1 - Masse - Programme Québécois de dépistage du cancer du sein

J ASSOC MED CAN • 10 FÉV. 1998; 158 (3 Suppl) SF5
© 1998 Association médicale canadienne (texte et résumé)
1. Masse palpable au sein : information
et recommandations visant à guider la
prise de décisions en présence d’une
masse palpable au sein
Le Comité directeur des guides de pratique clinique pour la prise en
charge et le traitement du cancer du sein
Résumé
Objectif : Fournir de l’information et des recommandations visant à aider les femmes et
leurs médecins à prendre les décisions nécessaires pour confirmer ou infirmer le diagnos-
tic de malignité en présence d’une masse palpable au sein.
Preuves : Les guides s’appuient sur une recension systématique des données probantes publiées
et sur l’opinion d’experts. Les références ont été sélectionnées au moyen d’une recherche in-
formatique par mots clés utilisant MEDLINE (à partir de 1966) et CANCERLIT (à partir de
1985) jusqu’en janvier 1996, et sur une recension non systématique jusqu’en janvier 1997.
Avantages : Exclusion ou confirmation du diagnostic de malignité le plus rapidement possi-
ble et avec un minimum d’interventions.
Recommandations :
Les femmes qui présentent une masse au sein ou une modification suspecte de la con-
sistance du tissu mammaire devraient d’abord faire l’objet d’une anamnèse, d’un exa-
men physique et, généralement, d’une mammographie.
L’anamnèse devrait permettre de déterminer la date de découverte de la masse et,
éventuellement, les modifications observées depuis le début, et de préciser les antécé-
dents personnels de biopsie ou de cancer du sein de la patiente. Il convient de consigner
les facteurs de risque de cancer du sein, mais la présence ou l’absence de tels facteurs ne
devrait pas influer sur la décision de faire pratiquer des examens complémentaires.
L’examen physique devrait avoir pour objet de rechercher les signes qui permettent de
différencier les masses malignes des masses bénignes.
La mammographie permet souvent de préciser la nature de la masse et de déceler, dans
l’un ou l’autre sein, des lésions occultes à l’examen clinique.
La ponction à l’aiguille fine permet de déterminer si la masse est solide ou kystique. En
présence de tumeurs solides, on peut prélever du matériel cellulaire en vue de l’examen
cytologique.
L’échographie est une autre méthode qui peut permettre de différencier les kystes et les
tumeurs solides.
Si un doute raisonnable subsiste sur la nature bénigne de la masse, il faut pratiquer une
biopsie.
Lorsqu’on pratique une biopsie chirurgicale, il faut veiller à exciser la totalité de la
masse ainsi qu’une marge saine, en une seule pièce.
La biopsie par forage, qu’elle soit guidée par l’examen clinique ou des techniques
d’imagerie, permet généralement de poser ou d’exclure le diagnostic de malignité et,
par conséquent, de réduire la nécessité d’une biopsie chirurgicale.
La thermographie et la transillumination ne sont pas des techniques diagnostiques
recommandées. La valeur de l’imagerie par résonance magnétique n’a pas encore été
établie. Il ne s’agit pas, pour l’instant, d’une technique diagnostique courante.
Lorsqu’on choisit une technique diagnostique, il faut prendre en considération l’expé-
rience du diagnosticien et la disponibilité de la technique en question.
Il faut effectuer rapidement les investigations complémentaires et bien informer la pa-
tiente tout au long du processus.
Même si le diagnostic de malignité n’a pas été établi, il est parfois plus prudent de
prévoir des examens de contrôle.
Validation : Ce guide a été révisé par un comité de rédaction, par des lecteurs principaux, par
des lecteurs secondaires choisis dans toutes les régions du Canada ainsi que par le Comité
directeur. Le document final est le fruit d’un consensus parmi tous ces collaborateurs.
Commanditaire : Le Comité directeur des guides de pratique clinique pour la prise en
charge et le traitement du cancer du sein a été constitué par Santé Canada.
Complété : Le 1er juillet 1997
Supplément spécial
La liste des membres du Comité
directeur se trouve en page SF94,
et la liste des personnes qui ont
contribué à la rédaction de ce
document, en page SF10.
