L`identité intellectuelle de deux écoles historiques La nouvelle

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Zhou Lihong
Université Sun Yat-sen
L’identité intellectuelle
de deux écoles historiques
La nouvelle histoire en Chine
et les Annales en France
Ce travail s’attaché à décrire l’implantation et l’évolution des deux courants historiographiques
que sont la nouvelle histoire en Chine et les Annales en France. Avec l’ouverture de la Chine
du XIXe siècle aux courants extérieurs, de nouvelles pensées historiques se formèrent, telle une
« révolution historiographique » critiquant l’historiographie traditionnelle. Elle était notamment
fondée sur l’étude ordonnée des archives, la coopération interdisciplinaire et des études critiques.
Côté français, c’est l’école des Annales qui joua le rôle d’une nouvelle Histoire. Avec Henri Berr,
proclamant que l’histoire, reine des disciplines, devait prendre la responsabilité d’unir les différentes disciplines, en considérant que toutes les connaissances sur le passé sont le produit de
la réglementation des pensées, l’écho s’en trouva décuplé avec deux jeunes historiens Lucien
Febvre et Marc Bloc, les fondateurs de l’école des Annales. Ainsi, même si la nouvelle histoire
en Chine et l’école des Annales en France apparurent dans deux pays différents et n’eurent pas
d’échanges directs, ils eurent cependant beaucoup de points communs. Les deux écoles furent le
champ expérimental de l’historiographie moderne dont les caractéristiques communes telles que
la conception de l’histoire totale et l’intégration des disciplines sont devenus les caractéristiques
essentielles de l’historiographie moderne
Le titre est volontairement paradoxal, parce qu’on dit souvent que la
nouvelle histoire en Chine dans les années vingt et trente a été beaucoup influencée
par l’histoire dite positiviste en France et dont l’école des Annales fit précisément
une de ses cibles. Mais quand la nouvelle histoire se développait vigoureusement
en Chine dans les années vingt et trente, l’école des Annales ne faisait que percer
sa coquille à Strasbourg. Les historiens chinois n’entendirent pas parler de l’école
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des Annales jusqu’aux années cinquante1 et peu de liens entre l’une et l’autre furent
établis. Cet article a pour objectif d’explorer et expliquer les points communs entre
ces deux courants historiographiques.
La « nouvelle histoire » en Chine dans les années vingt et trente
du XXe siècle
L’historiographie chinoise prenant naissance dans la période précédant la dynastie
Qin et qui est florissante dans la dynastie des Song du Nord et celle des Song du Sud,
a une longue histoire de plus de trois mille ans. Dans la première partie de la dynastie
Qing, les succès de l’historiographie chinoise ont été remarquables avec les œuvres
récapitulatives sur la critique historique, l’étude critique des textes et la théorie historique. Avec l’irruption de la Guerre de l’opium en 1840, les ennemis d’Outre-mer
sont venus en Chine à flots continus, et les pensées occidentales, surtout les théories
et méthodes historiques ont commencé à être transmises. C’est pourquoi la société
chinoise subit un bouleversement jamais rencontré jusqu’alors2. Ce grand changement a entraîné la transformation de la culture traditionnelle chinoise et certains
chercheurs commencèrent à réfléchir sur les théories et méthodes de l’historiographie chinoise, si bien que sa modernisation date de cette période.
Les intellectuels chinois assimilèrent les pensées historiques occidentales qui
traversèrent le Japon. Depuis la restauration de Meiji, le Japon avait commencé à
importer cultures scientifiques et théories historiques européennes. À l’époque de la
Réforme des Cent Jours, un groupe d’intellectuels chinois commença à introduire
en Chine les livres historiques traduits par les chercheurs japonais. Après l’échec de
la Réforme, Liang Qichao (1873-1929) s’exila au Japon où il fut influencé par les
milieux intellectuels japonais. Bientôt, un groupe d’intellectuels chinois commença
à former de nouvelles pensées historiques, telle une « révolution historiographique »
critiquant l’historiographie traditionnelle.
L’article intitulé « la nouvelle histoire » de Liang Qichao paru en 1902, indiquait une nouvelle orientation de l’historiographie en Chine, mais aussi l’émergence
d’une conscience historique moderne parmi les intellectuels chinois. Dans cet ar1. En 1955, ayant participé aux Xe Congrès international des sciences historiques à Rome, deux
chercheurs russes A.M.Пaнkpaтoвa et Гастоне Манакорда ont publié respectivement deux articles
pour introduire des opinions historiques de ce congrès dans lequel ils parlèrent de l’école des Annales.
C’est à travers ces deux articles traduits en chinois en 1956 que les chercheurs chinois eurent pour la
première fois connaissance de l’école des Annales.
2. Qu Lindong, Précis de l’historiographie chinoise, Shanghai, Maison d’édition du peuple de Shanghai,
p. 13, p. 53, p. 71-78.
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Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
ticle, Liang Qichao expliqua que les vieux historiens chinois avaient quatre abus
et deux défauts. Les quatre abus se déclinaient en ces affirmations : « ils n’écrivent
que pour le gouvernement impérial et oublient le peuple » ; « ils n’écrivent que pour
l’individu et ignorent le groupe », « ils n’écrivent que des choses surannées pour
mieux éviter les questions d’aujourd’hui » ; « ils n’écrivent que les faits pour mieux
passer à côté des idées ». Les deux défauts étaient qu’« ils savent narrer mais ne savent
pas sélectionner des sources » ; « ils savent suivre les règles démodées mais ne savent
pas créer ». Liang Qichao proposait alors deux idées pour guérir complètement les
abus et défauts dans les études historiques traditionnelles. Premièrement, il promut
une conception de « l’histoire totale », c’est-à-dire une histoire englobant tout le
genre humain, le passé et le présent, les élites et le peuple, l’intérieur et l’extérieur
d’un pays. Deuxièmement, il s’attacha à valoriser la coopération interdisciplinaire.
Selon lui, la raison principale pour laquelle l’histoire traditionnelle ne pouvait pas
s’adapter à la nouvelle époque, résidait dans le fait que les anciens historiens chinois
ne tissaient pas de liens intimes avec la géographie, la géologie, l’ethnologie, la politique, la religion, la loi et l’économie3.
Liang Qichao mérite-t-il d’être considéré comme l’un des initiateurs de la nouvelle histoire en Chine ? La première grande floraison d’études historiques rénovées s’est produite dans l’entre-deux-guerres avec les efforts d’une jeune génération
d’historiens tels que Fu Sinian (1896-1950), Gu Jiegang (1893-1980), Chen Yinke
(1890-1969). À quoi peut-on attribuer la floraison d’études historiques rénovées?
En premier lieu, après le mouvement du 4 mai 1919, les méthodes et théories occidentales ont été introduites dans les milieux des études chinoises, et les cours sur les
études critiques des documents historiques ont été créés dans les départements d’histoire des universités4. En 1925 et 1928, deux instituts ont été fondés successivement
pour promouvoir les travaux scientifiques en histoire : l’Académie d’Études nationales de Tsinghua et l’Institut d’histoire et de philologie dans l’Académie centrale.
