« Accidents vasculaires cérébraux : mettre toutes les chances de son côté. > SOMMAIRE » Pourquoi des Journées de la Fondation Recherche Médicale ? p. 2 Comment éviter l’accident [AVC] ? p. 3 Premiers symptômes… et la course contre la montre commence ! p. 4 Optimiser la récupération des fonctions perdues p. 5 Débat animé par Laurent Romejko, journaliste de France 2. Quels médicaments pour demain ? p. 6 Document disponible sur le site web de la Fondation Recherche Médicale www.frm.org Les réponses à vos questions p. 8 Publication : novembre 2005 À propos de la Fondation p. 15 Crédits photographiques : Fondation pour la Recherche Médicale. Propos recueillis à l’occasion de la 4è édition des Journées de la Fondation Recherche Médicale, sur le thème « Sommes-nous malades de notre environnement ? ». Le présent débat s’est déroulé le 12 septembre 2005, à l’auditorium du Musée des BeauxArts de Caen. Avec la participation de : > Dr Eric T. MacKenzie Directeur de recherche dans l'UMR 6185 Université de Caen - CNRS "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques", au sein du GIP Cyceron de Caen. > Dr France Woimant Praticien hospitalier dans le service de neurologie de l’hôpital Lariboisière Fernand Widal, Paris (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris), et Présidente de la Société française neurovasculaire. > Pr Alain Yelnik Chef du service de médecine physique et de réadaptation à l’hôpital Lariboisière Fernand Widal, Paris (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris). > Pr Alain Buisson Co-responsable de l'équipe de recherche "Pathologie de la neurotransmission" à l'UMR 6185 Université de Caen - CNRS "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques", au sein du GIP Cyceron de Caen. La Fondation pour la Recherche Médicale a été créée en 1947 pour apporter une aide rapide et décisive aux chercheurs dans tous les domaines de la recherche médicale. La Fondation a ainsi participé à toutes les grandes découvertes médicales françaises. Grâce uniquement aux dons et legs privés, elle soutient chaque année 1 chercheur sur 3 et finance environ 700 programmes de recherche. La Fondation Recherche Médicale remplit également une mission d’information pour favoriser le dialogue entre les Français et les chercheurs. À ce titre, elle s’est vue attribuer par le gouvernement le label « campagne d’intérêt général 2005 ». Pour faire un don : Bullletin à découper en dernière page de ce document. À retourner à : Fondation pour la Recherche Médicale 54, rue de Varenne - 75335 Paris cedex 07 Tél. : 01 44 39 75 75 - Fax : 01 44 39 75 99 ou sur sur www.frm.org (rubrique "aidez la recherche") Accidents vasculaires cérébraux : mettre toutes les chances de son côté y www.frm.org 1 Pourquoi des « Journées de la Fondation Recherche Médicale » ? Plus que jamais, les liens entre environnement et santé sont aujourd’hui au cœur des inquiétudes des Français. Pollution de l’air et de l’eau, risques alimentaires, contamination microbiologique et chimique, rayonnements, stress et bruit… sont autant de facteurs incriminés dans nombre de maladies et auxquels nous sommes tous potentiellement exposés. En outre, les maladies liées directement ou indirectement à notre environnement et à nos modes de vie sont en constante augmentation : cancers, maladies cardiovasculaires, allergies, obésité, stérilité… À titre d’exemple, on estime que 7 à 20 % des cancers seraient imputables à des facteurs environnementaux ! Pourtant, aujourd’hui encore, nombre de questions restent en suspens… Devant le besoin d’information que vous nous manifestez chaque jour, la Fondation Recherche Médicale a décidé en septembre 2005 d’ouvrir ce débat avec vous, en présence des meilleurs experts. La 4e édition des Journées de la Fondation Recherche Médicale1 a posé, en effet, la question « Sommes-nous malades de notre environnement ? ». Au cours de six débats sur six thématiques différentes et dans six villes de France, un public venu nombreux a pu dialoguer avec les chercheurs et trouver réponses à ses questions. Face à ce questionnement, la Fondation Recherche Médicale a également choisi de lancer, dès 2004, le programme « Défis de la recherche en allergologie2 ». C’est une réelle incitation au développement de recherches sur les origines moléculaires et cellulaires des allergies et sur les pistes de traitements. C’est également une initiative ambitieuse qui n’aurait pu voir le jour sans la générosité et la confiance de ses donateurs - peut-être vous ? -. Cette nouvelle édition des Journées de la Fondation Recherche Médicale est finalement l’occasion de mieux comprendre les enjeux de la recherche et de mesurer le rôle essentiel de la Fondation Recherche Médicale. Joëlle Finidori, Directrice des affaires scientifiques de la Fondation Recherche Médicale 1 visitez le site consacré à l’événement http://www.jfrm.org pour plus d’infos, consultez la page http://www.frm.org/demandez/dem_specifiques_allergie.php 2 Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 2 Comment éviter l’accident ? Dr France Woimant Praticien hospitalier dans le service de neurologie de l’hôpital Lariboisière Fernand Widal, Paris (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris), et Présidente de la Société française neurovasculaire. Dr Eric T. MacKenzie Directeur de recherche dans l'UMR 6185 Université de Caen - CNRS "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques", au sein du GIP Cyceron de Caen. Pr Alain Buisson Co-responsable de l'équipe de recherche "Pathologie de la neurotransmission" à l'UMR 6185 Université de Caen - CNRS "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques", au sein du GIP Cyceron de Caen > L’accident vasculaire cérébral Dr France Woimant – L’accident vasculaire cérébral est complexe et très varié. Il peut se traduire par un mal de tête brutal et fort, suivi d’une paralysie du côté gauche, d’un coma et d’un décès dans les 24 ou 48 heures. Il peut également se traduire par une brutale paralysie de la moitié du corps et des difficultés d’expression, avec parfois des séquelles. Enfin, l’accident vasculaire cérébral peut se traduire par des troubles visuels légers. Un accident vasculaire cérébral correspond à la survenue brutale d’une lésion du cerveau, secondaire à une lésion vasculaire. Les troubles seront proportionnels à la taille de la lésion. Selon que la zone du cerveau touchée est celle de la motricité, du langage ou de la vision, les personnes présentent une paralysie brutale, des difficultés à s’exprimer et à comprendre ce qu’on leur dit, ou encore des troubles visuels. Ce qui rend la lésion vasculaire complexe – comparée par exemple à un infarctus du myocarde –, est