La crise est entrée récemment dans sa 5ème année. Ce qui

publicité
La crise est entrée récemment dans sa 5ème année. Ce qui a commencé par la faillite de la banque
d’affaires américaine Lehman Brothers, a fini par provoquer la récession économique la plus grave
depuis les années 30. En fait, nous sommes les témoins de plusieurs crises – ou, pour l’exprimer plus
clairement, une crise en plusieurs phases. La première phase de la crise a été celle de la crise
bancaire, au cours de laquelle la chute d’une seule banque a engendré une crise bancaire au niveau
mondial. En Belgique également, toutes les grandes banques furent touchées – ne citons que Fortis
et Dexia. La crise est entrée dans une deuxième phase dans le courant du printemps 2009 avec la
crise économique. C’est à ce moment-là que l’impact réel de la crise s’est fait ressentir sur
l’économie. Toutes les grandes économies européennes – ainsi que les Etats-Unis – ont été
confrontées à une récession importante de l’activité économique. Au cours des deux premiers
trimestres 2009, l’économie belge a régressé en moyenne de plus de 5%. Une nouvelle phase a
démarré au printemps 2010, celle de la crise budgétaire. Les pouvoirs publics du monde entier
devaient supporter la charge budgétaire à la fois de la crise économique mondiale et du sauvetage
des banques. Différents pays aux ‘bases économiques faibles’ étaient acculés. L’exemple le plus
douloureux est la tragédie de la crise grecque qui dure déjà depuis plus de deux ans.
Sur fond de crise, on assiste à une accélération fondamentale de l’intégration européenne. Plusieurs
nouveaux plans et initiatives se suivent à un rythme accéléré. Il fallait avant tout instaurer un
successeur à la stratégie de Lisbonne, cette stratégie devait déterminer les priorités politiques de
l’UE pour 10 ans. Au printemps 2010, l‘Europe 2020’ voit le jour. Des objectifs ambitieux ont été
formulés dans différents domaines – bien qu’il aurait fallu mettre encore plus en exergue les aspects
sociaux. La crise nécessitait aussi une action européenne forte. Dans ce contexte, les réformes de
l’Union européenne - et principalement celles situées dans la zone euro1 – s’accélérèrent. Plusieurs
initiatives virent le jour dans la complexité institutionnelle de l’Union européenne : le Pacte Europlus, le Pacte budgétaire, le ‘Six-pack’, le ‘Two pack’ … au moment où nous rédigeons ces lignes, les
réformes ne semblent pas encore avoir abouti. Toutefois, le but de la brochure est d’aider le
secrétaire, le délégué ou le militant SETCa à comprendre la situation actuelle. Là où cela s’avère
nécessaire, nous revenons sur quelques aspects historiques et le contexte. Précisons dès le départ
que le SETCa adopte une position critique face à la manière dont la crise a été gérée jusqu’à ce jour
au niveau européen. Notre modèle social est contesté à différents niveaux – il suffit de penser à la
recommandation européenne visant à revoir le mécanisme d’indexation automatique. A la fin du
texte nous rappelons qu’il existe une autre voie notamment celle de l’Europe sociale et
démocratique dans laquelle les salaires et les dépenses sociales ne sont pas considérées uniquement
comme un ‘coût’ mais comme des outils favorisant le pouvoir d’achat et la redistribution.
En redigeant cette brochure, nous avons tenté de présenter les choses le plus clairement et le plus
simplement possible. Elle doit permettre à chacun de cerner la complexité de la construction
1
La zone euro est constituée des pays qui utilisent l’euro comme monnaie. Précisons que certains pays de
l’Union européenne n’utilisent pas l’euro.
p 1 / 18
Novembre 2012 - La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
européenne. En fin de brochure vous trouverez une liste des termes le plus souvent utilisés dans le
“jargon” que l’Union européenne a développé ces quatre dernières années.
Les réformes institutionnelles européennes que nous connaissons aujourd’hui, n’auraient jamais été
réalisées sans la profonde crise socio-économique dans laquelle nous vivons. Les étapes successives
de la crise ont nécessité, à chaque fois, une nouvelle intervention européenne. Les plans
économiques européens ne sont pas le résultat d’un projet mais sont souvent l’addition des
initiatives qui semblaient s’imposer dans le contexte. A chaque étape de la crise, l’Europe a
développé une autre approche et, à chaque fois, d’autres priorités étaient définies. Toutefois, au fil
des années, une interprétation dominante de la crise européenne s’est manifestée et sert de fil
rouge à travers les plans de réforme. C’est précisément à ce niveau que selon le SETCa, on n’est pas
sur la bonne voie, nous y reviendrons plus loin.
Pendant la première phase de la crise – de l’automne 2008 au printemps 2009 – tout a été mis en
oeuvre pour sauver le système bancaire européen. Les pays européens sont intervenus directement
– par le biais de nationalisations – ou indirectement – par le biais de systèmes de garantie – afin de
sauver les banques de la déroute. E matière de discipline budgétaire, l’Union européenne a été plus
tolérante. Eviter une implosion économique totale était la première et la principale mission. La
première réaction à la crise économique qui a démarré au printemps 2009 a moins mis l’accent sur la
discipline budgétaire que sur l’importance de la stabilisation et de la relance économique via les
dépenses sociales et les stimulants fiscaux2. Le Plan européen de redressement économique est un
élément important qui a surtout mis l’accent sur la croissance économique, même si cela se faisait au
prix d’une politique budgétaire conservatrice. Le plan prévoyait un stimulant budgétaire immédiat de
1,5% du PNB et insistait sur l’importance des investissements à long terme. Les mots d’ordre étaient
solidarité et justice sociale. En cette année 2009, l’Europe a aussi fermé les yeux face à la hausse des
déficits budgétaires. Le ‘drame grec’ qui dure depuis plus de deux ans a soudainement mis fin à cette
situation. On entrait de plein pied dans la troisième phase de la crise – appelée généralement la
‘crise euro’ ou la ‘crise de l’endettement’.