Ensuite, grâce aux grandes découvertes archéologiques, des dépouilles préhistoriques,
des inscriptions oraculaires d’époque Yin (XIVe-XIe siècles avant Jésus-Christ), des
anciens ustensiles en cuivre, des manuscrits de Dunhuang furnt utilisés par des chercheurs, beaucoup élargissant leur vision de recherche5. Enfin, avec l’évolution du
3. Liang Qichao, « La nouvelle histoire », Quatre œuvres de Liang Qichao, Changsha, Édition de
Yuelu, 1985, p. 242-245 et p. 251.
4. Li Xiaoqian, La Transmission des études historiques occidentales en Chine, 1882-1949, Shanghai,
Maison d’édition de L’Université normale de la Chine de l’Est, 2007, p. 308.
5. Cao Jiaqi, Les Études historiques en Chine du XXe siècle, Pékin, Maison d’édition de Xiyuan, 2000,
p. 56.
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mouvement de la nouvelle littérature, des études sur les romans, les théâtres et
les littératures populaires prospérèrent. Pendant cette si courte période, les études
historiques en Chine ont fait des progrès remarquables, si bien que les recherches
générales ont évolué dans un sens de plus en plus spécialisé, et beaucoup d’hommes
de talent surgirent à cette époque-là6.
Les innovations des études historiques pendant cette période se révèlent dans
trois aspects : nouveaux documents, nouvelles questions et nouvelles directions.
Utiliser les nouveaux documents
Premièrement, ayant emprunté les méthodes d’études historiques du positivisme
occidental, les chercheurs de cette période, tinrent à mettre des documents en ordre
avec les méthodes scientifiques. Dans les Idées principales de l’histoire de la philosophie en Chine, Hu Shi (1891-1962) proposera d’« étudier tous les documents avec
les méthodes scientifiques et les idées précises et ensuite résumer les chemins de la
vie, les origines des pensées et les visages réels de leurs théories »7. Fu Sinian indiqua
que, selon lui, « l’histoire, c’est l’étude des documents ». Il appela les historiens à
faire de leur mieux pour collectionner des documents8.
Ces historiens insistèrent bien sur le fait qu’ils utilisaient de nouveaux documents. Wang Guowei (1877-1927) proposa d’utiliser le système de la « double
preuve », c’est-à-dire d’établir que les documents historiques et les vestiges culturels
mis à jour se vérifient l’un et l’autre ; par exemple, il utilisera des inscriptions oraculaires d’époque Yin et des inscriptions dans des anciens objets de bronze à confirmer des livres anciens comme Shiji《史记》ou
(
Mémoires historiques de Simaqian),
Shanhaijing 《山海经》
(
ou Livre des monts et des mers), Tchou-Chou-Ki-Nien
《竹书纪年》ou
(
Les Annales de Bambou) et Chuci (ou Les chants de Chu)9. En
étendant la « double preuves» de Wang Guowei, Fu Sinian proposera de considérer
que des documents directs et indirects sont également importants, que les notes du
fonctionnaire et du populace, de l’intérieur et de l’extérieur de Chine, éloigné et
proche se consultent, que les matériaux oraux et écrits soient également importants. Gu Jiegang, qui a lancé un mouvement des critiques de l’histoire ancienne,
collectionnera non seulement des sources de l’histoire officielle, mais aussi celles de
6. Gu Jiegang, Avant-propos, Gu Jiegang, L’Historiographie chinoise contemporaine, Shenyang, Maison
d’édition des éducations de Liaoning, 1998.
7. Hushi, Idées principales de l’histoire de la philosophie en Chine, Beijing, Maison d’édition de l’Est,
1996, p. 6.
8. Cao Jiaqi, Les Études historiques en Chine du XXe siècle, p. 122.
9. Ibidem, p. 101-102.
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CHINE - EUROPE Perceptions croisées
la chanson populaire, le dialecte, le proverbe, l’énigme, le livret, les us et coutumes
et la religion populaire10. En collectionnant les sources de ce dernier, méprisées par
l’élite lettrée, l’inspiration lui vint pour formuler, entre 1920 et 1923, une « théorie stratigraphique sur l’accumulation et la falsification de l’histoire de l’antiquité
chinoise en couches successives ». ChenYinke, quant à lui, mit l’accent sur les nouvelles sources et sur les nouvelles opinions qu’il attendait chaque fois que nécessaire
pour corriger ses articles11. Il excellera à utiliser des poèmes pour étudier l’histoire,
en élargissant ainsi beaucoup le champ des sources. En dehors des documents officiels, les fondateurs de l’histoire économique et sociale en Chine s’intéressèrent aux
documents populaires. Par exemple, pour démêler l’évolution et l’application de Yi
Tiao Bian Fa (The Single Whip Law), Liang Fangzhong (1908-1970) a étudié plus
de mille titres des chroniques locales qu’il avait collectionnées dans les différents
bibliothèques en Chine, au Japon et aux États-Unis12.
Poser les nouvelles questions
Non seulement les historiens de la nouvelle histoire comptèrent sur des documents, mais aussi ils s’attachèrent à « explorer les règles générales de l’histoire à
travers les relations mutuelles et les liens de cause à effet des choses »13. Hu Shi a
dit : « L’histoire a deux côtés, l’un est scientifique, qui fait attention à collectionner
et à arranger des documents ; l’autre est artistique, qui attache de l’importance à
raconter et à expliquer les événements historiques ». Chen Yinke a dit : « Ce qu’on
trouve est en fait une petite partie des documents que les ancêtres ont laissés. Si
on voulait guetter toute la structure des choses en s’appuyant sur ces fragments, il
nous faudrait avoir la vision et l’esprit avec lesquels les artistes goûtent des peintures et des sculptures de l’époque ancienne, et ensuite on pourrait comprendre ce
que les ancêtres ont dit ». C’est pourquoi Chen Yinke chercha souvent des pistes à
travers les poèmes des intellectuels pour témoigner des causes et conséquences des
grands évènements. Par exemple, dans son chef-d’œuvre, Biographe non-officiel de
10. Gu Jiegang, « Zixu (préf. de Gu) dans Gushibian I », Sur le chemin de l’histoire, l’égo-histoire de Gu
Jiegang, Beijing, Maison d’édition de l’Université Renmin de Chine, 2011, p. 48.
11. Huang Xuan, « En souvenir de Professeur Chen Yinke, souvenir fragmentaire d’une assistante de
quatorze ans de travail en commun », Actes du colloque international en souvenir du Professeur Chen
Yinke, p. 70.
12. Liu Zhiwei et Chen Chunsheng, « Les études de l’histoire sociale et économique de Monsieur
Liang Fangzhong », Journal académique en sciences sociales de l’Université Sun Yat-sen, n° 6, 2008,
p. 81, p. 73.
13. Liu Jianming, « Essai sur la méthode comparative de Monsieur Chen Yinke », Actes du colloque
international en souvenir de Professeur Chen Yinke, p. 237.
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Liu Rushi, ayant étudié des différents écrits des intellectuels à la fin de la dynastie
des Ming et au début de la dynastie des Qing, Chen Yinke a prouvé que la restauration des Ming avait progressé clandestinement avec le soutien de beaucoup
d’hommes convaincus14.
