Médecines parallèles - Philanthropic Foundations Canada

Six plantes mystérieuses utilisées en Chine depuis des
siècles pourraient représenter la prochaine percée majeure dans
le traitement préventif du cancer du poumon, grâce à un auda-
cieuxprogramme de financement initié par la HechtFoundation,
une petite fondation deVancouver, qui a permis d’amorcer cette
importante recherche.
Lecancer du poumon est la principale cause de décès
par cancer autant chez les hommes que chezles femmes. Même
si l’on considère que cette maladie peut être évitée en grande
partie – 90 pour cent des personnes atteintes fument ou ont
fumé – jusqu’à présent, la plupart des traitements administrés
se sont vélés trop toxiques ou inefficaces.
La nécessité de découvrir de nouvelles
formes de traitement est d’autant plus pressante
que, selon des statistiques récentes de la Société
canadienne du cancer, le pourcentage des femmes
atteintes d’un cancer du poumon a fait un bond
alarmant de 46 % depuis 15 ans.
Lepassage à l’Occident d’une mystérieuse
cure chinoise à base de plantes a débuté en
1996, lorsque le Dr Wah Jun Tze, endocrinologue
pédiatrique de renommée mondiale ayant étudié
à Harvard et vivant à Vancouver, a découvert
l’existence de ce médicament (surnommé ZSP), à
l’occasion d’une conférence médicale tenue à
Beijing, dans son pays natal.
Cecocktail végétal, amalgame de six
plantes, est emplo depuis plusieurs siècles en
médecine traditionnelle chinoise pour prévenir les
maladies. Son utilisation pour traiter le cancer ne
remonte toutefois qu’à 26 ans, depuis que la
Chinese Academy of Medical Sciences en a prouvé
l’efficacité contre le cancer de l’œsophage.
Intrigué par cette nouvelle, le Dr Tze a pos-
tulé que le traitement pourrait s’avérer tout aussi
bénéfique pour éliminer les lésions précancéreuses
dans le poumon. La perspective de découvrir un
remède si vital a incité le DrTze à créer une compa-
gnie, Global CancerStrategies, et à faire breveter
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Médecines
parallèles :
Étude d’un médicament à
base de plantes pour guérir
le cancer
Subventionneur : Lotte and John Hecht Memorial
Foundation
Bénéficiaire : BC Cancer Agency
Sommaire : Financer la recherche sur un
médicament non-traditionnel à base de
plantes pour le traitement préventif du
cancer du poumon.
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le médicament sous le nom d’ACAPHA (acronyme pour Anti-
Cancer Preventative Health Agent). Mais il fallait d’abord mener
une étude préliminaire en vue de confirmer la précision des
données chinoises et d’établir l’efficacité de ces plantes dans
les poumons.
Pendant ce temps, le Dr Stephen Lam, spécialiste des
tumeurs pulmonaires à la BC Cancer Agency et professeur à la
faculté de médecine de l’Université de la Colombie-Britannique,
s’armait d’un bronchoscope à lumière fluorescente et non
blanchedevantfaciliterla détection des tissus précancéreuxdans
les poumons. Résultat : letauxde détection s’amélioraitde171%.
Ces données impressionnantes ontattirél’attention du DrTze, qui
a sollicité la collaboration du Dr Lam pour réaliser l’étude préli-
minaire sous les auspices de la B.C. Cancer Agency.
