RESUME Ce dossier d’étude vous permettra d’avoir idée générale de l’organisation de ce comité et de vous donner certains éléments historiques contextuels de la crise que vous aurez à traiter afin de vous aider dans vos recherches. COMITE DE CRISE HISTORIQUE - 1917 Ultime tournant, ultimes tourments. LYONMUN 2017 Comité de crise historique - 1917 : Ultime tournant, ultimes tourments. 12 décembre 1916 : Proposition de paix de l’Allemagne, aveux de faiblesse ou provocation ? I/ La nature d’un comité de crise historique. Contrairement aux sessions MUN typiques, cette simulation est une reconstitution historique. Il s'agit d'être fidèle aux possibilités techniques, au climat moral et politique de l'époque. Les anachronismes devront être évités. Cependant vous êtes bien les acteurs de cette crise et non ses figurants. Vous devrez définir une stratégie, une politique étrangère et préparer vos déclarations publiques. Même si ce type de comité dépend d’une forte trame narrative, n’oubliez pas qu’en tant que dirigeant, c’est à vous d’infléchir le cours des événements ! Ainsi, si les postulats et les causes de la crise sont historiques, son développement est entre vos mains. Il peut devenir atypique et aboutir à une réalité différente de celle que nous connaissons. Il s'agit de revivre et non de répéter une année charnière de la Grande guerre, l’année 1917. Vous serez par conséquent responsable de la destinée de votre Nation et ultimement de l'Europe ! Ne répétez pas les mêmes erreurs. Vous jouez de fait un rôle et occupez un poste qui vous a été confié par votre gouvernement pour résoudre cette crise. Il vous faudra agir conformément aux perceptions stratégiques de l'époque jusqu'aux inclinaisons personnelles défendues par votre personnage. N'oubliez pas que les négociations, si elles se déroulent au plus haut niveau, celui interétatique, sont aussi le fruit de luttes de pouvoirs, d'intérêts opposés et d'opinions conflictuelles avec une vision du monde bien tranchée au sein de la cellule de crise. Vous l'aurez compris, un tel exercice requiert un important travail de documentation à la fois sur la position de votre gouvernement et les intérêts personnels de votre personnage. Nous vous conseillons d’établir des fiches sur votre potentiel militaire, économique, ceux de votre adversaire et les principales problématiques à résoudre. Le savoir permet le pouvoir. Sans information exacte il vous sera impossible d'agir. De l'erreur stratégique, d'une mauvaise évaluation des forces adverses ou d'une définition incertaine de vos objectifs peuvent naître le chaos et permettre la victoire de vos adversaires. La maîtrise des événements dépend de vos informations et de votre communication. II/ Vos Chairs pour vous servir : La Backroom : Alors que les grands hommes pensent contrôler leur destin, derrière le brouillard de guerre, c’est bien à eux, membres de la backroom, de tirer les ficelles. Soyez prévenu ! Ce cercle de conspirateurs, composé d’Olivier Deligny, Julien Draillard et Vincent Tourret, tous anciens participants du LyonMUN et passionnés d’Histoire, espère vous procurer autant de plaisir à jouer cette crise qu’ils en ont eu à la préparer. Chacun issus de parcours universitaires différents (Histoire, Affaires européennes et Relations internationales), ils ont unis leurs forces pour vous offrir la meilleure expérience possible et vous attendent de pied ferme le 18 mai 2017. Premier chair : Gilles Texier Chers délégués, Ataman du grand Touran, surnom Ataboy, je me nomme Gilles Texier. Je me trouve actuellement en Master 2 Sécurité internationale et Défense à l'Université Jean Moulin Lyon 3 après une année de césure riche en rebondissements et autres voluptés des rivages de la mer de Simbad aux contreforts de l'Europe dans la cité de Constantin. Après une année universitaire riche en émotions, mes attentions se placent sur la réalisation d'un mémoire de recherche sur la pensée militaire turco-ottomane et son impact aujourd’hui sur la vie politique turque au travers d'une analyse comparée des coups d'Etat (ça semble compliqué et ennuyant mais c'est passionnant de tirer la pelote de laine). Curieux de nature, avide de nouvelles expériences et rencontres, voyageur en terres mystiques et inconnues, j'ai hâte de faire votre rencontre ainsi que de découvrir votre attrait pour l'année 1917 autour d'un obus ou d'un verre. Dans les deux cas, il a un mouvement, lever, pousser, l'artoche ça totoche ! J'ai découvert le concept même du MUN au travers de camarades de promotion m'invitant à y participer. C'est ainsi que commença un certain engouement pour les rencontres et les discussions autour d'une table d'abord à Paris puis ensuite à Lyon au travers de remarquables simulations dont je garde d'excellents souvenirs. Gardons la mémoire vive, je vous attends et j'ai hâte de vous découvrir dans vos barbes, habits et autres fioritures. Diplomatiquement vôtre ! Gilles Texier Deuxième chair : Gauthier Baron Agun Narai est né à Bangkok d’un père et d’une mère thaïlandais le 12 février 2000. Abandonné dès la naissance en raison d’un problème de pigmentation (il est albinos pour ceux qui n’ont pas compris), il survécut dans un bidonville près de la capitale. Durant ces longues années de souffrance, il n’eut pour seul compagnon que BunMa, sa fleur qu’il a recueillie vers l’âge de 11 ans. Passionné des plantes, il décide de partir en France afin de s’imprégner de la flore locale, et accessoirement d’améliorer son mode de vie. Pour se faire, il réussit à se faire embarquer clandestinement dans une cage à chien à bord d’un avion à destination de Lyon, le personnel de l’aéroport l’ayant pris pour un chihuahua en raison de sa maigreur. Arrivé à Lyon en 2013, il réussit aisément à s’intégrer auprès de “ces peaux pâles”. Il changea alors de nom et devint Gauthier en l’honneur de sa fleur qui était un gaillet des Pyrénées (du latin Galium pyrenaicum) (oui, Gauthier est assez limité au point de prendre un prénom en G juste parce que sa fleur commençait par un g et non, je n’expliquerai pas comment un gaillet des Pyrénées s’est retrouvé en Thaïlande). Suivant sa passion pour les fleurs, il réussit avec succès une licence de biologie en 2016 et est à présent en master d’art floral. C’est au cours d’une marche dans le parc de la Tête d’or (que nous vous conseillons vivement si vous n’êtes pas lyonnais) que Gauthier a senti un manque dans sa vie. Il trouva rapidement la source de ce problème : il voulait devenir chair au comité historique 1917 du glorieux LyonMun. Le trio en charge du comité, étant un peu benêt sur les bords et prétextant un lien entre le parcours biologiste de Gauthier et la nécessité pour le tsar Nicolas II, une fois renversé, de cultiver un jardin potager afin de survivre, donna sa chance à Gauthier, qui devient ainsi votre second chair. III/ L’organisation du comité Le comité se divisera en deux cellules de crise incarnant les deux systèmes d’alliance de l’époque : la triple Entente face à la Triplice. Ils sont composés respectivement de 4 et 3 Nations : → La République française représenté par le Président Raymond Poincaré, le Généralissime Joffre et le député d’opposition Georges Clémenceau. → The United Kingdom of Great Britain and Ireland (Le Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande) représenté par The Right Honorable Lord Lloyd George, Le Général Douglas Hegg Chef de la Force Expéditionnaire Britannique et le Secretary of State for War Lord Derby → Regno d’Italia (Le Royaume d’Italie) représenté par le Président du Conseil italien Paulo Boselli, le Chef d'Etat-Major italien le Général Luigi Cadorna et le député Giovanni Giolitti. → Rossiïskaïa imperia (Empire Russe) représenté par le président du Conseil des ministre de l’Empire Russe Boris Vladimirovitch Stürmer, Le Chef de l’Etat-major russe Mikhail Alekseïev et Député Kerenski. → Osztrák-Magyar Monarchia (Double Monarchie