Liang Fangzhong, quant à lui, ne s’abîma pas dans des études critiques des textes,
par contre, il chercha toujours à explorer les règles du développement de la société
ancienne en Chine commençant par les questions en détail15. Par exemple, ayant
étudié l’application et l’influence de Yi Tiao Bian Fa (The Single Whip Law) dans les
différentes régions en Chine, Liang Fangzhong découvrit l’essence du changement
de la structure de la société dans les dynasties Ming et Qing, notamment par le fait
que Yi Tiao Bian Fa ait changé les valeurs et les modes de perception des impôts,
ce qui provoqua le changement des relations entre le gouvernement et le peuple et
renforcé la centralisation et la bureaucratie16.
Lancer de nouvelles directions
Grâce aux nouveau documents et à la méthode d’interdisciplinarité, les historiens de la nouvelle histoire ont lancé des nouvelles directions de recherche en
histoire telles que l’histoire sociale et économique, l’histoire culturelle, l’histoire des
femmes et l’histoire du folklore.
L’histoire sociale et économique se développa dans les années trente du XXe siècle
avec deux revues importantes comme le Journal de l’histoire sociale et économique et
Shihuo. La première génération des fondateurs s’incarna en Guo Moruo (18921978) et Tao Xisheng (1899-1988), qui ont jeté les bases pour les recherches sur
l’histoire sociale et économique en Chine. Influencé par Karl Marx et L.H.Morgan,
Guo Moruo a publié Essai sur la société ancienne en Chine. Ayant assimilé les connaissances des sciences sociales de toute espèce, Tao Xisheng a publié Les Analyses sur
la société chinoise, L’Histoire de la société féodale en Chine, L’Histoire économique du
Nord et du Sud Dynasties. Comme les représentants de la deuxième génération, Fu
Yiling (1911-1988) et Liang Fangzhong ont reçu les éducations de l’économie et de
14. Huang Xuan, « En souvenir de Professur Chen Yinke, souvenir fragmentaire d’une assistante
de quatorze ans de travail commun », Actes du colloque international en souvenir de Professeur Chen
Yinke, p. 70.
15. Tang Mingsui, Liu Zhiwei, « L’ impression après la lecture de Les supplémentaires des recueils des
articles sur l’histoire économique de Liang Fangzhong », Les Études sur l’histoire sociale et économique en
Chine, n° 2, 1985, p. 105.
16. Liu Zhiwei, Chen Chunsheng, « Les études de l’histoire sociale et économique de Monsieur
Liang Fangzhong », p. 66.
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Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
la sociologie. Travaillant sur l’histoire des dynasties Ming et Qing, les deux préconisèrent l’association de l’histoire sociale et l’histoire économique, firent attention
à la vie sociale du menu peuple et à « l’économie privée », critiquèrent les modes
narratives de l’histoire des évènements et des politiques qui furent très populaires à
cette période. Fu Yiliang mit l’accent sur les études des économies privées et attesta
l’histoire par les sources populaires, les folklores et les stèles. Combinant les anciens
livres des institutions et les changements du développement de l’économie et de la
société, Liang Fangzhong mena les recherches sur les divers domaines de l’histoire
sociale et économique en Chine17.
L’histoire culturelle est une nouvelle direction de la nouvelle histoire. Liang
Qichao, fondateur de l’histoire culturelle, a projeté de rédiger un gros volume de
L’histoire de la culture en Chine incluant les conflits culturels entre la nationalité
Han et les minorités nationales ainsi que leur influence, la convergence et l’influence mutuelle entre les autres nationalités culturelles dans le monde et la culture
chinoise, l’organisation politique de la nation chinoise, les classes et les corps de
la société traditionnelle en Chine, les caractéristiques de la langue chinoise et
son influence sur la culture, etc.18 En 1936-1937, la maison d’édition des affaires
commerciales a publié La série de l’histoire de la culture en Chine dirigée par Wang
Yunwu et Fu Weiping, incluant l’histoire des classiques en Chine, l’histoire du
Néoconfucianisme, l’histoire des mariages, l’histoire des peintures, l’histoire des
livres, l’histoire de l’épigraphie, etc., au total cinquante espèces. Dans les années
vingt et trente du XXe siècle, une série d’œuvres réputées sur l’histoire culturelle
ont été publiées, telles que La Culture chinoise et les soldats chinois écrite par Lei
Haizong, Les Ermites chinoises et la culture chinoise écrite par Jiang Xingyu, L’Histoire
des cultures européens répondues en Chine écrite par Jiang Tingyou19. Deux livres de
Chen Yinke, Essai de l’histoire politique de la dynastie des Tang et Aperçu des origines
des instituions dans les dynasties Sui et Tang, servent comme modèle de l’histoire
culturelle à cette époque. Considérant les races et les cultures comme l’essence du
problème de l’histoire et de la culture dans la dynastie des Tang, Chen Yinke posa
17. Yang Guozhen, « L’Assimilation et l’interaction : l’histoire économique et sociale occidentale et
l’école de l’histoire sociale et économique en Chine », Hou Jianxin (ed.), L’Histoire économique et
sociale : la nouvelle direction des études historiques, Beijing, Maison d’édition des affaires commerciales,
2002, p. 8.
18. Liang Qichao, « Les méthodes des études historiques chinoises », Quatre œuvres de Liang Qichao,
p. 111-112.
19. Zhou Jiming, « Essai de l’histoire culturelle en Chine du XXe siècle », Études historiques, n° 6,
1997, p. 123-124.
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L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
des notions importantes : « la politique des particularismes du centre de la plaine de
Shaanxi » ; « les systèmes des nationalités de non-han et de han » ; « les sangs et les
régions » ; lesquelles ont eu des grandes influences dans les milieux de recherche20.
Les études des populations féminines ont pris un place importante dans les
recherches de Chen Yinke. Il a publié une série des œuvres importantes sur les
femmes dans l’histoire chinoise dont les sujets sont vastes tels que les relations entre
l’origine de l’impératrice Wuzetian et le bouddhisme, la biographie non-officielle de
Liu Rushi. Dans ses œuvres, il a découvert l’esprit héroïque des femmes banales et a
dépeint les personnages emblématiques de l’esprit non-conformiste pour explorer
le style et l’apparence de leur époque21.
Gu Jiegang a posé la première pierre pour les études du folklore, en fondant
l’association des folklores et publiant deux revues L’art et la littérature populaire et
L’hebdomadaire des mœurs folkloriques. Il proposa à étudier les contes légendes, les
énigmes, les blagues, les superstitions, les étiquettes et coutumes, les conditions
climatiques des quatre saisons et les fêtes22. Utilisant maints exemples, il a étudié
les changements des contes et légendes de Dame Mengjiang dans les différentes
époques durant 2500 ans en Chine selon des documents et des sources populaires.
Selon lui, les intrigues de l’histoire de Dame Mengjiang changeaient sans cesse avec
les mouvements des centres culturels et connaissait des ajouts de nouveaux éléments
selon les changements d’époques23.
