IUFM DE BOURGOGNE CONCOURS DE RECRUTEMENT : professeur des écoles L’éducation nutritionnelle : comment l’aborder à l’école élémentaire ? OUERRADI Maud Directeur de mémoire :Mme Delorme-Vadez Année : 2003-2004 N° de dossier :03STA16304 SOMMAIRE Introduction A] Aspect théorique I Nos besoins alimentaires 1) Conditions nécessaires : manger en quantité et en qualité a) Les besoins énergétiques b) Les besoins fonctionnels 2) Un outil nutritionnel : le classement des aliments 3) La nécessité d’un équilibre alimentaire II Manger, un acte chargé de sens 1) Un acte vital et vitalisant 2) Un acte de plaisir 3) Un acte social et convivial III Les comportements alimentaires 1) Comment apprend-on à manger ? a) Conditions pour apprendre à manger b) Perception de l’aliment à travers les âges 2) Les grandes étapes du discours alimentaire a) Années 70 : manger « moins » b) Années 80/85 : manger « vite » c) Années 85/90 : manger « sans » d) Années 90 : manger « juste » e) Années 2000 : manger « quoi » ? 3) Les problèmes actuels a) Une perte de repères b) Une modification des comportements alimentaires c) Les principaux troubles métaboliques et nutritionnels d) Deux problèmes d’actualité : l’obésité et les allergies alimentaires IV L’éducation nutritionnelle, modes et pratiques 1) L’évolution des concepts a) L’approche traditionnelle b) L’approche contemporaine p1 p2 p2 p2 p2 p2 p2 p3 p4 p5 p5 p6 p7 p7 p8 p8 p9 p9 p 10 p 10 p 10 p 11 p 11 p 11 p 12 p 13 p 13 p 15 p 15 p 15 p 15 c) Comparaison des deux approches 2) Les champs de l’éducation nutritionnelle p 16 p 17 V Une préoccupation nationale p 18 1) Plan National Nutrition Santé : protection, prévention, éducation p 18 a) Contexte p 18 b) Objectif général p 19 c) Principes généraux p 19 d) Six axes stratégiques p 20 2) Des exemples d’actions locales p 20 a) « Autour de l’alimentation », un projet Saône-et-Loire en 2001/2002 p 20 b) L’ogre du Nord-Pas-de-Calais p 21 c) « Mon restau de l’an 2002 » p 21 3) L’école élémentaire, un acteur privilégié p 22 a) Rôle de l’école et son évolution p 22 b) Les Instructions Officielles (1995 – 2002) p 23 c) Exemples d’activités réalisables en classe p 24 B] Pratique de classe I 3 semaines en CE2 (1er stage en responsabilité) 1) Présentation 2) Séquence et prolongements possibles 3) Analyse de pratique II 10 jours en toute petite et petite section (2ème stage en responsabilité) 1) Présentation 2) Activités faites et suite envisagée 3) Analyse de pratique p 27 p 27 p 27 p 28 p 29 p 30 p 30 p 30 p 31 Conclusion p 32 Bibliographie p 34 Annexes p I à XIX Introduction L’alimentation est sans doute un des domaines les plus universels : elle concerne chaque individu, de sa naissance à sa mort et intéresse tout groupe social, quelles que soient ses origines. L’importance de l’alimentation dans le développement des maladies aujourd’hui les plus répandues (maladies cardiovasculaires, cancer,…) est bien établie. Les Français sont eux-mêmes sensibles aux liens existant entre alimentation et santé, et la majorité d’entre eux est convaincue que l’alimentation influence directement son état de santé. Il apparaît donc important d’éduquer l’homme à s’alimenter vu la persistance des problèmes liés à la nourriture. Mais cette éducation doit commencer dès le plus jeune âge, d’où le rôle primordiale que doit jouer l’école sans pour autant disputer à la famille celui, incontournable et essentiel, qui est le sien dans ce domaine, comme dans toute éducation. Cette préoccupation de santé publique est déjà ancienne et pourtant les précédentes études – principalement quantitatives – portant sur les représentations, les connaissances et les comportements des Français en matière d’alimentation ont mis en évidence un décalage entre les perceptions et les connaissances, les représentations et les pratiques effectives. Et c’est probablement parce que l’alimentation intéresse tout le monde qu’elle suscite un nombre croissant de messages, sans qu’il soit toujours facile d’en décrypter l’origine : données scientifiques, informations vulgarisées ou publicités commerciales et qui sont parfois contradictoires. L’éducation nutritionnelle évolue en même temps que les recherches scientifiques dans le domaine pour essayer de répondre à cette problématique : comment aborder l’éducation nutritionnelle, plus particulièrement à l’école élémentaire, en prenant en compte toutes les dimensions de l’acte alimentaire ? Car c’est bien ce que les experts semblent reprocher aujourd’hui aux démarches passées : ne se soucier que de l’aspect nutritionnel avec des règles à suivre pour savoir s’alimenter correctement. C’est la question que je me suis posée. Nous verrons, dans un premier temps, les besoins alimentaires de notre corps sans oublier que manger est un acte qui en se réduit pas seulement à la nutrition. Les comportements alimentaires viendront appuyer l’idée selon laquelle il est difficile de changer durablement les pratiques sans prendre en compte à la fois les conditions de cet apprentissage, le discours alimentaire qui devient contradictoire d’une décennie sur l’autre et les problèmes actuels. Dans un second temps, nous montrerons que cette éducation est une préoccupation nationale qui a pris en compte la réflexion menée pour la rendre plus efficace et légitime, l’école apparaissait comme un acteur privilégié. Dans un troisième temps, ma pratique de classe montrera la nécessité d’adopter une démarche de promotion globale de la santé où tous les aspects de la prise alimentaire doivent se retrouver pour une éducation durable et effective. 