Au printemps 2010, on constate que le déficit budgétaire de la Grèce ne s’élevait pas à 6% du PNB –
comme affirmé au départ – mais dépassait les 12% du PNB. En se remémorant la faillite de Dubaï, on
craignait que certains pays de la zone euro ne soient plus en mesure de rembourser leurs dettes.
Cela provoqua un certain niveau de ‘selffulfilling prophecy’ : la crainte que la Grèce ne puisse plus
rembourser ses dettes générera encore plus de dettes. Le statut créditeur défavorable eut comme
conséquence que la Grèce ne pouvait refinancer ses dettes que moyennant un taux d’intérêt très
élevé. Les premiers fonds d’aide européens furent donc créés en 2010 – même si ce ne fut que
2
Des stimulants fiscaux concernent les moyens budgétaires supplémentaires libérés afin de stabiliser et de
stimuler l’économie. Le terme fiscal ne signifie pas qu’il s’agit nécessairement de déductions fiscales.
p 2 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
temporairement. Ces fonds furent gérés par une ‘troïka’ constituée de la Commission européenne,
de la Banque centrale européenne et du Fond Monétaire International. L’aide était assortie de
conditions très strictes. Plus tard, l’Irlande, le Portugal et (en partie) l’Espagne reçurent également
des moyens d’un de ces fonds. Ainsi, l’Union européenne changea son fusil d’épaule – sous
l’influence de ‘Merkozy’3 – la crise européenne fut rebaptisée en ‘crise de l’euro’ ou ‘crise de
l’endettement’. Depuis lors, la discipline budgétaire et la compétitivité sont devenus une obsession.
De nombreuses initiatives ont vu le jour depuis le printemps 2010 : le Pacte euro-plus, le Pacte
budgétaire, le ‘Six-pack’ et finalement le ‘Two Pack’. Toutes les propositions politiques peuvent
finalement être résumées en une seule interprétation des causes de la crise : un manque de
discipline budgétaire et de compétitivité. Plus loin, nous expliquerons en quoi cette interprétation
fait fausse route. En même temps, la stratégie ‘Europe 2020’ démarrait et devait ranimer la stratégie
de Lisbonne défaillante. La ‘méthode’ visant à assurer le suivi des avancées des Etats membres en
matière de budget, de compétitivité et des objectifs EU2020 fut appelée le ‘Semestre européen’ – un
cycle de six mois au cours duquel tous les Etats membres étaient ‘analysés’. La brochure aborde
successivement la stratégie Europe 2020, les contours de la gouvernance économique européenne et
le semestre européen.
Depuis le passage à l’an 2000, l’Union européenne a pris l’habitude de travailler avec de grands plans
décennaux. En mars 2000, on assista à la mise en place de la ‘stratégie de Lisbonne’ – d’après le nom
de l’endroit où se déroulait le sommet européen. La stratégie avait pour objectif de faire de l’Europe
‘l’économie de connaissance la plus dynamique et la plus compétitive’. Une participation du marché
de l’emploi de 70% - en d’autres termes 70% des personnes en âge actif doivent avoir un travail – et
la réalisation d’une croissance économique annuelle de 3% furent les objectifs principaux. Les
objectifs de Lisbonne baignaient dans la confiance et l’optimisme qui régnaient à l’époque. En
théorie, la stratégie comportait trois piliers équivalents : l’économique, le social et l’écologique. On
notera que l’Europe devait mener des campagnes décisives visant à éradiquer la pauvreté d’ici 2010.
Entre-temps, nous avons constaté que la pauvreté n’a certainement pas été éradiquée en Europe et
en réalité, on a surtout poursuivi des objectifs économiques. Cette orientation néolibérale se
manifesta surtout – ou du moins de façon explicite – dans le soi-disant ‘Rapport Kok’ de 2004, appelé
d’après l’ancien premier ministre néerlandais qui présidait le groupe de travail. Désormais, seuls les
objectifs économiques devenaient prioritaires.
Au printemps 2010, on détermina les grandes lignes du successeur de la stratégie de Lisbonne :
Europe 2020. La devise devint ‘une croissance intelligente, durable et inclusive’. Cinq objectifs
3
Terme utilisé dans les médias pour définir l’axe franco-allemand pendant la présidence de Nicolas Sarkozy. Le
terme est en partie trompeur étant donné que la France et l’Allemagne ne sont certainement pas d’accord sur
tous les sujets.
p 3 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
principaux sont au centre de ce programme : l’emploi, la recherche et le développement,
l’environnement, l’éducation et la pauvreté. Pour la première fois dans l’histoire, la stratégie
comportait aussi un objectif chiffré pour la pauvreté – même si on peut regretter que le social se
limite à cet objectif. Chaque année, les Etats membres doivent rédiger un rapport de progrès sur les
avancées réalisées. Ce rapport doit être déposé auprès de la Commission européenne avant fin avril
et sera intitulé ‘programme national de réforme’. Ces programmes de réforme sont établis sur la
base de dix ‘lignes directrices intégrées’ – qui confèrent un contenu plus concret à la stratégie
EU2020. Chaque année, la Commission rédige aussi un rapport et formule des recommandations. Le
non-respect de ces objectifs européens n’est pas assorti d’une amende. Il existe un lien fort entre la
stratégie Europe 2020 et la nouvelle gouvernance économique européenne, étant donné qu’elles
sont poursuivies ensemble dans le Semestre européen – voir plus loin.
EU 2020: cinq objectifs principaux
Objectif 1. Emploi: un emploi pour 75% de la population âgée de 20 à 64 ans.
Objectif 2. Recherche et développement: investissement de 3% du PNB.
Objectif 3. Climat et énergie: réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20%, 20% d’énergies
renouvelables et une augmentation de 20% de l’efficacité énergétique.
Objectif 4. Education: abaissement du taux de décrochage scolaire à moins de 10% et un diplôme de
l’enseignement supérieur pour au moins 40% de la population âgée de 30 à 40 ans.
