lesquels les comportements humains jouent un rôle plus ou moins important. La complexité et la
diversité des opérations pouvant contribuer aux rejets dans le milieu naturel appellent l’intervention de
nombreux employés qui, auparavant, considéraient souvent les questions environnementales comme
des problèmes strictement techniques dont les ingénieurs et les techniciens avaient l’entière
responsabilité. Par exemple, dans les usines de production d’aluminium primaire, les émissions
atmosphériques de poussières et de fluorures, qui constituent les principaux polluants de cette
industrie, proviennent, à la source, de plusieurs centaines cuves d’électrolyse disposées en série et sur
lesquelles s’effectuent de nombreuses opérations pouvant avoir un impact significatif sur les
contaminants rejetés. Ces cuves, qui constituent le coeur du processus d’électrolyse, sont reliées aux
épurateurs d’air et aux cheminées d’usine par un système de ventilation qui aspire les fumées et les
contaminants. Des observations que nous avons menées dans plusieurs alumineries québécoises ont
montré que de nombreuses procédures et de nombreux comportements pouvaient avoir un impact
significatif sur les émissions atmosphériques rejetées en aval des procédés. Par exemple, les «effets
anodiques»3, qui se traduisent par une augmentation brutale de la température des cuves d’électrolyse
et par une «pointe» importante des émissions de fluorures et de carbone, peuvent être réduits de façon
significative par le respect, par les travailleurs, de certaines procédures liées en particulier à l’alimentation
en alumine de chaque cuve.
Le caractère irrégulier des rejets de contaminants et l’occurrence de déversements accidentels
Outre la pluralité des sources de contaminants, la pollution industrielle se caractérise par des
fluctuations de la charge polluante et par l’occurrence de déversements accidentels dont la prévention
est essentielle pour assurer la protection des écosystèmes et le respect des normes réglementaires.
Même dans des conditions normales d’opération, les rejets de contaminants sont en effet rarement
stables et linéaires en raison des cycles de production, des opérations de maintenance (lavages,
vidanges...), des pannes, du respect plus ou moins strict des procédures, ou encore des erreurs
pouvant occasionner, de façon ponctuelle, des niveaux inhabituels de pollution. Par leur proximité
physique avec les procédés et leur implication dans les opérations pouvant occasionner des
déversements, les opérateurs jouent souvent un rôle fondamental dans la détection de ces
dysfonctionnements et la mise en oeuvre de procédures d’urgences. Le rôle de la dimension humaine
dans la prévention des accidents industriels montre l’importance de la sensibilisation et de la formation
des individus. Ainsi, selon une étude réalisée dans la région Rhône-Alpes, qui regroupe de nombreuses
entreprises chimiques, l’erreur humaine serait à l’origine de plus de 40% des accidents industriels
survenus dans cette région entre 1971 et 19904. Les aspects humains jouent également un rôle central
dans la prévention des déversements mineurs et ponctuels, lesquels peuvent cependant entraîner, à long
terme, une forme de pollution chronique. Par exemple, à la raffinerie que nous avons étudiée, la
formation des opérateurs et la réduction des délais d’intervention en cas d’incident ont permis une
amélioration significative de la qualité des sols et de la nappe phréatique, lesquels avaient été contaminés
par l’accumulation, durant de nombreuses années, de petits déversements accidentels.