1 A] Aspect théorique : I Nos besoins alimentaires 1) Conditions nécessaires : manger en quantité et en qualité Les besoins de notre organisme doivent guider notre alimentation. Ces besoins sont de deux ordres : quantitatif et qualitatif. Ces deux dimensions remplissent des fonctions au sein de l’organisme qui sont complémentaires. D’une part, les besoins quantitatifs correspondent aux nécessités énergétiques du corps et d’autre part, les besoins qualitatifs correspondent aux nécessités fonctionnelles du corps. a) Les besoins énergétiques : Ils varient selon l’âge, l’activité physique et la température extérieure. Il apparaît donc important de prendre en compte ces critères dans notre alimentation et de remettre en cause régulièrement nos habitudes de prise alimentaire. Les apports caloriques des aliments sont, par conséquent, à surveiller étroitement(cf. annexe 1). b) Les besoins fonctionnels : Ils réclament les matériaux indispensables au bon fonctionnement de l’organisme tels que l’eau, les sels minéraux, les protides, les lipides et les vitamines. Il apparaît donc important de connaître la composition des aliments que nous mangeons pour couvrir au mieux ces besoins. Pour permettre la prise en compte de ces paramètres à savoir, les aspects quantitatif et qualitatif, le consommateur a, à sa disposition, un outil nutritionnel : le classement des aliments. 2) Un outil nutritionnel : le classement des aliments Les nutritionnistes distinguent 6 groupes d’aliments : les viandes/poissons/œufs les produits laitiers les fruits et légumes les matières grasses les féculents les produits sucrés 2 L’eau est un cas particulier car même si elle ne fait pas partie des 6 groupes d’aliments, elle est indispensable pour l’être humain. Ces 6 groupes permettent de connaître le rôle de chacun des aliments grâce aux différentes sortes de matières nutritives qu’ils contiennent. Les viandes/poissons/œufs contiennent des protides ; Les produits laitiers contiennent du calcium ; Les fruits et légumes contiennent des fibres, des vitamines et des minéraux ; Les matières grasses contiennent des lipides, des vitamines et des acides gras ; Les féculents et les produits sucrés contiennent des glucides. Par conséquent, les aliments contiennent différentes sortes de matières nutritives : - les protides constituent les « matériaux de construction » du corps ; on dit alors que les groupes viande/poisson/œuf et produits laitiers sont des aliments bâtisseurs. - Les glucides contenus dans les sucres et les lipides contenus dans les graisses apportent l’énergie nécessaire au corps pour ses mouvements et le maintien de sa température ; on dit alors que les groupes matières grasses, féculents et produits sucrés sont des aliments énergétiques. - Les vitamines et les sels minéraux permettent le bon fonctionnement de l’organisme ; on dit alors que le groupe légumes et fruits est constitué d’aliments fonctionnels. Cet outil permet au consommateur de se repérer dans la composition des aliments afin de couvrir correctement les besoins qualitatifs et également de comprendre les informations contenues sur les étiquettes des aliments consommés. En effet, aujourd’hui les emballages d’aliments fournissent de plus en plus souvent des « informations consommateurs » précisant la composition de l’aliment et encore faut-il comprendre à quoi servent les glucides, les lipides et les protides. Ces étiquettes sont aussi une mine d’informations concernant les apports énergétiques des produits permettant ainsi de répondre convenablement aux besoins énergétiques (cf. annexe 1). Cette prise en compte des deux dimensions quantitative et qualitative est garante d’une bonne alimentation. Viennent s’ajouter à cela quelques recommandations qui conduisent vers un véritable équilibre alimentaire. 