Ce guide a fait l’objet d’un examen
par les pairs.
La détection d’une masse au sein est chose courante.
S’il est vrai que la majorité des masses ne sont pas
cancéreuses, il faut toujours envisager le diagnostic
de malignité. Aussi, dès que l’on décèle la présence d’une
masse ou une modification suspecte de la consistance ou de
la résistance dans quelque région du sein, il faut prendre
une série de décisions qui ont pour objet d’affirmer ou d’in-
firmer le diagnostic de cancer. Le présent guide vise à aider
les femmes et leurs médecins à atteindre cet objectif, en ré-
duisant au minimum les interventions. Nous examinons ci-
après les facteurs qui influent sur les décisions à prendre.
Chaque recommandation est suivie d’un bref résumé des
données probantes et de ses raisons d’être. Nous exposons
dans un autre guide la marche à suivre en présence d’anoma-
lies suspectes décelées à la mammographie (voir guide no2.
Investigation des lésions détectées par la mammographie).
Méthode
Les données qui ont servi de base à l’élaboration du présent
guide ont été obtenues au moyen d’une recherche systéma-
tique par mots clés de titres en langue anglaise se rapportant
au cancer du sein dans les bases de données MEDLINE et
CANCERLIT, pour une période débutant, respectivement,
en 1966 et 1983 et se terminant en janvier 1996; nous avons
également consulté d’autres publications citées dans des recen-
sions publiées. Une recension non systématique des publica-
tions sur le cancer du sein a été poursuivie jusqu’en janvier
1997. Les données probantes ont été classées par niveau, tel
qu’indiqué (voir page SF3). Dans la mesure du possible, nous
avons retenu des preuves des niveaux I à III, mais lorsque les
données expérimentales étaient non concluantes ou insuf-
fisantes, nous nous sommes fondés sur l’opinion d’experts re-
connus (niveau IV). Une version provisoire du guide a d’abord
été élaborée par l’auteur, après quoi le document a fait l’objet
d’analyses et de révisions itératives par un comité de rédaction
composé de huit membres du Comité directeur, par trois
lecteurs principaux et par tous les membres du Comité di-
recteur. Le document a ensuite été examiné par 19 lecteurs
secondaires choisis dans toutes les régions du Canada, soit des
oncologues (chirurgiens, médecins et radiologistes), des infir-
mières, des médecins de famille et des patientes atteintes de
cancer du sein. Chaque nouvelle version a été lue par l’auteur.
Le document final a été approuvé par le Comité directeur. Il
est le fruit d’un consensus important parmi les intervenants
qui ont participé au processus.
Recommandations (y compris données
probantes et raisons d’être)
Les femmes qui présentent une masse au sein ou une modi-
fication suspecte de la consistance du tissu mammaire de-
vraient d’abord faire l’objet d’une anamnèse, d’un examen
physique et, généralement, d’une mammographie.
Dans la majorité des cas, les masses décelées dans le sein
ne sont pas malignes. Toutefois, lorsqu’on observe une masse
ou une modification suspecte de la consistance du tissu mam-
maire, il faut déterminer si l’on est ou non en présence d’un
cancer. La première étape consiste à procéder à une anamnèse
et à un examen physique qui seront suivis, au besoin, par
d’autres examens diagnostiques (mammographie, ponction à
l’aiguille fine, échographie) et par une biopsie des tissus (biop-
sie par forage ou biopsie chirurgicale). Tout le processus doit
être guidé par le souci de poser un diagnostic fiable en ayant
recours à un minimum d’interventions. Chez les femmes por-
teuses d’un implant, l’approche est la même, mais on vérifie
tout particulièrement l’intégrité de l’implant.
L’anamnèse devrait permettre de déterminer la date de
découverte de la masse et, éventuellement, les modifica-
tions observées depuis le début, et de préciser les antécé-
dents personnels de biopsie ou de cancer du sein de la pa-
tiente. Il convient de consigner les facteurs de risque de
cancer du sein, mais la présence ou l’absence de tels fac-
teurs ne devrait pas influer sur la décision de faire prati-
quer des examens complémentaires.
