tr`es souvent un laser qui ´emet dans l’infra-
rouge. Il est n´ecessaire ´egalement de faire attention `a
la puissance ´emise par le laser car l’´echauffement pro-
voqu´e par une trop forte intensit´e dans le milieu peut
d´enaturer les objets observ´es, ceci est une limite `a la
force maximale que l’on peut exercer grˆace `a une pince
optique (P≤100mW ).
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