Il s’agit ici de lire le rapport d’expertise collective de l’Inserm paru en 20071 inti-
tulé Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie - Bilan des données scientifiques. Ce rapport, qui
a suscité moins de réactions que celui sur les troubles des conduites, procède pourtant
de la même démarche et s’appuie sur les mêmes présupposés idéologiques. Essayons
d’en résumer les 700 pages dans lesquelles les hypothèses voisinent avec les approxima-
tions, notamment en ce qui concerne la recherche d’une causalité organique néanmoins
affirmée.
Dans une première partie le rapport retient la dénomination « dyslexie » appli-
quée à un trouble spécifique répertoriée dans la classification internationale comme
« Trouble spécifique de la lecture ». C’est donc le fait qu’il soit isolé qui justifie la démarche
consistant à rechercher une cause spécifique. Plusieurs théories sont exposées (visuelles,
magnocellulaire, cérébelleuse…), mais les experts penchent pour une cause génétique
alors qu’aucun marqueur n’est identifié.
Les termes régulièrement rencontrés dans l’exposé des diverses théories tels que
« probablement », « largement », « potentiellement », ainsi que le conditionnel souvent
employé devraient conduire les experts à une plus grande prudence dans leurs conclu-
sions. Pourtant, ils n’hésitent pas à affirmer qu’« un dysfonctionnement du développe-
ment d’aires cérébrales normalement impliquées dans la représentation et le traitement
des sons de la parole est l’hypothèse admise pour la dyslexie »2. Ainsi pouvons-nous lire
in fine que « la dyslexie a pour explication un déficit cognitif, qui a lui-même [nécessai-
rement] une base cérébrale. Ce déficit est probablement congénital, d’origine largement
génétique, avec toutefois des facteurs pré et périnatals potentiellement impliqués dans
un certain nombre de cas, et une large part d’interaction gènes-environnement »3.
S’ils reconnaissent qu’il n’y a pas suffisamment de preuves à l’appui de ces théories,
cela ne les empêche pas d’affirmer l’organicité : « Il est notablement établi que l’expres-
sion de la dyslexie résulte à la fois de dysfonctionnements cérébraux et cognitifs (dont
les causes peuvent être multiples) et de l’influence de nombreux facteurs environne-
mentaux »4. Les experts pronent ainsi une causalité exclusivement organique, tout en y
incluant le vaste fourre-tout des « facteurs environnementaux ».
Après avoir affirmé l’existence d’un trouble spécifique pour valider la cause orga-
nique, nous apprenons que ce n’est pas si simple, car la dyslexie est souvent associée à
d’autres troubles : tdha, troubles émotionnels, troubles comportementaux. La dyslexie
s’inscrit dans ce qu’ils appellent une « véritable comorbidité » qui laisse ouverte « la
question de la pluralité et de l’interaction des déterminismes », tous référés bien sûr à
1 Expertise collective de l’Inserm. Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie - Bilan des données scientifiques.
Paris, Éditions inserm, 2007. http://www.ladocumentationfrançaise.fr/rapports-publics/074000190/
index.shtml
2
Ibid., p. 701.
3 Ibid., p. 513.
4 Ibid., p. 702.
par Maryse Roy
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