L’ évolution biologique est souvent présentée comme un
processus linéaire et ascendant orienté vers la production
d’êtres de plus en plus complexes et raffinés. Un être initial sim-
ple serait tout d’abord apparu il y a fort longtemps dans quel-
que profondeur marine. Au fil des générations, il aurait
bourgeonné, puis serait devenu une machine plus élaborée,
mieux armée pour résister à son milieu. Ses descendants
auraient ensuite enfanté peu à peu les plantes, puis les mollus-
ques et les poissons, dont certains se seraient péniblement his-
sés sur quelque rive déserte pour devenir au fil du temps
reptiles. Après bien des périties, certains petits reptiles
se seraient transformés à l’ombre des dinosaures en petits
mammifères dont quelques-uns des descendants seraient deve-
nus, bien plus tard, des singes. Prolongeant alors le mouvement
qui porterait le vivant à se complexifier toujours davantage,
dans son corps comme dans ses capacités psychiques, certains
de ces singes se seraient lentement relevés et auraient fini par
marcher uniquement sur leurs membres postérieurs. Levant les
yeux vers le ciel des idées, devenant hommes, ils auraient acquis
une intelligence qui les placerait au sommet de l’évolution des
êtres vivants. Telle est l’histoire qui est souvent considérée
comme l’enseignement majeur du darwinisme.
REDÉCOUVRIR DARWIN
Pourtant, bien qu’elle soit fort répandue, cette représenta-
tion de l’évolution biologique est à la vérité fort peu dar-
winienne. En réalité, l’idée centrale du darwinisme est bien plus
révolutionnaire et corrosive pour le narcissisme humain que
cette peinture de la succession des espèces fortement teintée
d’anthropocentrisme. Quelle est donc cette idée, si déstabili-
sante qu’elle rencontre de vives résistances et peine à être
comprise ? Et de quels moyens pédagogiques les biologistes
darwiniens peuvent-ils user pour en faire saisir en toute clarté
la substance ?
Le dernier livre de Richard Dawkins1apporte une réponse
magistrale à ces questions. Dès les premières pages, à travers
une argumentation à la fois limpide, attrayante et profonde qui
a fait le succès de ses précédents ouvrages, Dawkins explique
que pour comprendre l’évolution, il faut avant tout résister à la
tentation d’interpréter les faits évolutifs comme s’ils devaient
131
Sociétal 50 g4etrimestre 2005
Dans un ouvrage dense, subtil et passion-
nant, Richard Dawkins propose de
remonter le cours de l’histoire du vivant,
à la rencontre de nos ancêtres successifs.
Au cours de ce pèlerinage dans le temps,
il voile la ritable signification de
l’idée d’évolution : une histoire arbores-
cente singulière et sans direction finie.
* Chargé de recherche au CNRS GEMAS, Maison des Sciences de
l’Homme.
De quelles espèces
descendons-nous ?
DOMINIQUE GUILLO *
6LIVRES ET IDÉES
4CONJONCTURES
4REPÈRES ET TENDANCES 4DOSSIER
The Ancestor's Tale.
A Pilgrimage to the Dawn
of Life
par Richard Dawkins
1. Richard Dawkins, The Ancestor’s Tale. A Pilgrimage to the Dawn of Life, Londres,
Weidenfeld & Nicholson, 2004, 528 p.
conduire de toute nécessià l’homme. Le singe n’est pas une
esquisse grossière d’être humain, pas plus que les poissons ne
préfigurent les reptiles. Plus généralement, l’évolution biologi-
que ne doit pas être comprise comme un développement
ascendant oriendans une direction particulière, comme par
exemple la complexification croissante des organismes. En réa-
lité, souligne Dawkins, elle n’est rien d’autre qu’un processus
aveugle de descendance avec modification, qui des-
sine un immense arbre généalogique contingent
dont nous ne sommes qu’un des innombrables
rameaux terminaux. De ce point de vue, nous n’a-
vons donc aucune prééminence particulière. Les
espèces actuelles ont une égale dignité : toutes ont
su résister au fil des générations à la sélection natu-
relle, juge de paix de l’histoire des êtres vivants.