d’Autriche-Hongrie) représenté par le Kaiser Charles 1er, le Generalstabschef Franz Konrad Von Hötsendorf, le Ministerpräsident de Hongrie Istvàn Tisva et le Ministerpräsident d’Autriche Ernst Von Koerber. → Deutsches KaizerReich (Empire Allemand) représenté par le Kaiser Guillaume II, le Generalfeldmarschall Paul Von Hindenburg, le ReichKanzler Theobald von Bethmann Hollweg et le Grand-duc héritier Maximilien Von Baden. → Devlet-i Âliye-i Osmâniyye (Empire Ottoman) représenté par le Sultan et Calife Mehmed V, le Ministre de la Guerre Enver Pacha et le Ministre de la marine Djemal Pacha, également Gouverneur de Syrie. IV/ Le Contexte de pré-crise : une paix impossible ? Selon les propos du général Joffre, la guerre devait être courte et violente. Ce ne fut pas le cas. Sur le front de l’Ouest, depuis octobre 1914, le front s’est stabilisé autour d’un axe allant des Flandres à la ligne bleue des Vosges en passant par Verdun. La guerre de manoeuvre dites “des frontières” poursuivie par la “course à la mer” s’est rapidement enlisée dans une guerre de siège à l’échelle des Nations où chacun tente de démoraliser, de saigner et de soumettre l’adversaire pour parfois des gains de quelques kilomètres. L’équipement militaire va s’adapter à cette nouvelle guerre avec l’acquisition d’armes collectives pour accroître la puissance de feu des unités d’infanterie mais aussi pour assurer leur protection avec l’adoption. L’ensemble de ces améliorations combinées au développement des dispositif de défense en profondeur ont ainsi pour conséquence de faire échouer toutes offensives de rupture, celles-ci s’écrasant sur les lignes adverses sans entraîner des gains territoriaux majeurs et causant de lourdes pertes dans les deux camps. Un exemple emblématique demeure la bataille de la Somme (juillet-novembre 1916) qui après 4 mois de batailles intenses n’a permis qu’une avancée de 30km pour des pertes s’élevant côté français et britannique à 615 000 hommes et côté allemand à 650 000 soldats. Au final, durant toute la période allant de 1915 à décembre 1916, le front se sera enlisé, sans changement majeur. Sur le front Est, la situation diffère complètement. En effet, les vastes plaines composant le paysage de l’Europe de l’Est permettent encore des manœuvres de contournement, de dépassement sur les flancs et autres percés de “grand style” malgré des flux logistiques de plus en plus distendus. Le 12 décembre 1916, le front est pour l’instant stabilisé sur un axe vertical allant de Vilnius jusqu’à la Roumanie après offensives et contre-offensive des deux camps, dont la dernière russe a pu avancer d’une centaine de kilomètres en Galicie. Afin de débloquer la situation, les deux camps cherchent de nouvelles options. Cela passe par la recherche de nouveaux alliés (Royaume d’Italie et Royaume de Roumanie pour le camp de l’Entente, Empire Ottoman et Royaume de Bulgarie pour les Puissances centrales), la recherche de nouveaux fronts (le débarquement à Gallipoli en avril 1915 qui après son échec aboutira à la formation de l’armée d’Orient située à Salonique, etc.), le développement de nouvelles armes (chars, gaz), etc. Autre stratégie également mis en place : l’installation d’un blocus à l’encontre des Puissances centrales et de leurs alliés qui a pour but d’asphyxier l’économie de guerre de ces Etats en les privant de ravitaillement en matières premières. Ce blocus fut efficace. Dès 1915, l’Empire allemand voit ses importations baisser de moitié (55% de ces importations). Les Empires centraux répliquent par une guerre sous-marine à l’encontre du commerce interallié. Néanmoins, suite au naufrage du paquebot américain Lusitania du 7 mai 1915 et face aux pressions américaines, les opérations sous-marines allemandes furent limitées durant l’année 1916 tandis que le blocus allié fut maintenu. Au final, toutes ces tentatives n’eurent pas l’effet escompté. Le prolongement de la guerre affecta sur le long terme le moral des populations civiles. En effet, l’effort de guerre primant, les populations civiles se voient privées de ressources de première nécessité en particulier en ce qui concerne le charbon. Le rationnement est instauré dans les pays belligérants et porte sur différents produits (charbon, sucre, viandes, etc.). La rudesse des hivers vient aggraver la situation. L’hiver de 1916 est certainement le plus rude de toute la guerre. Surnommé l’hiver des navets en Allemagne, il se traduit par un froid glacial qui bloque les voies de communication (tels les canaux en Allemagne, ou encore les voies ferrées en Russie), ralentissant encore plus le ravitaillement des populations civiles. Les villes sont plus particulièrement touchées avec le développement de famines (c’est le cas en Russie et dans l’Empire austro-hongrois). S’ajoute à ces difficultés la hausse des prix qui est rarement compensée par une hausse des salaires. Face à ces privations, des mouvements émergent en Allemagne et en Russie en faveur d’une amélioration de la qualité de vie et en faveur d’une paix blanche. Sur le plan politique, les grandes alliances et autres unions sacrées politiques se fragilisent à mesure que la guerre s’éternise. En France, cette Union politique fut incarnée par le Président Raymond Poincaré, le 4 août 1914, lors de son discours devant les Chambres, soit deux jours après la déclaration de l’état de siège. A la suite de cette déclaration, le Parlement décide de s’ajourner et remet la conduite de la guerre au gouvernement, persuadé que cette situation ne sera que temporaire étant, effectivement, convaincu que la guerre sera de courte durée. Néanmoins, à peine établie, cette Union sacrée montre déjà des crispations en janvier 1915 avec le soulèvement de certains parlementaires, à l’image de George Clémenceau, qui réclament des comptes au gouvernement sur la conduite du conflit. Bien qu’en apparence, l’Union sacrée semble perdurer, lors des discussions des séances plénières des deux Chambres, il en est en revanche différemment lors des commissions, plus discrètes, où les débats et les discordances font rages menant même à la création de comités secrets pour contrôler l’action de l’armée et du gouvernement qui se refusent de communiquer toutes les informations au pouvoir législatif. De même, en Allemagne, le 4 août 1914, le Kaiser Guillaume II appelle les représentants du Reichstag ainsi que tous les partis politiques à s’unir et à faire abstraction de leurs divergences durant le conflit. Ces propos seront ensuite appuyés par le Chancelier Bentham Hollweg qui réussira contre toute attente à convaincre une grande majorité du SPD (socialistes allemands) à rejoindre la Burgfrieden (“paix de forteresse”), l’équivalent de l’Union sacrée en France. Là encore, cette Union s’effrite dès 1915 et les premières grèves et manifestations voient le jour en raison de la lassitude de la guerre qui devait être brève et des pénuries alimentaires. Ainsi le Burgfrieden politique se délite complètement durant l’année 1916 avec la désolidarisation du SPD dont certains membres rejoignent la gauche de Zimmerwald. Par ailleurs, les divisions au sein du SPD mèneront à la création de la ligue spartakiste qui fixera les bases du Parti communiste d’Allemagne. Ces groupes ainsi que les différentes grèves et manifestations font l’objet de répressions tout au long de l’année 1916. De manière générale, on remarque qu’au début de la guerre en août 1914, l’ensemble de la classe politique européenne et des populations sont plutôt enthousiaste et acceptent de mettre de côté temporairement leurs divergences. Toutefois, dès janvier 1915, avec la guerre de position qui s’installe et l’enlisement progressif du conflit, les voix dissidentes se font de nouveaux entendre, et dès 1916, l’opposition entre pacifistes et bellicistes est de plus en plus marquée, sans compter la grogne montante des populations face au pénuries alimentaires, en particulier dans les Empire