qu’elle peut être de deux types : le vaisseau peut se rompre et entraîner une hémorragie cérébrale, ou bien se boucher et provoquer un infarctus cérébral. Il y a quatre fois plus d’infarctus cérébraux que d’hémorragies cérébrales. > Qui est concerné ? L’accident vasculaire cérébral est une pathologie très fréquente : on estime qu’il y a chaque année 130 à 150 000 cas d’accidents vasculaires cérébraux en France, davantage que d’infarctus du myocarde. En d’autres termes, un accident vasculaire cérébral survient toutes les quatre minutes en France. Cette pathologie touche préférentiellement les sujets âgés de 70 ans et plus. Elle peut toutefois toucher des sujets plus jeunes : 5 % des personnes ayant un accident vasculaire cérébral sont âgées de moins de 40 ans. > Les facteurs de risque et de protection Les facteurs de risque lèsent progressivement les artères. L’hypertension artérielle est un facteur de risque majeur des accidents vasculaires cérébraux. Le tabac, le diabète et le cholestérol sont également des facteurs de risque. Si l’on traite son hypertension artérielle et que l’on arrête de fumer, le risque d’accident vasculaire cérébral diminue de manière importante. Parallèlement à cela, il existe des facteurs protecteurs, comme la pratique quotidienne d’exercice physique. Le rôle de l’alcool est plus ambigu : boire en moyenne un verre par jour pour les femmes et deux verres par jour pour les hommes protège de l’accident vasculaire cérébral. Par contre, une consommation plus importante augmente le risque. Le fait d’avoir une alimentation équilibrée, sans trop de sel ni de graisses protège également de l’accident vasculaire cérébral. Pour éviter cet accident, il faut respecter ces règles d’hygiène de vie mais également faire dépister une éventuelle hypertension artérielle. En France, une personne sur deux ne sait pas qu’elle est hypertendue. Parmi les personnes hypertendues, une sur deux ne se traite pas, et parmi celles qui sont traitées, une sur deux est mal traitée. L’hypertension multiplie par dix le risque de faire un accident vasculaire cérébral : ceci démontre l’importance de se faire prendre sa tension artérielle, de se faire dépister et de se faire traiter. Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 3 > Notre mode de vie augmente-t-il le risque d’accident vasculaire cérébral ? Dr Eric T. Mackenzie – Oui et non ! Le nombre d’accidents vasculaires cérébraux chez les jeunes de pays industrialisés diminue, mais il augmente chez les populations toujours plus âgées. Il est peu probable que la vie d’une personne âgée de 80 ans sera modifiée. Un quart des personnes qui subissent un accident vasculaire cérébral va mourir, un quart sera tellement handicapé qu’il sera entièrement dépendant de leur entourage, un quart présentera un net dysfonctionnement mais pourra vivre de manière indépendante, et le dernier quart récupérera (notamment les sujets jeunes). Le coût socio-économique de cette maladie est énorme, mais l’impact médiatique et sociétal est peu important, car elle concerne essentiellement une population très âgée. Pr Alain Buisson – Nous savons que la population des pays industrialisés vieillit de plus en plus. Cette pathologie deviendra donc extrêmement fréquente. Il sera nécessaire de la prendre en charge de manière peut-être plus efficace. Premiers symptômes… et la course contre la montre commence ! Dr France Woimant Praticien hospitalier dans le service de neurologie de l’hôpital Lariboisière Fernand Widal, Paris (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris), et Présidente de la Société française neurovasculaire Les symptômes qui doivent alerter Une paralysie brutale d’un hémicorps (bras, jambe, visage), un trouble brutal de la parole (plus de parole ou confusion de mots), un trouble visuel brutal ou encore la survenue simultanée des trois, qu’il y ait ou non des maux de tête associés, doivent faire évoquer l’accident vasculaire cérébral et faire appeler le 15 pour être amené à l’hôpital. Chaque minute compte : lorsqu’un vaisseau se bouche ou s’occlut, l’oxygène transporté par le sang, n’arrive plus jusqu’aux cellules cérébrales, qui s’asphyxient et meurent. > La prise en charge médicale : chaque minute compte Les médecins ont peu de temps pour limiter l’expansion de cet infarctus cérébral. Il existe des thérapeutiques simples pour limiter l’extension de l’infarctus : apporter de l’oxygène, éviter que le taux de sucre sanguin ne soit trop élevé, éviter la fièvre. Si le malade arrive précocement à l’hôpital, on peut lui administrer un traitement thrombolytique (par exemple la fibrinolyse, utilisée pour l’infarctus du myocarde) qui liquéfie le caillot et rétablit la circulation dans l’artère. Ce traitement doit être administré dans les trois heures qui suivent l’accident vasculaire : cela signifie que les patients ou leur entourage doivent reconnaître les symptômes et arriver rapidement à l’hôpital. De plus, les symptômes sont les mêmes, qu’il s’agisse d’un infarctus ou d’une hémorragie. Pour les différencier, il est donc nécessaire de faire des radios, par imagerie (scanner) ou résonance magnétique (IRM). Le délai est donc court. Au-delà de ces trois heures, les risques sont très importants, et ce traitement aggrave l’état du patient. Il s’agit véritablement d’une course contre la montre. Il est donc impératif d’appeler rapidement le 15 afin d’être amené dans un hôpital qui compte un service de neurologie ou une unité neurovasculaire (qui sont encore peu nombreuses). > Les unités neurovasculaires spécialisées La majorité des patients arrivent à l’hôpital plus de trois heures après l’accident vasculaire cérébral et, de ce fait, ne peuvent pas bénéficier du traitement thrombolytique. La prise en charge par l’unité neurovasculaire spécialisée reste toutefois très efficace, car elle repose sur une équipe dédiée et formée à l’accident vasculaire cérébral. Les infirmières qui connaissent la pathologie prennent mieux en charge les patients et sauront qu’il faut être vigilant lors de l’alimentation d’un patient qui vient de faire un accident vasculaire cérébral, car les muscles de sa gorge peuvent être paralysés et il peut s’étrangler en avalant. Les kinésithérapeutes débutent immédiatement la rééducation et positionnent correctement le membre paralysé afin d’éviter la survenue d’attitude vicieuse. Des orthophonistes Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 4 réapprennent aux patients à parler. Des psychologues peuvent également intervenir auprès des patients et de leur famille. Enfin, les médecins prescrivent des traitements en fonction de la cause de l’accident et coordonnent la prise en charge. Ils déterminent, après la