3) La nécessité d’un équilibre alimentaire Pour parvenir à un équilibre alimentaire, il faut établir une ration alimentaire quotidienne adaptée, c’est-à-dire que la composition de l’ensemble des repas d’une journée doit couvrir les besoins en matière et les besoins en énergie, comme nous l’avons vu précédemment. Mais il faut également avoir une alimentation variée et complète pour être sûr d’apporter au corps toutes les 3 vitamines et tous les oligo-éléments dont il a besoin. En effet, on pourrait très bien parvenir à combler tous les besoins énergétiques et qualitatifs du corps en mangeant toujours la même chose mais malgré cela les carences seraient bien présentes. Ainsi, grâce au classement des aliments, le regroupement des aliments qui fournissent qualitativement les mêmes nutriments est plus clair. Dès lors il fait apparaître des possibilités d’équivalence : à l’intérieur d’un même groupe, les aliments peuvent ainsi se remplacer permettant de varier au mieux l’alimentation. Par exemple, les œufs peuvent remplacer la viande ou le poisson car ils apportent à l’organisme les mêmes matériaux. Il en est de même pour 30 g. de beurre dans lesquels on retrouve autant de vitamines A que dans 35 g. de carottes ou pour 300 g. de fromage blanc dans lesquels on trouve autant de calcium que dans un quart de litre de lait. Les équivalences se poursuivent également d’un point de vue quantitatif car beaucoup d’aliments ont la même valeur énergétique : par exemple, 100 g. de pâtes apportent autant de kilojoules que 100 g. de riz cuit soit 376. Pour manger équilibré, il faut donc prendre en compte ces deux dimensions car si l’on trouve bien autant de vitamines A dans 30 g. de beurre que dans 35 g. de carottes, on n’y retrouve pas la même quantité de lipides. Il faut savoir varier tous les paramètres qui rentrent en jeu lors de l’alimentation. En plus de manger équilibré, il faut essayer de respecter quelques règles : faire trois repas par jour et deux petites « pauses », dans la matinée et dans l’après-midi (en mangeant par exemple une pomme ou un yaourt) ; se préparer un vrai petit déjeuner car, au réveil, nous sortons d’une longue période de jeûne ; éviter de « grignoter » des sucreries entre les repas, car l’activité physique réelle de la personne n’utilise pas tout le sucre avalé ; La nécessité de connaître les besoins quantitatifs et qualitatifs de l’organisme apparaît clairement. A cela s’ajoute la nécessité de connaître la composition des aliments et les différentes équivalences en vue de varier au mieux son alimentation et d’arriver à un équilibre alimentaire. L’éducation nutritionnelle doit apporter aux personnes ces connaissances théoriques. Mais si en s’intéressant à l’alimentation, on ne traite que de la dimension nutritionnelle, on oublie que l’acte de manger est chargé de sens et que l’alimentation ne se réduit pas à la nutrition. II Manger, un acte chargé de sens La consommation d’aliments est un acte complexe. Comme pour tous les animaux il est un acte inné, nécessaire à la survie, mais il prend de plus, chez l’homme, une dimension culturelle et affective. La diversité des alimentations à 4 travers le monde montre qu’il existe une grande palette de solutions à une nécessité universelle. Cet acte est intimement lié à nos comportements identitaires et personnels. Il est aussi le reflet de nos pratiques familiales, sociales et culturelles. Et il est enfin un mode d’expression de nos croyances symboliques et imaginaires. Notre manière de manger et d’apprécier la nourriture est un subtil mélange de comportements innés et acquis. Notre héritage biologique (par exemple, le fait d’être un être humain) et notre patrimoine physiologique (par exemple, les caractéristiques de nos cellules sensitives) sont à l’origine de certains comportements innés. Ensuite, l’expérience, la personnalité ou l’affectivité de chacun vient enrichir notre relation avec les aliments. 1) Un acte vital et vitalisant La fonction première de l’aliment est d’apporter à tout organisme vivant la matière première dont il a besoin pour : - assurer l’édification des structures (notamment lors des périodes de croissance), leur renouvellement et leur réparation (cicatrisation) ; - couvrir les dépenses énergétiques qui existent en permanence : mouvements (battements cardiaques, contractions musculaires, transports ioniques…), synthèse, maintien de la température du corps, digestion… Manger apparaît dès lors comme un acte de survie. Cette survie est d’autant plus assurée que l’alimentation de l’organisme vivant se diversifie. Ainsi l’homme a la particularité de consommer aussi bien des aliments d’origine animale (viande, œuf, poisson…) que végétale (légumes, fruits…) : son régime alimentaire est omnivore. Cet acte vital qu’est manger permet de se maintenir en bonne santé, de renouveler son énergie. Cette dimension sanitaire est de plus en plus importante lorsque l’on parle d’alimentation et suppose des connaissances nutritionnelles. 