L’UNITÉ INITIALE DU VIVANT
Pour retracer cette histoire singulière et pour
faire comprendre les principes qui la comman-
dent, Dawkins propose de remonter pas à pas le
cours du fleuve de la vie en partant du présent. Ce
parcours chronologique à rebours a l’avantage, dit-
il, de faire saisir l’unité du vivant. Surtout, il permet
de faire ressortir avec acuité l’une des implications
étonnantes de l’idée d’évolution, telle qu’elle est
aujourd’hui comprise dans le cadre du darwinisme.
Les êtres vivants, a-t-on dit, dessinent un immense
arbre généalogique. Or ils ont un ancêtre unique :
le code génétique des différentes espèces est, en
effet, dit Dawkins, « trop détaildans les aspects
arbitraires de sa complexité pour avoir été inventé
deux fois ». De cette conséquence capitale : tout
être vivant, actuel ou passé, a au moins un ancêtre
commun avec n’importe quel autre être vivant,
d’hier ou d’aujourd’hui. Prenons deux êtres humains
appartenant à des sociétés éloignées, par exemple
un aborigène australien et un pygmée. Si l’on pouvait reconsti-
tuer avec précision leurs arbres généalogiques respectifs, on
parviendrait nécessairement t ou tard à un individu dont ils
sont tous deux les descendants en ligne directe. Ce principe
vaut également pour n’importe quel animal. Un être humain
partage ainsi des ancêtres communs avec son chien, avec le
tyrannosaure dont il regarde le squelette dans un muséum
d’histoire naturelle, avec la mouche qui l’indispose, avec la
plante qu’il arrose tous les jours ou avec chacune des bactéries
qui colonisent son estomac. Il suffit de remonter suffisamment
loin dans le temps pour trouver ces aïeux partagés.
Réciproquement, cela signifie que le premier être vivant est l’an-
cêtre en ligne directe de tous les vivants actuels ; que certains
êtres vivants fort anciens ont engendré toutes les plantes qui
existent ; que quelques individus du genre Homo ayant vécu il y
a quelques dizaines de milliers d’années sont, autant l’un que
l’autre, les aïeux de l’ensemble des êtres humains actuels ; ou
que certains vivants, beaucoup plus anciens, sont les ancêtres à
la fois de toutes les plantes actuelles et de tous les humains
actuels.
Tout ceci implique, ajoute Dawkins, que deux êtres vivants ont
toujours plusieurs ancêtres communs. Par exemple, deux
humains pris au hasard ont pour ancêtres communs les indivi-
dus qui ont engendtoute l’humanité et seulement l’huma-
nité –, mais également les individus, beaucoup plus anciens, qui
sont les ancêtres communs aux mammifères et aux reptiles, ou
encore ceux, plus anciens encore, qui sont communs aux ani-
maux et aux champignons. Or, poursuit Dawkins,
l’un des ancêtres communs à deux vivants est
nécessairement plus récent que les autres : il est
leur aïeul commun le plus proche. Dawkins nomme
cet individu le « concêtre » (concestor) de ces deux
êtres vivants. Deux individus de la même espèce
ont donc toujours un concêtre. Et le principe vaut
également pour plusieurs êtres vivants de la même
espèce ou d’espèces différentes : il a existé un être
vivant, qui se trouve être le concêtre de tous les
êtres humains actuels ; un autre, plus ancien, est le
concêtre de tous les mammifères actuels. Et ainsi de
suite.
Ces réflexions permettent de comprendre en
quels termes le problème de l’évolution se pose au
biologiste aujourd’hui. Dans un tel cadre, toute la
question est en effet de reconstituer les embran-
chements de cet immense arbre, de dater les
points de convergence des rameaux et de mettre
ainsi au jour le degré de proximité entre les espè-
ces actuelles. En un mot, il s’agit de déterminer la
nature et l’ancienneté des concêtres. Dans le dar-
winisme bien compris, l’objectif n’est donc plus de
mettre bout à bout sur une ligne ascendante les
chaînons qui mèneraient de la bactérie originelle
jusqu’à l’homme, mais de reconstituer le schéma
buissonnant des cousinages et des parens en
ligne directe dessiné par un arbre généalogique
touffu. À propos de notre espèce, la véritable ques-
tion n’est donc pas de savoir si nous descendons des singes
actuels car nous n’en descendons pas mais de terminer
à quel degré nous sommes leurs cousins, à quelle date s’est
scindée la lignée dont nous descendons conjointement et à
quoi ressemblait le concêtre que nous partageons avec eux.