L’École des Annales
À la fin du XIXe siècle, influencées par l’historiographie de Ranke, les études historiques en France se sont développées en direction de la professionnalisation, avec
la Revue historique fondée par Gabriel Monod, le système de séminaire introduit
de l’Allemagne et un livre populaire sur la méthodologie historique Introduction
20. Cai Hongsheng, Regarder avec respect Chen Yinke, Beijing, Maison d’édition de Chine, 2004,
p. 31.
21. Ibidem, p. 14 ; Jiang Boqin, « Monsieur Chen Yinke et ses études sur l’histoire des mentalités en
lisant La biographie non-officielle de Liu Rushi », La Biographie non-officielle de Liu Rushi et les études de
la civilisation chinoise ancienne, les actes du colloque en souvenir de Professeur Chen Yinke, Hangzhou,
Maison d’édition du peuple de Zhejiang, 1995, p. 93-94.
22. Lǚ Jing, « Endurant des grandes difficultés dans les travaux de pionnier, Monsieur Gu Jiegang et
les études du folklore en Chine », Journal d’histoire, n° 3, 1993, p. 4-5.
23. Gu Jiegang, « Études des contes et des légendes de Dame Mengjiang », Gu Jiegang, Sur le chemin
de l’histoire, l’égo-histoire de Gu Jiegang, p. 176-183.
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Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
aux études historiques écrit par C.V. Langlois et C. Seignobos24. L’Histoire dite
positiviste en France s’éprend de l’histoire politique et militaire, exagère le rôle
des évènements, souligne l’importance des empereurs et des hommes politiques. Il
regarde les études historiques comme des simples travaux de collectionnement et
de rangement de documents25. L’historiographie de cette sorte a été critiquée par
certains chercheurs dont le plus représentatif est Henri Berr, fondateur de la Revue
de Synthèse historique (1900). Il proclama la nouvelle histoire et préconisa que l’histoire, reine des disciplines, devait prendre la responsabilité d’unir les différentes
disciplines. À son avis, l’histoire dite positiviste avait fait l’erreur de diviser le sujet
et l’objet et de diviser les pensées et le corps. Il pensa, par contre, que les pensées
avaient eu joué un rôle actif dans les analyses. En fait, toutes les connaissances sur le
passé sont le produit de la réglementation des pensées. C’est pourquoi il pensa que
l’histoire ait dû combiner avec la philosophie26. On trouve l’écho des propositions
d’Henri Berr chez deux jeunes historiens Lucien Febvre et Marc Bloc, les fondateurs de l’école des Annales.
En 1929, Lucien Febvre et Marc Bloc, professeurs à ce moment-là à l’Université
de Strasbourg, fondent la revue des Annales d’histoire économique et sociale avec les
nouvelles conceptions de l’historiographie que l’on peut résumer en trois points.
En premier lieu, l’histoire problématique se substitue à l’histoire narrative. Selon
ces deux historiens, « l’histoire n’est pas seulement une science du passé, mais aussi
une science du présent »27. C’est pourquoi, selon eux, les historiens doivent poser
des questions aux archives et établir des hypothèses. Ils promurent ensuite l’histoire
totale et pensèrent que les historiens devaient étudier toute la société dans laquelle
la politique, la structure sociale, l’économie et les croyances sont croisées28. Enfin,
pour réaliser les deux objectifs précités, ils proposèrent de briser les frontières
des disciplines et de travailler en coopération avec la géographie, la sociologie,
24. Guhang et Pang Guanqun, « La transmission de l’historiographie allemagne et la philosophie
historique en France du XIXe siècle et son influence », Journal de l’historiographie, n° 4, 2012,
p. 98‑100.
25. Paul Ricœur, Contribution de l’historiographie française à la théorie de l’histoire, trad. Wang Jianhua
(français en chinois), Maison d’édition de l’Académie des sciences sociales, Shanghai, 1992, p. 37.
26. Martin Siegel, “Henri Berr’s Revue de Synthèse Historique”,History and Theory, Vol. 9, n°3,
1970, p. 322-324.
27. Fernand Braudel, Écrits sur l’histoire, trad. (français en chinois) Liu Beicheng et Zhou Lihong,
Beijing, Maison d’édition de l’Université de Pékin, 2008, p. 76.
28. Paul Ricœur, Contribution de l’historiographie française à la théorie de l’histoire, p. 37-38 ; Marc
Bloch, Apologie pour l’histoire ou métier d’historien, trad. (français en chinois) Huang Yanhong,
Beijing, Maison d’édition du peuple de Chine, p.76.
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L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
la psychologie, l’économie, la linguistique et l’anthropologie. Comme l’affirmait
Lucien Febvre, « historiens, soyez géographes, soyez juristes aussi et sociologues
et psychologues, ne fermez pas les yeux au grand mouvement qui, devant vous,
transforme à une allure vertigineuse les sciences de l’univers physique »29.
Les trois générations des historiens des Annales ont brillamment réalisé ces propositions. Marc Bloch et Lucien Febvre, représentants de la première génération,
pratiquèrent vigoureusement l’histoire problématique. Bloch pensa que les historiens auraient dû remonter à la société du passé à partir du présent. En comparant
les fermes du nord de la France et les villages en Grande Bretagne, il trouve, par
exemple, que les terres à bandes sont très répondues dans la région de Picardie,
mais les pacages en Grande Bretagne sont divisés en de nombreuses parcelles par des
palis et paravents. À partir des faits actuels, il explora les raisons historiques pour
lesquelles les deux pays aient eu cette différence.30 La thèse de Febvre, Philippe II et
la Franche-Comté sert d’exemple pour étudier l’histoire totale de la société humaine,
en étudiant non seulement les conflits politiques à la fin du XVIe siècle, mais aussi
le paupérisme, le surpeuplement, l’augmentation des prix et les désastres naturels31.
Ils insistèrent également sur la collaboration de l’histoire avec d’autres disciplines.
D’après Febvre, beaucoup de succès de recherche ne sont pas le fait de l’intérieur et
du noyau de chaque discipline, mais du bord, du front et de la frontière commune
des disciplines32. C’est pourquoi les deux historiens se sont battus pour intégrer
les champs de la géographie, de l’économie, de la démographie et de la psychologie à l’histoire. Par exemple, Les Rois thaumaturges de Marc Bloch et Un Destin :
Martin Luther de Lucien Febvre servent d’exemple de la coopération entre histoire
et psychologie. Enfin, ils ont beaucoup élargi le domaine de sources historiques, en
mettant à jour des comptabilités pour l’histoire économique, des registres paroissiaux pour l’histoire de démographie, des bâtiments, des pierres tombales et des
vêtements pour l’histoire des mentalités.33
La deuxième génération des historiens des Annales représentés par Fernand
Braudel ont changé le titre de leur revue des Annales d’histoire économique et sociale
29. Georges Friedmann, « Lucien Febvre toujours vivant », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 12e année, n° 1, 1957, p. 4-5.
30. François Dosse, L’Histoire en miettes. Des Annales à la « nouvelle histoire », trad. (français en
chinois) Ma Shengli, Beijing, Maison d’édition de l’Université de Pékin, 2008, p. 56.
31. François Dosse, L’Histoire en miettes. Des Annales à la «nouvelle histoire», p. 65.
32. He Ping, L’Historiographie européene, Beijing, Maison d’édition des affaires commerciales, 2010,
p. 313.
