la rencontre des atomes froids et de la nanophotonique

ARR ˆ
ETER LA LUMI `
ERE DANS UNE FIBRE:
LA RENCONTRE DES ATOMES FROIDS ET DE LA NANOPHOTONIQUE
Julien Laurat
Laboratoire Kastler Brossel, UPMC-Sorbonne Universit´
es, CNRS, ENS-PSL Research University,
Coll`
ege de France, 4 Place Jussieu, 75005 Paris, France
R´
ESUM ´
E
La combinaison des atomes froids et de la nanophotonique permet de r´
ealiser de nouvelles
interfaces lumi`
ere-mati`
ere pour l’information quantique.
MOTS-CLEFS :information quantique; m´
emoire; atomes froids; nanophotonique.
Les interfaces lumi`
ere-mati`
ere constituent des outils importants pour l’optique quantique et les
r´
eseaux quantiques de communication [1]. Dans ce contexte, mon ´
equipe de recherche au Laboratoire
Kastler Brossel s’int´
eresse au d´
eveloppement de telles interfaces reposant sur des ensembles d’atomes
froids. Un exemple d’application est la r´
ealisation de m´
emoires quantiques permettant `
a la lumi`
ere et
`
a la mati`
ere d’´
echanger leurs ´
etats `
a la demande. En espace libre, nous avons ainsi cr´
e´
e une m´
emoire
permettant le stockage de bits quantiques encod´
es dans le moment orbital angulaire de la lumi`
ere, c’est-
`
a-dire dans l’h´
elicit´
e du front d’onde [2]. En faisant fonctionner deux m´
emoires quantiques en parall`
ele,
nous avons ensuite stock´
e des bits encod´
es par la structuration de la lumi`
ere dans le plan transverse,
non seulement en phase mais aussi en polarisation, r´
ealisant ainsi une m´
emoire quantique pour plusieurs
degr´
es de libert´
e simultan´
ement [3]. Dans cet expos´
e, je pr´
esenterai une nouvelle interface reposant sur
une nanofibre optique au diam`
etre sub-longueur d’onde et coupl´
ee `
a un ensemble d’atomes froids pi´
eg´
es
`
a proximit´
e.
Combiner atomes froids et nanophotonique apparaˆ
ıt comme une alternative prometteuse pour
r´
ealiser de nouvelles interfaces lumi`
ere-mati`
ere. Le fort confinement de la lumi`
ere permet non seulement
une interaction sur une distance qui n’est plus limit´
ee par la diffraction, mais ´
egalement une interaction
atome-photon exalt´
ee et la possibilit´
e d’interaction non-lin´
eaire `
a des puissances optiques tr`
es faibles.
400nm
signal
control
|gi
|ei
|si
signal control
SEM
Reference
Memory
0
200
400
600
800
0
2
4
6
8
Time !ns"
Detection events !a.u."
!
!
!
!
!
!
!
!
!
!
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!
!
!
!
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!
!
!
!
!
!
!
!
!
!
0
2
4
6
8
10
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Storage time !Μs"
Normalized Η
(a)
(b)
(c)
FIGURE 1 : Arrˆ
eter la lumi`
ere dans une fibre optique. Des atomes froids sont pi´
eg´
es au voisinage d’une fibre
optique qui a ´
et´
e´
etir´
ee dans une r´
egion de quelques centim`
etres. En arrivant dans cette zone, la lumi`
ere guid´
ee
est ralentie et l’information qu’elle porte est transf´
er´
ee aux atomes. Plus tard, `
a la demande, la lumi`
ere est r´
e´
emise
dans la fibre et peut se propager `
a nouveau. (a) Une fibre de 400 nm de diam`
etre est superpos´
ee `
a un large ensemble
d’atomes froids. Un champ dit de contrˆ
ole permet de modifier la propagation de la lumi`
ere guid´
ee. (b) Stockage et
relecture. (c) Temps de vie de la m´
emoire.
Session plénière 3
OPTIQUE 201513
Par exemple, un guide d’onde avec une dimension plus petite que la longueur d’onde fournit un large
champ ´
evanescent qui peut ˆ
etre utilis´
e pour interagir avec des atomes `
a proximit´
e ou pour les pi´
eger `
a
l’aide d’un pi`
ege dipolaire. La surface effective du mode ´
etant proche de la section efficace d’absorption,
un atome unique peut absorber une fraction non n´
egligeable de la lumi`
ere guid´
ee et fournir ainsi un fort
couplage lumi`
ere-mati`
ere en un seul passage.
