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Folia veterinaria
VACCINS VETERINAIRES ISSUS DE LA BIOTECHNOLOGIE
L’enregistrement de vaccins issus du génie génétique a débuté en médecine vétérinaire avec plusieurs vaccins
destinés aux animaux de compagnie et animaux de rente. L’emploi de tels produits pharmaceutiques peut poser
des difficultés dues à la méconnaissance de leurs qualités. La biotechnologie peut en effet apparaître comme un
élément négatif auprès de certaines personnes mal informées. Au contraire, ces vaccins présentent des avantages
indéniables, tels que la sécurité d’emploi et la définition presque parfaite de l’antigène utilisé pour la
vaccination. Les inconvénients sont liés au caractère recombinant du produit: l’écotoxicité d’un tel vaccin doit
être particulièrement bien étudiée. De plus, le recours à de tels produits génétiques ne peut se concevoir que s’ils
apportent un élément supplémentaire par rapport aux produits conventionnels existants: soit une efficacité
supérieure, soit une conservation de plus grande durée ou un marqueur biologique pour différencier les animaux
vaccinés des animaux infectés naturellement.
Les catégories de vaccins
Le génie génétique est une technologie qui permet de préparer un vaccin d’une manière différente des méthodes
traditionnelles. Le résultat doit de toute façon permettre une exposition optimale des antigènes d’intérêt à la
réponse immunitaire. Aussi, ces vaccins biotechnologiques rentrent dans les deux catégories de vaccins
classiquement décrites. Il faut y inclure les vaccins à ADN.
Vaccins inertes
- Vaccins inactivés : produits à partir d’un virus modifié génétiquement ; par exemple, par la délétion du
gène codant pour la glycoprotéine gE dans un vaccin inactivé dirigé contre la rhinotrachéite infectieuse
bovine ;
- Vaccins sous-unitaires: formés d’une ou de plusieurs protéines purifiées ou semi-purifiées; ces
protéines sont produites en bactéries, par exemple E. coli, ou par des baculovirus en cellules d’insecte ;
- Vaccins à base de peptides synthétiques: des séquences peptidiques représentant les domaines
antigéniques importants des immunogènes de l’agent pathogène sont synthétisées par voie chimique.
Vaccins vivants
- Vaccins recombinants: un virus ou une bactérie peut être modifiée génétiquement par la délétion d’un
gène ou l’introduction d’un nouveau gène. L’introduction d’un marqueur de sélection peut, par
exemple, être effectué par recombinaison génétique au laboratoire; des vaccins contre la maladie
d’Aujeszky rentrent dans cette catégorie : la délétion se situe au niveau du gène codant pour la
glycoprotéine gE ;
- Vaccins viraux vectorisés: ils sont une variante de la classe précédente. Un virus est utilisé comme
vecteur pour véhiculer les gènes exprimant les immunogènes d’un agent pathogène contre lequel on
désire vacciner;
- Vecteurs bactériens vivants: des bactéries peuvent être atténuées artificiellement et servir de support
pour véhiculer des gènes exprimant des antigènes étrangers.
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Vaccins à ADN
Ils constituent une catégorie à part. L’ADN représentant un gène et sa cassette d’expression sont injectés par
voie parentérale. L’ADN est alors transfecté dans certaines cellules où le gène est exprimé et donc l’antigène
produit. Cet antigène est présenté à la fois à la réponse immune humorale et cellulaire. Ce type d’immunisation
promet de nombreux développements à l’avenir.
Remarque
D’autres vaccins peuvent entrer dans la catégorie des produits issus de la biotechnologie, au sens où l’Agence
européenne du médicament peut l’entendre. En effet, des procédés biotechnologiques peuvent être utilisés dans
une étape de la production de tels vaccins comme, par exemple, dans la valence « leucose féline » d’un vaccin
multivalent félin commercialisé. La lignée cellulaire fibroblastique qui produit le composé « leucose féline » du
vaccin a été établie après transfection d’un ADN cloné en plasmide et provenant du thymus d’un chat infecté par
le virus de la leucose féline.