33. Ibidem, p. 313-314.
208
Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
en Annales. Économies, Sociétés, Civilisations pour affirmer leur volonté d’élargir
davantage leur domaine de recherche et de propager l’histoire totale. Pour soutenir
les recherches interdisciplinaires, Braudel fonda la Fondation Maison des sciences
de l’homme (FMSH). La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de
Philippe II de Braudel est un modèle d’histoire totale, qui se divise en trois parties :
La premier partie expose les environnements géographiques de la région méditerranéenne ; La deuxième partie explore la condition économique de la région méditerranéenne ainsi que la forme socio-économiques et la façon de la guerre entre
L’Empire ottoman et l’Empire d’Espagne qui dominaient la méditerranée à cette
période ; La troisième partie enfin, celle de l’histoire traditionnelle, c’est-à-dire l’histoire politique et militaire, en évoquant le processus de contestation de l’hégémonie
par ces deux empires. Ces trois parties correspondent aux trois différents temps
historiques, à savoir le temps géographique, le temps social et le temps individuel
que Braudel aura nommés ensuite les multiples dimensions de la durée historique
telles que la longue durée, la moyenne durée et la courte durée. La théorie de trois
durées de Braudel, une contribution remarquable pour l’historiographie, indique
sa réflexion profonde sur les notions de la cause et l’effet et de loi historique, ce qui
est un choc sur l’histoire narrative34.
La troisième génération des historiens des Annales représentés par Jacques Le
Goff, Emmanuel Le Roy Ladurie, Marc Ferro est monté aux première loges après le
mouvement du mai 1968. À ce moment-là, une transformation profonde se déploya
dans les milieux des recherches dans le monde occidental, et beaucoup de nouvelles
disciplines apparurent telles que la nouvelle économie, la linguistique moderne, la
sociologie historique, la géographie historique et l’anthropologie historique, etc.
Afin d’assurer la domination de l’histoire dans cette nouvelle tendance de la révolution des connaissances, cette génération d’historiens poussa le mouvement de la
nouvelle histoire pour promouvoir de nouveaux problèmes, de nouvelles méthodes
et de nouveaux objets. En examinant les nouveaux domaines comme les mentalités,
les représentations, l’écologie, et les actions humaines, ils inaugurèrent une série
des nouvelles directions de recherche telles que l’histoire du climat, l’histoire de la
mort, l’histoire des fêtes, l’histoire des enfants, l’histoire des femmes, l’histoire des
livres, l’histoire de l’alphabétisation et l’histoire de la mémoire35. Ils ont hérité la
34. Paul Ricœur, Contribution de l’historiographie française à la théorie de l’histoire, p. 38,40.
35. Quant au détail de la nouvelle histoire en France, vr. Lü Yimin, « Commentaire de la nouvelle
histoire en France », Sciences sociales de Zhejiang, n° 5, 1992. Le professeur Lü Yimin pense que
la nouvelle histoire en France est un mouvement intellecutuel dont les participants viennent non
seulement de l’ école des Annales, mais aussi du camp de l’histoire traditionnelle et de celle marxiste.
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L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
théorie de la longue durée de Braudel et utilisé l’histoire quantitative pour explorer
les diverses structures dans l’histoire et les phénomènes qui sont quasi immobiles
mais qui ont des influences profondes. L’École des Annales commença à avoir la
haute main sur les recherches historiques en France depuis l’époque de Braudel.
Mais jusqu’à l’époque de la troisième génération, cette école fut reconnue dans le
monde, parce que la plupart des historiens maîtrisaient l’Anglais, ce qui leur permit
de nourrir des relations intimes avec les historiens américains, anglais, russes, etc. Ils
furent invités à participer aux colloques étrangers, à donner des conférences internationales, et leurs œuvres ont été traduites en plusieurs langues. Corrélativement,
la Fondation Maison des sciences de l’homme (FMSH) invita régulièrement des
chercheurs de premier classe dans le monde à Paris pour poursuivre des recherches
interdisciplinaires.
Les points communs entre la nouvelle histoire en Chine et l’école
des Annales en France
Même si la nouvelle histoire en Chine et l’école des Annales en France apparurent dans deux pays différents et n’eurent pas d’échanges directs, ils eurent cependant beaucoup de points communs. En premier lieu, les deux promurent l’histoire
totale qui englobe tous les aspects de la vie humaine et met l’accent sur le peuple
ordinaire et le prolétariat. Ensuite, les deux préconisèrent des recherches interdisciplinaires. Liang Qichao postula que l’histoire avait des liens intimes avec la géographie, la géologie, l’ethnologie et l’anthropologie, etc. Gu Jiegang, Chen Yinke
et Fu Yiling pratiquèrent l’interdisciplinarité des recherches en abordant l’histoire
respectivement par les folklores, les poèmes et les coutumes. Quant à l’école des
Annales, les trois générations d’historien ont agrandi l’un après l’autre le terrain
d’histoire en combinant la géographie, la psychologie, la sociologie, l’économie et
l’anthropologie pour découvrir de nouveaux sujets. Troisièmement, les deux écoles
utilisèrent les nouveaux documents et les nouvelles méthodes. Se présentant au
moment opportun des grandes découvertes archéologiques, les historiens chinois
ont utilisé des dépouilles préhistoriques, des inscriptions oraculaires d’époque Yin
(XIVe-XIe siècles avant Jésus-Christ) et des anciens ustensiles en cuivre pour étudier
l’histoire ancienne de la Chine. L’école des Annales en France souligna également
l’utilisation des nouvelles sources. Emmanuel Le Roy Ladurie a collectionné les
données de dendrochronologie, de glacier, des vendanges pour étudier l’histoire
du climat en Europe. Michel Vovelle a collectionné des testaments pour explorer
la déchristianisation en Provence au XVIIIe siècle. Maurice Agulhon a approfondi
la transmission du sens du républicanisme au XIXe siècle en France à travers les
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Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
statues de Marianne. Mona Ozouf, quant à elle, a fait des recherches sur les cérémonies des festivals dans son livre La Fête révolutionnaire. La nouvelle histoire en
Chine et l’école des Annales en France ont essayé d’utiliser les nouvelles méthodes,
surtout la méthode quantitative. Au début du XXe siècle, Liang Qichao a déjà rendu
compte de l’histoire quantitative, qui ensuite a pratiqué cette méthode pour étudier
la propagation du christianisme en Chine et les immigrations de toutes les dynasties
dans l’histoire chinoise36. En raison de sa supériorité en matière de description de
« l’histoire quasi immobile », l’histoire quantitative a été universellement pratiquée
par la troisième génération de l’école des Annales pour explorer l’évolution du
climat, la transmission des livres, le processus de déchristianisation.
