Des territoires inégalement intégrés à la mondialisation Problémat

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Thème : Les dynamiques de la mondialisation
Chapitre : Des territoires inégalement intégrés à la mondialisation
Problématiques:
‐ Quelle typologie des territoires peut-on établir en fonction de leur inégale intégration à la mondialisation ?
‐ Quelles sont les caractéristiques des pôles et espaces majeurs de la mondialisation et des territoires restés en marge ?
I. Pôles et espaces majeurs de la mondialisation:
Quels sont les territoires moteurs de la mondialisation?
A. L'émergence d'un monde multipolaire:
Trois grandes aires de puissance (Amérique du Nord, Europe occidentale, Asie orientale) dominent
l'économie mondiale. Les États-Unis, l'Union européenne et l'Asie orientale produisent près de 60% de la richesse
mondiale alors qu'ils ne comptent que 13% de la population de la planète. Ils contrôlent près de 40% des exportations
mondiales, 75% de l'investissement mondial en recherche et développement, et réalisent 90% des opérations
financières. De plus, ces aires de puissance sont souvent regroupées en organisations économiques régionales
(ALENA, UE) qui organisent un commerce intrazone très important.
 Toutefois, en vingt ans, l'espace mondial est devenu de plus en plus multipolaire du fait de l'émergence de
nouveaux centres. Ceux-ci se concentrent dans les pays émergents en forte croissance. Alors que la richesse créée a
triplé entre 1990 et 2012, le poids des pays développés du Nord dans le total mondial a diminué de 80 % à 66 % du
fait du dynamisme des économies en développement. Dans celles-ci, on est passé «d'un Sud» à «des Suds» en raison
de la diversification des trajectoires économiques des PED (forte croissance, stagnation ou déclin) et de l'affirmation
de cinq grands pays émergents, les BRICS, ainsi que de nouvelles puissances régionales. Leur développement
rapide et leur intégration accélérée à l'économie mondiale entraînent des recompositions dans la hiérarchie des
territoires de la mondialisation.
Ce rééquilibrage géoéconomique dessine une nouvelle architecture du monde, plus complexe. Les liens de
dépendance Nord-Sud s'affaiblissent au profit de liens Suds-Suds, dynamiques. Chaque nouvelle puissance cherche à
renforcer son hégémonie continentale: la Chine en Asie centrale et orientale, le Brésil en Amérique du Sud, l'Inde en
Asie du Sud, l'Afrique du Sud en Afrique australe, la Turquie en Asie centrale et au Proche-Orient...
L'hégémonie traditionnelle - politique, économique et financière - des pays développés dans l'espace mondial
est remise en cause depuis le début de la crise économique en 2008. Les nouvelles puissances émergentes bloquent les
négociations commerciales à l'OMC, réclament plus de pouvoirs au FMI, à la Banque mondiale ou au Conseil de
sécurité de l'ONU et veulent défendre leurs intérêts nationaux.
=Géoéconomie: étude des rapports entre espace et économie => étude des rivalités économiques et de leurs enjeux sur
les territoires.
B. Les grandes métropoles, moteurs de la mondialisation:
 Les grandes métropoles concentrent l'essentiel du pouvoir économique, financier et politique. Elles exercent
des fonctions de commandement et d'impulsion à travers les sièges des gouvernements et des organisations
internationales, les sièges sociaux des firmes transnationales concentrés dans des espaces spécialisés (les grands
quartiers d'affaires), les bourses et marchés financiers (Wall Street à New York, la City de Londres, Paris, Tokyo,
Singapour, Shanghai). Certaines concentrent des fonctions spécialisées (banque à Zurich, cinéma à Los Angeles,
tourisme à Rio), d'autres présentent des fonctions de commandement très diversifiées: ce sont les villes mondiales
(Londres, New York, Paris, Tokyo). Toutes sont le lieu d'activité et de résidence des catégories les plus riches.
=métropole: ville qui exerce son influence sur un territoire très étendu, régional, national ou mondial.