2) Un acte de plaisir Jean Trémolières résume très bien cette idée : « l’alimentation doit non seulement être un objet nutritionnel, mais aussi faire plaisir et posséder une signification symbolique. Un aliment est une denrée comportant des nutriments, donc nourrissante, susceptible de satisfaire l’appétit, donc appétente et habituellement consommée dans la société considérée, donc coutumière .» (1968) Les résultats d’une étude qualitative auprès des 18-50 ans 1 va également dans ce sens : si les Français sont conscients des bienfaits d’une alimentation saine, 1 La santé de l’homme, n° 358, mars-avril 2002, « les Français, l’alimentation et la santé » pages 17 à 20 ; Pin, Loisel et Couvreur 5 celle-ci semble difficile à mettre en œuvre au quotidien puisque dans les représentations, la santé s’oppose en effet au plaisir. Le plaisir ressenti lors de la prise alimentaire est totalement subjectif appartenant à chaque individu. L’acte alimentaire et les goûts sont soumis à de très fortes déterminations sociales et les modalités cognitives de construction des choix alimentaires sont multiples. Aussi la réalité remet-elle en cause à la fois la conception d’un modèle alimentaire unique et la mise en place d’un message nutritionnel qui veut que les consommateurs adoptent ce modèle alimentaire unique. Ce plaisir passe par le goût, la saveur d’un aliment. On parle de quatre saveurs : sucrée, salée, amère et acide que peut définir la langue. On parle même de dégustation. Plusieurs organes interviennent de façon décisive dans le processus de dégustation. L’œil, le nez, la bouche, l’oreille, la main, en somme les cinq sens sont stimulés et transmettent des messages au cerveau. Les analyses des différents stimuli sont interprétées et acceptées différemment suivant les individus. Le goût peut être un moyen de communication, initiateur de culture et de convivialité autour d’une table par le partage des sensations perçues par chacun. C’est bien l’aspect « plaisir » qui incite à consommer les plats. Pour engager l’éducation nutritionnelle, il est préférable de commencer par cet aspect qui permettra ensuite d’aborder l’aspect équilibre et « raison », capitale pour la santé. 3) Un acte social et convivial L’alimentation est un acte chargé d’un fort contenu social. Dans tous les groupes humains, dans toutes les cultures et à toutes les époques, préhistorique, antique ou moderne, la recherche (chasse, pêche), la production (agriculture, élevage) et la consommation de nourriture sont des activités coopératives. En général, les repas pris en commun sont des moments de convivialité, d’échange ou de partage. Manger en famille, entre amis, donne une autre dimension au repas : il en fait accroître l’intérêt, le sens. Le repas est un lien et permet l’échange. En ce sens, il a bien une fonction sociale et familiale primordiale. L’alimentation comporte également une forte composante identitaire. « Manger … rien d’aussi intime », affirme Claude Fischler dans son ouvrage L’Homnivore. En effet, l’aliment transite par le corps. Manger n’est donc pas un acte anodin puisqu’il a des conséquences durables sur la construction du corps et le bienêtre, pouvant provoquer le plaisir et la santé, mais aussi le dégoût, la maladie ou la mort. On est ainsi rarement indifférent par rapport à ce que l’on consomme. Les aliments et les plats cuisinés sont en général chargés de références liées à ce que nous sommes et à ce que nous avons vécu. En mangeant une tomate en plein hiver, on mange aussi du soleil de la Méditerranée… même si c’est une tomate de serre hollandaise. Ces dimensions psychologiques et culturelles 6 éclairent en grande partie les goûts, les dégoûts, les rejets et les interdits alimentaires. On peut donc voir que l’acte alimentaire est un geste chargé d’affectivité. Il est le fruit d’un apprentissage du goût qui commence dès le plus jeune âge. Le poids de l’exemple de consommation à l’échelle familiale est déterminant pour les habitudes ultérieures de l’adulte. Les trois dimensions présentées ci-dessus et qui coexistent les unes par rapport aux autres, montrent bien que l’alimentation ne se réduit pas à la nutrition. Il est donc important lorsque l’on s’intéresse à ce domaine de prendre en compte tous les champs dans lesquels il s’implique. L’action éducative au sens large doit tenir compte de cette dynamique. Mais pour parvenir à une éducation nutritionnelle qui sera plus à même d’atteindre ses objectifs, il faut tenir compte de la situation actuelle dans laquelle se trouve les consommateurs en observant à la fois le processus d’apprentissage de l’acte de manger, les grandes étapes du discours alimentaire dans la société et enfin les problèmes actuels. III Les comportements alimentaires Le processus d’apprentissage de l’acte de manger reste assez semblable depuis l’origine de l’homme, en disant cela on ne voit pas alors pourquoi les comportements alimentaires changeraient. Mais c’est ce qu’on en dit aujourd’hui qui interfère sur ces comportements alimentaires. En effet, on a tendance à oublier ce qu’il y a autour de l’assiette, pour ne penser qu’à ce qu’il y a dans l’assiette. Les grandes étapes du discours alimentaire en témoignent débouchant par la même sur de nouveaux comportements alimentaires qui sont source de réels problèmes. 