Certains facteurs augmentent le risque de développer un
cancer du sein. Parmi ces facteurs, citons une biopsie an-
térieure à l’un ou l’autre sein mettant en évidence une hy-
perplasie atypique1, un carcinome lobulaire in situ (CLIS)2
ou un carcinome canalaire in situ (CCIS)3, la résection an-
térieure d’un carcinome4ou une radiothérapie pour la ma-
ladie de Hodgkin pendant l’enfance5ou de solides antécé-
dents familiaux de cancer du sein6(preuves de niveau III).
Le risque de développer un cancer du sein augmente égale-
ment avec l’âge (preuves de niveau III). En 1992, au
Canada, les taux d’incidence de cancer du sein chez les
femmes âgées de 30 à 39 ans, de 50 à 59 ans et de 70 à 79
ans s’établissaient, respectivement, à 0,35, 2,2 et 4,0 cas
pour 1000 femmes, par année7. Si les facteurs de risque et
l’âge augmentent le risque de développer un cancer du sein,
ils n’influent pas cependant de façon marquée sur la proba-
bilité qu’une masse donnée soit maligne. La majorité des
cancers surviennent chez des femmes qui ne présen-
tent aucun facteur de risque connu, et la majorité des
femmes qui présentent les facteurs de risque habituels
ne développent pas un cancer.
L’examen physique devrait avoir pour objet de rechercher
les signes qui permettent de différencier les masses ma-
lignes des masses bénignes.
L’examen mammaire devrait être accompagné d’une ex-
ploration attentive des aires axillaires et sus-claviculaires à la
recherche d’un envahissement ganglionnaire. Il est
préférable d’examiner les femmes non ménopausées une se-
maine après le début de la dernière période menstruelle, car
la congestion des seins est alors au minimum (preuves de
niveau IV)8. On trouvera ailleurs une description de la mé-
thode d’examen mammaire9. Certains signes (décrits
ci-dessous) devraient cependant retenir tout particulièrement
l’attention.
Le Comité directeur
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Supplément spécial
Les lésions du mamelon caractéristiques de la
maladie de Paget sont souvent causées par un cancer
du sein10.
Cette affection peut ressembler à une dermatite bénigne;
les lésions peuvent être suintantes et eczémateuses, parfois
sèches et psoriasiques, et sont généralement accompagnées
d’un épaississement de la plaque aréolo-mamelonnaire. Il
peut y avoir une sensation de démangeaison et de brûlure.
Ces signes traduisent généralement la dissémination cen-
trifuge des cellules cancéreuses, qui gagnent la peau sous-
jacente du mamelon à partir de l’épithélium des canaux galac-
tophores9. Si la maladie ne répond pas rapidement à un traite-
ment topique, il faut pratiquer une biopsie.
Les masses lisses, bien circonscrites, sont
habituellement bénignes (preuves de niveau IV).
Il s’agit de kystes ou de fibroadénomes. Les lésions qui sont
moins lisses et moins mobiles et dont les contours sont plus
flous évoquent davantage un carcinome. Les plaques
caoutchouteuses qui se mêlent aux tissus adjacents ne sont pas
de véritables masses, mais sont habituellement des zones
bénignes de transformation fibroglandulaire. Chez les femmes
plus âgées, la limite inférieure du sein peut présenter un aspect
induré en forme de croissant, attribuable au poids des seins
sus-jacents. Cette zone reflète une simple compression des tis-
sus adipeux et est bénigne, en particulier si elle est symétrique.
L’écoulement mamelonnaire n’est pas un signe
fréquent de cancer.
Un écoulement unilatéral persistant peut être dû au cancer
dans 4 à 21 % des cas9. L’écoulement peut être clair, sanglant,
sérosanguinolent ou séreux11. Il n’y a guère de risque qu’un
écoulement non sanglant soit provoqué par un cancer12, et
même un écoulement sanglant n’est souvent pas d’origine
cancéreuse13. Il est peu probable qu’un écoulement bilatéral
soit dû à un cancer.
Le cancer du sein peut être ou ne pas être
douloureux.