Pour présenter les connaissances accumulées par la biologie
contemporaine sur ces questions et pour faire ressortir en
toute clarté le sens réel de la théorie de l’évolution, Dawkins
formule sa lecture à rebours de l’histoire de la vie à travers une
métaphore à la fois suggestive et émouvante qui constitue la
trame de l’ouvrage. S’inspirant des Canterbury Tales de Geoffrey
Chaucer (1340-1400), il compare ainsi le cheminement chrono-
logique qu’il propose à un pèlerinage dans le passé, dont le but
est l’« aube de la vie », le concêtre de tous les vivants. Les pre-
miers lerins avec lesquels nous partons sont les hommes
d’aujourd’hui. À chaque date marchent ensemble les êtres
vivants dont les ancêtres sont, à cette date, les mes que les
nôtres. Ainsi le pèlerinage est-il jalonné par des points de ren-
contre avec d’autres groupes de vivants actuels, d’autres le-
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6LIVRES ET IDÉES
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4REPÈRES ET TENDANCES 4DOSSIER
Un être humain
partage ainsi
des ancêtres
communs avec
son chien, avec
le tyrannosaure
dont il regarde
le squelette
dans un muséum
d’histoire
naturelle, avec
la mouche qui
l’indispose, avec
la plante qu’il
arrose tous les
jours ou avec
chacune des
bactéries qui
colonisent son
estomac.
rins partis au me moment, mais à partir d’autres rameaux
terminaux, d’autres espèces actuelles de l’arbre de la vie. Ces
points de rencontre, que Dawkins nomme des « rendez-vous »,
correspondent aux dates auxquelles vivait le concêtre que nous
partageons avec les espèces qui nous rejoignent.
L’ouvrage est ainsi divisé en quarante rendez-vous
successifs. Le premier le rendez-vous 0 est celui
de l’humanité actuelle, dont le concêtre le concê-
tre 0 – vivait il y a quelques dizaines de milliers d’an-
nées. Au rendez-vous 1 les chimpans et les
bonobos nous rejoignent simultanément : notre
concêtre vivait il y a environ 6 millions d’années. Au
rendez-vous 6, tous les singes sont avec nous. Au
rendez-vous 15, la troupe comprend l’ensemble des
mammifères, dont le concêtre vivait il y a à peu près
180 millions d’années. Nous rejoignent ensuite les
reptiles, groupe à l’intérieur duquel Dawkins range
les oiseaux rendez-vous 16, concêtre semblable à
un lézard, vivant il y a 310 millions d’années –, puis
les amphibiens rendez-vous 17. Ensuite, jusqu’au
rendez-vous 23, nous croisons la route des différen-
tes sortes de poissons : le concêtre que nous parta-
geons avec eux, une sorte de lancelet, poisson effilé
au corps très simple, vivait il y a plus de 500 millions
d’années. Puis viennent, au rendez-vous 26 les vers,
les mollusques et les insectes, qui sont aussi pro-
ches de nous les uns que les autres : notre concê-
tre, probablement une sorte de ver marin, vivait,
semble-t-il, il y a près de 600 millions d’années.
Notre route rejoint ensuite celle de différents ani-
maux aquatiques très simples, comme les éponges
ou les cnidaires rendez-vous 28. Au rendez-vous
33, tous les animaux sont rassemblés. Les deux aut-
res grands groupes de pèlerins qui composent le
règne vivant se joignent alors à nous : les champi-
gnons rendez-vous 34 puis les plantes rendez-vous 36.
