Accroître des investissements publics et privés en faveur d’un développement social et économique durable fin de développer le Québec autrement et de permettre à l’économie sociale de réaliser son plein potentiel, on ne peut se fier uniquement à l’engagement citoyen. Les entreprises collectives, à l’instar des entreprises à capital-actions, doivent pouvoir compter sur un ensemble de mesures de soutien dans une diversité de secteurs. A Mais l’essor de l’entrepreneuriat collectif fait en sorte que les produits financiers disponibles pour les entreprises collectives ne suffisent plus. Les promoteurs ont des projets de plus en plus ambitieux. Des secteurs économiques entiers restent sans outils financiers adaptés à leurs besoins. Les collectivités chérissent des projets dont la réalisation dépend de l’accès à une capitalisation adaptée et patiente. Le Chantier de l’économie sociale se réjouit de la reconnaissance grandissante de la contribution de l’économie sociale dans plusieurs secteurs économiques. Le soutien par des contributions gouvernementales directes doit se poursuivre et dans plusieurs cas être renforcé, notamment en ce qui concerne l’habitation communautaire, l’aide à domicile et dans les services aux personnes ou de proximité. Les investissements en infrastructures communautaires doivent également augmenter. Il n’y a pas de doute : la finance solidaire doit changer d’échelle pour être à même d’engendrer des impacts significatifs et pour contribuer pleinement à ce changement de cap dans le développement socioéconomique du Québec. Pour que l’économie sociale contribue pleinement au développement économique, social et culturel du Québec, il est non seulement essentiel qu’elle reçoive une part équitable des contributions publiques destinées au développement économique mais également d’accroî tre l’accès à du capital privé dont les finalités dépassent le rendement financier à court terme et qui tient compte des rendements sociaux, écologiques et culturels. Il ne s’agit pas d’un rêve ou d’une vue de l’esprit. Au moment où la confiance dans les institutions financières traditionnelles est au plus bas et que des critiques envers Wall Street se font entendre partout sur la planète, le domaine de la finance sociale et solidaire, qui repose sur une multitude d’innovations financières et qui est maintenant connu sous le vocable «Impact investment», est en croissance exponentielle à travers le monde. Partout, on cherche de nouvelles approches financières, de nouveaux instruments d’investissement et de nouvelles méthodes d’évaluation du risque et du rendement afin de prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux. Dans ce domaine, le Québec possède déjà des atouts intéressants. Les fonds de travailleurs, les fonds locaux, les outils financiers du Chantier de l’économie sociale (Réseau d’investissement social du Québec (RISQ) et Fiducie du Chantier de l’économie sociale), le Fonds d’investissement Montréal (FIM), les programmes d’Investissement Québec en faveur des entreprises collectives et le Réseau québécois du crédit communautaire représentent une base de départ très prometteuse. 14 Pour ce faire, plusieurs actions sont déjà en cours. Le Chantier de l’économie sociale travaille en collaboration avec un ensemble de partenaires afin de créer de nouveaux produits financiers dédiés à des secteurs précis. En s’inspirant d’expériences étrangères, le Chantier examine une diversité de stratégies, y inclut la création d’un marché secondaire de la finance solidaire, afin d’ouvrir la voie à une diversité d’investisseurs tout en respectant les missions et la gestion démocratique des entreprises collectives. Il est grandement temps que les innovations permettant l’investissement privé à des fins sociales soient consolidées au Québec et, surtout, qu’on prépare le terrain rapidement pour un changement d’échelle, tant au niveau de la taille des projets que de la place que joue l’économie sociale dans l’économie québécoise et, conséquemment, sa capacité à attirer une grande variété de capitaux privés. Impact Investment et normes d’investissement Le Global Impact Investment Network (GIIN) est un réseau international d’investisseurs (impact investors). On retrouve parmi ses membres des acteurs de la finance sociale, de la microfinance, de grands fonds institutionnels et des fondations. En 2007, le GIIN a créé les premières normes internationales pour la finance sociale – Impact Reporting and Investment Standards (IRIS). Le GIIN continue à améliorer cette initiative en partenariat avec la Fondation Rockefeller, le Fonds Acumen et le B Lab afin de développer un vocabulaire commun et un cadre permettant aux investisseurs de suivre et d’évaluer les retombées sociales et environnementales des projets et des véhicules d’investissement. Une version pilote d’IRIS est disponible sur une plateforme de dialogue. Référence http://iris.thegiin.org Un potentiel d’investissement considérable ! Selon l’enquête annuelle 2011 portant sur l’évaluation des besoins de financement des entreprises d’économie sociale au Québec, réalisée par le Chantier pour le compte de la Fiducie du Chantier de l’économie sociale, 179 projets sont actuellement en développement dans toutes les régions !"#!$%&'(")*)+,-.+/)"012." &"344"56" 7-/8&.)-..&9&/)." potentiels. La taille des projets est également en croissance constante. Ainsi, entre 2007 et 2011, le taux de projets ayant !/&"8+,&!1" &":"56"&)"0,!."&.)"0+..$" &";"<"=">4"<? S’inspirer des bonnes pratiques : l’émission d’obligations communautaires en Ontario Au cours des dernières années, de nouvelles approches ont été mises en place en Ontario pour faciliter l’investissement privé dans des initiatives collectives, notamment dans le secteur des énergies renouvelables. D’une part, les Solarshare Community Bonds ont été mis sur le marché financier par Solar Share, une coopérative sans but lucratif. À ce jour, ces obligations ont permis le démarrage de 18 projets (17 en milieu rural et 1 projet industriel) de production d’énergie solaire. Les obligations sont d’une durée de cinq ans et offrent un 1&)*!1"+//!&," &":"<? D’autre part, Zooshare Biogas Cooperative est une entreprise à but non lucratif créée à Toronto afin de construire une usine de transformation des biogaz en électricité à vendre et en chauffage pour des activités au zoo de Toronto. Ce projet de 5 M$ se capitalise par la vente d’obligations aux citoyens. Trois millions et &9-" 7*%,-@+)-*/." &".&0)"+/."="!/")+!A" 7&/8-1*/"B"<" sont offerts. Question ouverte Est-ce que l’émission publique d’obligations ou de parts privilégiées directement par des coopératives ou OBNL est une stratégie appropriée dans le contexte québécois ? Un milliard par année pour les institutions financières communautaires américaines Proposition Soutenir les acteurs de l’économie sociale dans la mobilisation de capitaux privés à des fins sociales (finance solidaire) par un appui accru au développement de nouveaux produits et outils de capitalisation privés adaptés aux finalités et aux spécificités des entreprises tout en assurant un renforcement des investissements publics dans des secteurs stratégiques. Ce soutien doit se réaliser notamment par des garanties sur le capital, un partage du risque, des prêts à taux préférentiel ou sans intérêt et des mesures fiscales tout en assurant d’obtenir une part équitable des contributions publiques (subventions et mesures fiscales) destinées aux entreprises du Québec. En 2010, le gouvernement des États-Unis a mis en place le CFDI Bond Guarantee Program (Programme de garantie des obligations communautaires). La législation ordonne au Trésor américain &"@+1+/)-1"=">44<" &."*%,-@+)-*/." 7!/&" !1$&"9+A-9+,&" &" 30 ans émises par des institutions financières de développement communautaires (CDFI) à la hauteur de 10 par année d’une valeur d’un minimum de 100 M$ chacune. Ce programme sur trois ans permet à des institutions financières communautaires d’offrir des prêts ou du capital patient pour la revitalisation des quartiers, l’accès à du logement abordable, à l’emploi et à la propriété de leur propre entreprise pour des gens à faible revenu et au développement économique dans des milieux ruraux dévitalisés. Question ouverte Quels sont les nouveaux besoins ou les secteurs prioritaires pour la création de nouveaux produits financiers pour des entreprises collectives ? 15