centraux. C’est dans ce contexte de tension politique que les contestations socialistes se font entendre, séduisant de plus en plus de personnes par leur discours pacifiste promouvant l’idée de paix blanche. S’ouvre ainsi la conférence Zimmerwald du 5 au 8 septembre 1915 près de Berne. Il s’agit de la première conférence socialiste internationale depuis l’effondrement de « l’Internationale socialiste » marqué par le début du conflit. Auparavant, plusieurs tentatives visant à renouer les liens internationaux, à l’initiative de partis socialistes ou de pays neutres, eurent lieu, depuis août 1914, telles que la conférence Italo -Suisse de Lugano, ou encore la réunion des partis socialistes hollandais et scandinaves à Copenhague en janvier 1915. À Zimmerwald, les 38 participants de 11 pays condamnent ouvertement la guerre impérialiste et préconise une pression socialiste internationale pour parvenir à la paix. Toutefois, une minorité rassemblée autour de Lénine, recommande le déclenchement d’une action révolutionnaire à l’occasion de la guerre internationale. L’expérience sera réitérée quelques mois plus tard à Kienthal près de Berne du 24 au 30 avril 1916 rassemblant 44 participants originaires de 7 pays différents. Ainsi, s’installe en Europe un courant socialiste minoritaire Zimmerwaldien luttant pour la paix qui aura bien du mal à s’imposer politiquement car accusé de défaitisme par leurs opposants. Malgré cela, la prochaine conférence internationale socialiste se prépare déjà pour l’été 1917 à Stockholm. L’année 1917 débute sur une crise diplomatique à la suite de la remise d’une note par les puissances centrales pour initier des négociations de paix, le 12 décembre 1916. L’Allemagne déclarait souhaiter “entrer dès à présent en négociation de paix afin d’assurer l’existence, l’honneur et le libre développement des peuples afin d’établir une paix durable” tout en célébrant ses victoires militaires et en annoncant sa volonté de continuer la lutte jusqu’au bout. Cette proposition s’inscrit dans la poursuite de nombreuses négociations parallèles, notamment princières pour aboutir à la résolution du conflit. Le Roi des Belges, Albert Ier aurait ainsi envoyé des émissaires à Charles Ier. Certains avancent même que des entrevus se seraient déroulées en Suisse où les deux parties s’accordaient sur le besoin d’une paix de compromis. Dans un entretien donné aux Temps, le nouvel empereur d’Autriche- Hongrie déclarait connaître “toutes les horreurs de la guerre” et savoir “mieux que d’autres empereurs ou rois l’importance de la paix pour les peuples”. Rapidement, dès le 18 décembre, l’Amérique par l’intermédiaire de son président tout juste réélu Woodrow Wilson s’immisca dans le débat et demanda à tous les belligérants de révéler leurs buts de guerre. De chaque côté, la presse éclate en invectives : “la paix américaine, c’est la paix anglaise” entend-on outre-rhin ou “Notre but de guerre, M. le Président américain ? Chasser les boches hors de France. Après, nous pourrons parler” déclare Gustave Théry dans l’Oeuvre. Alors que penser ? L’Allemagne joue-t-elle double-jeu ? Est-ce une simple provocation ou une tentative sincère de mettre fin à la guerre sur la base du compromis ? L’opinion est enflammée, l’Amérique se réveille et vous, responsable de Nations en guerre, avez la lourde responsabilité d’accepter ou de rejeter ce qui pourrait être la seule vraie chance de paix depuis bientôt 3 ans. V/ Situations des pays en décembre 1916 Voici une présentation résumant le contexte de chacun des pays représentés. A/ L’Empire ottoman 1) Personnages Enver Pacha : ministre de la guerre et chef d’état-major de l’armée ottomane, germanophile, Enver Pacha se caractérise par son nationalisme turc exacerbé. Animé par la volonté de réaliser son projet pantouranien, il est partisan d’une guerre menée jusqu’à son terme. Djemal Pacha : ministre de la marine et gouverneur de Syrie, Djemal Pacha est également un nationaliste turc. Désireux de maintenir l’ordre et d’empêcher tout mouvement de contestation, il mena une répression ferme et sanglante à l’égard des populations non turques en Syrie. Malgré son patriotisme, il est toutefois soupçonné d’être en faveur d’un retournement d’alliance. Mehmed V : Sultan et Calife de l’Empire ottoman, Mehmed V est une marionnette aux mains du Comité Union et Progrès (ou Jeunes-Turcs). Il aspire néanmoins à acquérir un rôle politique plus important au sein de l’empire. Liman Von Sanders : Général allemand, il dirigea en 1913 une mission d’instruction qui avait pour but de moderniser l’armée ottomane. Lorsque la guerre éclata, il fut nommé Maréchal de l’Empire ottoman. Grand vainqueur de la bataille des Dardanelles, il est considéré comme l’officier « ottoman » le plus compétent. Malgré son départ théorique de l’armée allemande, Sanders demeure tiraillé entre son allégeance envers l’Empire ottoman et son devoir envers l’Empire allemand. Dernier point, il essaya en vain d’empêcher le génocide arménien. 2) La situation de l’Empire Ottoman à la veille du 12 décembre 1916 La guerre qui débuta fin juillet 1914 devait être la revanche de l’Empire ottoman sur les puissances occidentales qui l’ont « trahis » à plusieurs reprises. Entré en guerre au côté des puissances centrales, l’Empire ottoman avait comme objectifs de réaffirmer son autorité sur l’Egypte placée sous protectorat britannique depuis décembre 1914, renforcer sa présence autour de la Mer Noire notamment avec l’acquisition de terres en Dobrogée, étendre sa sphère d’influence sur la Perse au détriment de l’Empire russe et surtout, réunir sous un seul même État les populations turques du Caucase. Toutefois, la situation de l’Empire à l’aube du 12 décembre 1916 n’est pas à la hauteur de ses ambitions. En effet, la situation militaire est déplorable. Bien que réarmée et reformée avec l’aide de l’Empire allemand, l’armée ottomane n’a connu que deux grandes victoires : les Dardanelles (avril 1915- janvier 1916) et Kut el-Amara (avril 1916). Obligé de se battre sur les confins de son empire, celle-ci a subi de nombreux échecs. Mal ravitaillées en raison de la faiblesse du réseau ferroviaire, les troupes ottomanes souffrent de la famine, de la maladie et de la désertion. A cela s’ajoute le fait que l’armée ottomane dépend entièrement de l’Empire allemand concernant la production de ses armes et matériels de guerre, l’industrie ottomane étant incapable de soutenir le rythme. Concernant la situation intérieure, l’Empire ottoman dispose d’un avantage : la suppression de toutes oppositions de forme légale. En effet, durant la période d’avant-guerre, la totalité des pouvoirs fut progressivement concentrée entre les mains du Comité Union et Progrès (aussi appelé les Jeunes Turcs). Ce comité souhaite rendre à l’Empire ottoman sa splendeur d’antan en reconstruisant ses bases autour d’un noyau dur : une identité nationale turque et musulmane. La vie politique est alors menée par un triumvirat : Enver Pacha (ministre de la guerre), Talaat Pacha (grand vizir de l’Empire ottoman et ministre de l’intérieur) et Djemal Pacha (ministre de la marine). La mise en avant de l’identité turque par les autorités ottomanes va avoir pour conséquence la mise en place d’une politique de répression ferme à l’égard des populations non turques de l’empire (confiscation des biens, emprisonnements, exécutions, etc., le summum de cette politique étant le massacre des Arméniens en mai 1915). Ajoutée aux souffrances habituelles de la guerre qui touche l’ensemble des populations ottomanes (famines, inflation, manque de ravitaillement en charbon et denrées alimentaires amplifié par le blocus allié), cette politique répressive a eu pour conséquence le soulèvement arabe de juin 1916, mené par le chérif de la Mecque Hussein et son fils l’émir Fayral. Soutenu par les britanniques qui leurs ont promis la création d’un grand royaume arabe sous leurs autorités