Les vaccins produits en
E.coli
Un des premiers vaccins commercialisés issu de la biotechnologie est basé sur une des premières
biotechnologies : la production de protéines recombinantes par la bactérie E. coli. La séquence du gène codant
pour la glycoprotéine gp70 (masse moléculaire de 70 kD) du virus de la leucose féline (FeLV) a été obtenue. Le
DNA correspondant a été clivé du DNA proviral par l’action d’endonucléases de restriction et a été inséré dans
un plasmide bactérien. Ce plasmide recombinant sert à transformer des bactéries E. coli qui vont se multiplier et
augmenter le nombre de plasmides recombinants. A l’intérieur de chaque cellule bactérienne, le gène de la
glycoprotéine sera exprimé sous l’action d’un promoteur inductible par la chaleur. Lorsque la culture de
bactéries recombinantes est portée à 42°C, il y a une production massive de la protéine. La production de masse
se fait dans des unités de fermenteurs.
Les bactéries ne possèdent pas de système de glycosylation. La glycoprotéine du FeLV ne sera donc pas
glycosylée. Au lieu d’avoir une masse moléculaire de 70 kD, la protéine produite en aura une de 45 kD (p45).
Cependant, elle conserve son immunogénicité, ce qui tend à montrer que la glycosylation n’est pas essentielle
pour les épitopes portés par la glycoprotéine du FeLV. Les protéines sont extraites et purifiées. Un adjuvant
composé d’hydroxyde d’aluminium et de Quil A est ajouté et l’ensemble constitue un vaccin protecteur contre le
FeLV.
Les vaccins vecteurs
Virus de la vaccine
Le virus de la vaccine, un orthopoxvirus, est utilisé comme vecteur dans plusieurs vaccins. Ce virus est vraiment
le prototype du virus vecteur d'expression. L’exemple suivant décrit le développement d’un vaccin contre la rage
destiné à la vaccination orale du renard et dont le vecteur est le virus de la vaccine. Le virus recombinant possède
le génome du virus de la vaccine où le gène de la thymidine kinase (TK) est inactivé et coupé par l'insertion du
cDNA codant pour la glycoprotéine G du virus rabique, flanqué d'un promoteur spécifique du virus de la
vaccine. La méthode pour obtenir un virus recombinant nécessite le recours à la transfection de culture de
cellules infectées par le virus de la vaccine avec un plasmide qui contient le cDNA de la glycoprotéine G du
virus rabique. L'événement de recombinaison est attendu dans certaines cellules, entre le gène de la TK du DNA
du virus parental et le gène contenant l'insert présent dans le plasmide.
Dans la culture de cellules, deux populations de virus sont produites : le virus sauvage et le virus recombinant.
La sélection entre les deux populations se fait selon le phénotype du virus : le virus sauvage est TK+, le virus
recombinant est TK- (inactivation du gène TK par l'insertion du gène étranger).
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Le vaccin est utilisé dans le cadre de la vaccination antirabique par voie orale du renard. Le dépôt du vaccin se
fait par largage aérien au-dessus des zones à vacciner. L'appât vaccinal est composé d'une matière organique
appétente pour le renard, dans laquelle est dissimulée une capsule contenant le virus vaccinal. Le renard croque
la capsule en mastiquant l'appât, permettant au virus d'infecter le pharynx et les amygdales. Le vaccin contient de
la tétracycline qui sert de marqueur indirect de la vaccination. La tétracycline vient se déposer dans les couches
appositionnelles des os. Chez les cadavres de renards, elle est recherchée sur des coupes de mandibules par
examen au microscope sous lumière ultraviolette.
Les avantages principaux de ce vaccin sont d’une part l’ingestion par voie orale et d’autre part la très grande
résistance du vecteur vaccine qui permet au vaccin de rester actif quelles que soient les conditions
météorologiques (soleil ou gel). Cette méthode a permis, après plusieurs campagnes de vaccination, d'éradiquer
la rage en Belgique et en France.
Virus de la variole du canari
Le développement le plus récent dans le domaine des vecteurs poxvirus est la mise au point de vecteurs non
réplicatifs. Le virus vecteur infecte l'organisme, pénètre dans les cellules où il initie un cycle de multiplication.
Ce cycle est abortif et ne mène pas à la production de virus de nouvelle génération. Ils sont donc
particulièrement inoffensifs puisque le virus ne se dissémine pas et ne peut pas se transmettre à d'autres
individus. Néanmoins, de tels vecteurs sont capables d'immuniser l'animal.