Enfin, La nouvelle histoire en Chine et l’école des Annales en France accentuèrent les liens entre le présent et le passé. Selon Liang Qichao, « l’objectif des
historiens, c’est de laisser des nationaux connaitre les liens intimes entre la vie du
présent et celle du passé et de l’avenir »37. Chen Yinke dit souvent qu’il faut chercher
des expériences dans l’histoire. Comme historien, il pense toujours les questions
actuelles telles que les raisons de la prospérité et de la ruine de toutes les dynasties
dans l’histoire chinoise, les relations entre la Chine et les nationalités frontières, les
transformations des institutions de toutes les dynasties dans l’histoire chinoise et les
raisons pour lesquelles la culture chinoise pourrait durer si longtemps38. Quant à
l’école des Annales qui préconise l’histoire problématique, elle souligna d’avantage
les relations intimes entre le passé et le présent. Selon Marc Bloch : « parfois, dans
certains directions, les connaissances du présent sont plus directes pour comprendre
l’importance du passé »39. D’après Fernand Braudel, l’histoire est l’enfant de son
temps40.
Les points communs, ne pourraient certainement pas couvrir les différences
entre eux. Par exemple, l’école des Annales met en cause l’historiographie « positiviste » qui a pourtant favorisé la nouvelle histoire en Chine. La nouvelle histoire en
36. Xu Guansan, La nouvelle histoire de quatre-vingt- dix ans, Changsha, Maison d’édition de Yuelu,
2003, p. 56-57.
37. Liang Qichao, « Les méthodes des études historiques chinoises », Quatre œuvres de Liang Qichao,
p. 109.
38. Bian Senghui (ed.), Biographie suivant les chroniques historiques de Monsieur Chen Yinke, Beijing,
Maison d’édition de Chine, 2010, p. 58.
39. Marc Bloch, Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien, trad. (français en chinois) Huang
Yanhong, p. 59-60.
40. Fernand Braudel, Écrits sur l’histoire, trad. (français en chinois) Liu Beicheng et Zhou Lihong,
Beijing, Maison d’édition de l’Université de Pékin, 2008, 2e éd. 2009, p. 6.
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L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
Chine suivit les idées historiques du progrès, par contre, l’école des Annales brisa
les ordres narratifs et posa la théorie de trois durées attachant de l’importance à la
structure et à la tendance. L’école des Annales est une école cohérente transmise
sur plusieurs générations, les historiens de la nouvelle histoire en Chine sont eux
très divisés, ayant même des conceptions différentes sur la nouvelle histoire41. Bien
sûr, explorer ces différences n’est pas l’objet de cet article, mais en quoi la nouvelle
histoire en Chine influencée par l’historiographie dite positiviste, a des points communs avec l’école des annales laquelle met en cause l’historiographie « positiviste » ?
Je voudrais essayer d’éclaircir ce paradoxe.
En premier lieu, l’historiographie « positiviste » est seulement une des origines
des pensées des historiens chinois en dehors de laquelle ils sont beaucoup influencés
par la conception de l’histoire civilisationnelle. L’histoire civilisationnelle, apparue
au XVIIIe siècle avec Voltaire comme fondateur, proposa que les études devaient dépasser les frontières de la politique et des affaires militaires et explorer la culture, les
mœurs et coutumes. Au XIXe siècle, avec les efforts de François Guizot, de Henry
Thomas Buckle et de Jacob Christoph Burckhardt, l’histoire de la civilisation a élargi de plus en plus son domaine de recherche, pris en considération la coopération
interdisciplinaire, adopté la statistique des données et l’analogie de l’économie, la
méthode des images de l’art, les métaphores de la littérature, et même l’hypothèse,
l’observation, l’analogie, l’analyse et la synthèse des sciences naturelles42. Dans la
deuxième partie du XIXe siècle, la conception occidentale de l’histoire de la civilisation a été transmise au Japon où surgit une vague de publications sur l’histoire
générale de la civilisation, telle que L’histoire de la civilisation au Japon. Au début du
XXe siècle, poussé par le courant de la nouvelle histoire et l’éducation historique des
écoles, les intellectuels chinois commencèrent à traduire des œuvres sur l’histoire
de la civilisation à travers le Japon43, ce qui a beaucoup favorisé le mouvement de
la nouvelle histoire. En absorbant la conception de la civilisation en Europe, les
intellectuels comme Liang Qichao ont formé l’idée de l’histoire totale qui exige
l’élargissement de la vision de l’histoire et l’utilisation des méthodes interdisciplinaires. Semblablement, l’école des Annales en France vient de la même lignée de
l’histoire de la civilisation, ce qui lui permet de marcher dans le même chemin que
la nouvelle histoire en Chine.
41. Vr. Sang Bing, « La nouvelle histoire de la Chine moderne et sa transformation », Revue de la
science historique, n° 11, 2007.
42. Fu Qiong, « Essai sur l’histoire de la culture de l’Europe », thèse de l’Université de Fudan, 2008,
p. 109.
43. Li Xiaoqian, La Transmission des études historiques occidentales en Chine, p. 71.
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Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
Ensuite, l’antagonisme entre historiographie « positiviste » et école des Annales
n’est pas aussi grave qu’on puisse l’imaginer. Les méthodes pour vérifier des documents que pose l’historiographie « positiviste » ont créé les fondations pour une
spécialisation de l’histoire, ce qui est essentiel pour les études historiques de l’école
des Annales. Semblablement, même si l’historiographie « positiviste » soutient que
toutes les recherches sont fondées sur les documents, elle ne refuse pas de « deviner ». Par exemple, Langlois et Seignobos ont écrit dans l’Introduction aux études
historiques : « à partir des faits que les documents nous offrent, on essaie d’utiliser
la méthode qui permet de deviner un nouveau fait. Si cette méthode est correcte,
c’est une méthode juste et légitime pour obtenir les connaissances »44. Même si Fu
Sinian et Chen Yinke sont souvent classés comme appartenant à l’école de la critique des documents, le premier a des réflexions systématiques sur l’historiographie,
le second pratique également de l’histoire problématique. En fait, le classement
entre historiographie « positiviste » et historiographie problématique et celui entre
école de la critique des documents et école de la théorie historique est arbitraire.
Selon le Professeur Sang Bing, le critique des documents et la théorie historique
ne sont pas antinomiques, mais complémentaires. Le processus de collection des
documents permet aussi de découvrir les relations inhérentes entre les choses45. Les
milieux de recherche en France sont également en train de réfléchir aux étiquettes
qu’on a affublées à l’historiographie « positiviste » telles que « l’histoire narrative »,
« l’histoire des évènements » en niant ses liens avec l’école des Annales46.
L’historiographie « positiviste » et l’école des Annales pratiquèrent effectivement
la course de relais dans la voie de la modernisation des études historiques. Celle-là jeta
la base scientifique et professionnelle pour les études historiques, ce dernier chercha
les outils et les méthodes dans les autres sciences sociales, et légitima l’histoire par
l’attention portée à l’actualité, et anima enfin l’histoire par le dialogue incessant avec
les documents. Les deux écoles furent le champ expérimental de l’historiographie
moderne dont les caractéristiques communes telles que la conception de l’histoire
totale et l’intégration des disciplines sont devenus les caractéristiques essentielles
de l’historiographie moderne47. Seulement pour les études historiques en France,
44. C.V. Langlois, C. Seignobos, Introduction aux études historiques, trad. (français au chinois) Li
Sichun, Beijing, Maison d’édition de l’Université du peuple de Chine, 2011, p. 138.
45. Sang Bing, « Une Analyse de la proposition de Fu Sinian “L’histoire est seulement les études des
documents” », Revue de l’histoire chinoise moderne, n° 5, 2007, p. 29, p. 31-32.