regroupant les provinces de Syrie, de Mésopotamie et du Hedjaz, ces derniers mènent une guerre de guérilla contre les forces ottomanes dans les déserts d’Arabie. B/ L’Empire de Russie 1) Les personnages Boris Vladimirovitch Stürmer : Président du Conseil des ministres de l’Empire de Russie depuis le 2 février 1916, il ne doit son poste qu’à l’influence de Raspoutine et la sympathie de l’impératrice Alexandra à son égard. Homme ambitieux, ultra- conservateur et germanophile, il œuvre en secret des négociations avec l’Empire allemand pour obtenir une paix entre les deux empires. Mikhaïl Vassilievitch Alekseïev : Général russe, il est devenu le chef d’Etat-major de Nicolas II en avril 1916. Bien qu’en théorie, le tsar Nicolas II dirige l’armée russe, c’est Alekseïev qui dans les faits commande. Homme de faible constitution sujet à de nombreuses maladies, stratège médiocre et monarchiste convaincu, il est néanmoins favorable à des réformes libérales au sein de l’Empire russe. Dernière caractéristique : c’est un antibolchévique pur et dur. Alexandre Fiodorovitch Kerenski : Avocat de formation, Alexandre Kerenski fut élu député de la Douma en 1912. Membre du Parti socialiste-révolutionnaire de la branche trudovik, il se pose comme un opposant à l’autocratie exercée par le tsar. Partisan de la fin de la monarchie, il aspire à une révolution russe inspirée de la Révolution française. Il est en faveur de réformes libérales mais également sociales à destination des populations paysannes. Nicolaï Alexeïevitch Maklakov : Ancien ministre de l’intérieur de 1912 à 1915, Maklakov est un député conservateur favorable à la guerre. Fervent défenseur de la monarchie, il est un partisan de l’autocratie et s’opposera toute sa vie à la Douma et aux réformes constitutionnelles (il réclamera ainsi une forte répression à l’encontre de ceux portant ces projets de réforme). Nationaliste, il est contre toute forme d’autodétermination des peuples au sein de l’Empire russe. 2) La situation de l’Empire de Russie à l’orée du 12 décembre 1916 De tous les belligérants, l’Empire de Russie est certainement celui dont la situation est la plus catastrophique à la veille du 12 décembre 1916. Entrée en guerre afin de protéger le Royaume de Serbie des attentions belliqueuses de l’Empire austrohongrois, rejoints par la République Française et le Royaume Uni, l’Empire russe espère de cette guerre pouvoir renforcer son influence dans les Balkans au détriment de l’Autriche-Hongrie avec la création d’une grande Serbie rassemblant tous les slaves des Balkans dont ceux de la Bosnie-Herzégovine. Il cherche également à fait reconnaître plusieurs revendications territoriales tant à l’égard de l’Empire austro-hongrois (les régions de Galicie et de Bucovine) qu’à l’égard de l’Empire allemand (la Silésie et Poden). Enfin, depuis l’entrée en guerre de l’Empire ottoman au côté des Puissances centrales, l’Empire russe souhaite le contrôle des Détroits lui permettant ainsi un accès à la Mer Méditerranée. D’un point de vue militaire, l’Empire de Russie a pour principale force son poids démographique. Avec 160 millions de sujets, l’Empire russe dispose de réserves en hommes inépuisables. Malgré cet avantage, durant les deux premières de conflit, l’armée russe connut de nombreux revers face aux forces des Puissances centrales. En deux années de guerre, la Russie a perdu la Pologne et la Lituanie face aux forces allemandes et austro-hongroise, ainsi que la moitié de son armée. Ces échecs s’expliquent par deux grandes raisons cumulatives. Tout d’abord, l’incompétence des généraux russes : insensible aux besoins de leurs soldats, ils sacrifient leurs vies sans ménagement dans de grandes offensives qui se terminent par de faibles voire aucuns gains de terrain. Ensuite, l’armée russe est mal équipée par rapport aux forces allemandes et autrichiennes, disposant de peu d’artillerie lourde, d’un manque de mitrailleuses considérables, et d’une faible aviation. En 1915, elle fut confrontée comme les autres belligérants à la crise des munitions. Spécificité russe toutefois, elle connut également une crise concernant le matériel de base (fusils, etc.). L’incapacité de l’industrie russe à répondre aux besoins de l’armée et l’inefficacité du gouvernement russe à organiser de manière efficace cette production militaire furent néanmoins contrebalancées par l’action de Goutchkov, industriel et homme politique qui réunit hommes d’affaire et industriels au sein du Comité des Industries de guerre. L’action de ce comité permit de résoudre la crise des munitions et du matériel de base, permettant ainsi à l’armée russe de 1916 d’être mieux équipée que celle de 1915. Cette amélioration de l’équipement permit le succès de la grande offensive de Broussilov en Galicie autrichienne en juin 1916 qui fit une percée dans les lignes autrichiennes de plus de 100 kilomètres. Malgré cela, l’équipement militaire russe en matière d’artillerie lourde reste insuffisant et le ravitaillement demeure précaire. Ces échecs successifs, ce manque de ravitaillement et l’insensibilité des officiers à leurs besoins affectent considérablement le moral des soldats russes, entraînant une multiplication des désertions et des contestations à l’encontre de leurs officiers. A l’arrière, la situation n’est guère mieux. L’effort de guerre primant, les besoins de la population ne sont pas pris en compte. Les populations manquent des produits de premières nécessités (charbon, etc.). La production industrielle étant entièrement consacrée à la production militaire, les paysans, qui cherchent à acquérir des produits de l’industrie, cessent de vendre leurs biens aux villes. Ce ravitaillement des campagnes à destination des villes est d’autant plus en déclin que, durant l’hiver rigoureux de 1916, le froid dérègle le trafic ferroviaire russe (déjà grandement diminué par la perte de la partie occidentale de l’Empire où se concentrait l’essentiel des voies ferrées). Résultat, la famine se développe dans les grandes villes de l’empire. Pour aggraver le tout, les populations de Russie sont confrontées à la hausse des prix due à l’inflation, à laquelle aucune hausse des salaires ne répond. L’agitation sociale renaît partout dans le pays : grèves, manifestations contre la famine, pour la paix, etc. Face à l’incapacité du gouvernement, la société civile se substitue à ce dernier pour répondre à ses besoins. C’est la création des comités dans de nombreux domaines distincts tels que la production militaire (Comité des Industries de guerre), la santé publique (Comité de la Croix Rouge), etc. Ainsi, l’écart entre la société civile et le pouvoir s’agrandit de plus en plus. Cet écart entre pouvoir impérial et société civile est d’autant plus aggravé par fait que le pouvoir lui-même est en crise. Depuis le début de la guerre, le gouvernement dirige la société par le biais d’oukases(décrets) sans consulter la Douma. Celle-ci ne fut réunie qu’une fois durant les trois années de guerre, en juillet 1915, lors de la crise des munitions. Face à l’inefficacité du gouvernement à résoudre les problèmes auxquels est confronté l’empire de Russie, un bloc progressiste (constitué des Cadets et des Octobristes) obtient la majorité et demande le remplacement des ministres incompétents. Le Président du Conseil des ministres Goremykine, avec le soutien du tsar, refuse et renvoie l’assemblée. Le pouvoir est donc entre les mains du tsar et de son gouvernement. Or, le 24 août 1915, le tsar Nicolas II décide de prendre la direction des opérations militaires et part rejoindre la Stavka (l’état-major russe) à Mohilev. Le pouvoir est alors confié à la tsarine Alexandra. Accusée de germanophilie, elle est tombée sous l’influence du « moine » Raspoutine qui a su calmer l’hémophilie du tsarévitch Alekseï. Ce dernier, haït par l’opinion publique, renforce son emprise sur la tsarine et, à travers elle, agit directement sur la