Objectif 5. Pauvreté et exclusion sociale: réduction de 20 millions du nombre de personnes menacées
par la pauvreté ou l’exclusion sociale.
Lignes directrices intégrées Europe 2020
Ligne directrice 1. Garantir la qualité et la durabilité des finances publiques – on fait référence à un
déficit structurel maximum de 0,5% du PNB.
Ligne directrice 2. Résorber les déséquilibres macroéconomiques (dont les déséquilibres
commerciaux). Les systèmes de négociations salariales doivent être revus dans ce sens.
Ligne directrice 3. Réduire les déséquilibres au sein de la zone euro. On lance un appel afin que les
pays avec un excédent commercial – comme l’Allemagne – stimulent leur propre demande interne.
Ligne directrice 4. Stimuler la recherche et le développement – les dépenses des Etats membres
doivent être portées à 3% du PNB.
Ligne directrice 5. Stimuler l’efficacité énergétique et réduire les émissions de gaz à effets de serre –
rappel de l’objectif 3.
p 4 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Ligne directrice 6. Améliorer l’environnement entrepreneurial et moderniser l’industrie – notamment
par le biais d’administrations publiques ‘modernes’ et le soutien au PME.
Ligne directrice 7. Accroître la participation au marché du travail et diminuer le chômage ‘structurel’
– promouvoir une approche ‘flexicurity’.
Ligne directrice 8. Insister sur une main d’oeuvre qualifiée en mettant l’accent sur la formation tout
au long de la vie
Directive 9. Augmenter les performances des systèmes éducatifs et stimuler la participation à
l’enseignement supérieur - rappel de l’objectif 4.
Directive 10. Stimuler l’inclusion sociale et lutter contre la pauvreté.
Comme nous l’avons déjà signalé, la profonde crise socio-économique des dernières années a
engendré une cascade de nouveaux plans et initiatives européens. Principalement, les Etats
membres qui utilisent l’euro comme monnaie – la soi-disant zone euro – seront confrontés à de
grands changements ou connaissent déjà des changements structurels.
Il faut savoir que la compréhension du parcours des réformes européennes ne va pas sans une
interprétation dominante : la crise de la zone euro est la conséquence d’une politique budgétaire
trop laxiste et un manque de compétitivité dans certains Etats membres. Cependant, la première
réaction à la crise était d’un tout autre niveau. Le plan européen de redressement économique
prévoyait un ensemble substantiel de stimulants économiques et insistait sur les investissements à
long terme. Les ‘dérapages’ budgétaires n’étaient pas considérés comme extrêmement
problématiques. Un tournant symbolique dans l’approche de la crise a été l’apparition de la crise
grecque au printemps 2010. A partir de là, l’Europe a changé son fusil d’épaule et des règles
budgétaires plus rigoureuses ont été mises en place – principalement sous la pression de
l’Allemagne.
Premier élément dans la compréhension de la crise : elle était provoquée par des pays qui avaient
accumulé un déficit budgétaire trop important. La Grèce est l'exemple type qui, depuis son entrée
dans l’euro (2001), présentait systématiquement des déficits du budget national. Et pour couronner
le tout, la banque d’affaires américaine Goldman Sachs intervint pour aider la Grèce à embellir sa
situation financière. On peut dire que la Grèce a profité pendant des années de sa participation à
l’euro pour ‘vivre au-dessus de ses moyens’. Deuxième élément crucial dans la compréhension du
phénomène : certains Etats membres – et surtout les pays du Sud de l’Europe – manquent de
compétitivité. Témoin en est le déficit structurel de la balance commerciale que présentaient tous
les pays du Sud de l’Europe avant l’apparition de la crise. L’absence d’exportation serait due à des
p 5 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
charges salariales trop élevées et des marchés de l’emploi inflexibles – dont la protection stricte des
licenciements. Cette vision de la crise au sein de la zone euro a donné lieu à trois types d’initiatives
de l’Union européenne. : celles mettant l’accent sur le maintien d’une discipline budgétaire, des
initiatives visant à stimuler la compétitivité et finalement, la mise en place d’une solidarité
européenne – sous la forme de la création d’un fond d’aide européen permanent.
Le SETCa est d’avis qu’au départ déjà l’interprétation de la crise faisait fausse route et que donc les
solutions préconisées n’auraient pas d’effet. La crise n’est pas provoquée par un endettement public
trop élevé mais surtout par un excès de dettes privées – surtout bancaires. Certains pays qui
reçoivent une aide de l’Europe, ne présentaient pas de déficit de leur budget avant la crise. L’Irlande
et l’Espagne sont deux exemples. On doit donc se focaliser sur la maîtrise des dettes privées en
forçant les institutions financières à prendre moins de risques. Une réforme en profondeur du
système financier est essentielle. Il ne suffit pas de mettre l’accent sur les ‘déficits publics gérables’.
L’approche européenne – surtout à court terme – fonctionne à l’envers. C’est essentiellement le cas
pour les pays du Sud de l’Europe qui sont confrontés à un ‘paradoxe de l’épargne’ : lorsque dans une
économie, tout le monde essaie d’épargner au même moment, personne n’épargne. En effet,
lorsque personne ne dépense de l’argent, la croissance économique régresse, de nouvelles
économies sont donc nécessaires afin d’atteindre les objectifs budgétaires. C’est ainsi que les pays
du Sud de l’Europe se sont retrouvés dans un cercle vicieux. Une autre remarque importante
concerne la priorité à la compétitivité. En effet, tous les pays du Sud de l’Europe présentent un déficit
de la balance commerciale – ce qui signifie qu’ils importent plus qu’ils n’exportent. Il faut agir au
niveau du manque d’exportation. Toutefois, d’autres éléments, en dehors du coût salarial, jouent un
rôle primordial à ce niveau. Il suffit de penser à la formation des travailleurs. Face au déficit
commercial des pays du Sud de l’Europe, il y a un excédent commercial – principalement – en
Allemagne. On peut donc affirmer que l’Allemagne est aussi coresponsable des déséquilibres dans la
zone euro en raison de la modération salariale qu’elle applique depuis de longues années. Dans une
recommandation récente, la Commission européenne a exhorté l’Allemagne a augmenté les salaires
dans le secteur des exportations.