phase aiguë, dans quel service de rééducation envoyer leurs patients. > L’inégalité des équipements des hôpitaux en France Il n’y a actuellement qu’une trentaine d’unités neurovasculaire en France, spécialisées dans la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux. La situation est toutefois en train de s’améliorer : le Ministère a demandé l’élaboration d’un plan d’organisation des soins. Actuellement, chaque région mène une réflexion sur l’organisation de la neurologie au sein de ses hôpitaux, afin que les patients arrivent directement dans ces unités spécialisées. En Ile-de-France, ces unités neurovasculaires passeront de cinq à onze dans les mois qui viennent. En Normandie, une unité neurovasculaire ouvrira prochainement au CHU de Caen. Les choses se mettent progressivement en place. Il faut espérer que la prise en charge deviendra rapidement la même que celle de l’infarctus du myocarde, dans laquelle un malade souffrant d’une douleur dans la poitrine est directement amené par le SAMU dans une unité de soins intensifs cardiologiques. Optimiser la récupération des fonctions perdues Pr Alain Yelnik Chef du service de médecine physique et de réadaptation à l’hôpital Lariboisière Fernand Widal, Paris (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris) > Les trois aspects de la rééducation fonctionnelle La rééducation s’adresse à tous les symptômes de l’accident vasculaire, avec plus ou moins de succès : paralysie, aphasie (trouble de la parole), trouble de la sensibilité ou de la vision, troubles urinaires, et quelle que soit la cause de l’accident (hémorragie ou infarctus). Le premier aspect de la rééducation, très important, consiste à éviter l’apparition de complications supplémentaires. Si l’on ne s’occupe pas d’un patient hémiplégique victime d’un accident cérébral, il souffrira rapidement d’un raidissement progressif des membres, qui peut survenir dès les premiers jours qui suivent l’accident. Cette complication n’est pas systématique et peut être évitée. Dans ces cas, la rééducation (essentiellement la kinésithérapie) doit intervenir très précocement. Dans certaines aphasies, les personnes peuvent prendre un tic de la parole (répétition de mots) : dès les premiers jours, il est important de les empêcher d’acquérir ce tic et de s’enfermer dans un stéréotype. Grâce aux systèmes d’imagerie et notamment d’IRM, on sait que la rééducation joue un véritable rôle sur l’amélioration neurologique et la récupération du cerveau. La rééducation va ainsi aider le cerveau à mettre en œuvre des phénomènes de plasticité cérébrale. Il s’agit de la capacité qu’a le cerveau de modifier le fonctionnement des neurones. Si les neurones responsables de la mobilité de la main sont abîmés, ses voisins, qui jouaient un autre rôle, sont capables de modifier leur fonctionnement, pour peu qu’on le leur demande en les sollicitant et en les « bousculant » ! On sait à présent qu’en plus des complications précédemment citées, un patient ayant subi un accident vasculaire et qui est laissé tranquillement sans rien faire ne sollicite pas son cerveau. Il faut donc solliciter le cerveau de multiples manières, avec des exercices très différents, pour l’obliger à trouver le moyen de récupérer ce qui ne fonctionne plus bien. La troisième partie de la rééducation consiste, lorsque malheureusement les parties de cerveau abîmées sont trop importantes et que le patient ne peut plus bouger la main ou le pied, à apprendre à vivre malgré cela. Même si tout n’est pas revenu, on peut marcher, manger, s’habiller, écrire, conduire sa voiture. Cet aspect de la rééducation, qui consiste à retrouver la fonction d’une autre manière, est différent. > Le moment de la prise en charge par la rééducation Il est capital que la rééducation intervienne dès le premier jour, afin d’empêcher les Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 5 complications. Toutes les unités de médecine neurologique doivent avoir la possibilité de proposer de la kinésithérapie et de la rééducation orthophonique, au moins sur cet aspect préventif. Le travail consistant à réveiller le cerveau ne débute pas dans les premiers jours et peut être différé sur les semaines qui suivent, car les patients sont souvent fatigués à la suite de leur accident vasculaire. Il y a donc une période de rééducation « passive », pendant laquelle ce sont davantage l’orthophoniste, le kinésithérapeute et l’infirmière que le patient qui travailleront. Au fur et à mesure où l’état général du patient s’améliore (bonne tension, bonne vigilance), on lui demandera une participation forte, qui permettra d’engager le travail sur la plasticité du cerveau. > Les risques d’une rééducation trop précoce Si un patient souffrant d’une importante hémiplégie est mis debout trop rapidement alors que sa tension artérielle n’est pas encore bien régulée, son cerveau sera mis en souffrance. Il n’est pas bon de demander trop d’efforts à une personne trop fatiguée. Il y a une phase de progression au cours de laquelle l’équipe médicale doit s’adapter à ce que peut supporter le patient. La rééducation des premiers jours n’est pas intensive, mais doit être quotidienne et avoir parfois lieu plusieurs fois par jour. La rééducation prend place dans l’unité neurovasculaire et dans le service de médecine où le patient est éventuellement placé. La suite de la rééducation doit se faire dans une unité spécialisée de médecine physique et de réadaptation, spécialisée pour les patients souffrant de pathologies neurologiques (vasculaires ou autres), afin de leur proposer l’éventail de récupérations dont elle dispose. > Rééducation et recherche La rééducation a sa place dans la recherche, même si celle-ci est plus récente que la recherche sur les médicaments. Depuis une quinzaine d’années, on sait établir des protocoles afin de valider les techniques utilisées en rééducation. Il y a donc une véritable recherche en médecine physique et réadaptation : la courbe des publications internationales sur le sujet est exponentielle. Toutes les recherches sont complémentaires, et il n’est plus question de parler de recherche dans le cadre de l’accident vasculaire cérébral sans y inclure la recherche en rééducation. Quels médicaments pour demain ? Dr Eric T. MacKenzie Directeur de recherche dans l'UMR 6185 Université de Caen - CNRS "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques", au sein du GIP Cyceron de Caen. Pr Alain Buisson Co-responsable de l'équipe de recherche "Pathologie de la neurotransmission" à l'UMR 6185 Université de Caen - CNRS "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques", au sein du GIP Cyceron de Caen. > Trois pistes de recherche Dr Alain Buisson – Lorsque