L’ÉCOLOGIE AU SERVICE DE LA RESTAURATION
L’écologie de la restauration seproposed’étudier les actions nécessaires pour “recréer”les éco-
systèmes dégradés.Les écologues de la restauration s’accordent pour définir la restauration comme
«la transformation intentionnelle d’unmilieu pour y établir unécosystème considérécomme indi-
gène et historique. Lebut de cetteintervention est d’imiter la structure,le fonctionnement,ladiver-
sitéet ladynamiquedel’écosystème »(Society for EcologicalRestoration,1990).
Avant de présenter les principales idées de l’écologie de la restauration,notons en préambule que
cettedernièrecherche àconcilier des approches spécialisées qui se sont,par le passé, souvent
opposées.Eneffet,au-delàdes approches classiques, soit techniques, soit écosystémiques,
l’écologie de la restauration élargit aussi son champ aux sciences sociales.Les approches socio-
économiques et culturelles participent àl’évaluation de lademande sociale (besoin de protection,
perception des dégradations),alors queles approches techniques et écologiques définissent en
quelque sortel’offrepossible en matièrede restauration d’écosystèmes.
Le tableauI(p. 197)illustrecettecomplémentaritédes approches àpartir de l’exemple de laRTM
dans les Alpes du Sud,mais d’autres exemples sont àciter:
— restauration de berges de rivières et de terres agricoles surexploitées pour lutter contrel’éro-
sion,l’envasement des retenues ou lapollution des eaux ;
— revégétalisation de pistes de ski pour l’augmentation de ladurée d’enneigement et lalutte
contrel’érosion dans les étages subalpin et alpin (Dinger,1995) ;
— restauration de l’habitat d’espèces rares et de zones humides perturbées afin de conserver
labiodiversité;
— réhabilitation de carrièreàdes fins techniques,paysagères et éthiques.
Du point de vuedel’écologie,le développement d’une ingénierie écologiqueaméliorée en perma-
nencepar l’affinement des concepts,et en retour leur validation par l’expérimentation en vraie gran-
deur queconstituent une opération de restauration et son pilotage àlong terme, sont des atouts
pour le développement de cettediscipline. Plus quejamais,l’opposition en écologie entre recherche
fondamentale et application est vaine. D’ailleurs,historiquement,c’est bien àpartir des probléma-
tiques de terrain que se sont développés ses concepts les plus fondamentaux.
FONDEMENTS DE L’ÉCOLOGIE DE LA RESTAURATION
Quatreidées principales soutiennent ladémarche de l’écologie de la restauration :
—Avant de restaurer,il est nécessaired’obtenir ladisparition du facteur de dégradation
des milieux.Lediagnosticdes causes profondes des dégradations et laprisedeconscience
de leur importancene sont pas toujours évidents,ni unanimement partagés (exemples: relations
pollutions/dépérissement des forêts dans les années80 dans la vallée de laMaurienne, relations
forêt/érosion au XIXesiècle dans les Alpes du Sud).
—Une fois dégradé,l’écosystème est bien souvent lent ou incapable de se reconstruire; sa
résilienceest faible ou nulle, un seuil d’irréversibilitéécologique(Aronson et al.,1993,1995) apu
êtrefranchi.
—L’homme possède en partie lacapacitéde réparer les écosystèmes.Le traitement des éco-
systèmes dégradés,leur réhabilitation,peut débuter par des opérations d’ingénierie écologique.
C’est le domaine sans douteleplus délicat et pour lequel lamajoritédes chercheurs et ingénieurs
de la restauration travaille aujourd’hui.
—La restauration d’un système écologique viable,complexeet diversifié par définition,est un
processus écologiquedemandant du temps.Àpartir d’unespacedégradé,la restauration n’est que
très rarement possible sans une longuephased’accompagnement.L’écosystème réhabilité va, au
D.VALLAURI -Ch. CHAUVIN
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