46. Antoine Prost, « Charles Seignobos revisité », Vingtième Siècle, n° 43, juillet-septembre 1994.
47. Wang Xuedian (ed.), Introduction de l’historiographie, Beijing, Maison d’édition de l’Université
de Pékin, 2008, p. 285, p. 311.
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L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
le chemin vers l’historiographie moderne a été pratiqué par deux écoles et au
moins deux générations d’historiens. Par contre, en Chine, une seule génération
d’historiens des années vingt et trente a couvert deux pas, c’est-à-dire, le premier,
de l’historiographie traditionnelle à l’historiographie « positiviste », le deuxième, de
l’historiographie « positiviste » à l’histoire totale.
Enfin, pourquoi les historiens de la nouvelle histoire en Chine ont fait jaillir
des capacités créatives et synthétiques si exceptionnelles dans un laps de temps si
court ? On pourrait attribuer ce phénomène à leur époque de formation dotée de
circonstances exceptionnellement favorables. Cette génération d’historiens nés dans
une époque où l’examen impérial n’avait pas été annulé, connurent l’expérience
d’apprendre Les Quatre Livres et Les Cinq Classiques dans l’école privée de la Chine
traditionnelle. Dans leur jeunesse, ils ont eu la chance de rencontrer une époque
ouverte et réformatrice, et c’est pourquoi beaucoup de jeunes gens parmi eux sont
partis en Europe et aux États-Unis pour faire des études. Et comme, ils jetèrent une
base solide d’étude de la civilisation chinoise ancienne, ils surent comment utiliser
et sélectionner les pensées et méthodes occidentales, lorsqu’ils les rencontrèrent
Chen Yinke commença par exemple à faire des études à l’école privée à l’âge de
sept ans. Six ans après, il était parti au Japon pour faire des études. À l’âge de vingt
ans, il était en Allemagne. Durant sa jeunesse, il a fait des études successivement à
l’Université de Berlin, de Zurich, de Paris et à Harvard. Lorsqu’il rentra en Chine
pour obtenir le poste de professeur à l’Académie d’Études nationales de Tsinghua,
il possédait déjà une connaissance interculturelle sino-occidentale48. Gu Jiegang a
lu également Les Quatre Livres et Les Cinq Classiques depuis sa plus tendre enfance,
et écouté de plus beaucoup de contes populaires chez ses grands-parents, ce qui lui
donna l’intérêt pour l’histoire. Ensuite, il est entré à l’école de type nouveau pour se
familiariser avec les idées scientifiques. En 1913, il a réussi l’examen pour entrer à la
classe préparatoire de l’Université de Pékin. Ayant assisté à la conférence de Zhang
Taiyan, il eut envie d’effectuer le travail d’étude historiographique de la civilisation
chinoise ancienne. Puis il appris la méthode de l’historiographie occidentale grâce
aux cours d’histoire de la philosophie chinoise de Hu Shi. Après cela, il fut assistant
à l’Institut d’étude de la civilisation chinoise ancienne à l’Université de Pékin où il
consulté des inscriptions oraculaires d’époque Yin et des copies de manuscrits de
Dunhuang, ce qui l’amena à étudier l’histoire ancienne essentiellement à travers
des objets matériels. Gu Jiegang lui-même attribua l’achèvement de sa formation
48. Bian Senghui (ed.), Biographie suivant les chroniques historiques de Monsieur Chen Yinke, p. 37-91.
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Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
d’historien dans l’étude de l’histoire ancienne à la coïncidence des occasions offertes
par la tendance actuelle, du caractère individuel et de la situation49.
Précisions nécessaires
On peut avancer que s’il n’y avait pas eu de guerre avec le Japon (1937-1945),
ni de guerre civile entre le Kuomintang et le Parti communiste, ni de mouvements
politiques après la fondation de la République populaire de Chine, les études historiques en Chine se seraient développées plus rapidement et favorablement à partir de ce point de départ si éclatant des années vingt et trente. Mais en réalité, le
mouvement de la nouvelle histoire en Chine a été frustré après les années trente et
quarante, montrant ainsi que le développement des études historiques ne pourrait
pas se séparer des autres sciences sociales et des environnements institutionnels
favorables. La situation de l’école des Annales contrastait avec celle de la nouvelle histoire en Chine. Après la deuxième guerre mondiale, les sciences sociales
telles que l’économie, la sociologue, la psychologie se développèrent rapidement
en France. En dialoguant avec ces sciences sociales, l’école des Annales ne cessa pas
d’élargir son domaine de recherche. Braudel pensa que l’histoire pouvait prendre
une responsabilité plus grande, « Pour le moment, l’historien devrait viser au rassemblement des sciences de l’homme (peut-on leur fabriquer, grâce à l’informatique, un langage commun ?) plus qu’au perfectionnement de tel ou tel chantier.
L’historien de demain fabriquera ce langage – ou il ne sera pas »50. « La longue
durée » est une langue commune que Braudel proposa pour rassembler les sciences
de l’homme. En vue de pousser l’interdisciplinarité, Braudel créa l’EHESS et la
FMSN où les historiens de la troisième génération des Annales élevèrent le drapeau
de la nouvelle histoire en inaugurant les nouvelles directions telles que l’histoire des
femmes, l’histoire du climat, l’histoire de la mort et l’histoire de la mémoire. C’est
précisément à partir du milieu des années cinquante que la République populaire
de Chine renforça à la fois les recherches sur l’histoire politique, l’histoire des
événements et l’histoire de la guerre et réprima l’histoire sociale, l’histoire culturelle et l’histoire des mentalités. L’école de la théorie historique occupait une place
favorable, et la lutte des classes était devenue une tâche centrale. En conséquence,
les études historiques ont été beaucoup politisées. La sociologie, l’anthropologie et
la psychologie ont été abandonnées au même titre que la culture occidentale. Après
49. Gu Jiegang, Préface de Gushibian, Shijiazhuang, Maison d’édition de l’éducation de Hebei, 2000,
p. 22-96.
50. Fernand Braudel, Écrits sur l’histoire, Paris, Flammarion, 1969, p.7.
215
L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
la rupture avec l’Union soviétique dans les années soixante, les milieux des études
historique en Chine ont totalement fermé leur porte51.
Malgré tout, les études historiques en Chine n’étaient pas dans un état de stagnation. Certaines recherches continuèrent encore dans les fentes. D’abord, l’histoire sociale et économique se développa dans une situation difficile. Après 1949,
Fu Yiling s’est plongé dans les recherches sur les questions essentielles telles que « les
embryons du capitalisme en Chine » et « le long piétinement de la société féodale
en Chine ». Liang Fangzhong, quant à lui, insista sur l’indépendance académique et
sur la scientificité académique : d’un côté, il étudia la nature de la société chinoise
à partir de l’histoire de l’impôt foncier dans la dynastie des Ming; de l’autre, il
collectionna des sources sur les registres de l’état civil, les champs, et les impôts
fonciers qui avaient favorisé les études quantitatives de l’histoire de l’économie52.