politique russe, notamment via la nomination des ministres. C’est ainsi que Goremykine fut contraint de démissionner du poste de Président du Conseil des ministres pour être remplacé par Boris Stürmer le 2 février 1916. Le conseil des ministres devint peu à peu rempli de pions de Raspoutine. Ceci contribue encore plus à fragiliser le pouvoir impérial. C/ Le Royaume d’Italie 1) Les personnages Paolo Boselli : Doyen de la Chambre des Députés (quasi octogénaire), il devient Président du Conseil le 1 juin 1916 après la destitution de Salandra de ce poste. Homme politique de tendance libérale, il créera un gouvernement d’union nationale. Partisan d’une guerre jusqu’au bout, il s’efforce, depuis son accès à la présidence, à approfondir la coopération militaire avec les alliés (s’opposant sur ce point au général Cadorna). C’est dans ce but que fut déclarée la guerre à l’Empire allemand le 28 août 1916. Luigi Cadorna : Général italien, il fut nommé chef d’état-major de l’armée italienne en juillet 1914. Réticent à mener une guerre contre les Puissances centrales, il livra à ces dernières une guerre d’usure, sacrifiant des milliers de soldats italiens pour des gains territoriaux minimes. Chef despotique et cruel, il sanctionne les officiers qu’il estime incompétent ou indigne de confiance de limogeage, et punit tout débordement de la troupe par la peine de mort. Durant ces deux premières années de guerre, il déploya un effort considérable pour éviter toutes ingérences dans les questions militaires des hommes politiques qu’il méprise ouvertement. Ces derniers le soupçonnent d’avoir des ambitions dictatoriales. Giovanni Giolitti : Député libéral italien, Giovanni Giolitti fut, durant la période d’avant-guerre, quatre fois Président du Conseil italien. Homme ambitieux, il s’est maintenu au pouvoir grâce au clientélisme, à la corruption et aux pressions électorales. Nombreux sont ceux qui estiment que les présidences Salandra et Boselli ne sont que des périodes que Giolitti met à contribution pour reconstituer son capital social et sa clientèle afin de récupérer le pouvoir. Partisan de la neutralité, il pense que les revendications italiennes envers l’Autriche Hongrie pourront être acquises par la voie de la négociation, notamment avec le soutien de l’Allemagne. Enrico Corradini: Leader du parti politique italien Associazione Nazionalista Italiana, Corradini est un nationaliste italien. Impérialiste, il est en faveur d’une politique d’expansion territoriale. Favorable à un pouvoir autoritaire en Italie, il est un fervent partisan de la guerre, reconnaissant ses vertues purificatrices qui permettront à la nation italienne de s’élever. A ce titre, il mène une campagne violente à l’encontre des pacifistes. er 2) La situation du Royaume d’Italie à la veille du 12 décembre 1916 La situation du Royaume d’Italie diffère grandement de celles des autres belligérants du conflit en raison de son entrée tardive dans la guerre. Ayant choisi la neutralité, le Royaume d’Italie fut l’objet d’un véritable marchandage diplomatique de la part des deux camps. Finalement, suite à la signature du traité secret de Londres du 16 avril 1915 par le Président du Conseil Salandra, l’Italie s’engage à entrer en guerre au côté de l’Entente. Cet accord de Londres prévoit sa participation à la guerre en échange des terres irrédentes (le Trentin, la Vénétie Julienne et Trieste), d’une partie de la côte dalmate et des îles qui lui sont rattachées, l’acquisition de Valona et l’île de Saseno en Albanie, la revendication du Dodécanèse et d’une zone d’influence dans la région Adalia en cas de partage de l’Empire ottoman, et enfin des « compensations équivalentes » (les termes ici sont assez floues) dans le partage des colonies allemandes. A cet accord s’ajoute également des garanties économiques et financières, notamment le fait que la France vienne compenser la prépondérance allemande en termes d’exportations et de capitaux dans la péninsule italienne une fois la guerre déclarée. Finalement, le 27 mai 1915, le Royaume d’Italie déclare la guerre à l’Empire austro-hongrois uniquement. Le commandement de l’armée italienne est confié au général Cadorna. Ce dernier mena une guerre d’usure contre l’armée autrichienne, lançant cinq offensives en direction de l’Isonzo qui aboutirent à une simple progression d’une trentaine de kilomètres au prix de dizaines de milliers de soldats italiens morts. Ce général mène l’armée italienne d’une main de fer, limogeant les officiers jugés incompétents et punissant tout mouvement de contestations au sein de la troupe. Abusant des pouvoirs discrétionnaires confiés par le roi, Cadorna rejette toutes tentatives d’influence du politique sur les opérations militaires. En mai 1916 a lieu la Strafexpedition (une offensive autrichienne dans les Alpes) qui enfonça le front italien de 80 kilomètres avant que les forces de Cadorna ne les arrêtent. Les batailles victorieuses menées par la suite qui permirent de récupérer le territoire perdu ont sauvé Cadorna mais ont entraîné la chute du conseil Salandra. Ce dernier est alors remplacé par Paolo Boselli. Après avoir constitué un gouvernement d’Union nationale, Boselli s’efforce de renforcer la coopération avec les alliés. C’est ainsi que le 28 août 1916, le gouvernement déclare la guerre à l’Empire allemand et autorise l’envoi de troupes sur le front français mais aussi à Salonique (malgré les protestations de Cadorna qui souhaite concentrer ses efforts sur l’Isonzo). C’est également durant son début de présidence que l’Italie réussit à progresser sur le front italien, la sixième bataille de l’Isonzo permettant enfin de franchir le fleuve et de prendre la ville de Gorizia. Cette armée est soutenue par une industrie italienne en essor qui, grâce à l’aide du gouvernement, a su accroître la production militaire permettant à l’Italie à rattraper son retard, notamment en termes d’artillerie lourde, de mitrailleuses, etc. Pour autant la situation n’est pas toute rose dans le Royaume d’Italie. Suite à l’entrée en guerre de l’Italie au côté de la Triple Entente, les exportations allemandes qui dominaient le marché italien cessent, et les alliés sont incapables de répondre à la demande italienne en matières premières (en raison non seulement de leurs concentrations sur leurs propres économies, mais aussi en raison de la guerre sous-marine qui bloque une partie du ravitaillement.). Résultats : l’Italie manque de matières premières (charbons, minerais de fer, etc.). L’Italie est également confrontée à un manque de main d’œuvre et en particulier de main d’œuvre qualifiés. L’essentiel des ressources ainsi que la production industrielle étant consacrées à l’effort de guerre, des pans de l’économie sont délaissés notamment l’agriculture, créant ainsi une baisse de la production agricole et donc des problèmes de ravitaillements : les villes commencent à souffrir de la famine. De nombreux mouvements de protestations commencent à émerger. Dans les campagnes, se développent des « jacqueries » qui pillent et critiquent la guerre. Dans les villes, l’agitation sociale reprend. Le mouvement ouvrier proteste contre l’aggravation du décalage du niveau de vie entre des industriels qui profitent de l’effort de guerre pour s’enrichir et des travailleurs qui voient leur pouvoir d’achat diminuer en raison de l’inflation et de l’absence d’une hausse des salaires. Enfin, à cela s’ajoute, le développement au sein de la population comme de la classe politique d’un appel à la paix. Ce message est porté au sein du pouvoir par les socialistes, les catholiques (qui sont sensibles aux directives du Pape) et les libéraux giolittiens. D/ L’Empire Allemand 1) Les Personnages Paul Von Hindenburg Général en chef des armées du Reich, il fait partie des deux « intouchables » avec le général Ludendorff. En effet, depuis sa victoire à Tannenberg son influence politique et militaire n’a cessé