Même si les cancers du sein ne sont habituellement pas
douloureux, ils peuvent être accompagnés d’un malaise9. Aussi
la présence ou l’absence de douleur ou de sensibilité ne de-
vrait-elle pas influer sur la décision de procéder à un examen
approfondi en présence d’une masse suspecte.
L’anamnèse et un examen pratiqué par un clinicien
chevronné permettent souvent de reconnaître trois
causes courantes «sans gravité» de masse au sein,
sans qu’il soit nécessaire de procéder à des
investigations complémentaires.
Ce sont les fibroadénomes, les transformations fibrokys-
tiques et les gros kystes.
Les fibroadénomes
À la palpation, les fibroadénomes ressemblent beaucoup
aux kystes. Ils sont de forme arrondie, bien circonscrits, fer-
mes et très mobiles. Ils apparaissent généralement chez les
femmes jeunes, à partir de l’adolescence, alors que les kystes
surviennent habituellement un peu plus tard dans la vie, à
partir de la trentaine ou de la quarantaine.
Les transformations fibrokystiques
La douleur est probablement le motif de consultation le
plus fréquent chez les femmes présentant des transformations
fibrokystiques. La cause la plus fréquente de douleur aux seins
est une transformation fibroglandulaire bénigne auparavant
appelée maladie fibrokystique. La douleur est cyclique. Elle se
manifeste en général peu de temps après l’ovulation et s’inten-
sifie jusqu’au début des menstruations, après quoi elle disparaît
rapidement. Elle peut durer de quelques jours à deux à trois
semaines par cycle. Souvent, la douleur irradie vers l’épaule et
le bras et est accompagnée d’une sensation de brûlure. Les
transformations fibrokystiques sont généralement symétriques
et plus souvent localisées dans les quadrants supéro-externes.
Leur consistance est celle d’une plaque épaissie et caoutchou-
teuse, mais certains foyers peuvent être passablement indurés.
Ces plaques ne sont généralement pas bien limitées. Elles sem-
blent se mêler aux tissus mammaires plus normaux, sans ligne
de démarcation claire. En revanche, les tumeurs, aussi bien
bénignes que malignes, sont plus clairement limitées. Les
tumeurs bénignes, comme les kystes ou les fibroadénomes, ont
des surfaces très lisses. Les carcinomes, même s’ils sont délimi-
tés, n’ont généralement pas des contours lisses et peuvent avoir
une surface plus irrégulière, mal définie.
Les gros kystes
Ce sont généralement des masses rondes, bien circonscrites
et plutôt mobiles. Ils peuvent être douloureux ou sensibles,
mous ou relativement durs sous la pression du liquide accumulé.
L’efficacité avec laquelle l’examen clinique permet
de distinguer les masses malignes des masses
bénignes est fonction de la compétence et de
l’expérience de l’examinateur.
La technique de palpation n’est pas simple. Elle s’améliore
avec les connaissances et la pratique (preuves de niveau III)14.
Dans une étude pratiquée par Rimsten et ses collègues, un
cancer a été détecté chez 92,5 % des patientes lorsqu’un
examinateur expérimenté avait évalué une masse au sein
comme étant un «cancer assuré» après examen clinique15. Van
Dam et ses collègues ont observé que l’examen physique avait
une valeur prédictive positive de 73 %, et une valeur prédic-
tive négative de 87 %16.
Une masse suspecte à l’examen clinique appelle des inves-
tigations complémentaires. Le choix de la prochaine étape
(mammographie, échographie ou ponction à l’aiguille fine)
Masse palpable au sein
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Supplément spécial
sera fonction de l’âge de la femme, de la nature de la masse,
de la disponibilité et de la fiabilité de ces techniques diagnos-
tiques à l’échelle locale et de la préférence du médecin.
La mammographie permet souvent de préciser la nature
de la masse et de déceler, dans l’un ou l’autre sein, des lé-
sions occultes à l’examen clinique.
Chez les femmes plus jeunes, le tissu mammaire est générale-
ment plus dense à la mammographie, et le cliché ne fournira
vraisemblablement pas de renseignements utiles9. Toutefois, à
partir du milieu de la trentaine, l’intérêt de cet examen aug-
mente, et ce dernier devrait faire de plus en plus partie inté-
grante des investigations complémentaires en présence d’une
masse suspecte au sein (preuves de niveau IV)9. Lorsque c’est un
radiologiste chevronné qui fait la lecture du cliché, ce dernier
permet souvent de préciser la nature de la masse en question et
fournit en outre de l’information sur d’autres régions du sein.