Des règles régissant les budgets des Etats membres ne sont pas une nouveauté dans l’Union
européenne. Aujourd’hui, elle entend renforcer les règles existantes et les rendre plus
contraignantes. Des normes budgétaires figuraient déjà dans le Traité de Maastricht (1992). Les
fameux ‘Critères de Maastricht’ étaient appliqués comme conditions d’adhésion à l’euro. En ligne
avec la traditions de sobriété de l’Allemagne, les normes suivantes furent fixées : un déficit
budgétaire doit être limité à maximum 3% du PNB et la dette publique est limitée à 60% du PNB. En
1997, des critères identiques avaient été inscrits dans le Pacte de Stabilité et de Croissance. Le
contrôle européen des budgets n’est pas un fait nouveau. En réalité, ces règles n’ont pas été
respectées. On a relevé, avec une certaine ironie, que précisément la France et l’Allemagne ont
enfreint les règles budgétaires en 2003, sans que cela soit suivi d’une condamnation par le Conseil
des Ministres.
p 6 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Depuis 2010, on entend renforcer les règles budgétaires et les rendre plus contraignantes. Cela passe
par de nouvelles ‘Lois européennes’ – les soi-disant ‘Six-pack’ et Two Pack’ – ainsi qu’un nouveau
traité européen. Les principales modifications sont inscrites dans le ‘Six-pack, un ensemble de cinq
règlements européens et d’une seule directive européenne.4 Concrètement, les pays de la zone euro
dont le budget à ‘moyen terme’ dépasse le déficit maximum de 3% du PNB sont placés dans une
‘excessive debt procedure’ sur proposition de la Commission européenne. Les pays risquent
d’encourir une amende qui peut s’élever à 0,2% du PNB.
Des amendes pourront être évitées si une majorité qualifiée des Etats membres votent en Conseil
contre la proposition. Ce principe est appelé la ‘majorité qualifiée inversée’ – le terme ‘qualifiée’ a
trait au fait que tous les pays n’ont pas le même poids lors d’un tel vote. De grands pays comme
l’Allemagne ont un poids plus important. Le ‘Two Pack’ renforce donc le levier préventif du contrôle
budgétaire et permet aussi à la Commission européenne de placer un Etat membre sous une
‘surveillance renforcée’. Concrètement, deux dates sont importantes pour les pays de la zone euro.
Fin nombre, les Etats membres doivent déposer leur projet de budget, alors que le budget définitif accompagné du programme national de réforme – doit être déposé auprès de la Commission
européenne pour fin avril. Le ‘Six-pack’ des ‘Lois’ européennes a déjà été approuvé en 2011,
l’approbation définitive du ‘Two Pack’ est planifiée pour la fin de cette année.
En outre, un nouveau traité renforce les règles budgétaires : le Traité budgétaire. Ce nouveau pacte
et en fait indépendant de la législation européenne classique. Dorénavant, seul un déficit ‘structurel’
de 0,5% du PNB sera toléré. Des discussions sont encore en cours sur ce qu’on entend par un ‘déficit
structurel’5, mais globalement il est considéré comme un renforcement des règles existantes. En
outre, chaque année, 1/20ème de la dette publique dépassant les 60% du PNB doit être comblé. En
cas de non-respect, des Etats membres peuvent s’assigner mutuellement devant la Cour de Justice
européenne et le traité stipule clairement que le respect du pacte est une condition permettant
d’obtenir de l’aide des fonds de sauvetage européens. Ce traité doit être ratifié par les Parlements
belges (tant régionaux que fédéral). Selon toute vraisemblance, la discussion sera encore entamée
avant la fin de l’année.
La principale initiative visant à favoriser la compétitivité a été prise lors du Sommet européen de
mars 2011 avec le soi-disant ‘Pacte euro-plus’. D’autres dénominations courantes sont ‘Pacte pour
l’euro’ ou ‘Pacte de compétitivité’. Sous l’influence de la chancelière allemande Angela Merkel, le
pacte a un contenu fortement néolibéral. L’accord doit être considéré comme une énumération des
4
La grande différence entre un règlement et une directive est qu’un règlement est directement applicable dans
tous les Etats membres de l’UE. Par contre, une directive doit être transposée dans la législation nationale.
5
Un ‘déficit structurel’ est souvent défini comme un déficit budgétaire qui doit être apuré de la conjoncture
économique.
p 7 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
priorités politiques pour les pays de la zone euro. Outre les pays de la zone euro, des pays comme le
Danemark, la Pologne, la Lettonie, la Lituanie, la Bulgarie et la Roumanie ont aussi signé la
déclaration. Quatre objectifs sont visés essentiellement : relancer la compétitivité, stimuler l’emploi,
veiller à la durabilité des finances publiques et assurer une stabilité financière. Principalement sous le
dénominateur de la stimulation de la compétitivité, on évoque toute une série de mesures
néolibérales parmi lesquelles la suppression de l’indexation automatique des salaires et la
décentralisation de la concertation salariale. Des finances durables doivent être réalisées en relevant
l’âge légal de la pension et en supprimant les régimes de départs anticipés. Chaque pays doit
indiquer comment il entend atteindre les objectifs de l’accord. Les réformes doivent aussi figurer
dans les programmes nationaux de réforme.
La ‘excessive imbalance procedure’ est un autre élément crucial dans la gouvernance économique
européenne – ce qui figurait également dans le ‘Six-pack’. Concrètement, la Commission européenne
établit des tableaux de scores sur la compétitivité économique (par exemple sur les coûts salariaux).