1) Comment apprend-on à manger ? Malgré l’incongruité d’une telle question concernant une activité relativement banale et en grande partie déterminée par des données biologiques, manger s’apprend. Sur le plan biologique, l’être humain ne peut pas tirer d’un seul type de nourriture tous les éléments nutritifs dont il a besoin, contrairement aux espèces spécialisées, herbivores ou carnivores. Il lui faut un minimum de variété, des céréales ou des tubercules pour l’apport en glucides, des produits carnés ou des légumineuses pour les protéines, des produits gras ou des huiles pour les lipides, des fruits et des légumes pour les vitamines et les minéraux. L’être humain se trouve donc tiraillé entre deux nécessités : savoir se composer une alimentation diversifiée mais ne pas prendre de risque, tout aliment nouveau représentant un 7 danger potentiel. C’est selon le sociologue de l’alimentation Claude Fischler, le « paradoxe de l’omnivore ». La méfiance vis-à-vis des aliments nouveaux –la néophobie alimentaire- est caractéristique des omnivores. Parmi cette variété infinie, comment l’être humain arrive-t-il à choisir ? L’aptitude innée à faire les bons choix est toutefois extrêmement limitée. Pour séparer ce qui est comestible de ce qui ne l’est pas, l’être humain doit pouvoir s’appuyer sur un ensemble de savoirs et de connaissances. Se pose alors la question de savoir quelles sont les conditions de ces apprentissages. a) Conditions pour apprendre à manger Les conditions de ces apprentissages sont multiples : - on apprend en imitant des modèles. Le premier est celui qu’offre la famille, suivi par celui du groupe des pairs ; ce dernier est d’autant plus important que dans nos sociétés, les enfants sont socialisés précocement en dehors de la maison (crèches, garderies, écoles maternelles ,…) Il peut d’ailleurs y avoir par moments des conflits entre ces divers modèles, ou bien encore des apprentissages de consommation spécifique selon le cadre des prises alimentaires ; - l’enfant apprend encore en fonction des modèles éducatifs que l’adulte lui propose ou impose. Dans ce dernier domaine, il existe souvent un décalage entre ce que les adultes disent et ce qu’ils font ; ceci n’est pas sans poser problème. En effet, l’attitude du « fais ce que je dis et non ce que je fais » va à l’encontre de l’apprentissage par observation et est souvent source de conflits éducatifs parents-enfants ; - l’apprentissage des conduites alimentaires intègre, dès le début, la dimension hédonique ; ceci est d’autant plus important à prendre en considération que, dans le cas de la gustation, il existe des caractéristiques innées concernant l’agrément ou le désagrément de la sensation (même si les apprentissages culturels ultérieurs peuvent les modifier fortement) ; - manger est également l’apprentissage d’une identité, autant individuelle que collective. Les règles culinaires sont celles d’une société donnée. Elles servent toujours de modèle d’apprentissage, même lorsqu’on les transgresse ou rejette. L’individu se crée, s’affirme, autant par les conduites alimentaires, que par son langage ou ses manières de s’habiller ou d’être avec les autres. b) Ø Ø Perception de l’aliment à travers les âges : Avant 3 ans, les enfants n’ont pas de problèmes et avalent tout ce qu’on leur présente. Chez le bébé, le refus alimentaire est rare : certains mangent beaucoup, d’autres peu. A partir de 3 ans, c’est la période de phobies alimentaires. L’enfant commence à refuser tout ce qu’on lui présente et ceci quels que soient les aliments, connus ou nouveaux. Il trie les aliments dans son assiette. Cette 8 Ø phobie concerne 60% de la population. Elle est plus développée chez les garçons. Certains en sortent en trois mois, et d’autres conservent ce comportement toute leur vie. Il importe de ne pas gaver l’enfant. Le forcing alimentaire peut, en effet, entraîner des troubles du comportement alimentaire. Il y a des enfants qui éprouvent le besoin de manger beaucoup et d’autres peu. De 6 à 9 ans, l’enfant éprouve du goût pour les saveurs non affirmées et rejettent les saveurs trop fortes. L’expérience de Fischler (CIDIL) montre que le goût « fort » est assimilé aux adultes. Ainsi considérera-ton l’acceptation de saveurs nouvelles et plus corsées comme un rite de passage alimentaire. La connaissance des conditions permettant cet apprentissage et la prise en compte de la perception de l’aliment différente selon l’âge devraient pouvoir nous aider à orienter de façon efficace notre volonté d’éducation nutritionnelle. Cependant, on a pu constater qu’aujourd’hui beaucoup d’autres facteurs non seulement culturels mais encore induits par la société actuelle rentrent un jeu dans ce processus d’apprentissage vital pour l’homme, rendant ainsi presque caduque la question posée au départ, à savoir :comment apprend-on à manger ? Ceci ne nous aide pas vraiment dans notre démarche éducative nous faisant encore percevoir l’immensité des domaines touchés lorsque l’on parle d’éducation nutritionnelle. 2) Les grandes étapes du discours alimentaire Pour parfaire cette analyse, il convient d’examiner les grandes étapes du discours alimentaire au cours des vingt-cinq dernières années. Ceci appuie l’idée développée ci-dessus selon laquelle les informations livrées au consommateur concourent à le déstabiliser et même à le perdre dans un flot de recommandations parfois contradictoires. On distingue au cours des vingt-cinq dernières années, quatre grandes étapes dans le discours alimentaire : manger « moins », manger « vite », manger « sans » et manger « juste ». A ces quatre étapes, il faut ajouter celle, émergente aujourd’hui : manger « quoi » ? a) Années 70 : manger « moins » Après les années 60, années de croissance et de jouissance, les années 70 sont placées sous le signe de la contestation. 