Biologiste infos ❘ Février-Mars 2015
FINANCES
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Les trois actes 1
L
e projet Novescia, démarre dans les années 2007-2008,
sous l’égide d’Acto Capital, dans le cadre d’une opéra-
tion de capital-développement, créant de toute pièce un
nouvel acteur. S’appuyant sur l’expertise du dirigeant
du pôle de biologie médicale de la Générale de Santé, recevant
les ressources nécessaires pour un projet de nature industrielle, la
logique est simple : un maillage territorial, afin de mutualiser les
services d’analyses, et des sites se transformant en simples points de
prélèvement pour les patients… En 2009, Novescia se trouve ainsi
à la tête d’un ensemble de 550 salariés, pour un chiffre d’affaires
pro forma de 65 M€ avec un contrôle des
laboratoires par deux pays limitrophes de
la France définissant une législation de la
détention du capital plus libre pour des non
biologistes.
En 2010, Novescia rachète 25 laboratoires à
la Générale de Santé, pour porter le nombre
de ses enseignes à 80 et doubler son activité.
Résultat : Novescia termine 2011 sur un chiffre
d’affaires de 150 M€. La même année, inter-
vient la désignation d’un nouveau patron, pour
lancer un plan de rationalisation des coûts et
de réinternalisation de certaines spécialités.
À notre connaissance en 2013, le chiffre
d’affaires de Novescia s’élevait à 160 M€,
dont 110 de patients directs et 46 d’activité
clinique, faisant ressortir un EBE de 20 M€
(hors frais de croissance externe et de réor-
ganisation en plateaux techniques régionaux)
pour une centaine de sites, 1 250 salariés dont
170 biologistes.
Début 2015, Cerba European Lab rachète Novescia. Lui-même
soutenu depuis 2010 par PAI Partners, l’acheteur valorise son
confrère à 275 M€, soit un multiple d’acquisition estimé à près de
11 fois l’Ebitda2, probablement encore amélioré dans ce nouvel
exercice 2014.
La valeur d’entreprise est élevée, mais il faut tenir compte d’une
part de la dette lors de la cession – l’endettement financier net
ressortait à 46 M€ en 2013 – qui minore le prix négocié et d’autre
part des apports en capital successifs, (dernier capital social connu
145 M€), dans les entrées des investisseurs et des primes d’émis-
sion de ces opérations – 4 M€ en 2013 – pour
apprécier le rendement réel de l’opération
pour les cédants, au regard du temps de leur
investissement.
À cet égard, il est intéressant de remarquer que
les statuts de la société
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régissent 145 millions
d’actions ordinaires de 1 € et 80 000 actions de
préférence, soulignant l’existence de diverses
catégories d’actionnaires probablement entrés
à des dates différentes. L’article 9 précise en
outre que dans l’hypothèse d’une cession totale
les actions de préférence bénéficient d’une
valorisation supplémentaire dépendant du
TRI4 de l’opération mais aussi du calendrier,
avant ou après le 1er janvier 2016, ce dernier
étant moins favorable. On comprend mieux
alors la date du « deal ».
Les paramètres de calcul ne nous sont pas
davantage connus. La curiosité est que le prix
proposé retient un Ebitda maximalisé alors
qu’il nous semble manifeste que les synergies
S’il fallait choisir un dossier pour résumer
la course aux tubes des laboratoires et la
surenchère des prix des regroupements ces
dernières années, NOVESCIA semble un bon
exemple, avec un scénario assez proche des trois
actes d’une pièce de théâtre classique. Acte
premier, mise en place d’un acteur ex nihilo en
s’appuyant sur un manager du secteur ; acte
second, un management de croissance un peu
tous azimuts et des résultats contrastés ; acte
trois, un management du résultat et la mise en
ordre de l’entité pour sa revente rapide.
NOVESCIA - CERBA : des affaires à tout prix ?
© Novescia
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Novescia est créé en 2007-2008, sous l’égide d’Acto Capital. La logique est simple : un maillage
territorial, afin de mutualiser les services d’analyses, et des sites se transformant en simples
points de prélèvement pour les patients.
Début 2015, Cerba European Lab rachète Novescia et le valo-
rise à 275 M€ (11 fois l’Ebitda).
Philippe Taboulet
Expert-comptable