Le Messager Céleste, novembre 2014 page 3
Méthode simple pour
mesurer votre champ visuel
Dans le numéro d’octobre du
Messager Céleste, Jean-Claude vous
a décrit différentes méthodes pour
chercher un objet dans le ciel. La re-
cherche en soi constitue un des plus
grands plaisirs de l’astronome ama-
teur. Quand on utilise la méthode du
saute-étoile plurôt que le Go To (qui a
aussi certains avantages), on apprend
son ciel et, en prime, on fait souvent
des découvertes inattendues : une
étoile double par ci, un astérisme par
là, ou encore une étoile rouge
éblouissante, sans oublier tous les
objets insoupçonnés dans l’entourage
immédiat de l’objet que l’on cherche.
La méthode est assez simple. Avec le
telrad et un oculaire donnant un faible
grossissement, on vise l’étoile visible
à l’oeil nu la plus rapprochée de l’objet
recherché, puis, on se rapproche pas à
pas dudit objet jusqu’à ce qu’on
l’atteigne. Évidemment, il faut savoir
la distance (en degrés) de l’étoile vi-
sible qu’on a visée et l’objet recherché.
Par exemple, sachant que M27 se situe
à 3° au nord de l’étoile formant la
pointe de La Fèche, on vise cette
dernière et, l’oeil à l’oculaire, on se
déplace de 3° vers le nord, en direc-
tion de l’étoile polaire. Mais comment
fait-on pour savoir ce que représentent
3° dans l’oculaire?
Si le champ de votre oculaire couvre
1°, il suffit de se déplacer 3 fois de de
ce champ. Il faut donc savoir quel
champ couvre l’oculaire utilisé avec
votre instrument. S’agit-il de 2°, 1° ou
moins ? Pour le savoir, une première
méthode implique un petit calcul mais
cette méthode ne donne qu’un résultat
approximatif.
Sur chaque oculaire, en plus de la
longueur focale, la largeur du champ
apparent est inscrite. Le champ appa-
rent, c’est l’angle de vision perçu par
l’oeil. Par exemple, dans un Plössl on
perçoit 50° de large, 68° pour un Erfle,
82° pour un Nagler ou 100° pour un
Ethos.
Rien ne vaut un bon exemple pour
comprendre. J’utilise un 10 pouces f/
5 (1500mm de focale). Si j’utilise un
oculaire Panoptic de 27mm, j’obtiens un
grossissement de 46,3X. Sur le Panop-
tic, il est inscrit que le champ apparent
est de 68°. Quel est donc le champ réel?
Puisque j’ai un grossissement de 46.3X,
le champ réel est donc 46.3 fois plus petit
que le champ apparent. Donc, le champ
réel est de 68°/46.3 = 1.49°, presque 1°
et demi. Pour parcourir 3°, il faut se
déplacer de l’équivalent de 2 fois le
champ de l’oculaire.
Mais il arrive souvent que les données
sur la longueur focale et sur le champ
apparent des oculaires ne soient pas
exactes. Et c’est là que la deuxième
méthode s’impose. Pour une mesure
vraiment précise, on utilise la méthode
de la dérive qui ne prend que quelques
minutes.
On pointe le télescope sur une étoile
située près de l’équateur céleste (Spica
au printemps, Altaïr à l’été, Alpha Ceti
à l’automne et Procyon à l’hiver.
Sachant qu’une étoile près de l’équateur
céleste se déplace d’est en ouest à une
vitesse de 15° à l’heure, on peut en
conclure qu’elle se déplace de 1° en 4
minutes ou 15’ en une minute. En
minutant le temps que met l’étoile à tra-
verser le champ de l’oculaire d’un bord
à l’autre, on peut déterminer de façon
très précise le champ angulaire couvert.
Mais il ne faut pas oublier d’éteindre le
moteur si votre monture est motorisée...
Il suffit alors de multiplier le temps mis
par l’étoile pour traverser d’est en ouest
le champ de l’oculaire par 15 et on
obtient le champ précis en minutes d’arc
que l’on peut convertir en degrés le
cas échéant.
Au fil des années, j’ai remarqué que
la plupart des amateurs qui utilisent
la méthode du saute-étoile le font avec
enthousiasme. Mais très souvent, on
n’applique qu’une partie de la
méthode. On se sert de l’étoile visible
à l’oeil nu la plus proche de l’objet
recherché et on se sert du telrad pour
viser à peu près à la bonne distance de
ladite étoile. La plupart du temps, cela
permet effectivement de tomber sur
l’objet. Mais il arrive assez souvent
que l’on doive fouiller autour pour
effectivement tomber sur l’objet. Mais
qui nous dit qu’il s’agit du bon objet?
Peut-être est-ce une autre galaxie que
celle recherchée. Cette confusion
potentielle est chose courante quand
on cherche une petite galaxie pâle en
plein dans l’amas de la Vierge. Par
contre, en connaissant le champ cou-
vert par l’oculaire, on peut être cer-
tain de la distance parcourrue entre
l’étoile et l’objet et qu’on est bien sur
le bon objet. Les motifs d’étoiles
autour sont aussi essentiels à cette
identification.
Les amateurs savent bien que pour
chercher un objet, , on utilise toujours
l’oculaire donnant le plus faible
grossissement. Donc, dans la phase
recherche, on utilise presque toujours
le même télescope et le même
oculaire. Si on a pris la peine de
mesurer une fois le champ visuel de
cette combinaison télescope-oculaire,
on le sait pour toujours et à force de
l’utiliser, on ne pourra plus jamais
l’oublier. Ça devient comme une
seconde nature, un peu comme le fait
de savoir que tel oculaire de telle
longueur focale donne tel
grossissement dans mon télescope.
L’hiver s’en vient et la recherche
d’objets pâles à -20C n’est pas de tout
repos. Pourquoi ne pas utiliser une
méthode de recherche qui est plus
efficace et rapide que d’y aller à peu
près?
Jean Paul Pelletier