 Une quarantaine de villes mondiales sont les nœuds privilégiés de la production et de la circulation de la
richesse, des hommes, des savoirs, de la recherche, et des informations grâce à leur haut niveau d'équipement et de
qualification. Ensemble, elles forment l'AMM. Villes cosmopolites, elles sont aussi des capitales culturelles avec des
musées renommés. Trente aéroports y polarisent 70 % du trafic aérien mondial. Elles sont les espaces moteurs de la
mondialisation et les villes mondiales les plus puissantes (New York, Londres, Tokyo) s'inscrivent au coeur de
mégalopoles en forte croissance (Megalopolis américaine, Dorsale européenne, mégalopole japonaise).
= Ville mondiale: ville aux fonctions de commandement exceptionnelles,
=AMM (Archipel métropolitain mondial): ensemble des villes mondiales, connectées en réseaux, qui sont les
centres d'impulsion de la mondialisation.
=Mégalopole: Grande région urbaine de plusieurs dizaines de millions d'habitants et s'étendant sur des centaines de
kilomètres, formée par un tissu urbain continu de plusieurs métropoles qui se rejoignent. Ce terme a été utilisé
initialement pour décrire le littoral Nord-Est des États-Unis de Boston à Washington, la Megalopolis.
Ne pas confondre avec "Mégapole"=> très grande agglomération de plus de 10 millions d'habitants pour l'ONU.
 La répartition dans le monde des villes de rang mondial est inégale. Elles se concentrent majoritairement dans
les pays développés, mais les dynamiques économiques en cours expliquent l'émergence de villes de commandement
notamment en Asie (Shanghai, Singapour, Séoul, Mumbaï), en Amérique latine (Sâo Paulo).
 Fonctionnant en réseaux, les métropoles sont organisées en une hiérarchie urbaine mondiale et continentale.
Si les métropoles du Nord (New York, Londres, Paris, Tokyo) gardent un réel et puissant avantage, la montée des pays
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émergents se traduit par la métropolisation spectaculaire de grands pôles (Singapour, Beijing, Shanghai, Sao Paulo,
Bombay, Moscou, Istanbul...) qui monopolisent les activités modernes et internationalisées de leur pays. Mais
l'explosion urbaine entraîne l'accumulation des oppositions sociales et urbaines exacerbées et des dysfonctionnements:
ceintures de bidonvilles, déficit d'équipements collectifs, sous-investissements en infrastructures...
=Métropolisation: Mouvement de forte concentration des hommes et des fonctions les plus stratégiques dans les
villes les plus importantes d'un pays, d'un continent, voire du monde.
C. Les grandes façades maritimes, interfaces de la mondialisation:
La mondialisation s'accompagne d'un vaste processus de littoralisation*. Les littoraux jouent un rôle
fondamental d'interface facilitant la connexion aux échanges mondiaux. Ils sont souvent les lieux privilégiés des
dynamiques démographiques, industrielles, économiques et urbaines, comme en témoignent les mutations de la Chine
ou de l'Inde.
=Littoralisation (ou maritimisation): tendance à la concentration des hommes et des activités sur les littoraux.
=Interface: zone de contact entre deux ensembles géographiques différents par l'importance de leur peuplement, leur
niveau de développement, etc... L'interface peut être un lieu de conflit ou d'enrichissement mutuel par des échanges de
toutes natures.
 Quelques grandes façades maritimes jouent un rôle majeur dans l'économie mondiale: Japon, Chine littorale,
Northern Range européenne, Megalopolis de la Côte Est et de la côte Pacifique des États-Unis. En effet, le commerce
mondial de marchandises s'organise autour de grandes routes qui relient les façades maritimes asiatiques, européennes
et nord-américaines. Les plus puissantes mégalopoles sont littorales et concentrent les plus grands ports et les
principaux flux maritimes mondiaux.
=Façade maritime: espace littoral d'échanges constitué de très grands ports proches les uns des autres mettant en
relation un avant-pays maritime et un arrière-pays continental.
=Northern range: principale façade maritime européenne qui s'étend du Havre à Hambourg.
D. D'autres territoires présentent une étroite articulation à l'espace mondialisé fondée sur une forte
spécialisation fonctionnelle:
Ce sont les interfaces frontalières (Frontière Mexique - Etats-Unis), les détroits stratégiques (Gibraltar,
Malacca...), les zones franches (Dubai, ZES du littoral chinois...), les paradis fiscaux, les hubs aéroportuaires et
portuaires, les «fermes du monde» (espaces voués à l'agriculture intensive produisant pour le marché mondial => ex:
les Grandes Plaines aux EU), les espaces du tourisme international (littoral méditerranéen, Floride, Alpes du Nord...).
