Rougeole
La rougeole est une infection virale, strictement
humaine, extrêmement contagieuse et touchant tradi-
tionnellement l’enfant.
Le virus de la rougeole, dont un seul type est connu,
appartient àlafamille des Paramyxoviridae et constitue
l’espèce type du genre Morbillivirus.Sataille est de 120
à250 nm. Il est entouré d’une enveloppe constituée
d’une bicouche lipidique porteuse de glycoprotéines,
hémagglutinine (H), responsable de l’attachement àla
cellule cible, et protéine de fusion (F), responsable de
l’entrée du virus dans la cellule. Cette enveloppe, tapis-
sée sur sa face interne de la protéine de matrice (M),
protège la nucléocapside, de symétrie hélicoïdale, qui
associe la protéine de capside (N) àunARN mono-
caténaire de polarité négative d’environ 17 kb, auquel
sont également associées dans le virion mature une
ARN polymérase (L) et une phosphoprotéine (P). Le
génome viral est constitué des gènes de ces 6protéines
structurales, mais code également pour 2protéines non
structurales dont les gènes sont inclus àl’intérieur du
gène P.
La molécule CD46 aété identifiée comme récepteur du
virus àlasurface de la cellule, au moins pour les
souches vaccinales. Après fusion entre l’enveloppe
virale et la membrane cytoplasmique, le cycle de multi-
plication viral est entièrement cytoplasmique. La
transcription du génome par l’ARN polymérase ARN-
dépendante virale produit des ARN de polarité positive
directement messagers, traduits en protéines virales par
la machinerie cellulaire. La même ARN polymérase va
répliquer le génome viral. Les glycoprotéines virales
sont maturées par le réticulum endoplasmique et
migrent vers la membrane plasmique àtravers laquelle
les particules virales complètes vont bourgeonner.
Le virus pénètre dans l’organisme par voie aérienne et
se multiplie au niveau de sa porte d’entrée muqueuse.
Il gagne ensuite le système lymphoganglionnaire local.
Une phase virémique se produit autour du 5
e
jour après
le contage, avec infection d’abord des monocytes puis
atteinte des autres lignées. Une leucopénie accompagne
toujours les derniers stades de l’infection. La dissémina-
tion alieu ensuite dans les organes lymphoïdes avec dif-
fusion vers de nombreux organes, en particulier la peau
et les muqueuses. L’infection des cellules épithéliales de
l’épiderme aboutit àdes cellules géantes et àuninfiltrat
périvasculaire responsable de la symptomatologie cuta-
née caractéristique et des taches de Köplick de la cavité
buccale. Après une incubation de 14 jours en moyenne
(7 à18jours), la phase prodromique associe fièvre,
malaise, anorexie puis catarrhe oculo-nasal en 3à
4jours. La phase d’état associe fièvre, symptômes respi-
ratoires et ORL et une éruption cutanéomuqueuse
caractéristique qui commence derrière les oreilles et sur
le front et descend jusqu’aux pieds en 3jours, s’effaçant
ensuite selon le même ordre en 5à6jours avec résolu-
tion du tableau fébrile.
Les formes atténuées sont régulièrement constatées chez
des patients ayant reçu des immunoglobulines àvisée
prophylactique, chez des nourrissons avec persistance
partielle des anticorps maternels, chez des sujets anté-
rieurement vaccinés. Les formes subcliniques seraient
également fréquentes.
L’infection par le virus de la rougeole induit systémati-
quement une immunosuppression transitoire qui peut
persister plusieurs semaines, majorée en cas de dénutri-
tion associée, avec une augmentation importante de
sensibilité aux infections secondaires.
La rougeole est traditionnellement considérée dans les
pays développés comme une affection infantile bénigne
n’entraînant qu’une très faible mortalité (moins de 1
pour 1000 selon les études). C’est pourtant une mala-
die souvent grave chez le très jeune enfant, chez l’ado-
lescent et l’adulte, et l’une des premières causes de
mortalité infantile dans les pays en voie de développe-
ment dans un contexte de malnutrition chronique (mor-
talité de 3à6%).
Par ailleurs, l’introduction de la vaccination amodifié
les caractéristiques de la maladie. Avant l’ère vaccinale,
la rougeole était une maladie de l’enfant entre 2et4ans
évoluant par épidémies tous les 2à3ans. La rougeole
évolue maintenant par petites épidémies dans des com-
munautés d’enfants non vaccinés et chez des adoles-
cents et jeunes adultes non vaccinés ou ayant perdu leur
immunité vaccinale antérieure (62 %des cas déclarés
en France en 2002 avaient plus de 10 ans, contre 20 %
20 ans plus tôt). Des complications sévères immédiates
ou retardées sont observées, plus fréquentes chez le
jeune enfant et chez l’adulte, et en cas de dénutrition ;
elles sont par ordre décroissant de fréquence :diarrhée,
otite moyenne aiguë, pneumonie virale interstitielle
avec surinfection bactérienne éventuelle, encéphalite
aiguë postrougeoleuse immédiate ou retardée.
L’atteinte respiratoire et l’encéphalite sont respective-
ment les principales causes de décès chez l’enfant et
chez l’adulte.
La rougeole peut être prolongée et sévère chez
l’immunodéprimé, parfois sans éruption. Elle est sou-
vent gravissime chez l’enfant atteint de sida.
La panencéphalite sclérosante subaiguë (PESS) est une
complication tardive de la rougeole, toujours fatale.
Rare même avant la vaccination (1 cas sur 1million),