1968 est passé par-là, la publicité est diabolisée, les multinationales honnies. La logique de dénuement et de dépouillement trouve son expression dans la macrobiotique. La maigreur de Twiggy ou de Jane Birkin détrône les rondeurs de Brigitte Bardot et Marylin Monroe. Le régime et la chasse aux calories s’instaurent. 9 b) Années 80/85 : manger « vite » Dans le début des années 80, l’heure n’est plus à la révolte ni à la contestation. Un vent de Californie commence à souffler sur l’Europe. Le style golden boy (jeune, bronzé, musclé) devient le modèle de référence. Il ne s’agit plus seulement d’être mince encore faut-il être musclé à coup d’aérobic, de gym tonic et de body stretching. Jane Birkin laisse la place à Jane Fonda et Véronique et Davina. Pour la première fois, la vision du corps devient une appréhension de l’intérieur : on se met à l’écoute de son corps et on cherche à « être en forme ». Pour manager son capital énergétique, on choisit des aliments dynamisants, des potions magiques (céréales, barres et biscuits énergétiques, boissons de l’effort). A la maison, surgelés, salades et légumes en sachet plantent le décor. Dans la rue, le fast-food s’impose. L’alimentation doit se plier modestement aux temps d’une vie trépidante et exaltante. c) Années 85/90 : manger « sans » A la fin des années 80, Tchernobyl a traumatisé les esprits : ce sera la grande vague des mouvements écologiques. Le trou dans la couche d’ozone est au centre de tous les débats. Le marketing répond à cette nouvelle exigence écologique et lance en 1989 l’essence sans plomb et le lessive sans phosphate. Les produits verts et les emballages recyclables font leur apparition. L’hygiène de vie s’inscrit dorénavant dans une logique de prévention et l’on mange avec sa tête. Les produits allégés « sans » sucre et « sans » matière grasse envahissent les rayons des supermarchés. Paradoxalement, les consommateurs exigent de ces produits une qualité gustative. On assiste à une réconciliation et à la renaissance du goût. De nouvelles alliances se créent : modernité et tradition, diététique et gourmandise. Le plaisir réapparaît. On refuse les pratiques coercitives, les rites ascétiques, les privations et les interdits. La femme pulpeuse (Isabelle Adjani) réconcilie forme et plaisir. d) Années 90 : manger « juste » Sur fond de sida, de pollution et de chômage, les doutes se développent et les remises en question se multiplient. Dans un contexte incertain, générateur d’anxiété, on s’appuie sur la famille et on revient à des valeurs morales. On cherche la sécurité, l’authenticité et la vérité. Cette quête du Graal des temps modernes s’exprime par le retour aux origines : du tourisme vert aux labels et AOC. On regarde vers le terroir et le savoir-faire traditionnel : on veut manger du vrai pain, du beurre de baratte, du sel de Guérande… On respecte les cycles naturels et on préfère les produits de saison : on devient attentif aux goûts, aux saveurs, aux odeurs. Les valeurs de santé et la préoccupation de sûreté bactériologique progressent. Surtout, on s’aperçoit qu’il faut manger de tout, équilibrer son alimentation, car aucun aliment est complet :un peu de tout en quantité raisonnable. La nourriture redevient aussi la 10 médecine. De nouveaux prophètes surgissent : avec la nutrithérapie et les nutrialiments, c’est toute une vogue des aliments-santé. e) Années 2000 : manger « quoi » ? Aujourd’hui, les peurs alimentaires ont tendance à se multiplier. La sécurisation par la tradition et l’authenticité subsistent, mais la grande opposition entre le pur et l’impur se réintroduit. On constate une progression dans la consommation des aliments bio, du végétal. Dans une société d’abondance alimentaire, les différentes tendances qui ont parcouru le paysage nutritionnel au cours des vingt-cinq dernières années témoignent d’une perte de repères alimentaires pour le consommateur. A cette perte de repères s’ajoutent différents problèmes liés à l’alimentation. 