=Interface frontalière: espace où se font des échanges de toute nature entre des acteurs venus de pays différents,
=Hub: plate-forme ou nœud de correspondance (aéroport, port, etc.) qui concentre et redistribue les flux de
marchandises et de personnes à différentes échelles.
=Zone franche: territoire bénéficiant d'avantages fiscaux et/ou douaniers.
II. Des territoires et des sociétés en marge de la mondialisation:
Quels sont les territoires en marge de la M°?
A. Des inégalités persistantes à toutes les échelles
 La mondialisation creuse les inégalités sociales et territoriales entre ceux qui en bénéficient et ceux qui en sont
exclus, dans tous les pays, du Nord comme du Sud, et à toutes les échelles : 1 % de la population de la planète détient
38 % de la richesse mondiale alors que les trois milliards d'habitants les plus pauvres n'en possèdent que 4,2 %; Un
tiers de la population mondiale (2,1 milliards de personnes en 2011) vit avec moins de 2 dollars par jour et 1 milliard
de personnes vivent avec moins de 1,25 dollars par jour (2011). Au Royaume-Uni, pays du Nord, 25 % des enfants
vivent sous le seuil de pauvreté.
=Seuil de pauvreté: niveau de revenus au-dessous duquel, dans un pays donné, une personne est considérée comme
pauvre, c'est-à-dire ne disposant pas d'un niveau de vie convenable. le seuil de pauvreté est relatif selon le niveau de
richesse du pays. Pour les PED, la Banque mondiale définit un seuil d'extrême pauvreté (1,25 dollar par personne et
par jour) et un seuil de pauvreté (2 dollars par personne et par jour). Pour les pays riches, le calcul est différent: on
calcule le pourcentage de la population vivant avec un revenu inférieur à une certaine fraction (généralement 50 ou
60%) du revenu médian (= revenu qui partage la population en deux parties égales: 50% gagne plus et 50% gagne
moins).
Avec la croissance démographique et la crise de 2008, la situation mondiale peine à s'améliorer. La moitié de
la population active mondiale (3,25 milliards de personnes) est en situation précaire: plus d'un milliard d'habitants ont
faim, 1,5 milliard n'ont pas accès à l'électricité et 3 milliards à l'assainissement. Les Objectifs du Millénaire pour le
développement annoncés par l'ONU en 2000. qui promouvaient progrès social, économique et solidarité, sont caducs.
=Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD): Signés en 2000 par 189 pays sous l'égide des Nations
unies, avec échéance en 2015, ces objectifs ont pour but premier de réduire l'extrême pauvreté, la faim,
l'analphabétisme et la maladie.
 Du fait des trajectoires contrastées des PED depuis 30 ans, on est passé « d'un Sud» à « des Suds ». Aux pays
en rattrapage rapide où émerge une classe moyenne urbaine (NPI d'Asie, Asie de l'Est, Europe centrale et orientale,
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et une partie de l'Amérique latine), on peut opposer des pays en stagnation (Nord de l'Afrique, Amérique andine et
centrale) et des espaces bloqués (Afrique subsaharienne, Asie du Sud, Pays les moins avancés).
B. Les difficultés à s'intégrer dans la mondialisation relèvent de facteurs multiples:
 Bien des pays du Sud se voient marginalisés à l'échelle mondiale du fait de leur situation géographique.
L'insularité (Océanie), l'enclavement faute d'accès à la mer (Laos) ou d'infrastructures performantes (Érythrée)
demeurent une entrave à leur intégration dans la mondialisation. Cet isolement existe aussi à l'échelle d'une région,
d'une ville ou d'un quartier.
=situation géographique: position d'un lieu par rapport à d’autres lieux semblables ou complémentaires; position
d'un lieu dans les différents réseaux qui lui assurent des relations avec d’autres lieux semblables ou complémentaires.
 L'instabilité et les tensions politiques maintiennent souvent les pays qui en sont victimes à l'écart des flux
mondialisés. Sanctionnés par les agences de notation financière, ils peinent à capter les investissements (Zimbabwe,
Corée du Nord). La corruption désorganise leur économie. Leur insécurité rebute les touristes (Afrique
subsaharienne).