La présence de calcifications irrégulières ou groupées à proxi-
mité de la masse est évocatrice d’un carcinome. La mammogra-
phie peut également fournir de l’information sur le sein opposé.
On devrait donc, normalement, pratiquer un examen mammo-
graphique optimal, comportant deux incidences par sein avec
compression focalisée ou un agrandissement radiologique de
toutes les zones anormales. Toutefois, la sensibilité globale de la
mammographie dans la détection des cancers du sein palpables
pourrait ne pas dépasser 82 %17 et pourrait même être encore
plus basse chez les femmes non ménopausées (preuves de niveau
III)18. Par conséquent, si un cliché mammographique sus-
pect peut augmenter la probabilité que la masse soit ma-
ligne, on ne saurait se fonder sur un cliché mammo-
graphique normal pour exclure le diagnostic de cancer en
présence de signes cliniques évocateurs.
La décision de pratiquer d’abord une mammographie ou
une ponction à l’aiguille fine varie selon le centre et le cas en
cause. En général, les médecins expérimentés dans la pratique
de la ponction à l’aiguille fine procèdent directement à cette
intervention et peuvent ainsi porter plus rapidement un diag-
nostic définitif. Certains, toutefois, demandent une mammo-
graphie avant de procéder à la ponction à l’aiguille, craignant
que les contours lisses et bien définis à la mammographie qui
caractérisent les lésions bénignes solides ne soient altérées par
cette dernière intervention19.
La ponction à l’aiguille fine permet de déterminer si la
masse est solide ou kystique. En présence de tumeurs
solides, on peut prélever du matériel cellulaire en vue de
l’examen cytologique.
La ponction à l’aiguille fine (PAF) est peu coûteuse, facile à
réaliser et ne demande aucune préparation; elle est pratique-
ment sans douleur et peut être pratiquée au cabinet du médecin,
généralement sans anesthésie locale20. Si la ponction retire un
liquide clair, jaunâtre ou verdâtre, et si la masse disparaît com-
plètement, le diagnostic est celui de simple kyste. Ces masses
sont bénignes, et le liquide ne devrait pas être expédié pour
analyse, car le résultat est invariablement normal (preuves de
niveau III)21,22. Si le liquide est sanglant, on peut être en présence
d’un carcinome ayant une composante kystique12, et le liquide
devrait faire l’objet d’une cytologie9. Si le liquide est exempt de
sang, si la masse disparaît complètement et si la mammographie
est négative, aucun examen complémentaire n’est requis.
Si aucun liquide n’est retiré à la PAF ou si la masse persiste
après l’évacuation, on peut, au cours de la même ponction,
prélever un échantillon pour examen cytologique. La capacité
d’obtenir, au moyen de la ponction à l’aiguille fine, du
matériel cellulaire suffisant pour l’examen cytologique est
fonction du praticien9, et l’interprétation de la cytologie
dépend de la possibilité d’avoir accès aux services d’un patholo-
giste expérimenté dans ce domaine. Dans 90 % à 95 % des
cas, le matériel cellulaire obtenu par ponction est suffisant
pour la cytologie23 et peut permettre d’obtenir 95 % de diag-
nostics exacts24. Dans le cadre d’une étude de suivi de 835 lé-
sions mammaires palpables, on n’a relevé qu’un seul faux
positif (0,7 %) parmi les 135 résultats de ponction à l’aiguille
fine qui étaient dits «positifs». On dénombrait toutefois
14 faux négatifs, soit un taux de faux négatifs de 15,2 %, parmi
les 92 résultats dits «négatifs» (preuves de niveau III)25. Une
comparaison récente entre l’utilisation de la PAF sans guidage
stéréotaxique et de la biopsie par forage dans les cas de lésions
palpables au sein a mis en évidence la sensibilité de ces deux
techniques (qui atteignait, respectivement, 97,5 % et 90 %)26.