Les médecins savaient qu’il ne serait guère facile
d’obtenir des fonds pour cette étude. Le Dr Lam explique : « Les
essais cliniques demédicaments à basedeplantes sontrarement
financés parlegouvernementou lesecteurpublicparcequenous
avons l’habitude, en Occident, de recourir à des médicaments
pharmaceutiques qui necontiennent en général qu’un composé
isolé, ce qui permet une étude pharmokinétique claire du mode
d’absorption et d’élimination par le corps humain. En revanche,
les médicaments à basede plantes comptent de multiples ingré-
dients; il est alors très difficile d’identifier l’ingrédient actif. En
médecine traditionnelle chinoise, on se soucie peu d’isoler
l’ingrédientactif. On croitque l’efficacitéd’un médicament résulte
plutôt de l’action synergétique de plusieurs ingrédients œuvrant
de concert que de l’effet d’un seul compo. »
Lefinancement de la recherche sur les
médicaments non-traditionnels à base de plantes
pose d’autres difficultés liées au procédé de « con-
trôleparles pairs » exigé parla plupartdes subven-
tionneurs conventionnels. Or il est souvent difficile,
expliquele DrLam, detrouverdes praticiens qui ont
l’expérience de médicaments à base de plantes et
peuvent ainsi être qualifiés de « pairs ». C’est
pourquoi la majorité des projets de recherche non
traditionnels se heurtent au refus des bailleurs de
fonds qui préfèrent financer des domaines qui leur
sont familiers.
Heureusement, quelques années plus tôt,
le Dr Tze avait fait la rencontre d’Angela Webster,
directrice générale de la Lotte and John Hecht
Memorial Foundation. Il savait que cette fondation
apportait son soutien à ce genre de recherche,
surtout lorsqu’elle s’appliquait aux formes paral-
lèles de traitement du cancer. Les deux causes
concordaient parfaitement.
Lotte et John Hecht sont venus au Canada
de l’Allemagne et de l’Autriche avant la Deuxième
Guerre Mondiale. Ils ont bâti leur fortune grâce à
l’exploitation d’une scierie et à des investissements
dans l’immobilier. En 1962, le couple a créé la 1945
Foundation avec les profits de la vente des actions
del’unede leurs compagnies, afin dese consacrerà
l’éducation économique et de venir en aide aux
personnes démunies.
Par la suite, la Fondation a orienté ses activités vers le
soutien à la recherche sur les médecines complémentaires et
parallèles, plus particulièrement celles qui concernent le
traitement du cancer, lorsque Lotte a découvert, dans les années
1970, qu’elle était atteinte de cette maladie. Les traitements
classiques administrés au début s’étant vélés impuissants à
faire reculer la maladie, le couple s’est alors tourné vers d’autres
formes de traitements.
Ils ont tôt fait de comprendre qu’aucune ressource pro-
fessionnellen’étaiten mesuredeles aiderà évaluerla pléthore de
traitements parallèles proposés sur le marc comme panacées,
dontbeaucoup ne s’appuyaientsuraucuneanalysesérieusecon-
firmant leurs propriétés curatives. Ensemble, ils ontconvenu que
ce domaine avait désespérémentbesoin de financement.
Au milieu des années 1990, après le décès des deux
fondateurs, la 1945 Foundation a été renommée Lotte and John
HechtMemorial Foundation. En général, la Fondation appuiedes
projets menés en Colombie-Britannique. Toutefois, lorsque la
recherche présente suffisamment d’intérêt, elle finance des pro-
jets ailleurs au Canada et aux États-Unis. Les bénéficiaires sont
sélectionnés d’après le degré de complémentarité de leurs
recherches. Plus précisément, indique Angela Webster, « nous
recherchons des projets peu susceptibles d’être financés par
l’Institut de recherche en santé du Canada ou d’autres subven-
tionneurs conventionnels parce qu’ils ne cadrent pas avec leur
mandat ou simplement parce qu’ils sont trop risqués. »
Lemontant de l’aide accordée par la Fondation est
flexible, sans plafond fixe. C’est la crédibilité du demandeur qui
penchedans la balance. Dans lecas del’ACAPHA, Angela Webster
confirme que l’excellente réputation du Dr Tze au
Canada et en Chine, ainsi que sa conception de la
médecine, ont motivé le comité d’étude à faire ce
saut sans précédent dans l’inconnu.
