5
Chapitre 1er: Les présocratiques
1. La naissance de la philosophie
La philosophie est née en Grèce: c’est un fait ! Un fait qu’on ne peut que constater. Toute
l’humanité, depuis que l’homme existe, manifeste de la religiosité. C’est d’ailleurs un critère retenu
par les anthropologues pour déceler les premières traces d’hominisation dans l’évolution. Partout où
il y a humanité, il y a religion. Mais la philosophie, c’est-à-dire cette forme de discours qui recherche
une réponse aux même questions que la religion, mais avec la raison, c’est-à-dire avec une méthode
rationnelle rigoureuse, ne se manifeste pas avant le VIème siècle en Grèce. Pourquoi? Pourquoi en
Grèce et pas en Chine, au Pérou, dans ces régions qui sont aujourd’hui la Belgique ou quelque part
en Afrique? On n’en sait rien. On ne peut que constater le fait. Certes, on peut avancer des
explications d’ordre économique, social, politique. Il est vrai que le contexte était très favorable. La
Grèce était un lieu florissant sur le plan économique, ce qui favorisait les échanges culturels et
donc un grand brassage d’idées. Il y avait une situation politique stable et favorable, avec une
puissance militaire certaine. Bref, tout ce qu’il faut pour l’épanouissement des arts et de la culture.
Mais ce n’est pas là une explication absolue qui éliminerait le mystère. Pourquoi à ce moment-là et
en ce lieu-là? On pourrait trouver beaucoup d’autres lieux qui ont connu à d’autres moments des
situations de prospérité économique, sociale et politique. Le mystère demeure donc. C’est ce qu’on
a appelé le miracle grec! La raison est née en Grèce, elle a été inventée par les Grecs — inventer au
sens étymologique du terme. Inventer vient de invenire en latin qui signifie “trouver”. On ne trouve
que ce qui existait déjà. Comme on découvre une pièce de monnaie sur un chemin. Les Grecs
auraient ainsi découvert l’usage d’une faculté innée en tout homme. Mais pourquoi les hommes
n’en faisaient-ils pas systématiquement usage avant les Grecs ? Mystère! La seule chose que l’on
sache, c’est que les sciences et la philosophie sont nées en Grèce et pas ailleurs, c’est un fait.
On trouve certes en Chine, en Mésopotamie, en Égypte des signes d’un usage pragmatique de
la raison avant les Grecs. Une médecine, mélange d’empirisme et de magie, existait déjà dans
l’Orient ancien. Les mathématiques appliquées existaient déjà en Mésopotamie et en Égypte. Les
Egyptiens connaissaient déjà le calcul des fractions: Mais c’était pour un usage pratique immédiat.
Les Babyloniens connaissaient aussi le calcul des fractions et, de plus, une forme élémentaire de
géométrie: mais là, à nouveau, à des fins purement pragmatiques. Les Babyloniens se sont aussi
intéressés à l’astronomie et ont cherché à calculer les éclipses de lune et de soleil. Mais, chez tous
ces orientaux, on ne trouve pas de sciences pures. On ne trouve pas de traces de “science pour la
science”, du savoir pour le savoir, comme on le verra chez les Grecs. On ne trouve pas de traces de
démonstration ou de souci de la cohérence logique entre les propositions. Ce sont plutôt, chez les
orientaux, des recettes à usage immédiat pour résoudre des problèmes liés à la vie quotidienne,
comme la mesure des champs ou la construction de maisons ou alors liés à la vie religieuse comme le
calcul des éclipses. Il s’agit donc de sciences appliquées et non pas de sciences pures. Cela semble