La cytologie par ponction à l’aiguille fine permet de con-
firmer la malignité d’une masse extrêmement suspecte, mais elle
peut également être utile même si le risque de malignité est
faible. Ainsi, chez une patiente qui présente des transformations
fibroglandulaires relativement caractéristiques, elle permet de
rassurer le médecin et la patiente en affirmant la bénignité du
processus. L’intérêt de cette technique réside donc surtout aux
deux extrémités du spectre diagnostique. Si l’examen ne met pas
en évidence de cellules cancéreuses, le caractère manifestement
bénin de la lésion se trouve confirmé, et on évite la chirurgie. Si
des cellules cancéreuses sont décelées, on peut poser un diagnos-
tic ferme de cancer et ainsi mieux planifier la chirurgie. Lorsque
la cytologie, la mammographie et l’examen clinique évoquent
tous trois un cancer, le diagnostic sera vraisemblablement con-
firmé par la biopsie chirurgicale dans 99 % des cas; si les résultats
des trois examens susmentionnés évoquent une lésion bénigne,
on ne découvrira un cancer que dans moins de 0,5 % des cas27.
L’échographie est une autre méthode qui peut permettre
de différencier les kystes et les tumeurs solides.
Exécutée par un praticien chevronné, l’échographie per-
met de reconnaître un kyste avec certitude (preuves de
niveaux III, IV)28. Cette technique est particulièrement utile
lorsqu’il faut déterminer si des anomalies mammographiques
non palpables sont ou non kystiques (consulter le guide no2
pour une description plus complète).
Si un doute raisonnable subsiste sur la nature bénigne de
la masse, il faut pratiquer une biopsie.
En l’absence d’une cytologie positive, la décision de prati-
Le Comité directeur
SF8 J ASSOC MED CAN • 10 FÉV. 1998; 158 (3 Suppl)
Supplément spécial
quer ou non une biopsie repose sur le jugement du praticien,
qui doit examiner toutes les données disponibles, notamment
les antécédents de la patiente, les signes cliniques et les résul-
tats de la mammographie et de l’échographie. Il incombe au
clinicien de poser ou d’exclure le diagnostic de cancer, mais
également de réduire le nombre de biopsies inutiles. Si l’on
décide de pratiquer une biopsie, on peut opter pour une biop-
sie par forage ou une biopsie chirurgicale. Le choix est fonc-
tion du degré d’expérience, des compétences et des
préférences de l’examinateur, qui varient d’un centre à l’autre.
Lorsqu’on pratique une biopsie chirurgicale, il faut veiller
à exciser la totalité de la masse ainsi qu’une marge saine,
en une seule pièce.
Si l’on pratique une simple biopsie qui révèle ultérieure-
ment la présence imprévue d’un carcinome, il faudra souvent
effectuer une deuxième excision afin de vérifier que les
marges chirurgicales sont saines. Il sera plus difficile, à la
deuxième intervention, de localiser adéquatement la lésion,
car le siège aura été déformé par la réaction à la première in-
tervention et son aspect sera altéré par l’hématome (preuves
de niveau V). L’excision complète sera donc plus difficile, et
l’évaluation pathologique, plus incertaine. Les biopsies
chirurgicales devraient par conséquent réaliser une tumorec-
tomie, comme si le diagnostic de cancer était déjà établi. Il
faut procéder à l’excision de la totalité de la masse suspecte
ainsi que d’une marge saine, de façon que le pathologiste
puisse procéder à une évaluation des marges.
La biopsie par forage, qu’elle soit guidée par l’examen clini-
que ou des techniques d’imagerie, permet généralement de
poser ou d’exclure le diagnostic de malignité et, par con-
séquent, de réduire la nécessité d’une biopsie chirurgicale.
