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LibreCours • MAGAZINE DE L’UNIVERSITÉ DE NAMUR • N° 89 / JUIN 2013 Découvrir
MATHÉMATIQUE
OPTIMISER LA GESTION DE L’ÉNERGIE EN EUROPE
MÉDECINE VÉTÉRINAIRE
Namur décrypte le virus de
Schmallenberg… et met en garde
L
a production et la distribution d’énergie sont aujourd’hui un défi majeur, qui relève de para-
mètres techniques et économiques, mais aussi politiques et éthiques. « Il y a un besoin crucial
de systèmes effi caces et fi ables pour gérer les réseaux énergétiques qui deviennent de plus
en plus étendus et complexes, de par la diversifi
cation des sources d’énergie (éoliennes sur
terre et en mer, panneaux solaires…) et celle des acteurs » explique Annick Sartenaer, professeur au
Département de mathématique et membre du Centre de recherche NaXys. « L’arrivée de la production
privée notamment amène de nouvelles questions techniques (saturation du réseau, redistribution…),
sans compter la prise en compte des exigences de tous les interlocuteurs : ingénieurs, géologues,
économistes, autorités politiques, etc. ».
L’optimisation de tels systèmes d’aide à la décision se fait en deux étapes fondamentales : la modéli-
sation du problème, puis sa résolution. L’enjeu de la modélisation est de trouver le meilleur équilibre
entre fi délité à la réalité (complexité) et formalisation mathématique (nécessitant une simplifi cation
pour que le problème soit résoluble). Reste ensuite le développement de méthodes appropriées
capables de résoudre effi
cacement ce modèle mathématique. C’est à cette tâche que s’attèlent
Annick Sartenaer et son équipe d’optimisation numérique.
INTERDISCIPLINAIRE ET INTERNATIONAL
Pour ce projet largement interdisciplinaire, le travail des chercheurs namurois est intégré à celui
de 25 autres partenaires scientifi ques et industriels issus de 9 pays européens et d’Israël, grâce
à une action de Coopération européenne dans le domaine de la Recherche Scientifi que et
Technique (COST). Ces actions très sélectives (le taux d’acceptation des projets soumis avoisine
les 6,5 % seulement) favorisent la coopération internationale entre des équipes qui ont prouvé
leur excellence dans un domaine spécifi que.
E.D.
http://www.cost.eu/domains_actions/ict/Actions/TD1207
Fin mai, les chercheurs ont partagé ces
résultats avec le premier scientifi
que
à avoir identifi é ce virus, le profes-
seur Martin Beer, de l’Institut Friedrich
Loeffl er (Allemagne) et membre du comité de
thèse de François Claine, assistant au Départe-
ment de médecine vétérinaire namurois dont
les recherches doctorales sont consacrées à
ce nouveau virus. Pour le professeur Beer, le
centre de recherches ovines de l’Université de
Namur constitue un outil unique pour carac-
tériser la dissémination et le maintien du virus
de Schmallenberg dans la population animale,
deux éléments encore non élucidés à ce jour.
RISQUES DE RÉAPPARITION
DE LA MALADIE
L’équipe du professeur Nathalie Kirschvink, direc-
trice du département de médecine vétérinaire de
l’UNamur, a étudié l’impact zootechnique et éco-
nomique du virus sur le troupeau du Centre de
Recherches Ovines de l’Université, et notamment
le risque de réapparition de la maladie.
Ces analyses in vivo, dans des conditions natu-
relles, ont montré que le virus a infecté une
première fois le troupeau en octobre 2011 pour
réapparaître entre juillet et octobre 2012. Cela
prouve que, contrairement à ce que l’on pensait
initialement, le virus peut réapparaître dans une
zone où il a déjà frappé et que la réponse im-
munitaire des animaux atteints précédemment
n’est pas suffi sante pour empêcher une nouvelle
circulation. L’étude montre également qu’une
fois atteint, l’animal est porteur du virus entre
10 et 15 jours, ce qui est plus long que ce qui
est observé dans les conditions expérimentales.
MUTATION DU VIRUS
Une seconde étude a dès lors été menée, sous la
direction du professeur Benoît Muylkens, sur la
caractérisation génétique du virus, qui a été isolé
sur deux agneaux gravement atteints pour en faire
le séquençage complet et en étudier, in vitro, les
caractéristiques. Verdict : il présente de très nom-
breuses mutations par rapport au virus initial. « Ces
mutations ne sont pas aléatoirement distribuées
puisque 50 % d’entre elles sont concentrées dans
seulement 10 % de la séquence totale du génome.
Ces 10 % se situent au niveau des glycoprotéines
de surface qui ont une double fonction : servir à
la fois de module pour que le virus s’attache à la
cellule, et de cible pour la réponse immunitaire de
l’animal » explique Benoît Muylkens.
Les chercheurs namurois ont dès lors émis l’hypo-
thèse, désormais partiellement démontrée, que la
concentration des mutations au niveau des gly-
coprotéines de surface permet au virus d’étendre
son éventail d’interaction avec différents types
cellulaires. Ils supposent également que les mu-
tations se concentrent sur les glycoprotéines de
surface parce qu’elles lui permettent de modifi
er
l’aspect extérieur du virus, empêchant ainsi le sys-
tème immunitaire de le combattre. Ce contour-
nement du système immunitaire de l’animal aug-
mente la diffi culté de mettre au point un vaccin…
Les vétérinaires de l’UNamur vont poursuivre
leurs recherches concernant ce virus afi n d’en
défi nir le mode précis de dissémination, iden-
tifi er les mécanismes qui lui permettent de se
maintenir dans un troupeau déjà infecté, et étu-
dier les conséquences de la variabilité génétique
sur l’évolution du virus à court et moyen terme.
E.D.
Les résultats des travaux du prof. Muylkens
sont parus dans Journal of General Virology
et ceux de l’étude du professeur Kirschvink
dans la revue Emerging Infectious Disease.
Une gestion effi cace, durable et équitable de la production et de la distribution de l’énergie ?
Les mathématiciens de l’Université de Namur y contribuent, grâce à une action de recherche européenne
(COST) dédiée à l’optimisation de systèmes d’aide à la décision pour le secteur énergétique.
Les études du Département
de médecine vétérinaire de
l’UNamur concernant le virus de
Schmallenberg concluent que
ce virus apparu en 2011 et qui,
en moins de deux ans, a touché
plus de 13 846 troupeaux de
ruminants (bovins, moutons et
chèvres) dans 22 pays européens,
va réapparaître sous de nouvelles
formes, y compris dans des
endroits où il a déjà frappé.
Vers des
techniques
mathématiques
innovantes
Annick Sartenaer est membre du comité de
pilotage d’un autre projet relevant également
d’un programme de réseaux de recherche,
mais fi nancé par la Fondation européenne
de la science (ESF), une des plus anciennes
organisations œuvrant à l’espace européen de
la recherche et réunissant des membres de 29
pays. L’objectif de ce projet « OPTPDE » est de
faire émerger des techniques mathématiques
innovantes dans le domaine de l’optimisation
sous contraintes d’équations aux dérivées
partielles. Ce type d’optimisation s’applique à la
résolution de problèmes hautement complexes
posés dans tout secteur d’activité, depuis
l’aérodynamique (profi lage optimal d’ailes
d’avion) au traitement d’images médicales, en
passant par les prévisions météorologiques.