la pathologie est reproduite chez l’animal, les caractéristiques sont les mêmes que celles qui existent chez l’homme. La course contre la montre existe aussi, et les traitements sont d’autant moins efficaces qu’ils sont appliqués tardivement. Les modèles animaux ont permis de bien comprendre le mécanisme à l’origine d’un phénomène spécifique au cerveau : celui de l’expansion de la lésion, qui va atteindre des zones potentiellement saines du cerveau et qui ne devraient pas mourir. La première approche consiste à agir sur le comportement vasculaire : le r-tPA, une molécule testée et acceptée en essai clinique, semble produire des effets potentiellement bénéfiques sur les patients traités. Une équipe de Cyceron travaille sur le développement d’une nouvelle molécule, la desmotéplase (un fibrinolytique existant dans la salive des chauves-souris vampires), qui aurait des propriétés favorables sur le traitement des accidents vasculaires cérébraux. Il existe une interaction entre fibrinolytique (destruction des caillots) et fonctionnement cérébral. La deuxième approche consiste à faire en sorte que le cerveau soit plus résistant à l’asphyxie provoquée par l’accident. On sait Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 6 que les neurones se mettent à fonctionner anormalement : en intervenant sur ce dysfonctionnement, on peut leur permettre de survivre plus longtemps au stress lié à la perte de circulation cérébrale. Ces pistes de stratégie de neuroprotection sont très importantes. La troisième approche étudie l’hypothèse consistant à améliorer la rééducation par une intervention pharmacologique, voire de remplacer ces cellules mortes par de nouvelles cellules. Cette thématique des cellules souches est abordée dans le cadre des recherches de la structure Cyceron. > Traitements contre les hémorragies cérébrales Dr Alain Buisson - Actuellement, le traitement des hémorragies cérébrales fait essentiellement appel à l’intervention de neurochirurgiens qui travaillent dans l’urgence. Chez l’animal, on étudie si l’injection de petites quantités de sang (hématomes) au niveau du cerveau perturbe les neurones. Le sang, lorsqu’il n’est plus dans un vaisseau suite à la rupture de ce dernier, tue les neurones avec lesquels il est en contact direct. Le mécanisme de ce processus est connu. A l’avenir, il sera peut-être possible de donner des molécules empêchant les neurones de subir cette agression par le sang. Là encore, la neuroprotection est applicable sur les hémorragies cérébrales. > L’avenir de la recherche sur les accidents vasculaires cérébraux Dr Eric T. MacKenzie - Il y a une extension progressive de la lésion du cerveau. Peut-être faut-il étudier les accidents vasculaires cérébraux de la même façon que l’on étudie les cancers, c'est-à-dire selon la méthode du fast track, où toutes les études des étapes de l’évaluation clinique sont accélérées. Aujourd’hui, pour savoir si un médicament a un effet bénéfique pour les accidents vasculaires cérébraux, il faut recruter environ 2 000 malades, ce qui implique un nombre très important de centres spécialisés et des IRM pour chaque malade, et en conséquence présente un coût très élevé. Dr Alain Buisson - La recherche prend du temps et évolue : le contact permanent entre les cliniciens et les chercheurs a amené ces derniers à réfléchir sur leur recherche au vu des évènements cliniques. Lorsqu’un facteur aggravant a été identifié, les industries pharmaceutiques ont produit des molécules qui semblaient avoir le profil le plus efficace possible. Confrontées aux essais cliniques, ces molécules n’ont rien donné. La déception a été forte, et les chercheurs ont décidé de revoir leur stratégie. Il y a eu une période de flou, au cours de laquelle ils se sont aperçus qu’ils ne discutaient pas avec les cliniciens. Aujourd’hui, l’espoir revient et les chercheurs prennent en compte les éléments cliniques (facteurs de risques, fenêtre d’opportunité thérapeutique, quand traiter, quel type d’animal tester…). Ces dernières années, la recherche est ainsi devenue plus efficace et plus proche des préoccupations cliniques. A moyen terme, ceci conduira à l’apparition de nouvelles molécules qui auront des effets bénéfiques. Laurent Romejko – En quoi la Fondation pour la Recherche Médicale a-t-elle contribué à vos travaux ? Dr Eric T. MacKenzie – Depuis des années, la FRM aide des étudiants postdoctorants avant qu’ils n’entrent dans les grands organismes, et en nous attribuant des subventions non fléchées, c’est-à-dire permettant d’acheter des équipements, de financer le fonctionnement de routine, et d’être compétitif sur le plan international. Les seules subventions d’Etat ne permettent pas de mener une véritable recherche de qualité. Les institutions telles que la FRM sont donc d’une importance majeure. Pr Alain Buisson – La FRM est un partenaire permanent ! Effectivement, elle a subventionné des étudiants qui avaient un besoin de financement, mais elle m’a également aidé, en m’attribuant une bourse de soudure à la fin de ma thèse et avant mon départ aux Etats-Unis. Actuellement, nos étudiants partent facilement faire des recherches à l’étranger, mais leur retour devient de plus en plus difficile. Il est souvent rendu possible grâce à la Fondation pour la Recherche Médicale. Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 7 Les réponses à vos questions « Une prise quotidienne d’aspirine en complément d’un traitement hypotenseur est-elle efficace pour prévenir l’accident vasculaire cérébral ? » « Existe-t-il un dépistage préventif de l’accident vasculaire cérébral ? » Dr France Woimant – En prenant des doses quotidiennes d’aspirine, des médecins américains ont évité l’infarctus cérébral, mais ont accru leur risque d’hémorragie cérébrale. Une étude publiée récemment montre que l’aspirine, chez la femme, prévient l’infarctus cérébral sans augmenter de manière importante le risque d’hémorragie cérébrale. Dr France Woimant – Le dépistage préventif correspond en fait au dépistage des facteurs de risque (hypertension artérielle, cholestérol, diabète) et également des signes prémonitoires des accidents vasculaires cérébraux. En effet, une personne peut présenter des signes brefs (accidents transitoires) qui annoncent l’accident vasculaire cérébral. Par exemple, il peut s’agir de la survenue très brutale d’un trouble visuel, comme un rideau qui descendrait devant un œil et remonterait après deux minutes, ou encore d’une paralysie transitoire de la main. Ces symptômes signifient que le risque de faire un accident vasculaire cérébral avec des séquelles, est important. Environ 20 % des personnes hospitalisées pour hémiplégie ont présenté ces symptômes