La biopsie par forage est largement utilisée pour remplacer la
biopsie chirurgicale. L’aiguille peut être guidée par la palpation
si la masse palpable est importante. Cette intervention permet
de recueillir de un à six échantillons cylindriques minces de tissu
suffisants pour un diagnostic histologique. Elle permet de dis-
tinguer initialement un cancer in situ et un cancer invasif et de
procéder au dosage des récepteurs hormonaux. Il est rare que le
matériel obtenu soit insuffisant. L’exactitude de la biopsie par
forage guidée par l’examen clinique est plus élevée lorsque la
masse palpable est importante (preuves de niveau III). Dans une
étude portant sur 150 biopsies par forage de masses palpables, la
sensibilité globale de cette intervention s’établissait à 89 %, mais
elle atteignait 94 % dans le cas des lésions de plus de 2,5 cm de
diamètre. On n’a relevé aucun résultat faussement positif29.
Dans le cas des petites lésions, plus difficilement palpables,
il est possible de viser correctement la lésion si l’aiguille est
guidée par repérage stéréotaxique ou échographie (preuves de
niveau III) (voir également le guide no2). Donegan a examiné
1784 biopsies par forage, dont il est fait état dans 5 rapports
différents, et n’a relevé aucun diagnostic faussement positif.
Le taux de diagnostics faussement négatifs s’échelonnait
toutefois entre 1,6 % et 19 %17. Cette technique constitue
donc une option acceptable, dans les centres il est établi
que sa spécificité est élevée. On a fait état de la sûreté, de la
fiabilité et de la rentabilité de cette méthode, qui permet sou-
vent d’éviter une biopsie chirurgicale30,31.
Que l’on ait recours à la ponction à l’aiguille fine ou à la
biopsie par forage, le diagnostic de cancer devrait, le plus sou-
vent possible, être confirmé sans le recours à la biopsie
chirurgicale. Il est ainsi possible de discuter franchement du
diagnostic avec la patiente et de mieux planifier l’intervention
chirurgicale, et on élimine souvent ainsi la nécessité d’une
deuxième chirurgie.
La thermographie et la transillumination ne sont pas des
techniques diagnostiques recommandées. La valeur de
l’imagerie par résonance magnétique n’a pas encore été
établie. Il ne s’agit pas, pour l’instant, d’une technique
diagnostique courante.
La thermographie tente de mesurer le rayonnement ther-
mique accru émis par un carcinome mammaire. Mise au point
par Lawson en 1956, cette technique permet de déceler des
cancers symptomatiques32. Toutefois, il est maintenant établi
que sa capacité de déceler les petits cancers se rapproche des
résultats obtenus par un pur effet du hasard33. En 1977, le
Beahrs Committee du National Cancer Institute (NCI) a décon-
seillé le recours à la thermographie en tant que mesure de
dépistage systématique dans le cadre du Breast Cancer Detec-
tion Demonstration Project (BCDDP) du NCI34. En 1980, une
étude dans le cadre de laquelle 10 spécialistes en thermogra-
phie ont lu, à l’aveugle, 576 thermogrammes a révélé que
«l’indice de détectabilité» dans la population à l’étude n’était
pas supérieur à celui qui serait obtenu par un pur effet du
hasard (preuves de niveau I)35. À l’heure actuelle, cette tech-
nique n’est pas indiquée, en dehors des essais cliniques struc-
turés faisant appel à des techniques perfectionnées.
Une variante de la transillumination, la diaphanoscopie (ou
light scanning), est aussi utilisée pour l’exploration du sein.
Cette méthode présente un intérêt limité à cause de son
manque de spécificité et de sensibilité33.
L’imagerie par résonance magnétique tire parti de la zone
de néovascularisation qui entoure les tumeurs en développe-
ment. Pour visualiser les petites lésions, il faut injecter un
produit de contraste. Cette technique demeure lourde, lente
et coûteuse et n’est guère utilisée, actuellement, que dans le
cadre de la recherche.
Lorsqu’on choisit une technique diagnostique, il faut pren-
dre en considération l’expérience du diagnosticien et la
disponibilité de la technique en question.
L’examen clinique demande du doigté et de l’expérience.
La fiabilité des résultats de la ponction à l’aiguille fine, de l’in-
terprétation de la cytologie, de la biopsie par forage et de la
mammographie dépend toujours de la compétence et de l’ex-
périence du praticien. Lorsqu’on choisit un examen, il faut
prendre en considération aussi bien l’expérience du diagnosti-
cien que la disponibilité de la technique.
Masse palpable au sein
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