Chaque année, la situation d’un Etat membre est évaluée et (éventuellement) cataloguée de
déséquilibre ‘ordinaire’ ou ‘extraordinaire’. La Commission formule à chaque fois des
recommandations afin de redresser ce déséquilibre. Une amende de 0,1% du PNB est la sanction en
cas de déséquilibres excessifs – ces sanctions menacent certains pays du Sud de l’Europe. Des
sanctions peuvent être évitées grâce à une ‘majorité qualifiée inversée’ des Etats membres au
Conseil des Ministres – voir explication ci-dessus
Au printemps 2010, la Grèce avait grand besoin d’un important soutien financier. Le refinancement
de la dette sur le marché privé n’était ou bien plus possible ou bien à des taux d’intérêt exorbitants.
Les autres pays européens étaient confrontés à un problème face à la demande d’aide de la Grèce.
Une aide directe entre pays de la zone euro était explicitement interdite jusqu’alors par les traités
européens. Ainsi, l’Allemagne se trouvait en bonne position pour lier l’aide financière à de fortes
conditionnalités. Une ‘troïka’ constituée de la Commission européenne, de la Banque centrale
européenne et du Fonds Monétaire International devait veiller à ce que les pays bénéficiaires d’une
aide enregistrent suffisamment de progrès dans les réformes (budgétaires, marché du travail, etc.).
En 2010 et 2011, deux fonds d’aide temporaires furent créés: le Mécanisme européen de
stabilisation financière de €40 milliards gérés par la Commission européenne et une Facilité
européenne de stabilisation financière de €440 milliards gérés par les Etats membres. Depuis le
printemps 2010, des aides ont été octroyées à deux reprises à la Grèce. Il y eut des mesures d’aide
pour le Portugal et l’Irlande et les banques espagnoles ont déjà été soutenues une fois directement.
Un fonds d’aide permanent fut créé au cours de l’été 2012 : le Mécanisme européen de stabilisation
(€500 milliards).
Le ‘livre vert’ de la Commission européenne sur les ‘euro-obligations’ ainsi que les plans de
constitution d’une ‘union bancaire’ sont d’autres initiatives dans le cadre d’une plus grande
solidarité. Une euro-obligation implique que les pays de la zone euro se portent (en partie) garant
p 8 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
pour leurs dettes respectives et que, de cette façon, les taux diminuent pour les Etats membres – ou
du moins pour les plus faibles du club. Les investisseurs demanderaient des taux à plus long terme
étant donné que la zone euro dans son ensemble est considérée comme plus solvable que chaque
Etat membre séparément. Jusqu’à aujourd’hui, c’est restée une idée assez vague étant donné qu’elle
figurait uniquement dans le livre vert de la Commission européenne. Un ‘livre vert’ est une note
exploratoire avant que ne commence le véritable travail législatif. L’Union bancaire - ensuite - est
issue du principe que tous les pays européens devraient être ensemble garant pour leurs grandes
banques respectives. On pourrait éviter de cette façon que – surtout – des petits pays ne soient
touchés par la faillite de plusieurs de leurs grandes banques. D’un point de vue général, la solidarité
se limite provisoirement à la création d’un fonds d’aide européen. En outre, ces transferts sont liés à
des conditionnalités sévères.
L’ensemble des réformes demandées aux Etats membres en matière de discipline budgétaire, de
compétitivité et des objectifs Europe 2020 sera suivi dans un cycle de six mois qu’on a appelé le
‘Semestre européen’. Chaque année, la Commission européenne marque le lancement avec la
publication de la ‘Annual Growth Survey’ qui anticipe sur l’année à venir et comporte les priorités
politiques pour les pays européens. En mars, les dirigeants européens discutent des progrès des Etats
membres – le ‘Sommet du printemps’. Les Etats membres doivent ensuite introduire leur budget et
leur programme national de réforme auprès de la Commission européenne pour fin avril. En mai et
juin, la Commission européenne formule des recommandations aux Etats membres visant à stimuler
la santé budgétaire, à prévenir les déséquilibres et à encourager le respect de la stratégie EU2020.
Début juillet, les ministres des finances votent les recommandations. Ce qui est important dans ce
contexte, c’est le rôle central conféré aux ministres des finances des Etats membres – la soi-disant
Conférence ECOFIN. ECOFIN est une des créations du Conseil des ministres au sein de l’Union
européenne. Les ministres des Etats membres se réunissent par thème: il y a aussi un conseil des
ministres des affaires sociales ou de l’environnement. Les ministres des finances ont la réputation
d’avoir peu d’intérêt pour la dimension sociale de la stratégie européenne.
p 9 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Recommandation de la Commission européenne à la Belgique (juillet 2012)
Dans le cadre de l’analyse du programme national de réforme, la Commission européenne a adressé
sept recommandations à la Belgique. Les recommandations ne sont pas contraignantes et la Belgique
ne risque pas une amende en cas de non-respect. Toutefois, ces recommandations ont un ‘poids
politique’ important.
Recommandation 1. La Commission européenne propose d’exécuter le budget 2012 tel que prévu. Il
faut aussi garantir que la Belgique sera en mesure de surmonter son déficit budgétaire d’ici 2015.
Recommandation 2. L’Europe demande une réforme des systèmes de départs anticipés. En outre, il
est proposé de lier l’âge de la pension à l’espérance de vie (en augmentation).
Recommandation 3. Il est demandé à la Belgique de renforcer les réserves en capital des banques les
plus faibles.
p 10 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Recommandation 4. L’Europe demande une réforme du système de l’indexation automatique des
salaires. Concrètement, l’Europe propose d’utiliser des soi-disant “accords all in”, dans lesquels la
norme salariale inclut également les éventuelles indexations.
Recommandation 5. L’impôt sur le travail doit être partiellement remplacé par des taxes
environnementales.
Recommandation 6. L’Europe demande plus de concurrence dans le secteur de la distribution.
Recommandation 7. La Belgique doit renforcer sa lutte contre les émissions de gaz à effets de serre.