Ensuite, l’étude critique des textes et la paléographie se sont transmis de génération
en génération. Par exemple, après 1949, Gu Jiegang étudiait sans cesse Le Livre
chinois ancien (Shangshu), Chen Yinke étudiait Liu Rushi, Yang Shuda étudiait Le
livre de la précédente dynastie des Han (Hanshu). Enfin, les travaux de collection à
grande échelle des documents progressaient ponctués par L’Histoire comme un miroir (Zizhitongjian) et Les Vingt-quatre histoires, en modifiant Les cartes de la Chine
de toutes les dynasties de Yang Shoujing et en éditant La Collection de livres des sources
de l’histoire moderne en Chine53.
Depuis les années quatre-vingt, les études historiques présentent une image de
prospérité. Le point important des milieux de recherche s’est transféré des pensées
aux recherches, de l’argumentation d’un écrit à l’étude critique des textes. Chen
Yinke, Gu Jiegang et Fu Sinian sont devenus les idoles des jeunes chercheurs. Les
succès des historiens de la nouvelle histoire ont été redécouverts par les recherches
de la génération plus jeune. Par exemple, l’école de l’histoire sociale et économique
inaugurée par Fu Yiling et Liang Fangzhong connaît des successeurs, dont Chen
Chunsheng et Liu Zhiwei de l’Université Sun Yat-sen, sont les représentants parmi
les plus remarquables. Les deux fondèrent l’Institut de l’anthropologie historique
à l’Université Sun Yat-sen en faisant l’enquête dans le delta de la rivière de Perles
et dans le delta de la rivière de Han pour explorer les questions telles que le clan
51. Wang Xuedian, « Quelques tendances principales de l’historiographie de la Chine continentale
durant vingt ans récent », Sciences sociales de Shandong, n° 1, 2002, p. 91.
52. Liu Zhiwei, Chen Chunsheng, « Les études de l’histoire sociale et économique de Liang
Fangzhong », p. 72, p. 81.
53. Wang Xuedian, « L’historiographie chinoise de cinq derniers décades », Recherche historique, n° 1,
2004, p. 177-180.
216
Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
CHINE - EUROPE Perceptions croisées
patriarcal, la religion populaire, les coutumes, les organisations sociales locales et la
mode de la vie en campagne. De plus, ils travaillent à la combinaison des champs
de recherche et de l’analyse des documents, la recherche diachronique et l’analyse
conséquente, la recherche des institutions de l’État et la recherche de la société de
base en explorant le développement et le mécanisme de la société des dynasties
Ming et Qing54.
En même temps, depuis la réforme et l’ouverture, avec la recommandation des
chercheurs tels que Zhang Zhilian, Yao Meng et Lü Yimin, l’école des Annales s’est
amplement diffusée dans les milieux de recherche en Chine. Jusqu’à maintenant,
la majorité des œuvres des historiens représentatifs de l’école des Annales ont été
traduites en chinois. De plus, les œuvres en étudiant l’école des Annales telles que
The French Historical Revolution, The Annales School, 1929-1989 de Peter Burke et
L’Histoire en miettes, des Annales à la « nouvelle histoire » de François Dosse ont été
également traduites en chinois. Ces dernières années, les chercheurs en histoire
mondiale en Chine ont publié une série d’articles de haute qualité et les étudiants
de maîtrise et les doctorants ont choisi l’école des Annales comme sujet-titre de leur
mémoire ou de leur thèse55. Pourtant, il manque encore quelque chose pour que ce
soit complet, parce que la plupart des articles mettent l’accent sur la transmission
et sur l’influence de l’école des Annales en Chine, mais négligent les succès de la
nouvelle histoire comparable à ceux de l’école des Annales56.
54. Chen Chunsheng, « La recherche de l’histoire sociale en Chine doit attacher de l’importance à la
recherche sur champs », Recherche historique, n° 2,1993, p. 12 ; Chen Chunsheng, « Marcher vers le
champ historique », Lire, n° 9, 2006, p. 23.
55. Voir les articles sur l’école des Annales, Zhu Heshuang, « Les recherches sur l’anthropologie
historique de l’école des Annales », Historiographie trimestrielle, n° 4, 2003 ; Wang Jinxin, « Henry
Pirenne et l’école des Annales », Civilisations antiques, n° 4,2007;Gao Guorong, « l’école des
Annales et l’histoire des environnements », Historiographie trimestrielle, n° 3, 2005. Quant aux
thèses sur l’école des Annales, vr. Pan Jianghong, « Essai de l’école des Annales », Université normale
de la capitale, 2013 ; Wang Wei, « Essai de l’historiographie de Fernand Braudel », Université de
Fudan, 2012 ; Zhang Zhengming, « Les significations de l’historiographie de l’école des Annales »,
Université de Heilongjiang, 2010. Quant aux mémoires sur l’école des Annales, voir, Chen Jian,
« Essai sur l’histoire de la culture-mentalité de la première période de l’école des Annales », Université
normale de la capitale, 2012 ; Liu Xuan, « La méthode interdisciplinaire de l’école des Annales »,
Université normale du Nord-Est de Chine, 2011; Yuan Lili, « Les images variables de l’école des
Annales », Université normale de l’Est de Chine, 2010 ; Chen Xi, « la transformation de la notion de
la “structure” de l’école des Annales », Université normale du Nord-Est de Chine, 2010.
56. Les articles qui négligent les réussites de la nouvelle histoire en Chine sont ceux de l’histoire
mondiale. En fait, ces dernières années, certains chercheurs d’autres domaines de recherche ont déjà
intégré les ressemblances entre l’école des Annales et la nouvelle hisoire en Chine. Vr. les articles tels
que Chen Feng, « Tomber d’accord sans s’être concertés, l’école des Annales et les pensées de la nouvelle
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L’identité intellectuelle de deux écoles historiques Géostratégiques n° 42 • 2e trimestre 2014
Depuis les années quatre-vingt-dix, l’historiographie occidentale a fait l’expérience du tournant linguistique. En face de la crise, l’école des Annales a réglé de
nouveau la relation entre l’histoire et les sciences sociales en changeant le sous-titre
de leur revue en « L’histoire et les Sciences sociales ». Si les études historiques en
Chine peuvent offrir des contributions originales, il ne leur faut pas seulement absorber des pensées historiques occidentales et la conception occidentale des sciences
humaines, mais aussi réveiller la tradition de la recherche en Chine ainsi que pousser le processus de localisation des théories historiques. 语 助 手
histoire de Liang Qichao », Lire, n° 12, 1993 ; Yang Guozhen, « L’Assimilation et l’interaction :
l’histoire économique et sociale occidentale et l’école de l’histoire siociale et économique en Chine »,
Hou Jianxin (ed.), L’Histoire économique et sociale, la nouvelle direction des études historiques, Beijing,
Maison d’édition des affaires commerciales, 2002 ; Song Xueqin, « La comparaison entre les pensées
de “la nouvelle histoire” de Liang Qichao et celles de Marc Bloch », Sciences sociales de Shandong,
n° 3 2012 ; Chen Zhiping, « Essai du chemin de l’histoire sociale et économique inaugurée par Fu
Yiling, mémoires de la causerie sur la publication des œuvres de Fu Yiling », L’histoire économique de
Chine, n° 1,2009.
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