souriant et délicat, à la voix douce et modulée »... qu’elle désapprouvera, bien tard en disant : « la
jeunesse n’est pas une excuse, on aurait du s’enquérir de certaines choses »... Et même quand les
doutes surgissent, quand elle en vient à réfléchir sur cet Himmler : « Je n’avais jamais côtoyé
[Himmler] d’aussi près cet homme puissant et redouté. Il m’était extrêmement antipathique et
hypocrite et non pas parce qu’il donnait l’impression d’être brutal [...] Il raconta combien les
camps de concentration étaient merveilleusement aménagés. « J’ai réparti mes gens tout à fais
individuellement pour le travail et avec cette méthode, je n’ai pas seulement une sécurité totale,
mais également de bonne performance, le calme et l’ordre... »1. C’est certainement la seule fois
où elle entendit parler des camps de concentration. Quand la situation commença à se dégrader,
elle refusa de se poser plus de questions. Pourquoi ? Autant pour la loyauté immuable que
pouvaient avoir certains proches de Hitler ? Ou encore par simple confort pratique ? Il est bon par
cet écrit de voir le cœur de cette « société » comme elle le répète souvent. L’analyse de
l’évolution comportementale du Führer, celle des généraux - qu’il semble tant détester -, ou
encore celle du témoin lui même qui viendra à entendre les bombardements de l’Armée Rouge
aux porte de Berlin. L’évolution de cette « société » au cœur de la violence et de la sur-violence
est nette. Nous allons donc voir cela ; de la paisible Prusse-Orientale où se trouve le
Wolfsschanze, en passant par les « magnifiques » montagnes bavaroises du Obersalzberg que
surplombe le Berghof, jusqu’aux tragiques instants du Führersbunker.
2. Vers la « Victoire Finale » ?
Les journées passent, défilent. Le printemps 1943 au Berghof semble apparaître comme un
tournant dans la vie de Traudl. Elle apprend, notamment la chute de Stalingrad2 et les nombreuses
défaites de la Luftwaffe en Europe de l’est. De plus, elle nous témoigne de plus en plus de la
paranoïa et de la mégalomanie montante mais pas encore à son zénith de Hitler3. La guerre reste
encore loin, bien que le bruit des sirènes antiaériennes peut se faire -de façon de plus en plus
récurrente- entendre. L’agitation atteint son paroxysme en 1944. « Le soleil brillait [au Berghof]
sur le paysage passible, on buvait, on riait, on aimait, et malgré tout, la nervosité augmentait de
1 p. 131.
2 Cela nous apprend la lourde défaite de la Wehrmacht et la reprise en main des armées soviétiques.
3 Elle fera bien plus référence de cela, surtout après l’attentat du 20 juillet 1944.