La Commission européenne a aussi analysé les déséquilibres macroéconomiques – que l’on doit
surtout considérer comme des déséquilibres commerciaux. Le verdict pour la Belgique a été un
déséquilibre ‘ordinaire’ – ainsi la procédure n’aboutit pas à une amende. Outre la charge salariale
élevée, le manque d’investissements en formation est dénoncé comme un des principaux handicaps
de l’économie belge.
L’Union européenne traverse un changement fondamental. La crise économique profonde a
engendré un courant de nouvelles initiatives européennes. Peu de personnes ont encore une vision
claire des ‘Six-pack’, ‘Two Pack’ et autres Pactes européens. Il est important de tenter une
explication. Le ‘Jargon européen’ cache une révolution fondamentale. Par la surveillance des budgets
nationaux et la lutte contre les déséquilibres commerciaux, l’Europe élargit son champ d’action à des
thèmes qui auparavant, étaient de la compétence exclusive des Etats membres – il suffit de penser à
notre système d’indexation automatique des salaires ou au régime des pensions. Peu de personnes
semblent en être conscientes. Ou comme l’a déclaré le Président de la Commission, monsieur
Barroso, lui-même: “What is going on is a silent revolution - a silent revolution in terms of stronger
economic governance by small steps". Les optimistes diront que la Commission européenne peut
uniquement élaborer des recommandations mais, en même temps, ces recommandations ont un
poids politique élevé. Des déficits trop élevés ou des déséquilibres commerciaux risquent de donner
lieu à des amendes élevées. En fait, nous sommes témoins d’une institutionnalisation partielle de la
politique néolibérale.
Au moment d’écrire ces lignes, le train des réformes européennes ne semble pas encore être arrêté.
Dans le courant de l’été, Herman Van Rompuy – le Président européen 6 - a proposé un nouveau
‘masterplan’ pour l’Union européenne sous le titre ‘Towards a Genuine Economic and Monetary
Union’. Il prévoyait la réalisation de l’Union au travers de 4 chantiers : financier, budgétaire,
6
Le Président européen est celui qui dirige les sommets européens et qui doit donc trouver un compromis
entre les dirigeants et les chefs d’états qui y sont présents.
p 11 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
économique et démocratique. Une des idées avancées dans le rapport est de conclure des accords
bilatéraux avec les Etats membres sur les réformes nationales. D’un point de vue syndical, on peut
craindre que de cette façon, les recommandations aux pays deviendraient contraignantes. La
décision relative à ce dossier sera prise au Sommet européen de décembre 2012.
Malgré cela, le SETCa reste convaincu qu’une alternative est possible. En effet, ne nous laissons pas
mener passivement. Nous optons résolument pour une Europe sociale et démocratique! Les Etats
membres doivent obtenir plus de marge de manoeuvre – même en temps de crise – afin de renforcer
le pouvoir d’achat de la population et de sauvegarder les investissements à long terme – notamment
dans l’éducation. Il faut aussi faire preuve de beaucoup plus de solidarité véritable entre les Etats
membres, avec des euro-obligations, des fonds structurels7 plus importants et un véritable Fonds
européen d’investissements. Au lieu de faire une obsession de la concurrence et de la compétitivité,
nous devrions oeuvrer pour un salaire minimum européen et pour des conditions de travail dignes
pour tous les travailleurs européens. L’Europe doit aussi devenir plus démocratique. Les
fonctionnaires européens, ainsi que les membres de la Commission européenne doivent être
contrôlés plus strictement par le Parlement européen et par les parlements nationaux. L’Europe ne
peut pas prendre de décisions ‘en passant au-dessus des citoyens’. Mais l’Europe a surtout besoin de
nouvelles idées. Pendant la crise, le néolibéralisme a fait la preuve de son inefficacité et il est donc
assez étonnant que les dirigeants européens restent attachés à des idées dépassées. Mais comme le
dit si bien un vieux proverbe: la vérité s’élève au-dessus du mensonge comme l’huile au-dessus de
l’eau. Espérons que cette brochure sera déjà un premier pas dans le bon sens.
7
Les Fonds structurels sont des outils financiers de l’Union européenne ayant pour but de réduire les
différences économiques entre les régions.
p 12 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
En cas de recul de la croissance économique, les dépenses sociales en particulier – et les dépenses
publiques en général – assurent une ‘stabilisation automatique’ de l’économie. Les indemnités de
chômage sont un exemple connu : elles garantissent un maintien du pouvoir d’achat du chômeur.
Cela permet de stabiliser la demande macroéconomique. Des stabilisateurs automatiques sont une
alternative aux stimulants (fiscaux) – des dépenses uniques pour stimuler l’économie.
Le Pacte budgétaire (2012) est un nouveau Traité européen qui est en partie indépendant de la
législation européenne classique. Il s’agit d’un traité intergouvernemental qui doit être approuvé –
ratifié – par les Etats membres. Le traité prévoit un renforcement des règles budgétaires de la zone
euro: désormais, seul un ‘déficit structurel’ de 0,5% du PNB serait toléré. Dans le Pacte de Stabilité et
de Croissance existant, il était question jusqu’à présent d’un déficit budgétaire maximum de 3% du
PNB (mesuré sur le moyen terme). En outre, chaque année, les Etats membres sont tenus de combler
1/20ème de la dette publique ‘excessive’ (dépassant les 60% du PNB). En cas de non-respect, les pays
signataires peuvent s’assigner mutuellement devant la Cour de Justice européenne. En outre,
l’approbation du Pacte budgétaire devient une condition pour pouvoir revendiquer des moyens du
Fonds d’aide européen. La Belgique doit encore ratifier le pacte.
