L e s f i c h e s d e j u r i s p r u d e n c e d ’ e J u r i s . b e : Im m o b i l i e r – F i s c a l i t é – U r b a n i s m e - C o p r o p r i é t é – C o n s t r u c t i o n Troubles de voisinage Les fiches de jurisprudence de www.eJuris.be Notion de trouble excessif n° 62 Justice de paix de Waremme, Jugement du 30 juin 2004 - Le léger bruit, parfaitement dans la norme, provenant d'une machine à lessiver correctement installée et placée dans une cuisine ne constitue pas un trouble anormal du voisinage. Une mesure de déplacement constituerait une limitation du droit de propriété sans qu'il n'y ait objectivement un acte ou une attitude qui romprait l'équilibre entre propriétaires voisin:. - La présence d'un chien, en milieu rural, dans une maison pourvue d'un jardin ne cause pas des inconvénients anormaux de voisinage, dès lors que ce chien est correctement dressé, soigné, entretenu et que ses maîtres lui font porter un collier anti-aboiements en leur absence. La demande d'érection d'une palissade entre les deux propriétés, aux seuls frais d'un des voisins, est non fondée dès lors qu'aucun trouble anormal de voisinage n'est constaté (JLMB 2005, p. 1240). Jugement du 30 juin 2004 (…) Monsieur R. soutient qu'il subit un trouble anormal de voisinage résultant, d'une part, des aboiements d'un chien de grande taille présent chez les époux S.-P., ses voisins, et, d'autre part, du bruit et des vibrations que provoquerait leur machine à linge, installée contre le mur mitoyen de leurs immeubles respectifs. En termes de citation, il reprocherait également aux époux S.-P. d'avoir ancré dans le mur mitoyen des armoires, dont l'usage entraînerait des désagréments sonores importants et qu'une porte extérieure de leur immeuble, fixée sur ce mur mitoyen, claquerait en se refermant, créant ainsi un bruit assourdissant qui se propagerait dans le mur mitoyen. Les consorts S.-P. soutiennent en termes de conclusions que la demande serait irrecevable pour nullité de la citation, en vertu de l'article 702, 3°, du code judiciaire, au motif que la citation ne préciserait pas les faits invoqués par monsieur R , ses prétentions et les moyens sur lesquels il fonde son action. Ce moyen ne peut être retenu. En effet, la simple lecture de la citation permet de déterminer quels sont les troubles de voisinage dont se plaint monsieur R et qu'il prétend anormaux et l'objet de sa demande, c'est-à-dire la prise de mesures par les consorts S.-P. pour faire cesser les aboiements de leur chien et le déplacement de leur machine à lessiver, notamment. Subsidiairement, les consorts S.-P. contestent la réalité des troubles allégués et estiment la demande de monsieur R. particulièrement mal fondée puisqu'ils lui réclament reconventionnellement une indemnité de 750 euros pour procédure téméraire et vexatoire. Les constatations faites lors de la vue des lieux, à laquelle nous avons procédé le 17 février 2004, ont permis d'exclure tout trouble anormal provenant de l'usage de la porte arrière du bâtiment des consorts S.-P. et de la présence des armoires de cuisine non pas ancrées dans le mur mais normalement accrochées à ce mur mitoyen. . Actuellement, monsieur R. ne réclame d'ailleurs plus aucune mesure sur ces points. En ce qui concerne la machine à linge, nous avons constaté, lors de notre vue des lieux du 17 février 2004, que cette machine était placée dans la cuisine des époux S.-P., contiguë à la terrasse véranda de monsieur R., le long du mur mitoyen mais non contre ce mur, puisqu'un coussin de mousse a été placé entre l'appareil et le mur. Le bruit du fonctionnement de cette machine, constaté en présence des parties, était certes légèrement perceptible au rez-de-chaussée de l'immeuble de monsieur R , pour autant qu'aucun autre bruit habituel n'y soit produit. Ce léger bruit ne semblait certainement pas constituer un trouble , objectivement anormal. Certes, monsieur R. produit un constat unilatéral dressé par maître Catarina, huissier de justice suppléant de maître Heuze, aux termes duquel, le 4 mai 2004, à treize heures vingt, l'on pouvait entendre chez monsieur R un bruit important d'essorage et de percussion résonnant très fort dans sa véranda, son living et même dans le hall d'entrée (?). Aucune mesure n'est, cependant, faite pour objectiver cette constatation unilatérale. Bien sûr, le sentiment d'un bruit, et plus précisément, le plaisir ou la gêne que l'on peut en ressentir, est avant tout subjectif. Il apparaît, cependant, que la machine litigieuse est correctement installée et les époux S.-P. produisent une attestation d'un homme de l'art selon laquelle le bruit de cette machine, d'une marque renommée habituellement pour sa qualité, est parfaitement dans la norme et est tout à fait comparable à un autre appareil de cette catégorie. L e s f i c h e s d e j u r i s p r u d e n c e d ’ e J u r i s . b e : Im m o b i l i e r – F i s c a l i t é – U r b a n i s m e - C o p r o p r i é t é – C o n s t r u c t i o n Troubles de voisinage Les fiches de jurisprudence de www.eJuris.be Notion de trouble excessif n° 62 L'emplacement choisi par les époux S.