Les thèmes scientifiques actuels de l’acoustique et leur devenir ÉLECTROACOUSTIQUE L e terme « électroacoustique » recouvre en fait beaucoup de thèmes variés. La base est évidemment constituée des transducteurs électroacoustiques, mais la tendance est assez naturellement à un élargissement à des sujets dont le centre est l’utilisation de ces transducteurs. Pour ces raisons, les transducteurs pour les fréquences audibles et les transducteurs ultrasonores sont souvent étudiés par des spécialistes différents, d’autant que les transducteurs pour la reproduction sont à « large bande » (de fréquence), alors que les transducteurs ultrasonores sont souvent à bande étroite, ce qui les différencie nettement . C’est pourquoi ce chapitre est divisé en deux sous-chapitres. 1. Électroacoustique et reproduction sonore Comme le suggère son étymologie, l’électroacoustique est avant tout un assemblage de connaissances, qui prend tout son sens dans l’étude des transducteurs, dont le noyau dur concerne les conversions d’énergie entre diverses formes : électrique, mécanique et acoustique. Historiquement, l’électroacoustique a cependant recouvert bien d’autres notions, essentiellement au travers d’analogies entre la propagation acoustique et la propagation électromagnétique, étayées par des notions communes fondamentales comme l’impédance ou la réciprocité. Dans notre société hyper-médiatisée, l’importance des outils de communication a motivé une évolution extrêmement rapide de la technologie des transducteurs, qui tend à occulter les aspects fondamentaux liés à l’électroacoustique, aujourd’hui souvent considérée comme un outil de résolution efficace de problèmes d’ingénierie. Il suffit ainsi de discuter rapidement avec quelques scientifiques pour constater que peu de personnes revendiquent l’électroacoustique comme une spécialité, au point que bien des congrès d’acoustique n’ont plus de session sur ce thème. Force est donc de constater qu’il est ambigu, recouvrant tant de facettes que presque tout le monde utilise des notions historiquement liées à l’électroacoustique, mais sans les considérer comme telles. 1.1 De profondes racines Il est ainsi intéressant de donner quelques repères dans l’histoire parallèle de l’électricité et de l’acoustique. Un exemple est basé sur la bouteille de Leyde, a priori simple curiosité de salon au milieu du XVIIIe siècle : Franklin l’a utilisée pour faire osciller une balle entre deux électrodes (vibreur électrostatique), qui ont été par la suite modifiées pour en permettre la résonance, donnant naissance à un « clavecin électrique » vers 1861, ou un « télégraphe électrostatique » vers 1774. La première de ces applications peut ainsi être vue comme un ancêtre de nos synthétiseurs, alors que la deuxième serait à l’origine des moyens de télécommunication caractéristiques de ce début de siècle. C’est la création d’un générateur électrochimique par Volta, vers 1800, qui a permis l’essor de l’électricité. Il a ouvert la voie à de nombreuses découvertes, pour aboutir à la renaissance d’un ancien concept : le télégraphe, sous forme cette fois électromagnétique (1831). Le rapport entre l’électricité et l’acoustique s’est ainsi atténué dans le télégraphe, jusqu’à ce que C. Bourseul suggère en 1854 qu’une future version pourrait reproduire la voix humaine. Effectivement, un premier prototype de téléphone est apparu vers 1860, puis a été amélioré par Gray puis Bell, dont le principal brevet date de 1876. C’est à cette époque que « l’électroacoustique » est devenue un domaine d’étude spécifique, du fait des bouleversements de la société auxquels elle a été associée. Le sujet d’intérêt majeur à cette époque était la mise au point de transducteurs à haut rendement, faute de moyens d’amplification. De très nombreux mécanismes de transduction ont ainsi été étudiés, parmi lesquels les couplages magnétostrictif (Page, 1837), magnétodynamique (Siemens, 1874), résistif (Bell, 1876), électrostatique (Dolbear, 1877), piézoélectrique (Curie, 1880), thermoacoustique (Preece, 1880), en enfin électrodynamique (Cuttriss et Redding, 1881). Mais cette deuxième moitié du XIXe siècle a aussi connu une avancée gigantesque sur le plan théorique : c’est vers 1873 que Maxwell a publié la théorie de l’électromagnétisme, et vers 1877 que Lord