«Jecrois que personne n’aurait financé ce
projet si nous ne l’avions fait. Nous avons pris un
véritable risque, sans étude scientifique de base, ni
abondance de données sur l’ACAPHA, mais
l’avantage de travailler avec une équipe aussi
crédible l’a emporté. C’est le principal atout des
fondations privées, de jouir d’une plus grande
souplesse », reconnaîtAngela Webster.
LeDrLam renchérit, « L’accès aux subven-
tions d’organismes privés ou philanthropiques est
crucial pour le financement de la recherche médi-
cale car il est extrêmement difficile de convaincre
les subventionneurs conventionnels de consacrer
des fonds à l’essai clinique de médicaments à base
de plantes. Il permet de combler les lacunes dans
l’appui à ce que je considère comme une recherche
de pointe, alors que les autres bailleurs de fonds ne
comprennent pas toujours la signification de ce
genre d’étude. »
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C’est le principal atout des
fondations privées, de jouir
d’une plus grande souplesse.
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«C’est un événement marquant »,
déclare le Dr Lam. « Il s’agit de la première étude
scientifique nord-américaine consacrée à l’essai
d’un médicament complexe à base de plantes pour
prévenir le cancer. Si l’étude fonctionne comme
prévu, elle pourrait apporter une contribution
majeure à la prévention du cancer du poumon et à
nos modes denormalisation de composés d’origine
végétale pour les essais cliniques à venir. »
Encouragée par le succès de l’étude
préliminaire de l’ACAPHA, la Hecht Foundation
examine actuellement la possibilité de créer un
programme de financement conjoint afin d’ap-
puyer les travaux du Dr Lam sur d’autres applica-
tions éventuelles du médicament dans le traite-
ment des cancers du cerveau, du côlon, de la
bouche, de l’œsophage, du sein et de la prostate.
«Ceque le conseil d’administration de
la Hecht Foundation a trouvé de plus gratifiant
dans le financement de ce projet est d’avoir pris
un risque qui a rapporté bien plus que nous
l’aurions espéré », explique Angela Webster.
«Nous avons profité d’une rareoccasion de jouer
un rôle de catalyseur pour attirer d’autres fonds
en appui à la recherche sur l’ACAPHA et d’aider à
améliorer le taux de survie des personnes
atteintes d’un cancer très mortel. »
Pour plus d’information, visitez le site Internet
de la Fondation : www.hecht.org
Ce que le conseil d’administration de la Hecht
Foundation a trouvé de plus gratifiant dans
le financement de ce projet est d’avoir pris
un risque qui a rapporté bien plus que nous
l’aurions espéré.
Selon lui, les délais imposés par les subventionneurs
conventionnels pour traiter les demandes d’aide financière sont
beaucoup plus longs, leurs exigences plus strictes en terme de
rapports, etleurs modalités plus contraignantes au chapitre dela
propriété intellectuelle de telles découvertes.
En mars 1997, à peine six semaines après que le DrTze
ait présenté sa demande, le conseil de la Hecht Foundation
approuvait le versement de près de 90 000 $ pour importer
l’ACAPHA de Chine et entreprendre l’étude préliminaire. En 1998,
tout était en place pour l’étude. Vingt grands fumeurs et anciens
fumeurs présentant une dysplasie ou des lésions bronchiques
précancéreuses ont reçu des comprimés d’ACAPHA deux fois par
jour pendant six mois. Au terme des essais cliniques, l’examen
des bronches parimagerie fluorescente a révélé que la dysplasie
avait complètement disparu chez80 % des sujets.
Ces résultats étonnants ont attiré l’attention du U.S.
National Cancer Institute, qui s’efforçait vainement de découvrir
un agent de prévention du cancer du poumon depuis plus de
trente ans. À l’automne 2002, l’Institut a offert aux chercheurs
canadiens une subvention de 4 millions $ US pour procéder à un
essai cliniquede l’ACAPHA sur3500 volontaires, pendantcinq ans.
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