Enfin, après avoir croisé la route de quelques créatures à l’orga-
nisation sommaire, nous arrivons au terme du pèlerinage, le
rendez-vous 39, point auquel les eubactéries nous rejoignent. Le
concêtre que nous trouvons ici est un ancêtre commun à tous
les vivants actuels : une bactérie procaryote sans noyau identi-
fiable, qui a vécu il y a plus de 3 milliards d’années.
CROCODILES, OISEAUX, LÉZARDS…
Ce pèlerinage ne renseigne pas seulement sur la nature et
l’âge de nos ancêtres. Il serve également des surprises
de taille au sujet de la parenentre les espèces actuelles. En
effet, la taphore développée par Dawkins permet de com-
prendre que le critère qui sous-tend la classification des êtres
vivants dans la biologie de l’évolution contemporaine est celui
de la proximité généalogique, établie grâce à la paléontologie et,
surtout, à la biologie moléculaire. Or on se rend compte au fil
des « rendez-vous » que ce critère conduit à des regroupe-
ments allant dans certains cas à l’encontre de l’idée intuitive
que nous nous faisons de la proximité des êtres vivants. En effet,
lorsqu’une lignée se scinde en deux espèces distinctes, il peut
arriver que l’une évolue très vite, tandis que l’autre se trans-
forme peu. Dans de tels cas, ces deux espèces peuvent présen-
ter rapidement davantage de différences, au moins dans leur
aspect extérieur, que n’en présente l’espèce sta-
gnante avec des espèces cousines généalogique-
ment plus éloignées des espèces issues de
scissions plus anciennes mais qui se sont peu
transformées elles aussi. Ainsi apprend-on que les
hippopotames sont en réalité plus proches des
baleines que des cochons ; ce qui signifie que les
hippopotames et les baleines sont issus d’êtres
vivants qui sont eux-mêmes des descendants des
ancêtres communs aux hippopotames, aux baleines
et aux cochons. De même, les crocodiles sont plus
proches des oiseaux que des lézards. Et les lézards
sont plus étroitement apparentés aux poules qu’aux
salamandres. Plus étonnant peut-être encore, le
hérisson est plus proche de l’ours polaire, de la
baleine, du phoque, du rhinocéros ou du chien que
du porc-épic, du rat ou du cochon d’Inde. Le concê-
tre que le hérisson partage avec les premiers vivait
en effet il y a 80 millions d’années... Soit environ 5
millions d’années après que la lignée dont il provient
se fut séparée de celle qui donnera naissance au
porc-épic, au rat et au cochon d’Inde. Les poissons,
quant à eux, ne constituent pas véritablement un
groupe : la truite est généalogiquement plus proche
de l’homme, du tyrannosaure ou de l’aigle que du
requin. Au fil des rendez-vous, le lecteur va ainsi de
surprise en surprise, à mesure qu’il découvre les
résultats récents établis au moyen de la biologie
moléculaire.
Mais Dawkins ne se contente pas de retracer cet
étonnant arbre généalogique. À chaque « rendez-
vous », il propose également des « histoires », associées au nom
d’un des nouveaux pèlerins qui viennent de se joindre à la
troupe. Ces histoires sont autant de courts essais passionnants,
dans lesquels Dawkins aborde certains points essentiels débat-
tus dans le cadre de la biologie de l’évolution contemporaine.
Ainsi la question de la sélection sexuelle est-elle traitée dans
l’« histoire du paon » au rendez-vous 16. Dans l’« histoire de la
sauterelle », Dawkins se livre à une subtile analyse à propos des
races et du racisme chez l’homme2. Et dans l’« histoire du singe
hurleur », il développe une étonnante explication de la manière
dont la perception des couleurs a évolué chez les primates : elle
aurait permis à nos lointains ancêtres nocturnes de mieux voir
les fruits la nuit.
133
Sociétal 50 g4etrimestre 2005
DE QUELLES ESPÈCES DESCENDONS-NOUS ?
2. Une adaptation de ce texte a été traduite en français et est parue dans
Courrier international, 733, 18-24 novembre 2004, pp. 51-54.
3. Richard Dawkins, The Selfish Gene, Oxford, Oxford University Press,
1976.
Les crocodiles
sont plus
proches des
oiseaux que des
lézards. Et les
lézards sont
plus étroitement
apparentés aux
poules qu’aux
salamandres.