d’augmenter à tel point qu’il exerce une dictature militaire en Allemagne. Cet état de fait s’explique en partie par sa forte popularité auprès du peuple allemand à la veille de 1917 et par les pouvoirs importants que l’Empereur lui a confié depuis le début du conflit. Theobald von Bethmann Hollweg : Chancelier impérial depuis 1909, il connaît très bien les rouages de l’Etat. Par ailleurs, il a une attitude modérée apte au compromis en plus d’être dans les bonnes faveurs impériales grâce aux conseils qu’il prodigue à l’Empereur. Il fait par ailleurs l’unanimité au sein du Reichstag malgré les doutes du Zentrum ; le SPD salut même sa nomination. C’est un homme soucieux du respect du droit international. C’est un pragmatique et un patriote qui sait fixer des objectifs de guerre. Guillaume II : Empereur d’Allemagne et roi de Prusse, il est le cousin du Tsar Nicolas II et du Roi George V. Il a des ambitions impérialistes pour l’Allemagne et veut pour ce faire mettre un terme à l’Empire Britannique. Il a une atrophie de l’épaule gauche qui le gêne dans ses fonctions et l’empêche de monter à cheval. Il est agressif, entêté, impulsif et peu compréhensif. Maximilien (« Max ») Von Baden : Grand-duc héritier du Bade, cousin de Guillaume II, Homme politique et militaire allemand, il est le président d’honneur de la croix rouge du Baden et de la YPMC. Libéral, il s’oppose à Hindenburg et à sa politique ultra conservatrice. Malgré son discours modéré, il rejette en privée le parlementarisme. 2) Situation de l’Empire allemand le 12 décembre 1916. Militairement, l’Allemagne arrive à maintenir un nombre de soldat assez stable grâce à ses effectifs de réserve qui arrivent à compenser ses pertes depuis le début de la guerre. Néanmoins, depuis le début de la guerre, 1 million de soldats allemands sont morts sur tous les fronts et la puissance centrale reste assez vulnérable par le fait de devoir diviser ses troupes sur deux fronts à l’Est et à l’Ouest. En outre, d’un point de vu numérique, les forces de l’entente dépassent nettement celles de la Triplice. Malgré cela, l’Allemagne arrive à maintenir des frontières à son avantage et au cours de l’année 1916, les puissances centrales ont connu plusieurs succès militaires importants telles que l’invasion de la Roumanie et de la Serbie. Par ailleurs, la défense de la Somme a été couronnée de succès, infligeant un coup dur pour l’Entente. Mais la grande force de l’armée allemande réside dans sa forte mécanisation ainsi que ses infrastructures. En effet, les tranchés des forces du Reich sont mieux aménagées que les françaises, et le réseau ferroviaire important de l’Empire ainsi que l’usage de véhicules motorisés permettent d’acheminer rapidement des hommes, renforts, matériels et ravitaillement sur les deux fronts. De manière générale, l'État-major allemand est optimiste quant à l’issus de la guerre pour l’année 1917. Néanmoins, le début de l’année 1917 s’annonce critique pour la population civile qui souffre d’importantes pénuries alimentaires, de malnutrition. Dès son entrée en guerre, l’Allemagne n’avait pas prévu que le conflit s’éterniserait et pensait la victoire rapide. Cette erreur de perception a conduit les autorités à prévoir des réserves que pour quelques mois. Ainsi, dès l’instauration du blocus par l’Entente contre les puissances centrales, les réserves allemandes s’épuisent très rapidement. De plus, la mauvaise logistique allemande d’approvisionnement des populations civiles amplifie les pénuries. Ainsi dès l’année 1915, les allemands commencent à souffrir du blocus (débuté le 11 mars 1915) et cette situation s’amplifie à mesure que la guerre s’éternise. Dans ce contexte, le pays va connaître une inflation très importante sur ses produits alimentaires et de bases à un niveau tel que le gouvernement sera obligé d’imposer des prix maxima. Cette mesure deviendra très vite inefficace et le rationnement est rapidement instauré pour tous les produits de consommations de base et alimentaire. Ainsi, dès février 1915, des cartes de pain sont distribuées et a ration sera fixé à 225 grammes de farine par jour et par personne mais rapidement cette ration tombera à 200 grammes. Au début de l’année 1916, tout est donc rationné en Allemagne. Par conséquent, cette situation entraîne la sous-alimentation des civils allemands qui est lourde de conséquence. L’apport nécessaire journalier d’un adulte est de 3000kcal/jour en moyenne, or à la veille de l’année 1917, un allemand moyen consomme à peine 1000kcal/jour. Les médecins de l’époque font notamment état de personnes ayant les os et les mâchoires apparentes. La grippe et la tuberculose ainsi que d’autres maladies se propagent du fait de faiblesse du système immunitaire de la population. Le nombre de naissance a aussi chuté de moitié depuis le début de la guerre et la faiblesse de la croissance des enfants est inquiétante. Fin 1916, malgré une situation militaire favorable, la population allemande se lasse de la guerre et commence à cesser de s’accommoder des pénuries et de la faim. E/ La Double Monarchie d’Autriche-Hongrie 1) Personnages Charles Ier : Empereur de l’Autriche Hongrie depuis le 22 novembre 1916, succédant à son oncle François Joseph. Ferdinand étant mort en 1914, c’est donc à lui que revient la couronne impériale. Lorsqu’il accède au pouvoir, il souhaite changer l’ensemble des ministres et les officiers à la tête du pouvoir pour mener à bien son programme qui est de mettre un terme à la guerre et d’améliorer les conditions de vie de ses citoyens. Il est par ailleurs un des seuls dirigeants à avoir véritablement connu l’enfer du front. Istvan Tisza : Président du Conseil Hongrois, il contrôle une large partie de la vie politique de l’Empire et dispose d’une forte influence dans le pays depuis 1910 par sa position de chef du parti libéral. C’est par ailleurs un grand défenseur de la dynastie des Habsbourg et était très apprécié par François Joseph envers qui il faisait preuve d’une loyauté sans limite. Cependant, en 1915, il n’arriva pas à établir d’Union nationale au sein du Conseil Hongrois. Franz Conrad Von Hotzendorf : Général d’Etat majors des armée impériales, partisan d’une guerre préventive contre la Serbie et l’Italie avant la Guerre, il est l’un des principaux acteurs de l’alliance autrichienne avec le Reich. Il est assez éloigné des réalités et des détails matériels tant dans ses écrits et ordres militaires. Il prend peu en considération par exemple les besoins de ses troupes ce qui provoque beaucoup de pertes humaines sur le front. Néanmoins, il est un brillant stratège avec un fort esprit de synthèse et de clairvoyance dans les transmissions et il est un précurseur dans le domaine de la mécanisation de la mobilité des troupes et sur le transport aérien. C’est un également un fervent partisan de la doctrine offensive. Mais il essuie de très nombreux échecs militaires qui sapent sa crédibilité après la mort de François Joseph. Ernst Von Koerber : Ministre président de l’Autriche depuis octobre 1916, il prône la poursuite de la guerre mais cherche à réformer la manière dont celle-ci est menée afin d’améliorer le ravitaillement autrichien. Il insiste également sur la nécessité pour la double monarchie de maintenir de bonnes relations avec le Reich qui est celui lui indispensable dans la conduite de la guerre. Par ailleurs, il voit d’un mauvais œil toute concession ou avantage qui pourrait être accordé à la Hongrie. 