Rayleigh a publié les bases de l’acoustique. Des bases théoriques essentielles sont ainsi communes aux deux domaines que sont l’électromagnétisme et l’acoustique : la plus universellement utilisée est la théorie de la propagation, dans laquelle la nature physique des phénomènes est quasiment occultée par l’étude spatio-temporelle de « signaux » porteurs d’information. Elle est donc utilement complétée par une description des échanges d’énergie associés, formalisée par la notion d’impédance (aussi bien mécanique qu’électrique), qui caractérise la réaction d’un milieu face à une sollicitation. L’étude du couplage entre différentes formes d’énergie (transduction) a enfin conduit à mettre en évidence un « effet inverse » (Villari, 1864), traduisant le caractère éventuellement bidirectionnel du couplage entre les grandeurs électriques et mécaniques, ce qui illustre une troisième notion fondamentale commune : la « réciprocité ». « Électroacoustique » est ainsi un terme qui peut désigner aussi bien l’histoire commune aux domaines de l’électricité et de l’acoustique, qu’un domaine d’application commun, ou un ensemble de propriétés fondamentales partagées qui suggèrent des méthodes de travail communes. 1.2 Microphones, écouteurs et haut-parleurs Aujourd’hui, l’étude des transducteurs est un des rares thèmes qui est systématiquement associé au terme «électroacoustique», mais elle est plutôt perçue comme un secteur d’application et non un domaine scientifique. Omniprésents, les transducteurs sont utilisés dans la plupart des laboratoires, dans de nombreux systèmes industriels, mais surtout dans toutes les applications multimédia actuelles, sous l’appellation générique « audio ». Ces marchés gigantesques imposent une logique de développement très rapide, à base d’avancées technologiques orientées essentiellement vers la maîtrise des coûts, qui occultent un travail scientifique qui se poursuit à sa cadence propre. Les technologies dominantes (mais pas exclusives) sont les technologies électrodynamiques pour les écouteurs, les haut-parleurs et les microphones de scène, et les technologies électrostatiques pour les microphones de mesure, de studio ou de communications. Un dialogue constant a permis aux scientifiques et aux in- Le livre blanc de l’acoustique en France en 2010 - 57 dustriels de faire progresser les concepts théoriques nécessaires à la compréhension du fonctionnement de ces transducteurs, mais aussi et surtout leur technologie. La bonne qualité de certains produits à très bas coût commercialisés aujourd’hui ne pouvait probablement pas être envisagée il y a seulement vingt ans, et de nouveaux brevets concernant les transducteurs sont déposés chaque mois. Pourtant, même les meilleurs produits souffrent encore de nombreuses limitations, et les travaux de recherche continuent donc dans certains laboratoires. Ainsi, en restant dans le cadre des sources sonores audibles, des exemples encore « d’actualité » sont par exemple le transducteur ionique (Klein, 1946) où le couplage avec des particules ionisées est lié à la viscosité et à la conduction thermique de l’air, ou la source « paramétrique » (Westervelt, 1951) dans laquelle deux champs ultrasonores de grande amplitude interagissent non-linéairement pour créer une source audible au sein d’un volume d’air distant. Le caractère « immatériel » de telles sources permet de réaliser des géométries de volume source très particulières, conduisant à des propriétés inhabituelles (sources directionnelles, etc.). Ces deux exemples assez caractéristiques relèvent aujourd’hui plutôt du domaine de « l’acoustique physique », bien qu’ils soient tout à fait dans la lignée des travaux autrefois classifiés dans la spécialité « électroacoustique ». De tels principes sont par ailleurs plutôt expérimentaux et leur dynamique est limitée, ce qui les cantonne encore dans les laboratoires comme leurs prédécesseurs l’ont été pendant longtemps autrefois. Les technologies « classiques » restent donc encore largement les plus répandues, leur évolution étant liée à la fois à la demande du marché et à des avancées dans d’autres domaines. Cette évolution ne doit pas être sous-estimée : la technologie électrostatique doit beaucoup de son succès au principe de « prépolarisation », par exemple par un film électret (Sessler, 1962), qui a permis la production de masse de capsules microphones à très faible coût – le flambeau pouvant être repris par les MEMS. Dans le même esprit, le développement de films piézoélectriques (PVDF) porte de grands espoirs, que l’industrie pourra éventuellement concrétiser si un marché suffisant se manifeste. Même le vétéran des haut-parleurs alimente encore la recherche, car un des principaux points faibles du haut-parleur électrodynamique s’avère être son comportement magnétique, longtemps ignoré par une description principalement électrique. De nouvelles structures de moteurs basées sur des matériaux modernes (aimants néodyme, ferrofluides) ont ainsi permis de réduire significativement plusieurs sources de non-linéarité majeures, ouvrant la voie à une reproduction sonore a priori plus fidèle. Les travaux effectués en ce sens relèvent de multiples spécialités (science des matériaux, magnétisme, etc.). Leurs avancées alimentent aussi une réflexion scientifique à plus long terme : la réponse à un besoin du marché justifie un investissement technologique, qui conduit à des configurations nouvelles (c’est à dire miniature), faisant éventuellement émerger un nouveau problème scientifique à résoudre. Cependant, les résultats de tels développements technologiques ne sont pas toujours diffusés rapidement car les acteurs du domaine cherchent souvent à valoriser au préalable des investissements importants. Schématiquement, on peut ainsi estimer que le dynamisme technologique actuel en matière de transducteurs « audio » est en partie responsable d’une diminution de l’intérêt de la communauté scientifique. Ceci devrait par contre être passager, et même annoncer un regain d’intérêt pour ces transducteurs lorsque la propriété industrielle associée se sera éteinte – comme cela a déjà été le cas dans le passé. 58 - Le livre blanc de l’acoustique en France en 2010 1.3 La reproduction sonore Parmi les applications « audio », la reproduction sonore représente une part très importante des marchés actuels. Mais c’est aussi un domaine où la recherche scientifique est très active, avec de nombreux partenariats entre laboratoires et entreprises. Une des raisons de ce dynamisme est l’engouement actuel pour la reproduction spatiale du champ, qui passe de la stéréophonie aux différentes variantes du « multicanal ». Là encore, une des raisons est la disponibilité des technologies, à la fois en termes de transducteurs (à la fois petits et fidèles) et de moyens de traitement audionumérique. Par contre l’émergence de ce thème résulte aussi de raisons plus profondes : il permet la cristallisation autour d’un même sujet de nombreuses spécialités scientifiques, parmi lesquelles la vibroacoustique, l’acoustique des locaux, le contrôle actif, le traitement du signal, la perception, etc. Il ne s’agit pas d’une simple application, mais bien d’un thème scientifique transverse – comme l’était l’étude des transducteurs au temps de « l’électroacoustique ». Un aspect critique de la reproduction sonore spatiale est celui de la représentation des champs : dans un problème spatial audio 3D, il est impossible de respecter rigoureusement les critères d’échantillonnage usuels, compte tenu de la très large gamme des fréquences audio (3 décades). La discrétisation spatiale du problème acoustique ne peut donc être que très imparfaite, et il est d’autant plus important de bien choisir et respecter les caractéristiques jugées essentielles dans le champ à reproduire (ce qui définit des paradigmes tels que WFS, HOA, etc.). Il s’agit bien là d’un problème fondamental d’acoustique, mais qui ne correspond par contre pas (encore ?) à une « spécialité » reconnue. Deux écoles coexistent depuis longtemps en ce domaine : soit une synthèse rigoureuse basée sur une représentation compacte du champ, soit une approche créant plutôt une illusion sonore, basée elle aussi sur des méthodes rigoureuses, mais relevant autant d’une dimension artistique que scientifique. L’arbitrage entre les deux relève de l’étude de la perception, qui n’a pas encore produit de modèles suffisants pour orienter les choix. Cependant le scientifique se heurte aussi à la réalité économique : les formats commerciaux actuels constituent une norme de fait, que les partenaires industriels ne