Plus étonnant
peut-être encore,
le hérisson est
plus proche de
l’ours polaire, de
la baleine, du
phoque, du
rhinocéros ou du
chien que du
porc-épic, du rat
ou du cochon
d’Inde.
Certaines de ces « histoires » permettent également à Dawkins
de rattacher le propos de l’ouvrage aux idées qu’il a défendues
dans ses précédents livres. Dans The Selfish Gene3, Dawkins sou-
tenait, en effet, que la cible de la sélection naturelle, autrement
dit le niveau auquel se joue l’évolution du vivant, n’est ni
l’espèce, ni la population localisée géographiquement, ni l’indi-
vidu, mais le gène. Or dans The Ancestors Tale, l’argumentation
est centrée non pas sur les gènes mais, précisément, sur les
liens généalogiques qui unissent les individus et les groupes taxi-
nomiques d’êtres vivants. Dawkins doit donc expliquer en quoi
la logique qui commande ces liens s’articule avec celle des
gènes. Il veloppe cette question, essentielle dans la perspec-
tive qui est la sienne, dès le début de l’ouvrage dans l’« histoire
du tasmanien » et l’« histoire d’Ève ».
GÉNÉALOGIE DES GÈNES
On peut montrer, souligne-t-il tout d’abord dans ces deux
« histoires », qu’en réalité 80 % des individus d’une
population sont appelés à devenir des « ancêtres universels »,
autrement dit des ancêtres communs à tous les individus des
générations ultérieures issues de cette population. Or cet éton-
nant résultat, fait-il remarquer, est incompatible avec l’hypothèse
d’une sélection opérant au niveau des individus. En effet, un tel
taux implique que dans la plupart des populations vivantes une
assez faible fraction d’individus est finalement éliminée de la
compétition pour la postérité. En revanche, dit Dawkins, ce
résultat s’explique sans difficultés si l’on admet que les vérita-
bles cibles de la lection sont les gènes. Pour le comprendre,
souligne-t-il, il faut remarquer que l’arbre des gènes ne recoupe
pas celui des individus. En effet, comme chaque individu, un gène
a un arbre généalogique : un gène est issu d’un gène parent – un
seul, à la différence des individus des espèces sexuées et il a
éventuellement lui-même des descendants, s’il réussit à se répli-
quer. Dans cet arbre généalogique, comme dans celui qui unit
les individus les uns aux autres, on peut, en remontant dans le
temps, trouver des points de convergence, des gènes ances-
traux communs, plus ou moins éloignés selon les gènes étudiés.
Or, ajoute Dawkins, si l’on se place du point de vue d’un seul de
nos gènes, nous pouvons fort bien être proches d’un individu
dont nous sommes généalogiquement très éloignés et, récipro-
quement, très éloignés d’un de nos proches parents. L’exemple
des groupes sanguins est à cet égard frappant. Les gènes qui
codent le système A, B et O sont probablement apparus chez
un des ancêtres que nous partageons avec les chimpanzés, qui
possèdent les mêmes groupes sanguins que nous. Aussi, dit
Dawkins, « pour ce gène particulier, chacun de nous est généa-
logiquement plus proche de certains chimpanzés que de cer-
tains humains ». Laalogie des nes n’est donc pas
superposable à celle des individus. Voilà pourquoi une sélection
naturelle peut s’opérer dans une population au fil du temps sans
que de nombreuses lignées d’individus s’éteignent à chaque
génération.
Les exemples de ce type pourraient être multipliés. Ce livre, qui
associe avec bonheur la synthèse et l’essai, la présentation des
résultats les plus récents et la formulation d’hypothèses aussi
originales qu’audacieuses, fourmille de faits et d’arguments pas-
sionnants et instructifs. Dawkins défend sans doute parfois des
positions qui ne font pas l’unanimité dans la communauté scien-
tifique, en particulier à propos des nes. Mais ce beau livre,
orné de magnifiques et instructives illustrations, est d’une
richesse et d’une ingéniosité telles qu’on ne saurait le lire sans
en tirer de grands bénéfices. g
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