transitoires au cours des jours précédant l’accident. Une personne doit s’inquiéter si brutalement elle ne peut plus parler, bouger un côté du corps, ou si elle a un trouble visuel brutal qui disparaît au bout de quelques minutes. Il faut donc être très attentif à ces symptômes et en parler immédiatement à son médecin, afin d’en comprendre la cause et d’éviter une récidive. « Plusieurs flashs lumineux pendant plusieurs jours peuvent-ils signaler un début d’hypertension ? » Dr France Woimant – Les manifestations d’infarctus transitoires correspondent plutôt à des signes déficitaires : il s’agirait donc d’assombrissements plutôt que de flash lumineux. « L’utilisation des statines est-elle efficace dans la prévention des accidents vasculaires ? » Dr France Woimant – Des études ont clairement montré que les personnes qui ont fait un infarctus du myocarde et qui par la suite prennent des statines diminuent leur risque de faire un accident vasculaire cérébral, qu’elles présentent ou non un taux de cholestérol trop élevé. « L’absorption répétée de cortisone favorise t’elle les accidents vasculaires cérébraux ? » Dr France Woimant – Les corticoïdes augmentent de façon très modérée le risque d’accident vasculaire cérébral. « Quels sont les risques de récidive d’accident vasculaire cérébral ? » Dr France Woimant – Ces risques existent mais sont différents en fonction de chacun, car ils dépendent de la cause de l’accident vasculaire cérébral. Si une personne présente une insuffisance cardiaque, un cœur dilaté, une hypertension artérielle, ou un diabète, elle a un risque important de faire une récidive. Par contre, une personne dont l’accident vasculaire cérébral est dû à un rétrécissement de la carotide, et qui a été opérée de cette dernière, présentera un risque de récidive faible. La récidive des accidents vasculaires cérébraux se traite donc au cas par cas et selon qu’il s’agit d’un infarctus ou d’hémorragies. « Les migraines ophtalmiques sont-elles un facteur de risque ? » Dr France Woimant – La migraine ophtalmique (migraine avec aura) a été reconnue comme facteur de risque d’accident vasculaire cérébral chez les gens jeunes et notamment les femmes de moins de 45 ans, qui associent d’autres facteurs de risque tels le tabac et la contraception orale. Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 8 « Existe-t-il un facteur héréditaire aux accidents vasculaires cérébraux ? » Dr France Woimant – L’hérédité a une influence sur les accidents vasculaires cérébraux par le biais de l’hypertension artérielle ou du diabète qui, eux, peuvent être héréditaires. « Quelle est l’importance du risque par rapport au traitement hormonal substitutif ? » Dr France Woimant – Pendant longtemps, on a pensé que le traitement hormonal substitutif était un protecteur vasculaire. Des études américaines récentes ont toutefois montré qu’il était en fait un facteur de risque vasculaire, notamment au cours des six premiers mois du traitement. Il faut toutefois signaler que les Américains n’utilisent pas le traitement hormonal substitutif de la même manière que les Européens : les doses d’œstrogènes et de progestatifs sont très supérieures à celles employées en Europe. « Dans la revue Recherche & Santé [la revue de la Fondation pour la Recherche Médicale, ndlr], le Dr Denis Vivien a pointé les effets délétères du t-PA : les médicaments classiquement donnés contre les affections cardio-vasculaires contiennent-ils du tPA ? » Dr Denis Vivien [présent dans la salle] – Les traitements et la prise en charge dans les unités neuro-vasculaires sont forcément bénéfiques. Des travaux réalisés au centre Cyceron de Caen ont montré qu’un des facteurs permettant la thrombolyse est également susceptible de faire sur-fonctionner les neurones, qui dans ce cas ont besoin de davantage d’oxygène. Lorsqu’un vaisseau cérébral se bouche, les neurones sont privés d’oxygène : s’ils en ont encore plus besoin, on peut arriver à une « surchauffe» puis une mort neuronale. Dans la mesure du possible, il faut essayer d’arriver très tôt dans l’unité neurovasculaire pour permettre la thrombolyse dans un délai tel que cette même molécule ne pourra pas atteindre les neurones. Actuellement, plusieurs sociétés pharmaceutiques développent des thrombolytiques de deuxième ou troisième génération qui n’auront que des effets bénéfiques et n’entraîneront pas de surchauffe neuronale. Il s’agit de résultats de travaux de recherche visant à améliorer le traitement des accidents vasculaires cérébraux : actuellement, le traitement avéré et efficace est bien celui de la thrombolyse. Dr France Woimant – Effectivement, ce traitement thrombolytique est dangereux s’il n’est pas administré dans les bonnes conditions et par des équipes spécialisées. L’infarctus cérébral peut en effet risquer d’être transformé en hémorragie cérébrale, avec des conséquences graves. Le r-tPA est une molécule très efficace pour déboucher le vaisseau, mais elle entraîne un risque d’hémorragie cérébrale, et elle ne peut pas être administrée par les urgences d’un hôpital lambda. Seuls des neurologues spécialistes des pathologies neuro-vasculaires peuvent la manipuler, avec un faible risque d’hémorragie si les contre-indications au traitement sont parfaitement respectées. Ces molécules ne peuvent être administrées au domicile du patient car il est nécessaire, au préalable, de réaliser un examen d’imagerie (scanner ou IRM). Lorsqu’une personne présente une douleur dans la poitrine, elle appelle le SAMU qui réalise un électrocardiogramme et diagnostique un infarctus du myocarde : le traitement thrombolytique peut être administré directement dans le camion du SAMU. En cas d’accident vasculaire cérébral, le patient doit d’abord arriver à l’hôpital, passer une imagerie qui confirme s’il s’agit bien d’une artère bouchée, et peut ensuite bénéficier de ce traitement, qui a beaucoup plus de complications lorsqu’il est administré pour le cerveau que pour le cœur. En cas d’accident vasculaire cérébral, la fenêtre thérapeutique est très brève. « Y a-t-il une relation de cause à effet entre le ronflement, l’apnée du sommeil, l’hypertension et l’accident vasculaire Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 9 cérébral ? » Dr France Woimant – Des études actuelles semblent montrer que l’apnée du sommeil et certains ronflements seraient effectivement un facteur de risque de l’accident vasculaire cérébral. « L’aspirine a-t-elle un effet sur les accidents vasculaires cérébraux ? » Dr France Woimant – En cas d’infarctus cérébral, une majorité de patients ne peut pas suivre le traitement de la thrombolyse. Aux Etats-unis, où la thrombolyse est autorisée depuis 10 ans, 5 % des patients sont