Il existe un vaccin pour le chat contre le virus de la leucose féline dont le vecteur vaccinal est le poxvirus du
canari (variole du canari ; canarypoxvirus). Ce virus est capable d’infecter des cellules félines, mais il ne se
multiplie pas complètement chez le chat. Cette propriété lui confère une grande sécurité d’emploi. Le gène
« gag » codant pour les protéines de capside et de matrice et le gène « pro » codant pour la protéase du FeLV
sont insérés dans le locus C3 de l’avipoxvirus. Le gène « env », codant pour la glycoprotéine d’enveloppe et la
protéine transmembranaire du FeLV, est inséré dans le locus C5. Ces deux loci, C3 et C5, sont situés dans les
répétitions terminales inversées du génome du poxvirus, et sont des zones non essentielles au poxvirus. Le
vecteur code donc pour les protéines de capside, de matrice et d’enveloppe qui sont les immunogènes du FeLV.
Il code aussi pour la protéase virale qui sera capable de cliver les polyprotéines en ces protéines individuelles. De
plus, ce vecteur est inoffensif pour l’homme.
Conclusions
Dans son arsenal thérapeutique, la médecine vétérinaire possède un nombre croissant de vaccins issus de la
biotechnologie. Ces vaccins sont exclusivement enregistrés au niveau européen et non au niveau national. Ils
sont particulièrement étudiés, de manière à ce que leur innocuité soit élevée et leur efficacité meilleure que les
produits actuels. Un des intérêts de ces vaccins est leur parfaite définition tant du point de vue chimique que
biologique. Ils sont spécialement indiqués lorsque leurs caractéristiques leur confèrent un avantage dans la
protection: par exemple, une stabilité augmentée dans les conditions extérieures comme pour le virus
recombinant contre la rage. Ces vaccins constituent aussi un bel exemple de l’intérêt des biotechnologies,
lorsqu’elles sont utilisées dans le but d’améliorer la santé et le bien-être des animaux domestiques.
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Tableau: Vaccins issus de la biotechnologie commercialisés en Belgique
Nom du vaccin Indication Description
Bayovac CSF E2
(Bayer AG Pharma) Peste porcine classique Vaccin sous-unitaire: glycoprotéines E2-
synthétiques exprimées par le vecteur
baculovirus en cellules d'insecte
Eurifel FeLV (Merial) Leucose féline
Eurifel RCPFeLV
(Merial) Leucose féline, panleucopénie,
rhinotrachéite féline et calicivirose
féline
Vaccins constitués e.a. d'un virus recombinant
de la variole du canari avec insertion de gènes
"env" et "gag" et partiellement du gène "pol" du
virus de la leucose féline
Fevaxyn Pentofel
(Fort Dodge Lab
Ireland)
Leucose féline, panleucopénie,
rhinotrachéite féline, calicivirose
féline, infection à Chlamydophila
felis
La valence « leucose féline » est produite par
une lignée cellulaire génétiquement modifiée
Ibraxion (Merial) Rhinotrachéite infectieuse bovine Vaccin inactivé ; virus de la rhinotrachéite
infectieuse bovine génétiquement modifié :
délétion du gène de la glycoprotéine E (permet
de distinguer les animaux vaccinés des animaux
non vaccinés)
Leucogen (Virbac) Leucose féline vaccin sous-unitaire: protéine p45 (protéine
gp70 non glycosylée) produite par une souche
recombinante d’E. coli
Neocolipor (pigs)
(Merial) Infection à E. coli Souche recombinante d’E. coli (F4, F5, F6 et
F41)
Porcilis Pesti (Intervet) Peste porcine classique Vaccin à sous-unités: protéines E2 synthétiques
exprimées par le vecteur baculovirus sur cellule
d'insecte
ProteqFlu-Te (Merial) Grippe équine et infection à
Clostridium tetani Vaccins constitués e.a. d'un virus recombinant
de la variole du canari avec insertion du gène
de l’hémagglutinine du virus influenza équin
Raboral V-RG
(Merial) Rage Vaccin constitué d'un virus recombinant de la
vaccine avec insertion du gène codant pour la
glycoprotéine G du virus de la rage
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