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toute étude scientifique, et d'avoir pris
connaissance de l'ensemble de la
bibliographie en lien avec le sujet traité. Puis
l'enquête peut commencer : les entretiens et
les questionnaires sont les outils de base du
sociologue. Il dispose aussi dans sa « boîte à
outils » des méthodes d'observation. Vient
ensuite l'analyse des données quantitatives
et qualitatives. Certaines données
qualitatives pouvant d’ailleurs donner lieu à
des exploitations quantitatives, par exemple
lorsqu'il est possible de définir à partir d’un
corpus d’entretien des variables, qui seront
ensuite traitées statistiquement. La restitution
de ces analyses peut prendre des formes
variées : via des rapports de recherche, des
ouvrages, des articles, des communications à
des colloques...
Quelles ont été les principales ruptures
conceptuelles en sociologie urbaine ?
Je ne pense pas qu'on puisse réellement
parler de ruptures dans le sens où, à la
différence peut-être des sciences dites
« dures », les connaissances produites à un
moment donné ne rendent jamais totalement
caduques des connaissances établies
préalablement. En sociologie urbaine, il y a
des controverses et des continuités, des
périodes de prééminence de thèses et de
méthodes selon les contextes socio-
historiques et selon ce qui se joue dans le
champ des sciences humaines et sociales en
général. Par exemple, la sociologie urbaine
des années 1970 a été marquée par la
planification urbaine, les politiques de
rénovation urbaine et la prégnance forte du
marxisme du point de vue scientifique.
Aujourd'hui, l'analyse de ces politiques est
plus éclatée du fait de l'éclairage de différents
courants.
Pouvez-vous nous expliquer les
principales évolutions de la sociologie
urbaine ces dernières années ?
Aujourd'hui, on a sans doute une plus grande
diversité d'approches et d'objets. Mais je
perçois une évolution plus forte. La sociologie
urbaine s'est toujours intéressée à
l'articulation du spatial et du social, mais de
plus en plus, les passerelles entre la
sociologie urbaine, la sociologie en général et
les autres sciences humaines et sociales se
multiplient. Cela va dans les deux sens : les
acquis de la sociologie urbaine sont
davantage pris en compte par les autres
champs de la sociologie et les sciences
humaines et sociales, et la sociologie urbaine
s'appuie également sur les connaissances
d'autres disciplines. Par exemple, les travaux
sur la stratification sociale mobilisent des
approches de la sociologie urbaine pour
savoir comment l’espace intervient dans le
devenir des classes moyennes, leur déclin,
leur recomposition. L'ouvrage « La France
des petits moyens » (2008), qui est une
analyse sociologique d'une fraction des
classes moyennes des banlieues
parisiennes, analyse ainsi ces « petits
moyens » à travers leur mode d'inscription
dans les espaces pavillonnaires
périphériques. On peut citer aussi les travaux
de François de Singly, dans le champ de la
sociologie de la famille, qui prennent de plus
en plus en compte l'importance de l'espace
du logement dans les recompositions
familiales, les phénomènes de mobilité, de
circulation des enfants entre les différents
foyers, etc. Au-delà de la sociologie, la
sociologie urbaine a également des
articulations avec l'histoire, la géographie...
Cette interdisciplinarité va-t-elle
s'accentuer encore dans les années à
venir ?
Il s'agit presque d'une injonction à l'heure
actuelle, or c'est très compliqué. Mais bien
avant cette injonction « institutionnelle »,
lorsque des raisons scientifiques le
justifiaient, des expériences de travail
interdisciplinaire ont existé et ont très bien
« fonctionné ». Par exemple, en 1977, un
programme lancé par le CNRS réunissait
sociologues, géographes, démographes,
historiens, etc. afin d'observer le changement
social sur une soixantaine de localités en
France.
Aujourd'hui, l'interdisciplinarité devient une
norme, mais pensée institutionnellement. Il
« faut » allier le plus grand nombre de
disciplines, et s'il s'agit de sciences humaines
et sociales et de sciences « dures », c'est
encore mieux, etc. Mais en pratique, ce n'est
pas simple et cela exige du temps. Nous