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D’autre part, le théâtre c’est l’art de l’ici et maintenant. Conçu comme texte et
comme représentation le théâtre est surtout un art du présent et d’une présence :
présence des comédiens sur scène et présence des spectateurs dans la salle. Cette
réalité des spectateurs dans la salle (au cinéma il y des spectateurs mais
invisibles car la pellicule ne sent pas leur présence) contraint les metteurs en
scène à prendre en compte leur réalité sociales et culturelle. La pièce de théâtre
ne peut être reçue de la même manière par des publics différents. Le texte qui ne
constitue qu’un argument du spectacle ou comme le considère Otacar Zich « un
élément n’ayant aucune primauté » 2est abordé différemment par chaque
metteur en scène en fonction de sa culture, de son public, de sa vision du monde.
Nous voici donc en plein processus d’un interculturalisme conscient ou
inconscient mais qui laisse quand même des traces sur le produit final qui est le
spectacle à voir. C’est un dialogue perpétuel entre les différent acteurs de la
production d’une pièce de théâtre : nous visons par acteurs les agents de la
production : les techniciens, les artistes et le texte.
Tout le monde l’atteste, en Algérie dès son origine, le théâtre est l’art de l’autre,
de l’ennemi. C’est une pratique importée par des français pour des français. Les
algériens avaient adopté cette pratique qu’ils ne maîtrisaient pas encore. A ce
propos Sid Ali Sellali écrit dans son ouvrage L’aurore du théâtre
algérien : « nous sommes redevables à l’art dramatique français dont nous
avons adopté la technologie pour créer un théâtre national algérien au sens vrai
du terme. »3Les hommes de théâtre à l’époque ne connaissaient que Molière
qu’ils avaient largement traduit simplement ou dans certains adapté. Dans le cas
de Sellali dit Allalou, il a monté la pièce qui signa la véritable naissance du
théâtre algérien : Djéha. Cependant il s’est toujours servi du moule européen,
c'est-à-dire la salle à l’italienne en U. nous sommes ici en présence d’une
technologie, d’un art importé mais ayant un contenu algérien car utilisant un
2L’esthétique de l’art et du drame
3Sid Ali Sellali, L’aurore du théâtre algérien, Oran, cahiers du C.D.H.S N° 9 1982, p 58