L’assemblée ECOFIN est une des formations du Conseil des ministres – la réunion des ministres des
finances. Le Conseil des ministres de l’Union européenne se réunit par thème. Ainsi, il y a la réunion
des ministres des affaires sociales, de l’environnement… L’assemblée ECOFIN joue un rôle crucial
dans la nouvelle gouvernance économique de l’Union européenne. Concrètement, les amendes
imposées en cas de déficits budgétaires excessifs (excessive debt procedure) ou en cas de
déséquilibres ‘excessifs’ (excessive imbalance procedure) sont approuvées par cette assemblée – via
le principe d’une ‘majorité qualifiée inversée’
La stratégie Europe 2020 est la nouvelle stratégie décennale qui fixe les priorités politiques pour les
Etats membres de l’Union européenne. L’Europe 2020 fut lancée en 2010 en tant que successeur de
la stratégie de Lisbonne (un échec partiel). Cinq objectifs sont visés dans le domaine de l’emploi, de
la recherche et le développement, de l’environnement, de l’éducation et de la pauvreté. Chaque
année, les Etats membres doivent déposer un ‘rapport de progrès’ pour la fin avril: le soi-disant
programme national de réforme. Aucune amende n’est imposée en cas de non réalisation des
objectifs Europe 2020 – contrairement aux infractions aux règles budgétaires.
p 13 / 18
Novembre 2012 - La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
‘Le Pacte euro-plus’ est aussi connu sous les dénominations de ‘Pacte pour l’euro’ ou ‘Pacte de la
compétitivité’. Le pacte est une déclaration jointe aux conclusions du sommet européen de mars
2012. Il comporte des priorités politiques en matière de politique socio-économique. Tous les pays
de la zone euro et six pays hors zone euro – parmi lesquels le Danemark et la Bulgarie – ont souscrit
au pacte. Quatre objectifs sont prioritaires : relancer la compétitivité, stimuler l’emploi, rétablir la
durabilité des finances publiques et veiller à la stabilité financière. Sous le dénominateur de la
restauration de la compétitivité toute une série de mesures néolibérales sont suggérées dont la
suppression de l’indexation automatique des salaires et la décentralisation de la concertation
salariale.
Le plan européen de redressement économique était une approche commune des Etats membres
européens pour s’attaquer à la crise économique au cours du printemps 2009. Un stimulant
budgétaire immédiat de 1,5% du PNB et la sauvegarde des investissements à long terme sont les
points essentiels. Les principes de base sont la solidarité et la justice sociale. Plus tard – surtout
depuis le printemps 2010 – la crise a de plus en plus souvent été redéfinie en ‘crise de l’endettement’
ou ‘crise de l’euro’ et l’accent a été mis (excessivement) sur la discipline budgétaire.
Le semestre européen est un cycle de six mois (janvier – juillet) dans lequel l’avancée des Etats
membres européens est suivie dans les domaines suivants : discipline budgétaire, réforme du marché
de l’emploi et objectifs Europe 2020. Le semestre européen démarre chaque année en janvier avec la
publication de la ‘Annual Growth Survey’ par la Commission européenne et comporte les
perspectives économiques pour l’ensemble de l’Union. Cette enquête sert de fil conducteur aux
programmes nationaux de réforme des Etats membres. Les rapports de progrès doivent être
introduits auprès de la Commission au plus tard fin avril. Des recommandations aux Etats membres
sont ensuite formulées début juillet. Celles-ci sont approuvées par l’assemblée ECOFIN sur
présentation de la Commission européenne.
Le mécanisme européen de stabilisation (MES) est un fonds d’aide européen permanent pour les
Etats membres en difficulté qui fut lancé le 1er juillet 2012. Le fonds a une capacité de prêt de €500
milliards maximum. Des conditions strictes sont liées à l’aide du MES. Les réformes nationales des
pays bénéficiaires sont suivies par une ‘troïka’ formée de la Commission européenne, de la Banque
centrale européenne et du Fonds monétaire international. Le mécanisme européen de stabilité a été
p 14 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
précédé par des fonds temporaires tels que la Facilité européenne de stabilité financière et le
mécanisme européen de stabilité financière.
La directive européenne est une des possibilités législatives dont dispose l’Union européenne. Le
caractère spécifique de la directive est le fait qu’elle est uniquement contraignante pour les Etats
membres quant à ‘l’objectif à atteindre’. Concrètement, la directive européenne doit toujours être
transposée dans la législation nationale. Dans le domaine social, on vote uniquement des directives.
Un exemple connu de directive européenne est la Directive sur le temps de travail de 2003. Cette
directive impose notamment des congés annuels minimum de 4 semaines – connu sous le nom de
‘congé européen’.
Un règlement est une sorte de ‘Loi européenne’. Contrairement à la directive, le règlement ne doit
pas être transposé dans la législation des Etats membres. Les règlements ont un effet immédiat tant
en ce qui concerne ‘l’objectif à atteindre’ qu’en ce qui concerne le ‘moyen à utiliser’. Les règlements
européens ont aussi la priorité sur les lois nationales. Un exemple connu est le règlement qui
instaure la nouvelle ‘excessive debt procedure’ (2011) – un élément du ‘Six-pack’ aux lois
européennes.
Cette procédure a été introduite via le ‘Six-pack’ aux ‘Lois européennes’ de 2011. Des pays qui
transgressent les règles budgétaires figurant dans le Pacte de Stabilité et de Croissance – déficit
maximal de 3% du PNB – peuvent être placés dans une ‘excessive debt procedure’. En cas de déficits
excessifs, la Commission européenne peut proposer de sanctionner l’Etat membre. Une sanction
financière peut aller jusqu’à 0,2% du PNB. Une sanction peut être évitée uniquement si une majorité
(qualifiée) des Etats membres votent contre la proposition au Conseil des Ministres. Le principe est
mieux connu sous la dénomination de ‘majorité qualifiée inversée’.
La ‘excessive imbalance procedure’ a été instaurée via le Sixpack’ aux ‘Lois européennes’.
Concrètement, la Commission européenne dresse des ‘tableaux de scores’ relatifs aux déséquilibres
macroéconomiques. Un exemple, la comparaison du coût salarial entre les Etats membres. En cas de
déséquilibres – principalement des déséquilibres commerciaux – la Commission formule des
recommandations afin de résoudre le problème. Ces recommandations font partie des
recommandations adressées aux pays chaque année en juillet. En cas de déséquilibres excessifs, une
amende de 0,1% du PNB menace l’Etat membre. Une amende pourra uniquement être évitée si la
p 15 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
majorité des Etats membres votent contre en Conseil des ministres – le principe de la ‘majorité
qualifiée inversée’.