-P. pour installer une telle machine à linge, soit dans la cuisine, près de la porte donnant sur le jardin, n'est pas en soi illogique et relève d'une bonne gestion de leur espace d'habitat. La mesure de déplacement sollicitée par monsieur R. constituerait une limitation de leur droit de propriété sans qu'il n'y ait objectivement dans leur chef une attitude ou un acte posé qui romprait l'équilibre entre propriétaires voisins. Il est, par ailleurs, vraisemblable que la structure des bâtiments et leurs aménagements intérieurs entraînent un certain manque d'étanchéité acoustique, notamment au niveau du mur mitoyen et qui peut être perçu différemment par les parties, mais dont la responsabilité ou la charge ne peuvent être imputées plus à l'une qu'à l'autre. La demande de monsieur R. sur ce point n'est donc pas fondée. Monsieur R. se plaint également des aboiements du chien des époux S.-P. et demande que ceux-ci érigent à leurs frais une palissade d'une hauteur de deux mètres entre leurs jardins respectifs, de façon à ce que le chien n'aboie plus en apercevant sa famille lorsqu'elle est dans le jardin. Il demande également qu'il soit ordonné aux époux S.-P. de museler leur chien pendant leur absence pour empêcher de même tout aboiement. Les époux S.-P. contestent également ces demandes, en faisant valoir que leur chien est d'un naturel calme et ne causant aucun trouble selon la plupart de leurs voisins, qui l'attestent, alors que monsieur R. aurait eu, à plusieurs reprises, une attitude provocante à l'égard du chien. Ainsi, selon eux, le chien ne causerait aucun trouble excessif de voisinage lorsqu'il est dans leur jardin et, en outre, lors de leurs absences et alors que le chien reste à l'intérieur, ils munissent celui-ci d'un collier spécial antiaboiements. Enfin, ils estiment que la pose d'un écran entre les deux jardins (suggestion que nous avions d'ailleurs faite lors de notre vue des lieux) ne pourrait se faire qu'aux frais exclusifs de monsieur R. en raison de ses pratiques naturistes, occasionnelles ou non. On ne peut évidemment reprocher aux époux S.-P. d’entretenir un chien, en l'espèce un berger des Pyrénées, en milieu rural, dans une maison pourvue d'un jardin où le chien peut, normalement, déambuler. Selon les attestations produites, ce chien est correctement dressé, soigné et entretenu. Si monsieur R. produit diverses attestations de ses amis et connaissances faisant état d'aboiements perceptibles d'une maison à l'autre quand le chien est enfermé, il faut noter que, outre le problème d'étanchéité acoustique possible du mur mitoyen tel que relevé ci-dessus, les époux S.-P. ont, depuis lors, acquis un collier anti-aboiements dont ils munissent leur chien lors de leurs absences. L'efficacité de cet accessoire semble suffisante au vu de la documentation déposée et de nos constatations sur place au mois de février. C'est donc d'une façon purement gratuite que monsieur R. demande que le chien soit muselé lorsqu'il est seul alors que les époux S.-P. ont opté pour une solution aussi efficace mais bien plus satisfaisante pour le confort de l'animal. Quant à l'attitude de l'animal, lorsqu'i1 se trouve en liberté dans le jardin, il est évidemment normal que le chien aboie lorsqu'il voit une présence proche, surtout s'il est provoqué. 1 Monsieur R. a, certes, le droit de jouir paisiblement de son jardin, mais les époux S.-P. ont ce même droit sur leur jardin, ce qui inclut pour eux la possibilité d'y laisser déambuler leur chien, en veillant bien sûr à ce qu'il n'aboie pas intempestivement dès qu'il voit une présence proche, soit en le rappelant à l'ordre s'ils sont présents, soit en le munissant du collier spécial antiaboiements. Il apparaît, d'ailleurs, que cela ne semble pas poser de problèmes pour les autres voisins. Nous avions suggéré, lors de notre vue des lieux, la pose d'un écran dans la haie séparative qui isolerait chacune des parties chez elle et mettant ainsi fin à certaines discussions. Il ne nous apparaît, cependant, pas non seulement d'imposer une telle solution, mais encore d'en faire supporter le coût par les seuls consorts S.-P. 1 En effet, d'une part, si la présence d'un chien peut causer des inconvénients de voisinage, encore faudrait-il qu'ils soient anormaux et rompent l'équilibre normal entre les voisins, ce qui, en 'espèce, ne semble pas être le cas, si le chien est suffisamment sous contrôle, comme exposé ci-dessus. D'autre part, en raison des comportements de vie des parties, l'érection d'un tel écran, doublant l'écran de verdure actuel, présente de l'intérêt pour chacune des parties en évitant que ces comportements ne déplaisent ou ne nuisent à son voisin. En conséquence, et si elles estiment pouvoir trouver dans cette construction un élément d'apaisement. ce serait plutôt à frais communs que ce travail devrait être exécuté. La demande d'érection d'une palissade par les époux S.-P. à leurs frais exclusifs n'est donc pas fondée. En ce qui concerne la demande reconventionnelle pour procédure téméraire et vexatoire, il nous apparaît que celle-ci n'est pas davantage fondée. Les fiches de jurisprudence de www.eJuris.be L e s f i c h e s d e j u r i s p r u d e n c e d ’ e J u r i s . b e : Im m o b i l i e r – F i s c a l i t é – U r b a n i s m e - C o p r o p r i é t é – C o n s t r u c t i o n Troubles de voisinage Notion de trouble excessif n° 62 En effet, il reste évident que la présence d'un chien est, à tout le moins subjectivement, cause d'un trouble pour monsieur R. et que, même si ce trouble ne peut être qualifié de trouble anormal de voisinage, certaines mesures ont pu être prises par les époux S.-P. pour limiter les désagréments. Il en a été de même pour l'aménagement de la pose de la machine à linge. Le fait que monsieur R. se soit mépris sur l'étendue de ses droits en matière de troubles de voisinage ne rend pas ipso facto son action téméraire et vexatoire. Par ces motifs, ... Déboutons les parties de leurs prétentions respectives. Compensons les dépens.