=Agences de notation financière: entreprises chargées d'évaluer les risques liés à la solvabilité des emprunteurs
(États, entreprises, etc.).
 Les territoires en difficulté disposent généralement de très peu d'atouts (=avantages comparatifs) leur
permettant d'entrer dans la NDIT et présentent trop de risques pour les FTN. Cela se traduit par une faible
participation aux échanges commerciaux et financiers mondiaux.
=Avantages comparatifs: Ressource (agricole, minière, humaine) dont on peut tirer profit dans le cadre de la
nouvelle division internationale du travail en raison de sa rareté ou de son inégale répartition dans le monde.
=NDIT (Nouvelle division internationale du travail): division internationale du travail dans laquelle des pays
émergents jouent un rôle croissant en participant à la productions de biens manufacturés et de services exportés.
 Les territoires et sociétés en marge connaissent une forte montée des tensions sociales et économiques et de
l'insécurité. Les révolutions du « printemps arabe » en 2011 traduisent la montée des revendications démocratiques,
sociales et économiques. La mobilisation de la population, en particulier de la jeunesse confrontée au chômage et à la
misère, renverse des régimes autoritaires et corrompus (Tunisie, Égypte, Libye).
= Printemps arabe: nom donné à l'ensemble des mouvements de protestation et de révolution qui ont eu lieu dans le
monde arabe à partir de la fin de l'année 2010 (Tunisie, Egypte, Libye...)
 La montée des activités et trafics illicites est, pour les territoires les plus pauvres, une des rares modalités
d'insertion dans la mondialisation. La culture et le trafic de drogue déstabilisent de manière croissante l'Amérique
centrale et andine, le bassin caraïbe, une partie de l'Afrique, l'Asie centrale et du Sud-Est. La piraterie maritime
connaît un fort développement en Asie du Sud-Est, dans le golfe de Guinée et au large de la Somalie. La
mobilisation militaire internationale contre ces fléaux ne peut être efficace que dans le cadre de la promotion d'un
ordre économique international plus juste et plus solidaire.
C. Les Pays les moins avancés (PMA) font figure d'exclus de la mondialisation:
 Les 49 PMA représentent les États les plus fragiles et marginaux de la planète. Ils cumulent les blocages
économiques et sociaux les plus importants; 34 sont situés en Afrique subsaharienne, 9 en Asie, 1 dans les Caraïbes et
5 dans le Pacifique.
=Pays les moins avancés (PMA): Groupe de pays définis par l'ONU en 1971 à partir de trois critères: faible revenu
par habitant, faiblesse de la production industrielle dans le RNB et faible taux d'alphabétisation. Ces États cumulent
toutes les manifestations du sous-développement (faible espérance de vie, grande pauvreté, systèmes éducatifs et
sanitaires déficients).
 La question du développement s'y pose avec acuité. La faiblesse des États, l'absence de couverture sociale et de
système de retraite, la défaillance des systèmes de santé et éducatifs, l'insuffisance des infrastructures, l'impossibilité
d'accéder à l'eau potable, au tout-à-l'égout ou à l'électricité sont des vecteurs de mal-développement (caractérisé par la
pauvreté, le travail des enfants, la surconsommation du patrimoine naturel et forestier). Peu diversifiée, leur économie
souffre de la concurrence des pays du Nord (coton africain par exemple). Le « brain drain» (migration des cerveaux)
prive ces pays de leur élite intellectuelle.
 Leurs importantes richesses naturelles (pétrole au Soudan et en Angola, uranium au Niger, minerais au Congo,
diamants de Sierra Leone, cuivre en Zambie...) sont généralement exploitées par des FTN des pays développés ou
émergents et profitent peu aux populations locales. Le produit de ces rentes est souvent confisqué par des élites
politiques locales autoritaires et corrompues. Des conflits internes sanglants, voire des guerres civiles résultent de la
concurrence pour l'accaparement des rentes (diamants au Sierra Leone et au Liberia) et détruisent le tissu social et
économique. L'avenir des PMA est un enjeu crucial.
Bilan: La mondialisation est un processus qui intègre inégalement les territoires dans les réseaux d'échanges. Elle
met en avant des territoires très intégrés, tout en laissant de côté des territoires plus ou moins marginalisés.
Néanmoins, elle recompose sans cesse cette hiérarchie.
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