thrombolysés. En Europe, la thrombolyse est autorisée depuis seulement 2 ans, et ce pourcentage est encore plus faible. Lorsqu’il n’y a pas de thrombolyse, c’est l’aspirine qui est donnée en cas d’infarctus : son efficacité est modérée mais intervient dès la phase aiguë et prévient le risque de refaire un infarctus cérébral. « Les hôpitaux ne sont pas toujours à proximité : comment se comporter avec la personne qui présente un accident vasculaire cérébral ? » Dr France Woimant – Il faut impérativement laisser la personne allongée, afin que le sang arrive au cerveau, jusqu’à ce qu’elle soit prise en charge à l’hôpital ou par le médecin. Il faut essayer d’aller le plus rapidement possible à l’hôpital : le schéma d’organisation de soins a pour objectif de réaliser un maillage sur les différentes régions afin que malades puissent rapidement se rendre dans un hôpital de proximité. Actuellement, une formation spécialisée sur cette pathologie vasculaire cérébrale existe pour les médecins, pour qu’ils soient plus nombreux à pouvoir répondre à cette pathologie. En cas d’accident vasculaire cérébral, la tension artérielle a tendance à s’élever : il faut impérativement la laisser s’élever. Si vous arrosez votre jardin avec un tuyau rétréci, le débit sera faible. Pour augmenter ce débit, vous allez augmenter la pression. Le processus est le même pour un accident vasculaire cérébral : le sang circule mal et arrive difficilement au cerveau. L’organisme réagit en augmentant la pression artérielle. Dr Eric T. MacKenzie – Très souvent, le conjoint pense que la personne fait une grasse matinée ! Il téléphone ensuite au généraliste, qui se déplace à domicile. Le patient est ensuite transporté à l’hôpital, où il n’y a pas toujours de neurologue. Dans de nombreux pays, les patients n’arrivent jamais dans une unité spécialisée dans le délai critique. La France est mieux lotie que d’autres pays : en Grande-Bretagne, il y a un seul centre d’urgence pour les accidents vasculaires cérébraux, pour une population équivalente à celle de la France. Dr France Woimant – Effectivement, les accidents vasculaires cérébraux qui surviennent la nuit posent problème. Ils ne sont pas toujours accompagnés d’une douleur à la tête, et une paralysie qui survient pendant le sommeil peut passer inaperçue jusqu’au réveil. L’heure de survenue de l’accident ne peut pas être datée, et le traitement thrombolytique ne peut pas être administré. Au contraire, la douleur associée à un infarctus du myocarde réveille le malade. Toutefois, même si le patient arrive tardivement dans une unité neuro-vasculaire, il peut en tirer profit. « Vous avez beaucoup parlé d’artères obstruées. Que faut-il faire en cas d’hémorragie ? » Dr France Woimant – En cas d’hémorragie cérébrale, il faut également réagir très vite, et laisser un taux d’oxygène normal voire élevé, ne pas faire monter le taux sanguin de glycémie, et prévenir la fièvre. Ces facteurs évitent l’accroissement de l’hémorragie cérébrale. Il n’y a pas actuellement de traitement spécifique de l’hémorragie cérébrale. Une étude internationale en cours examine les effets d’un traitement qui tente de limiter la taille de l’hémorragie. « Lorsque l’on fait appel au 15, l’on peut parfois attendre plusieurs heures aux urgences, au bout desquelles on peut éventuellement passer un scanner mais pas d’IRM, qui fonctionne uniquement en journée et ponctuellement. N’y a-t-il pas moyen d’arriver directement en neurologie ? » Dr France Woimant – En 1999, une enquête a montré que 50% des patients victimes d’accidents vasculaires cérébraux arrivaient en trois heures aux urgences, mais y restaient ensuite longtemps et n’étaient pas toujours Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 10 hospitalisés dans un service de neurologie. Le schéma régional d’organisation des soins qui est en train d’être mis en place a pour objectif de remédier à ce problème. Ainsi, l’infirmière d’accueil aux urgences orientera immédiatement le patient vers un neurologue. Une fois que cette organisation sera mise en place, des moyens humains seront nécessaires afin de faire fonctionner ces unités 24 heures sur 24. « Quelle solution trouver pour un patient victime d’un accident vasculaire cérébral lorsque tous les centres de rééducation régionaux sont saturés ? » Pr Alain Yelnik – Il n’y a pas suffisamment de structures spécialisées. Au cours des dix dernières années, il y a toutefois eu d’importantes créations d’unités de rééducation neurologique. Cette rééducation n’est pas à huit jours près, si un kinésithérapeute de l’unité dans laquelle se trouve le patient vérifie régulièrement qu’il ne prend pas de mauvaise position. « Une personne sur deux souffrant d’hypertension est mal traitée. Où peut-on être bien traité ? » Dr France Woimant – Les patients qui prennent un traitement anti-hypertenseur n’ont pas toujours un bon suivi, et leur tension artérielle est mal équilibrée. Ce problème est important car il augmente le risque d’accident vasculaire cérébral. Lorsqu’une personne est hypertendue, il est très important qu’elle fasse suivre son hypertension artérielle, soit par son médecin traitant, soit elle-même grâce à des appareils d’auto-mesure. Tous ces appareils ne sont pas efficaces : le site internet de l’agence du médicament liste les appareils homologués et référencés. « Quels sont les rôles respectifs du neuropsychologue et de l’orthophoniste au cours de la rééducation ? » Pr Alain Yelnik – Initialement, l’orthophonie rééduque la parole, puis le langage. Aujourd’hui, les orthophonistes ont élargi leur domaine de rééducation à des troubles visuels et de mémoire. Le neuropsychologue agit sur un domaine beaucoup plus large, qui va jusqu’à l’efficience intellectuelle. Les neuropsychologues font très peu de rééducation : ils font le plus souvent des bilans ou des états des lieux. Ce sont essentiellement les orthophonistes qui se chargent de la rééducation. « Quelle est la différence entre une rupture d’anévrisme et un accident vasculaire cérébral ? » Dr France Woimant – La rupture d’anévrisme entraîne le plus souvent une hémorragie méningée, différente de l’hémorragie cérébrale. L’hémorragie cérébrale est un hématome dans le cerveau qui détruit une zone cérébrale. L’hémorragie méningée résulte d’une rupture d’anévrisme sur un vaisseau qui court entre le cerveau et la boîte crânienne. Il y aura du sang autour du cerveau, ce qui produira des maux de tête importants, une raideur de la nuque, des troubles de la vigilance et parfois un coma, mais plus rarement une paralysie comme c’est le cas au cours d’un accident vasculaire cérébral. L’hémorragie méningée concerne souvent l’adulte jeune (16 à 30 ans) et résulte