En utilisant une telle approche, nous avons r´
eussi `
a int´
egrer une m´
emoire quantique directement
dans une fibre optique (figure 1) [4]. Pour cela, une fibre optique commerciale similaire `
a celles uti-
lis´
ees dans les r´
eseaux de t´
el´
ecommunication a ´
et´
e chauff´
ee et ´
etir´
ee jusqu’`
a moins de 400 nanom`
etres
de diam`
etre et ce, sur quelques centim`
etres. Nous avons ensuite refroidi des atomes de c´
esium dispos´
es
proches de cette zone ´
etir´
ee. Lorsque la lumi`
ere atteint cette r´
egion, une grande partie de l’´
energie circule
autour de la fibre et elle peut alors interagir avec les atomes environnants. En utilisant la technique dite de
transparence induite ´
electromagn´
etiquement qui permet de contrˆ
oler les propri´
et´
es du milieu atomique
par un laser additionnel, la lumi`
ere a ´
et´
e ralentie par un facteur 3 000 puis totalement arrˆ
et´
ee. Cette im-
pulsion lumineuse a ´
et´
e stopp´
ee pendant plusieurs microsecondes puis ´
emise de nouveau dans la fibre.
Sans cet arrˆ
et impos´
e, la lumi`
ere aurait parcouru dans le mˆ
eme temps plusieurs kilom`
etres ! L’informa-
tion port´
ee par la lumi`
ere est transf´
er´
ee aux atomes sous la forme d’une excitation collective, une large
superposition quantique. En raison du fort confinement de la lumi`
ere, quelques milliers d’atomes suf-
fisent pour obtenir de fort ralentissement, alors que des millions ´
etaient n´
ecessaires dans les exp´
eriences
en espace libre. Nous avons ´
egalement montr´
e que des impulsions lumineuses contenant un seul photon
pouvaient ˆ
etre stock´
ees et r´
e´
emises avec un large rapport signal sur bruit. Au del`
a des m´
emoires quan-
tiques, ce syst`
eme peut aussi ˆ
etre utilis´
e comme source de photons uniques intrins`
equement fibr´
es.
Je montrerai ´
egalement comment le pi´
egeage d’atomes froids autour de la nanofibre permet de
r´
ealiser un miroir de Bragg efficace [5]. En r´
ealisant un r´
eseau optique dans le champ ´
evanescent, avec
une distance entre les atomes proches de la longueur d’onde de la transition atomique, nous avons pu
d´
emontrer des r´
eflectivit´
es sup´
erieures `
a 75% avec seulement quelques milliers d’atomes (figure 2). La
possibilit´
e de contrˆ
oler le transport de photon unique dans ce type de syst`
eme est `
a la base de nombreuses
propositions dans ce domaine ´
emergent dit de l’´
electrodynamique quantique en guide d’onde (waveguide
quantum electrodynamics).
Je terminerai cet expos´
e en discutant les perspectives du domaine, en particulier l’apport possible
des cristaux photoniques `
a cette nouvelle direction de recherche.
x
z
y
d
(a)
(c) (d)
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
R
T
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
6040200
-20-40
Detuning [MHz]
R
T
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
6040200
-20-40
Detuning [MHz]
(b)
(a)
(c) (d)
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
R
T
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
6040200
-20-40
Detuning [MHz]
R
T
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
R, T
6040200
-20-40
Detuning [MHz]
(b)
FIGURE 2 : Miroir de Bragg atomique. Les atomes pi´
eg´
es `
a proximit´
e de la nanofibre peuvent ´
emettre en espace
libre ou dans le mode guid´
e. Chaque atome se comporte alors comme un miroir avec une faible r´
efl´
ectivit´
e pour la
lumi`
ere se propageant dans la nanofibre. Lorsque la distance entre les atomes est tr`
es proche de la longueur d’onde
de la transition atomique, l’interf´
erence entre ces r´
eflexions peut conduire `
a une forte r´
eflexion de Bragg. Dans
notre cas, 2000 atomes seulement permettent d’obtenir une r´
eflexion Rproche de 75%. Le trac´
e donne les spectres
de r´
eflexion et de transmission en fonction du d´
esaccord `
a la r´
esonance du champ sonde.
Session plénière 3
OPTIQUE 2015 14
R´
EF ´
ERENCES
[1] J. Laurat et T. Chaneli`
ere, “La m´
emoire, pilier du r´
eseau quantique,” in La Recherche, Les R´
evolutions
quantiques, juillet 2015.
[2] A. Nicolas et al., “A quantum memory for orbital angular momentum photonic qubits,Nature Photon. 8,
234 (2014).
[3] V. Parigi et al., “Storage and retrieval of vector beams of light in a multiple-degree-of-freedom quantum
memory,Nature Commun. 6, 7706 (2015).
[4] B. Gouraud, D. Maxein, A. Nicolas, O. Morin, J. Laurat “Demonstration of a memory for tightly guided
light in an optical nanofiber,Phys. Rev. Lett 115, 023602 (2015).
[5] N.V. Corzo, B. Gouraud, A. Chandra, A. Goban, A.S. Sheremet, D.V. Kupriyanov, J. Laurat “Large Bragg
reflection from one-dimensional chains of trapped atoms near a nanoscale waveguide,” arXiv :1604.03129.
Session plénière 3
OPTIQUE 201515
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