La stratégie de Lisbonne était une stratégie européenne pour 10 ans adoptée au sommet européen
de Lisbonne (mars 2000). L’objectif principal était de faire de l’Europe l’économie de connaissance la
plus compétitive et concurrentielle possible à l’aide d’une participation du marché du travail de 70%
et d’une croissance économique annuelle de 3%. À l’époque du sommet de Lisbonne, il existait une
vague rhétorique sur ‘l’éradication de la pauvreté’ d’ici 2010. La stratégie de départ se basait sur une
théorie à trois composantes : l’économique, la sociale et l’écologique. Après le rapport Kok de 2004,
la stratégie subit une réorientation focalisée exclusivement sur les emplois et la croissance
économique. La plupart des observateurs considèrent la stratégie de Lisbonne comme un échec.
L’Europe 2020 succéda à la stratégie de Lisbonne en 2010.
Dans le cadre de la stratégie Europe 2020, les Etats membres doivent chaque année présenter leurs
avancées dans leur programme national de réforme. Les programmes doivent être déposés auprès
de la Commission européenne pour la fin avril et doivent être rédigés en tenant compte des 10 lignes
directrices intégrées. Dans le cadre du semestre européen, la Commission adresse chaque année –
en juillet – des recommandations aux Etats membres sur la façon d’atteindre les objectifs visés. Une
des sept recommandations pour la Belgique a été la suppression de l’indexation automatique des
salaires. Le non-respect des recommandations européennes n’est pas assorti de sanctions.
La majorité qualifiée inversée signifie qu’une majorité qualifiée des Etats membres doit s’opposer à
une proposition. Le terme ‘qualifié’ implique que tous les pays n’ont pas le même poids lors du vote.
Certains grands pays – comme l’Allemagne – ont un poids plus important. Cette méthode de prise de
décision est d’application aux amendes en cas de déficit budgétaire ‘excessif’ (‘excessive debt
procedure’) ou en cas de déséquilibre ‘excessif’ (‘excessive imbalance procedure’).
Le terme ‘Six-pack’ a trait à un ensemble de six ‘Lois européennes’ (2011) – cinq règlements et une
directive – qui instaure à la fois la ‘excessive debt procedure’ et la ‘excessive imbalance procedure’.
En cas de déficit budgétaire excessif une amende de 0,2% du PNB peut être appliquée alors qu’en cas
de déséquilibre ‘excessif’, une amende de 0,1% du PNB est possible. Les amendes peuvent être
évitées uniquement s’il existe une ‘majorité qualifiée inversée’ entre les Etats membres.
p 16 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Dans le cadre de ce programme de progrès, les Etats membres doivent indiquer dans quelle mesure
leurs budgets nationaux pour le ‘moyen terme’ sont conformes aux règles budgétaires européennes
– déficit maximum de 3% du PNB. Dans le cadre du semestre européen, les Etats membres doivent
déposer ce rapport auprès de la Commission pour la fin avril avec leur programme national de
réforme. Pour les pays de la zone euro, ces rapports sont appelés les ‘programmes de stabilité’, alors
que pour les autres Etats membres on parle de ‘programmes de convergence’.
Le Pacte de stabilité et de croissance conclu en 1997 a confirmé les critères de Maastricht comme
règles budgétaires centrales pour la zone euro. Concrètement, on tolère un déficit maximum de 3%
du PNB et une dette publique maximum de 60% du PNB. Le traité définit également la procédure de
contrôle des budgets nationaux. En réalité, les règles n’ont pas été respectées avant la crise. En 2003,
tant l’Allemagne que la France ont enfreint les normes de Maastricht, sans qu’il s’ensuive une
condamnation européenne. Le respect du Pacte de stabilité et de croissance a été renforcé par le
biais des ‘Lois européennes’ reprises dans le Six-Pack et le Two Pack.
Le ‘Two Pack’ est un ensemble de deux nouveaux règlements européens. Le premier règlement
instaure un ‘mécanisme de prévention’ plus stricte en ce qui concerne le respect des règles
budgétaires. Concrètement, les Etats membres doivent envoyer leur projet de budget fin novembre à
la Commission. Un deuxième règlement permet à la Commission d’exercer une ‘surveillance
renforcée’ des pays en difficultés budgétaires. Il institutionnalise également la pratique de la troïka
(Commission européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international) qui s’est
développée ces dernières années. Normalement, le Two Pack sera approuvé avant la fin de l’année
2012.
Le Rapport Van Rompuy est un nouveau ‘masterplan’ pour l’ensemble de l’Union européenne. Le
plan prévoit la réalisation de l’Union par le biais de quatre chantiers : financier, budgétaire,
économique et légitimité démocratique. Une des idées les plus intéressantes est la possibilité de
conclure des accords bilatéraux sur les réformes nationales avec chacun des Etats membres. On
pourrait craindre que les recommandations de la Commission aient un caractère contraignant. La
décision relative au rapport sera prise lors du Sommet européen de décembre 2012.
p 17 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Le Traité de Maastricht (1992) est un des grands traités ayant influencé le cours de l’histoire de
l’Union européenne en plus du Traité de Rome (1957) et du Traité de Lisbonne (2007). Un des
éléments du Traité a été la détermination des ‘normes de Maastricht’ qui définissaient la condition
d’adhésion à l’euro. Concrètement, il a été convenu que le déficit budgétaire ne pouvait atteindre
que 3% maximum du PNB et que la dette maximum ne pouvait s’élever qu’à 60% du PNB. Ces règles
ont été interprétées avec beaucoup de souplesse.
p 18 / 18
La gouvernance économique européenne : un kit de survie pour le syndicaliste
Téléchargement