fréquemment de la rupture d’une malformation congénitale. Les hémorragies cérébrales sont le plus souvent dues à l’hypertension artérielle, et également à des malformations vasculaires artério-veineuses ou à des prises de traitement liquéfiant le sang (traitements anticoagulants suite à des phlébites sur les jambes, à des embolies pulmonaires, ou à une arythmie cardiaque). « La création de néo-vaisseaux derrière la rétine peut-elle être la conséquence d’un accident vasculaire cérébral ou est-ce la conséquence d’un simple accident hémorragique local ? » Dr France Woimant – Les néo-vaisseaux derrière la rétine sont souvent liés à des occlusions veineuses. « Depuis 2000, je suis porteur d’une valve de dérivation à la suite d’une hydrocéphalie consécutive à une hémorragie méningée. Quelle est la durée de vie de cette valve, et quelles sont les mesures à prendre ? » Pr Alain Yelnik – Une valve de dérivation est en effet une des complications qui peuvent survenir. Elle peut être gardée très longtemps. Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 11 Dr France Woimant – En cas d’hémorragie méningée, il y a un saignement au niveau des méninges. Dans le cerveau, le liquide céphalorachidien circule et est résorbé au niveau de ces méninges. A la suite d’une hémorragie méningée, ce liquide est souvent mal résorbé et est présent en trop grande quantité, ce qui fait gonfler les ventricules du cerveau. Des valves permettent ainsi à ce liquide de partir vers le ventre ou le cœur. Ces valves peuvent être conservées très longtemps. Les valves posent problème surtout chez les enfants, car elles doivent être changées au fur et à mesure de leur croissance. Chez un adulte, elles ne posent pas de problème particulier et sont régulièrement surveillées par le neurochirurgien. « Si elles existent, de quelle nature sont les séquelles d’une hémorragie méningée ? Quels sont les possibilités et les moyens de récupération ? » Dr France Woimant – Il est difficile de répondre à cette question : il y a toute sorte de gravité dans l’hémorragie méningée, du mal de tête brutal et violent sans conséquence au coma duquel le patient conservera des séquelles. « En cas de lésion avérée, quelles sont les chances de récupération ? » Dr France Woimant – En cas de lésion avérée, environ deux tiers des patients conserveront des séquelles plus ou moins importantes, et un tiers récupérera ses fonctions sans séquelles. Les séquelles peuvent être très importantes et rendre le patient totalement dépendant d’un tiers. La rééducation précoce prend toute son importance, car elle permet de diminuer ces séquelles. Mais, même si elle est réalisée plus tardivement, elle reste néanmoins efficace. entendant parler, vous semblez avoir bien récupéré ! « Après un accident vasculaire cérébral, existe-t-il une rééducation de la mémoire perdue et de la faculté de calculer ? » Pr Alain Yelnik – Les troubles de mémoire à la suite d’un seul accident sont peu fréquents. La rééducation du langage, de la mémoire et du calcul fait partie de la rééducation orthophonique. Dr Eric T. MacKenzie – Il y a une petite zone du cerveau qui sous-tend les fonctions de calcul. Une équipe de Caen travaille sur ce sujet. Si c’est cette zone qui est touchée, les possibilités de récupérer les fonctions de calcul sont relativement limitées. Pr Alain Yelnik – L’acalculie est un symptôme très particulier, et de nombreuses raisons peuvent l’expliquer. Il faut faire un bilan et comprendre pour quelles raisons il y a un trouble du calcul, qui est rarement isolé. « J’ai subi deux accidents vasculaires cérébraux successifs. Je n’ai pas de troubles physiques mais une importante fatigue, avec des difficultés d’expression, des difficultés de préhension, et des problèmes de mémoire. J’ai été très bien pris en charge par l’hôpital de Caen mais on ne m’a jamais parlé de rééducation. Que pourrai-je faire ? » Pr Alain Yelnik – Je ne peux pas répondre sur l’aspect de la maladie. En ce qui concerne le symptôme, il s’agit de savoir de quel trouble vous souffrez et pour cela faire rapidement un bilan neuropsychologique complet avec votre neurologue. A partir de là, un plan de travail définira les aspects sur lesquels la rééducation peut vous aider et ceux sur lesquels il sera plus difficile de travailler. « Victime d’un accident vasculaire cérébral ischémique en juin 2004, j’ai été aphasique. Quelles sont les conséquences éventuelles et les possibilités de récupération ? » « Après une attaque vasculaire cérébrale, une de mes mains est douloureuse et froide. Le neurologue a suggéré de remplacer le traitement au propanolol pour éviter cela, mais le cardiologue n’est pas d’accord. » Dr France Woimant – Vous avez fait un infarctus cérébral qui a touché le lobe temporal gauche, permettant de s’exprimer : en vous Pr Alain Yelnik – La rééducation n’a malheureusement pas de réponse à apporter à ce trouble vasomoteur très fréquent. Quelques Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 12 médicaments peuvent l’atténuer. « Combien de temps après l’accident vasculaire cérébral le cerveau peut-il récupérer ? Peut-on attendre des améliorations trois ou quatre ans après l’accident ? » Pr Alain Yelnik – Cette question est fondamentale. Si la rééducation a été bonne, il n’y a pas d’amélioration spectaculaire à attendre trois ou quatre ans après l’accident. A contrario, il y a beaucoup à faire avec un patient qui n’a pas eu de rééducation immédiate et qui est rééduqué six mois ou un an après l’accident. En ce qui concerne les délais de récupération, les médecins se donnent parfois trois mois, ce qui est court. Il y a un continuum entre la récupération liée à une véritable amélioration du cerveau, et la récupération liée au nouveau fonctionnement progressif du cerveau. Dans ce cas, le temps de récupération de la marche, de l’écriture ou de la parole peut être supérieur à un an. Pr Alain Yelnik – Dans la poliomyélite, la commande cérébrale est normale, mais la transmission est défaillante. Dans l’accident vasculaire, la déficience se trouve au niveau de la commande cérébrale. Dans le second cas, la chirurgie est donc différente, mais elle s’inspire de ce qui est fait au niveau de la poliomyélite. « Les accidents vasculaires sont souvent liés à de l’hypertension. Pourtant, une personne avec une tension de 10 a fait un accident vasculaire cérébral. On lui a administré du tranxène®, et elle a récupéré dans les sept heures qui ont suivi. » Dr France Woimant – Dans certains cas, notamment lors d’une lésion de l’artère carotide, un accident vasculaire cérébral peut survenir avec une tension artérielle très basse. Dans ce cas, il est nécessaire de faire monter la tension artérielle