2) Situation de l’Autriche-Hongrie à l’aube du 12 décembre 1916 A la veille de l’année 1917, la situation austro hongroise est difficile. Elle a perdu la moitié de son armée depuis le début du conflit et connaît une famine et des pénuries encore plus importantes qu’en Allemagne à cause du blocus. Les manifestations d’indépendances tchèques, hongroises ou encore slovaques ébranlent l’autorité et la stabilité de l’Empire. La population est lassée par la guerre et le moral est morose. Le pays connaît également plusieurs émeutes de la faim et la population ne cache plus sa volonté d’une paix blanche. En outre, le système constitutionnel et la classe politique de la double monarchie sont archaïques et empêchent, ou du moins rend difficile, tous les projets de réformes domestiques. En effet, les antagonismes entre les deux États composant la double monarchie gèlent les réformes, chacun voulant défendre ses intérêts personnels. Cette discorde rend également plus complexe les opérations militaires de l’armée commune, car l’Autriche comme la Hongrie s’immiscent parfois dans la conduite de la guerre. Les deux monarchies étant autonomes, il est également difficile pour les ministres communs de mettre en place une politique cohérente car ils doivent tenir compte des intérêts de chacun. En effet, chaque politique est soumise à l’approbation par consensus des deux Etats. Il en est de même pour les affaires étrangères. Concernant le conflit, tout comme son voisin allemand, l’armée est répartie sur plusieurs fronts. Dans les Balkans, la Serbie a été écrasée par les puissances centrales en janvier 1916 mais cela a ouvert un nouveau front contre la Roumanie qui est entrée en guerre au côté des alliés se sentant menacée par les puissances centrales. Dans les premiers mois du conflit en Carpates, les Roumains arrive à écraser les troupes austro hongroises affectée dans la région. Ce succès est éphémère puisque très vites l’armée roumaines se fait écrasé par les armées germaniques et bulgare conduisant à l’occupation quasi complète de la Roumanie. A la veille 1917, les Balkans sont en grandes partie sécurisées par les troupes impériales et bulgares. Sur le front italien, les alpes rendent toute attaque et avancé difficile. Le front est tenu coté autrichien par un ensemble de soldats slaves qui ont été rassemblé en urgence au début du conflit mais qui arrive malgré tout à défendre le front avec ardeur. Au cours de l’hiver 19151916, le front a vu ses combats suspendus à cause des conditions climatiques et topographique particulièrement difficiles de la région. Néanmoins, Au cours du mois de mai 1916, l'État-major austro-hongrois a voulu tenter de briser le front italien en s’inspirant de la stratégie allemande à Verdun. Ainsi une offensive a été lancée dans le Haut Adige qui au départ permet au front autrichien de connaître plusieurs avancées mais elles finissent par s’enliser à cause des conditions de guerre particulièrement difficile qu’offrent les alpes. En effet, le relief alpin ne permet d’exploiter rapidement les percées. A l’Est, l’année 1916 a été difficile pour la double monarchie qui a dû faire face à l’importante offensive russe Broussilov. En effet cette attaque a été un véritable succès pour les forces du Tsars faisant reculer les troupes austro-hongroises. En effet, face à cette avancée, la double monarchie s’affole et se voit forcé de replier en catastrophe deux de ses armées, abandonnant ainsi leurs positions à la Russie. Toutefois, cette offensive finit par se briser contre les fortifications des Carpates et l’aviation austro-hongroise. F/ La République Française 1) Les personnages Raymond Poincaré : Président de la France depuis 1913, il est tenant d’une ligne dure contre l’Allemagne, d’où son surnom de “Poincarré-la-guerre”. Alsacien de naissance, lui et sa famille furent en effet expulsés de sa région après la défaite de 1871. Il incarne plus que tout autre “l’homme de la revanche” et sera celui qui plaidera pour “l’Union Sacrée”. Contrairement à la tradition de la IIIe république, il usera activement de son autorité morale pour influencer les choix politiques des différents gouvernements, n'hésitant pas par exemple à se déclarer pour la prolongation du service militaire avec la “loi des 3 ans” en 1913. Il contribua de même au renforcement de la triple Entente avec des déplacements en Russie en 1912 et 1914 et aux Royaume-Uni en 1913. Il est décrit par Clémenceau, qu’il déteste, comme “intelligent” mais “sans caractère” de part sa prudence et son habileté à louvoyer entre les sensibilités politiques. Joseph Joffre : Généralissime des armées françaises depuis 1914, “vainqueur de la Marne”, il est certes le responsable de la stabilisation du front nord mais aussi le partisan de “l’offensive à outrance” qui greva l’armée française. La bataille de la Somme qui s’est achevé a gravement atteint son capital politique auprès des britanniques et du gouvernement d’Aristide Briand mais il est certain de pouvoir opérer la percée tant attendue. Il croit qu’une action coordonnée des Alliées à l’Ouest et à l’Est entraînera la défaite inéluctable de l’Allemagne mais surtout souhaite la lancer avant que celle-ci ne déclenche sa propre offensive, qu’il croit en préparation. George Clémenceau : Vétéran de la politique sous la IIIe république, brillant orateur, président du conseil de 1906 à 1909, surnommé “Le Tigre” lors de son passage au ministère de l’intérieur, il s’illustre pendant la guerre par son intransigeance envers ce qu’il considère être des insuffisances de la part des différents gouvernements jugés trop “mous” voire incompétents. Partisan de la loi des 3 ans et de l’Union sacrée, patriote et inflexible sur ses positions, il aurait dû être un allié objectif de Poincaré mais les deux hommes entretiennent une haine réciproque. Au moment de le nommer président du conseil en novembre 1917, ce dernier déclarait à son propos : “le diable d’homme a pour lui l’opinion des patriotes et, si je ne l’appelle pas, sa force légendaire fera la faiblesse d’un autre cabinet”. En effet, au début de l’année 1917, Clémenceau à travers son journal “l’Homme enchaîné” cible impitoyablement les membres du gouvernement et Poincarré dont il juge l’influence “néfaste”. Il déclare qu’il “faut faire l’ordre dans le pays” et attaque personnellement le ministère de l’intérieur Louis Malvy jugé coupable de tous les méfaits : incompétence, négligence voire trahison. Il est enfin extrêmement critique envers le commandement militaire qu’il juge peu soucieux des pertes humaines encore illustré par le désastre de la Somme. Louis Malvy 2) La France en décembre 1916 : “l’année trouble”. La France finit l’année 1916 sur une victoire défensive (Verdun) et une offensive désastreuse (la Somme). Bien que l’annonce d’une offre de paix par l’Allemagne raffermissent les esprits qui la comprennent comme un aveu de faiblesse, une inquiétude diffuse imprègne la population et le moral reste précaire au sein de l’Armée. L’opposition réapparaît et commence à se radicaliser. Des syndicalistes et des socialistes forment des comités pour une “paix blanche” et on assiste à un renouveau de l’activité syndicale. Des grèves éclatent sporadiquement en Juin à Dion, en Août chez Citroën et un important mouvement a commencé en décembre. Un interdit moral semble ici avoir été franchi : faire grève n’est plus anti-patriotique. Sont-elles cependant de véritables signaux d’alarme qui remettrait en cause la conduite de la guerre ou simplement le symptôme d’une fatigue du peuple ? Bien que la cohésion nationale ne semble pour l’instant pas remise en cause, le doute, d’individuel, est devenu collectif. Il s’agit à présent “d’en finir” et les grandes offensives promises pour 1917 attisent tous les espoirs. Cependant, les relations entre le commandement militaire et le gouvernement sont pour le moins houleuses. Le président du conseil Aristide Briand, mis en difficulté par la Somme a été contraint de remanier son gouvernement le 12 décembre 1916. Malgré la relève de Foch du commandement du Groupe d'Armée Nord (GAN) à qui Joffre impute l’échec de l’offensive, Briand souhaite le limoger pour faire la démonstration de son autorité sur les militaires. Mais peut-il sacrifier Joffre qu’il a jusqu’à maintenant soutenu aveuglément sans risquer lui-même sa position ? Les rumeurs vont bon train sur son éventuel