3) Les problèmes actuels a) Une perte de repères Le mode de vie moderne induit des changements visibles dans les habitudes alimentaires : tendance générale à la déstructuration des repas et au recours au grignotage ; consommation accrue de protéines et de graisses animales (viande, poisson, œufs et produits laitiers) au détriment des protéines d’origine végétale lorsque le niveau de vie du consommateur augmente et qu’il devient citadin. Interviennent également des changements plus insidieux, dus aux pratiques industrielles de transformation, comme le raffinage qui prive les produits tels que sucre, farine ou huile des micro nutriments, fibres et oligo-éléments originellement présents dans les produits bruts. Tout cela peut aboutir à une dégradation de l’alimentation sur le plan nutritionnel. Les sociétés de consommation se caractérisent par une très grande disponibilité et accessibilité des produits alimentaires, voire une surenchère de l’offre des industries, une très forte pression de communication par le biais des médias et une multiplicité de recommandations nutritionnelles et diététiques. Les repères diététiques et nutritionnels, autrefois établis empiriquement sur plusieurs générations, et transmis dans le cadre de l’éducation familiale, le sont maintenant essentiellement par les médias ou les grands industriels alimentaires. Les avancées rapides de la science et la durée de vie très courte des produits aboutissent à des recommandations fluctuantes, éphémères et parfois contradictoires. Le consommateur se trouve ainsi placé devant des messages paradoxaux : l’incitation à consommer toujours plus, sous la pression des publicités pour les produits alimentaires, et à rester mince, sous la pression des standards de la mode ou de la diététique. Il en résulte une situation qualifiée par Claude Fischler de « brouhaha diététique » » et de « cacophonie alimentaire ». Celle-ci favorise des dérives du comportement alimentaire, qui peuvent parfois prendre des formes extrêmes comme la boulimie et l’anorexie mentale. Tout cela plaide en faveur d’un renforcement de l’éducation alimentaire des enfants, adolescents, et même des 11 adultes pour redonner à chacun des repères nutritionnels, diététiques, hygiéniques et culinaires. De plus, comme le souligne J.P. Poulain dans son ouvrage Manger aujourd’hui : attitudes, normes et pratiques, il y a une grande dissonance entre les connaissances du consommateur en matière de nutrition et sa propre pratique réelle. En effet, on sait informer la population à grands renforts de campagne d’informations sur la nécessité d’avoir une alimentation variée et équilibrée ou encore sur les risques qu’elles courent mais on a des difficultés à faire que ces savoirs théoriques deviennent de véritables pratiques adoptées. b) La modification des comportements alimentaires L’alimentation des Français a profondément changé au cours des cinquante dernières années. L’étude attentive de l’évolution de la consommation des divers aliments, ou groupes d’aliments, durant le demi-siècle écoulé, permet de constater que : - des modifications considérables ont eu lieu entre 1950 et 1980 - pour bien des aliments, une stabilisation des niveaux de consommation s’est installée durant les dix ou quinze dernières années. o Le pain : la consommation moyenne, par habitant et par jour, qui était de 600 grammes en 1880 et de 500 grammes juste avant la première guerre mondiale était de 140 grammes en 1990. Elle a donc diminué de plus de la moitié en quarante ans. o Les pommes de terre : l’effondrement de la consommation de pommes de terre entre 1950 et 1990 est moins connue mais tout aussi réelle. Les quantités consommées étaient de 124 kg par personne et par an en 1950, 61 kg en 1990. o Les légumes secs : la baisse de consommation fut très nette dès 1920 : 7,3 kg par personne et par an contre 1,5 kg en 1978 ; en 1991, elle était de 1,2 kg par personne et par an. Pour les produits d’origine animale riches en protéines : les viandes, les poissons, les œufs et les fromages, l’évolution fut inverse de celle que nous venons d’évoquer pour le pain, les pommes de terre et les légumes secs. Ø Il y a eu presque doublement de la consommation moyenne des viandes entre 1946 et 1980. C’est un changement considérable. Ø La consommation de poissons frais est relativement stable. Au cours des dernières décennies, le poisson en conserve et surtout le poisson surgelé et les plats à base de poisson surgelé, ont connu un grand essor : leur consommation s’est accrue de 50% entre 1980 et 1990. Ø Les fromages : moins de 9 kg par personnes et par an en 1959, 16 kg en 1991. c’est donc un accroissement très remarquable. En ce qui concerne les yaourts, la consommation a été multipliée par 8 en trente ans. 12 Ø La consommation de fruits a été multipliée par 2,5 depuis 1950, ce qui est incontestablement favorable à la santé. Ø En moyenne, les Français mangent 31 kg de sucre par an. La consommation de sucre incorporé aux aliments et aux boissons a considérablement augmenté durant les dernières années. De 1960 à 1990, la quantité de sucre consommée dans les boissons a été multipliée par 4,5, dans les glaces et crèmes glacées par 7. c) Les principaux troubles métaboliques et nutritionnels ü On estime en France, qu’environ quatre millions de personnes adultes ont un poids supérieur de plus de 20% au poids « normal » en fonction de leur âge et de leur sexe, et un nombre d’individus sensiblement plus élevé ont une surcharge pondérale modérée. ü Un million et demi de personnes sont atteintes de diabète. Cet ensemble réunit deux maladies forts différentes : diabète de type 1 ou insulinodépendant et diabète de type 2 ou non-insulinodépendant. ü Il y a environ cinq millions