peuvent pas ignorer, alors que l’expérimentation dans ce domaine nécessite des moyens que peu de laboratoires peuvent dégager sans partenariat. Heureusement, le dialogue reste aujourd’hui assez ouvert sur ce thème, permettant d’identifier progressivement les problèmes scientifiques à aborder. Parmi ceux-ci, l’interaction entre les transducteurs avec leur environnement sonore prend de l’importance quand leur nombre augmente, ce qui renforce les couplages entre objets adjacents. Les transducteurs réels ont une réponse qui dépend de leur charge acoustique, ce que l’on peut négliger tant que celle-ci reste mineure comparée à leur impédance mécanique propre. Cette dernière est en général minimisée dans les transducteurs très performants, qui s’écartent ainsi paradoxalement de sources idéalisées, en ce sens que leur « entrée » comporte alors deux degrés de libertés indépendants (tension et courant), là où l’utilisateur n’en pilote en général qu’un seul. Ceci pose des problèmes nouveaux et très intéressants en termes de stratégies de synthèse de champ, mais aussi de modélisation et de mesure de transducteurs agissant simultanément dans de petits locaux. De multiples concepts visent à traiter les parois d’un local d’écoute pour améliorer la restitution sonore, soit par des méthodes classiques (traitements absorbants, etc.), soit par des méthodes actives ou semi-actives. Au contraire, le concept des « line-arrays1 » maintenant omniprésent en sonorisation cherche à contrôler la directivité de sources à grand nombre de transducteurs, de manière à concentrer le champ à reproduire sur l’assistance en évitant autant que possible les parois. À (très ?) long terme, une convergence entre les dispositifs de correction de l’environnement et ceux de reproduction sonore pourrait donc conduire à une « paroi intelligente », assurant une reproduction sonore différenciée dans chaque local. À l’inverse, la tendance du marché actuel est à « l’écoute individuelle », maintenant intégrée dans de très nombreux produits. La solution usuelle est de faire appel à des écouteurs, qui apportent des problèmes spécifiques, notamment de métrologie : ils ne rayonnent pas dans un espace extérieur, mais dans une partie de l’oreille, qui constitue une charge confinée très variable d’un individu à l’autre. Là encore, le problème pratique de la caractérisation de la reproduction sonore débouche sur un problème fondamental ardu, qui va de l’acoustique physique à la perception. Ces quelques exemples illustrent la richesse des questions posées par la reproduction sonore, et leur caractère scientifique et fondamental, bien que transversal aux spécialités actuellement identifiées. À ces questions vont inévitablement s’ajouter celles liées à la raréfaction des ressources et de l’énergie, et donc du rendement énergétique des systèmes de traitement audionumérique et de reproduction sonore. C’est déjà un enjeu majeur dans les applications dites « nomades », qui préfigurent les besoins à venir : efficacité énergétique et compacité sont probablement deux propriétés qui devront être étudiés dans les prochaines années, et qui nécessiteront que les modèles prennent en compte globalement l’ensemble du problème de la reproduction sonore, depuis le système de pilotage jusqu’aux oreilles de l’auditeur. L’esprit général reviendra ainsi un peu à celui de l’électroacoustique : une approche basée sur la description énergétique couplée de phénomènes majeurs, mais abandonnant les hypothèses lourdes de linéarité ou d’invariance, et augmentée de la dimension spatiale du champ rayonné dans un environnement loin de l’anéchoïcité. 2. Capteurs et transducteurs ultrasonores 2.2 Historique L’évolution technologique des capteurs et transducteurs ultrasonores est étroitement liée au développement des méthodes acoustiques comme moyen d’investigation. En 1880, la découverte de la piézoélectricité par les frères Pierre et Jacques Curie ouvre la perspective de la génération et la détection des ondes ultrasonores. En 1916, Paul Langevin réalise la première expérience d’émission-réception d’ondes ultrasonores dans l’eau. L’utilisation des sonars durant la seconde guerre mondiale marque réellement le développement des transducteurs ultrasonores. Depuis, la technologie a constamment évolué, intégrant de