à l’aide de traitement médicamenteux. C’est également ce qui se fait dans les unités spécialisées. « J’ai lu qu’après un accident vasculaire cérébral, les circuits neuronaux étaient réactivés par des médicaments de la famille du Prozac®. » « La chirurgie orthopédique peut-elle réduire les séquelles qui persistent malgré une rééducation ? » Pr Alain Yelnik – Absolument. La chirurgie peut intervenir par exemple lorsque les muscles sont restés trop courts et gênent le mouvement. On distingue la chirurgie orthopédique sur les tendons et les muscles, et la neurochirurgie sur les nerfs. Les deux chirurgies peuvent se compléter : c’est tout l’intérêt des unités spécialisées de médecine physique et de réadaptation, qui font le bilan et décident de proposer ou non ces chirurgies. « La chirurgie orthopédique peut-elle améliorer les séquelles de la poliomyélite ? » Pr Alain Buisson – Les résultats bruts d’une étude ont effectivement montré qu’un groupe de patients qui avait reçu du Prozac® a présenté une meilleure récupération que le groupe de patients qui n’en avait pas reçu. Le Prozac® aide-t-il pour autant les neurones à résister à l’asphyxie liée à l’accident vasculaire cérébral ? A priori, les résultats de la même étude réalisée chez des animaux sont beaucoup plus mitigés. Il est possible que le Prozac® améliore la dépression qui peut suivre un accident vasculaire cérébral. Le Prozac® ne joue pas sur la cause de la mort des neurones mais sur un facteur associé. Dr France Woimant – Les patients qui font un accident vasculaire cérébral présentent par la suite une extrême fatigue, pendant plusieurs mois, probablement liée à des troubles de l’attention et à des difficultés de concentration. A la suite d’un accident vasculaire cérébral, une personne sur deux sera déprimée, et cette dépression est parfois difficile à déceler. C’est souvent l’entourage qui la remarque et qui doit y être attentif, car cette dépression peut gêner la rééducation. Sur ce point, des médicaments Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 13 sont extrêmement efficaces. Pr Alain Yelnik – Le Prozac® n’est pas le seul sur le marché ! « Après mon accident vasculaire cérébral, j’ai été mis sous traitement de Plavix®, Loxen® et Sectral®. La sensation de «jambes coupées» que je ressens après une longue marche est-elle due à ces médicaments ? » Dr France Woimant – La fatigue est un symptôme constant à la suite d’un accident vasculaire cérébral. Cette fatigue s’atténue au fil des mois, et n’est pas forcément liée aux médicaments qui sont prescrits. Synthèse rédigée pour la Fondation pour la Recherche Médicale par Editelor. www.editelor.com Les Journées de la Fondation Recherche Médicale 2005 ont été organisées avec le précieux soutien de l'AG2R, l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, IDS France, Matmut, France 5, France Inter, Pleine Vie, Top Santé, Femme Actuelle et La Vie. En régions : les Dernières Nouvelles d’Alsace, France3 Alsace, Ouest-France, France 3 Normandie, Le Dauphiné Libéré, Nice Matin, France 3 Méditerranée, La Dépêche du Midi et France 3 Sud. « Quelles sont les recherches menées dans le laboratoire "Neurodégénérescence : modèles et stratégies thérapeutiques" de Caen ? » Dr Eric T. MacKenzie – J’étudie la circulation cérébrale depuis 33 ans, dont 29 sur les modèles de l’ischémie. Des modèles animaux, et notamment le rongeur, sont utilisés pour tester les médicaments. Depuis peu, des modèles cellulaires commencent à être acceptés. Des vétérinaires qui souhaitent sauver un animal malade à n’importe quel prix mais que la pharmacopée vétérinaire ne soigne pas font appel au laboratoire. Notre intervention a été à chaque fois un succès pour l’animal et le vétérinaire. Chez l’animal, on peut quasiment sauver 100 % du cerveau dans un modèle d’accident vasculaire cérébral. Pr Alain Buisson – Dans la mesure où il s’agit d’une pathologie vasculaire, différentes approches sont possibles. Soit l’on agit sur la cause de la maladie, en essayant de faire disparaître l’obstacle vasculaire (des équipes de Caen travaillent sur cette problématique), soit l’on agit sur la fragilité particulière du cerveau à ce type d’accident en essayant de le rendre plus résistant (des équipes de Caen sont également impliquées dans ce type de stratégie), soit l’on essaye de faire récupérer le cerveau plus rapidement et plus efficacement (stratégique de recherche plus récente). Journées de la Fondation Recherche Médicale y Accidents vasculaires cérébraux y www.frm.org 14 À propos de la Fondation Recherche Médicale Créée en 1947 et reconnue d’utilité publique depuis 1965, la Fondation pour la Recherche Médicale a pour mission principale de financer la recherche médicale grâce aux dons et legs qu’elle collecte auprès du grand public et des entreprises. Ses aides concernent tous les aspects de la recherche médicale, que celle-ci soit fondamentale, clinique ou épidémiologique. Et ceci, dans toutes les disciplines médicales. Le but est clairement affiché : lutter contre toutes les maladies, sur tous les fronts. Grâce à la générosité de ses donateurs, la Fondation Recherche Médicale est devenue un acteur majeur de la recherche française. Depuis sa création, elle a participé à toutes les grandes découvertes médicales. à travers sa revue Recherche & Santé, ses guides « Santé : 100 idées reçues. L’avis des chercheurs » et son site web www.frm.org. Elle organise chaque année de nombreuses rencontres chercheurs / grand public partout en France pour favoriser le débat scientifique au sein de notre société. À ce titre, elle s’est vue attribuer par le Gouvernement le label « campagne d’intérêt général 2005 ». Quelques chiffres ► 15 millions d’euros sont consacrés chaque année à la recherche. ► 440 000 personnes font chaque année un « don utile » à la Fondation Recherche Médicale. ► Grâce à ces dons, la Fondation soutient un chercheur sur trois en France et finance plus de 700 programmes de recherche chaque année. Rappelons que la Fondation ne bénéficie d'aucune subvention et fonctionne uniquement grâce à la générosité de particuliers et d’entreprises. La Fondation Recherche Médicale remplit également une mission d’information du public > Bulletin de soutien Oui, je souhaite aider la recherche en faisant, par chèque bancaire ou postal à l’ordre de la Fondation pour la Recherche Médicale, un don de : 20 euros 25 euros 30 euros 40 euros 50 euros autre ………….. M. Mme Mlle M. et Mme NOM ………………………………………………… Prénom……………………………………………… Adresse……………………………………………… ……………………………………………………….. Code postal I_I_I_I_I_I Ville……………………. ……………………………………………………….. E-mail ……………………………………………….. 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