successeur : poursuivre l’assault avec Nivelle ou temporiser avec Pétain ? Le “vainqueur de la Marne” ne semble cependant pas incliné à abandonner son poste de généralissime mais Briand a la confiance du président Poincaré... Enfin la situation matérielle du pays est délicate. Si l’agriculture française assure l'autosuffisance de la population en produit frumentaire, l’invasion de ses régions les plus industrialisées et riches en houille prive la France de 74% de sa production de charbon et de 63% d’acier. Elle peut cependant s'enorgueillir d’une motorisation de ses troupes la plus avancée des belligérants, lui assurant une mobilité de ses réserves inégalée et des récents progrès doctrinaux au sein de ses armées qui ont décuplé leur puissance de feu : mitrailleurs chauchat, canon de 75 et premiers chars St Chamond. Disposant de 110 divisions, elle est la première puissance continentale de l’Entente sur le front Ouest et a dégagé un million d’homme pour les offensives de l’année. La France bien que troublée est sûre d’accomplir la percée qui la mènera vers la victoire...mais à quel prix ? G/ Le Royaume Uni de Grande Bretagne et d’Irlande 1) Personnages Lloyd George : Premier Ministre le 3 décembre 1916 en tant que libéral, il accède cependant au pouvoir grâce à une coalition des conservateurs en sa faveur contre H.H Asquith, pourtant du même parti que lui. Centralisant la prise de décision britannique par la création d’un War Cabinet, il est considéré parfois comme autoritaire. Décidé à limiter le pouvoir des militaires qu’il juge responsable du coût exorbitant en vie humaine de la guerre, il est partisan d’une coopération inter-alliée plus poussée et de l’intensification des campagnes périphériques au Moyen-Orient. La destruction de l’Empire Ottoman doit être selon lui, l’un des premiers buts de guerre de l’Empire Britannique. Douglas Haig : Remplace French comme chef de la Force Expéditionnaire Britannique en France en 1915. Il est partisan avec le chef du commandement général impérial William Robertson de concentrer l’effort de guerre sur le front occidental au détriment des autres théâtres d’opérations au Moyen-Orient. Formé dans la cavalerie et ayant combattu dans les guerres coloniales, Haig est un militaire orthodoxe qui n’apprécie pas les changements imposés par la guerre moderne. Il persistera à voir dans la cavalerie l’instrument nécessaire pour exploiter les ruptures de front. Il entretient des relations difficiles avec Lloyd George qu’il juge trop versatil. Lord Derby : nommé sous-secrétaire d’État à la guerre par H.H Asquith puis secrétaire d’État à la guerre le 10 décembre 1916, il fait partie du gouvernement mais n’est pas membre du War Cabinet qu’il cherche désespérément à intégrer. Il apparaît en effet comme un supporteur trop fervent des militaires aux yeux de Lloyd George. Il soutient Sir William Robertson, le chef du commandement général impérial et de Douglas Haig, le chef de la Force Expéditionnaire Britannique (FEB) avec qui le premier ministre est en désaccord constant. Conservateur et francophile, il est surnommé le “génial Judas” par son amour des intrigues politiques et de ses manoeuvres pour gagner des postes. Lord Curzon : Égocentrique, excentrique et arrogant, Lord Curzon n’en est pas moins intelligent, ambitieux et un fin connaisseur de l’Asie Centrale. Il fut en effet vice-roi de l’Inde de 1899 à 1905 où il démontra à la fois sa compétence et son extravagance. Éclipsé un temps de la politique, il revient au gouvernement en 1915 avec la coalition d’H.H Asquith puis lorsque Llyod George prend le pouvoir, il devient président de la chambre des Lords en 1916. Il sera ainsi intégré au sein du cercle restreint du War Cabinet. Middle-east pusher, il n’en a pas moins jugé l’expédition dans les Dardanelle comme une entreprise “Don Quichotienne”. Il est apprécié par Haig, qui le trouve décidé et avisé. 2) Le Royaume Uni le 12 décembre 1916 Extrait d’un poème de Lord Curzon à propos de lui-même : My name is George Nathaniel Curzon, I am a most superior person, My cheek is pink, my hair is sleek, I dine at Blenheim once a week. Le Royaume-Uni aborde l’année 1917 de façon sereine mais laisse paraître des signes d’épuisement alors que les perspectives de la guerre s’assombrissent pour l’Entente. Contrairement à son allié français, la population britannique n’exprime pas de doute quant à l’issue de la guerre, sûre de son bon droit et confiante dans la force de son empire. Cependant le flot des volontaires a fléchi et le gouvernement a dû établir la conscription à tous les hommes célibataires et mariés de 18 à 40 ans bien que les dominions continuent de fournir leur part d’hommes et de matériel. Ce soutien indéfectible des colonies s’il ne signifie pas encore une dépendance totale de la Grande-Bretagne à son domaine ultramarin devra forcément s’accompagner de compensation politiques. Déjà révélées par les atermoiements de l’Afrique du Sud rongée par les rancoeurs de la guerre des Boers, les revendications autonomistes voire indépendantistes semblent gagner en puissance. Impératif à son effort de guerre, l’empire britannique sera-t-il compromis par sa victoire ? Surtout, l’ascension de Lloyd George au pouvoir le 3 décembre 1916 a suscité de vifs débats dans la House of Commons. En effet, véritable coup d’état légal, ce dernier a évincé le premier ministre Asquith avec l’aide des conservateurs. Son gouvernement n’est pas ainsi le résultat de nouvelles élections mais d’une coalition hétéroclite de libéraux et de conservateurs. Llyod George constitue de même un War Cabinet restreint à 5 membres qui marginalise ceux du gouvernement et agace la chambre qui se voit reléguer à “une machine d’enregistrement” de ses décisions. Hostile au commandant en chef Douglas Haig dont il juge les méthodes trop coûteuses en homme et infructueuses, il semble vouloir ébranler l’équilibre établi entre civils et militaires. Llyod George réussira-t-il à s’immiscer dans la conduite des opérations et imposer ses vues ? Un conflit entre le commandement et le gouvernement semble ainsi s’esquisser au risque de perturber la préparation des offensives pour l’année 1917. Enfin, une menace latente mais mortelle refait surface pour le Royaume-Uni : la guerre sousmarine à outrance. Pour l’instant suspendue par l’Allemagne qui craint une intervention américaine, les rapports s’accumulent de préparatifs pour sa reprise. Estimés à plus d’une centaine à présent et opérant à proximité depuis les ports belges, les U-Boote, s’ils devaient être à nouveau employés pourraient virtuellement paralyser le transport maritime international. Ce sont les trois-quart du trafic à destination de la Grande-Bretagne qui se verraient détruits. Ils causeraient l'asphyxie industrielle du pays, sa ruine économique et peutêtre sa descente dans une crise sociale et politique aux conséquences inconnues. Certains déjà, en la personne du premier lord de la mer : l’amiral Jellicoe, se montrent ouvert à des négociations avec l’ennemi et se refusent à tout changement de doctrine maritime. Si la bataille de Jutland avait confirmé que le Royaume-Uni rules the wave, la bataille sous-marine allemande pourrait bien briser cette suprématie, voire son unité nationale. VI Bibliographie BECKER Jean-Jacques, La Première Guerre mondiale, Paris : Editions Belin, 2003, ISBN : 2-7011-3699-7 BERSTEIN Serge et MILZA Pierre, Chapitre 8 : La “Grande Guerre des Italiens”, in L’Italie contemporaine, du Risorgimento à la chute du fascisme, 2ème édition, Paris : Armand Colin Éditeur, 1995, pp.207-229, ISBN : 2-200-21690-4 SCRIBA Arnulf, Berlin pendant la guerre 1914-1918, Archives de la ville de Bruxelles, 2014, 274 pages. Consultation en ligne le 10/04/2017 : https://www.cairn.info/revue-cahiers-bruxellois-2014-1F-page-181.htm SIRINELLI Jean-François, La France de 1914 à nos jours, Paris : Quadrige/PUF, 2004, 544 pages, ISBN : 978-2-13-053843-1