nouveaux matériaux tels que les céramiques PZT dans les années 50, les composites piézoélectriques dans les années 80 et plus récemment les monocristaux à coefficient de couplage pouvant atteindre 90 %. Les développements technologiques s’accompagnent également d’une augmentation de la fréquence de fonctionnement des transducteurs ouvrant la voie à de nouvelles applications. Les années 50 voient le développement des premiers capteurs pour l’imagerie médicale et le contrôle non-destructif (CND) a gamme du MHz. À partir des années 70, les progrès en électronique et l’intégration des systèmes permettent le développement d’appareils commerciaux d’échographie médicale reposant sur l’utilisation de transducteurs multiéléments (barrettes) et de systèmes Doppler. En parallèle, la possibilité de générer et détecter des modes guidés sur substrat par peignes interdigités permet, par méthodes acoustiques, de réaliser des fonctions de filtrage en électronique à des fréquences de plusieurs centaines de MHz. Les méthodes de contrôle non-destructif et d’acoustique sous-marine, intègrent également les avancées technologiques conduisant dans ces domaines à une augmentation de la résolution des systèmes. 2.3 Méthodes/technologies La fonction de conversion d’énergie réalisée par le transducteur est faite le plus souvent par des matériaux piézoélectriques. Grâce à la nature réciproque du phénomène de piézoélectricité, ceux ci peuvent être utilisés comme émetteur ou comme récepteur. À titre d’exemple les monocristaux de niobate de lithium, des céramiques comme le titanate zironate de plomb ou le titanate zirconate de barium, certains polymères et copolymères comme le polyvinylidine difluoride (PVDF) ou le poly(vinylidène fluoride-trifluoroéthylène) P(VDF-TrFE) et les piézocomposites 2.1 Introduction Les capteurs ou transducteurs ultrasonores effectuent la conversion électromécanique qui permet d’engendrer et/ou de détecter des ondes dont les fréquences dépassent en général 20 kHz (sauf pour l’acoustique sous-marine qui s’intéresse également aux plus basses fréquences). Éléments principaux et indispensables à l’ensemble des procédés et expériences utilisant des ultrasons, ils s’intègrent dans de nombreux thèmes de l’acoustique. Ils sont employés dans les sonars actifs et passifs, comme hydrophones en acoustique sous-marine, pour le contrôle et l’évaluation non destructifs de matériaux et structures, pour le nettoyage industriel, dans les systèmes d’échographie et de thérapie en médecine, mais aussi en microscopie acoustique ou comme capteurs chimiques, physiques ou biologiques. Ils interviennent également dans des applications en débimétrie, le soudage de matières plastiques, en nébulisation ou dans les moteurs ultrasonores. [ FIGURE 1 ] Transducteurs pour l’imagerie médicale Philips medical. 1. Qu’on peut traduire par « réseaux en ligne ». Le livre blanc de l’acoustique en France en 2010 - 59 comptent parmi les matériaux piézoélectriques employés dans les transducteurs. Ces matériaux sont généralement associés à des éléments mécaniques passifs tels des lames adaptatrices ou des milieux arrières amortisseurs et éventuellement des éléments d’adaptation électrique pour constituer le transducteur ultrasonore. La géométrie ainsi que les propriétés des éléments constitutifs du transducteur, dont en premier lieu de l’élément actif, conditionnent les performances électroacoustiques du transducteur : sensibilité, bande passante et diagramme de rayonnement. Mis en œuvre sous forme de systèmes multi-éléments, et associés à une électronique de formation de faisceau, ils permettent l’imagerie de structures internes en médecine et dans l’industrie dans la gamme de fréquence 1-20MHz. À plus basses fréquences, ils permettent l’imagerie des fonds marins. 2.4 Perspectives et enjeux Aujourd’hui, la recherche dans le domaine des transducteurs ultrasonores est conduite en étroite relation avec celle menée autour des matériaux électroactifs avec l’objectif d’augmenter les performances – notamment la sensibilité et la bande passante – des transducteurs et de répondre aux besoins de nouvelles applications. Les monocristaux piézoélectriques de type PMN-PT ou PZN-PT possédant des propriétés piézoélectriques très élevées présentent des caractéristiques tout à fait séduisantes pour l’imagerie médicale. Les céramiques texturées aux performances approchant celles des monocristaux existent également et offrent la possibilité d’être fabriquées en grandes dimensions pour des applications d’acoustique sous-marine. En médecine, miniaturisation et intégration sous forme de réseaux d’antennes haute densité constituent aujourd’hui des enjeux majeurs dans le domaine des transducteurs ultrasonores, pour des applications en imagerie 3D et en imagerie haute résolution incluant l’imagerie endocavitaire et intravasculaire. Des structures intégrées à base de films épais piézoélectriques déposés sur substrat voient le jour. Elles permettent l’imagerie haute résolution à des fréquences entre 30 MHz et 100 MHz. De nouvelles technologies permettant un fort degré d’intégration comme les transducteurs capacitifs micro-usinés permettent d’envisager non seulement l’imagerie haute résolution, l’imagerie 3D, mais aussi le développement de capteurs à usage unique à faible coût. L’augmentation de la bande passante pour des applications d’imagerie harmonique, le développement de transducteurs de puissance pour des applications de thérapie, sont également des axes de recherche poursuivis par les laboratoires et entreprises travaillant dans le domaine des transducteurs. Dans le domaine du CND, les géométries variables ou irrégulières de la surface des pièces peuvent rendre leur contrôle impossible. La mise en œuvre de transducteurs ou de solutions techniques permettant de s’affranchir de la géométrie apparaît comme un enjeu majeur dans ce domaine pour les années à venir. L’utilisation de barrettes à déflexion permet dans une certaine mesure d’inspecter des régions difficilement accessibles. Des réseaux linéaires ou matriciels conformables voient également le jour ; ils permettent de s’affranchir de la géométrie des pièces en assurant un contact optimal. Leur pilotage à l’aide d’électroniques modernes permet de créer un champ ultrasonore indépendant de la géométrie. 60 - Le livre blanc de l’acoustique en France en 2010 [ FIGURE 2 ] Transducteur conformable qui permet de s’affranchir des géométries complexes des pièces pour leur contrôle ultrasonore. Une alternative repose le développement de systèmes de contrôle sans contact par transducteurs aériens. L’enjeu est alors de développer des systèmes suffisamment sensibles pour permettre une exploitation des signaux reçus. Les applications pour l’acoustique sous-marine nécessitent des matériaux et des conceptions de transducteurs permettant de supporter des puissances élevées et présentant un très bon rendement électromécanique. Alors que la plupart des antennes d’émission fonctionnaient à plus de 5 kHz, les années 80-90 ont été marquées par la conception d’antennes d’émission sonar fonctionnant autour de 1 kHz voire en dessous. La tendance actuelle et pour les prochaines années revient vers des fréquences plus élevées et une recherche de réduction des coûts avec des concepts de transducteurs comportant moins de pièces mécaniques, avec notamment des céramiques fonctionnant en mode de flexion. Pour ce qui concerne les hydrophones, l’objectif est d’obtenir des capacités diélectriques et des sensibilités suffisamment élevées pour assurer un rapport signal à bruit permettant d’écouter les bruits sous-marins. Les technologies d’hydrophones surfaciques utilisant des matériaux types PVDF sont maintenant suffisamment au point. Les études récentes et à venir pour les antennes de réception portent principalement sur des combinaisons de capteurs présentant une directivité (pour lever le doute droite/gauche) et de nouveaux capteurs sensibles à la vitesse particulaire dans l’eau au lieu de la pression acoustique. 2.5 Entreprises et laboratoires en France travaillant dans le domaine des transducteurs Sur le marché des transducteurs pour le CND et l’imagerie médicale on trouve les sociétés Vermon, Imasonic, Parallel Design, Métalscan, Sonaxis... Thales développe des matériaux piézoelectriques et des transducteurs pour l’acoustique sous-marin. Comme laboratoires travaillant sur le thème des transducteurs ultrasonores on peut citer le LUSSI (Tours), l’IEMN (Lille), FEMTO-ST (Besançon), l’INSERM (Lyon) pour les transducteurs de puissance, la DGA, l’équipe MIRA de l’IES (Montpellier)...