d’hypertendus. ü Plus de huit millions de personnes ont un taux de cholestérol sanguin supérieur à 2 ,5 g/litre. ü Environ 115 000 infarctus du myocarde chaque année sont responsables de 50 000 morts. ü Parmi les autres problèmes de santé partiellement liés à l’alimentation, il faut citer les caries dentaires et les troubles digestifs chroniques. Toutes ces pathologies sont plurifactorielles. L’alimentation n’est que l’un des facteurs responsables. d) Deux problèmes d’actualité : l’obésité et les allergies alimentaires Aujourd’hui, nous vivons dans une période de profusion alimentaire qui n’a sans doute jamais eu d’équivalent dans l’histoire. Cette profusion nous invite à une certaine « gourmandise », cependant que la plupart de nos activités sont sédentaires, nous poussant ainsi à une certaine « paresse ». Une chose n’a pas changé : c’est notre capacité de stocker, de constituer ce réservoir adipeux qui historiquement permet de faire face aux problèmes de pénurie et assure la survie de l’espèce. Nous voici donc en train de grossir inéluctablement avec pour toute réponse depuis cinquante ans, le modèle de la restriction, quasi obligatoire. Or, cette doctrine s’avère inefficace, voire même contre-productive, tous les chiffres en attestent : les obèses sont de plus en plus nombreux, de plus en plus gravement obèses et ils le deviennent de plus en plus jeune. On peut aujourd’hui prouver scientifiquement que les régimes font grossir. Les conséquences de l’obésité pour l’enfant sont les suivantes : une surcharge sur le squelette et le système musculaire déformant l’ossature et compromettant des pertes de poids ultérieures, l’apparition du diabète de l’enfant, puis les pathologies de l’adulte : maladies cardio-vasculaires, cancers, diabète et troubles 13 ostéo-articulaires ou encore une perturbation des relations de l’enfant avec son corps (et ses rapports sociaux). L’obésité devient un véritable problème de santé publique. Beaucoup de campagnes d’actions visent à réduire ce problème. En ce qui concerne les allergies alimentaires, on enregistre une augmentation globale du nombre déclaré d’allergies : quelques 3% de la population aurait une allergie alimentaire évolutive et 8% des enfants une allergie alimentaire. Il faut bien sûr s’entendre sur la définition de la maladie, clarifier les divers mécanismes en cause et interpréter les chiffres à bon escient. Seule une approche fondée sur les dernières connaissances scientifiques permettent d’éviter l’alarmisme qui conduit à mettre sur le même plan les diverses formes d’allergies alimentaires et à considérer tout patient allergique comme en danger mortel. Elle permet aussi de reconnaître la gravité de la maladie et souligne l’importance de la prise en charge et de la prévention. L’évolution des modes de vie, la disponibilité pour le plus grand nombre d’aliments en provenance de pays lointains, la transformation toujours plus poussée des produits alimentaires contribuent à la dissémination de nouveaux allergènes, parfois sous forme masquée, ce qui crée des difficultés pour l’évaluation des risques. Tous ces constats conduisent à une crise du modèle alimentaire traditionnel qui se base sur les trois repas. Comme le souligne J.P. Poulain dans Manger aujourd’hui : attitudes, normes et pratiques , il y a une situation de dissonance puisqu’on assiste non seulement à un processus d’individualisation de la prise alimentaire mais encore à une prise de distance par rapport au modèle de trois repas. Lorsque les modèles s’affaiblissent ou plutôt lorsqu’une distance est prise, les questions qui se posent alors aux mangeurs sont d’ordre qualitatif : que manger ? Quand et comment manger ? Elles se substituent à des questions de nature quantitative liées à des situations de manque ou d’incertitude des approvisionnements. Malgré les difficultés soulevées précédemment quant à la mise en place d’une éducation nutritionnelle efficace, il apparaît toujours nécessaire d’éduquer l’homme à s’alimenter. Les constats actuels qui sont les conséquences des tentatives antérieures doivent permettre de mieux orienter la démarche d’éducation. Force est de constater que cette démarche pour améliorer la santé de la population sur le plan nutritionnel existe depuis longtemps mais qu’elle a besoin de réaménagements. IV L’éducation nutritionnelle, modes et pratiques De l’hygiène alimentaire à l’éducation nutritionnelle, de nombreux changements sont intervenus, tant dans les termes que dans la démarche et les 14 pratiques. A travers l’histoire des concepts d’éducation à la santé et par l’analyse des actions et des acteurs du champ de l’éducation nutritionnelle, nous allons décrire et observer l’évolution de ce domaine. 1) L’évolution des concepts L’éducation nutritionnelle, comme l’éducation à la santé, sont des concepts en pleine évolution. Alors qu’il y a quelques années les éducateurs utilisaient des mots tels que bon, mauvais, interdit, actuellement ils parlent de variété, de plaisir, de convivialité. Ainsi les messages évoluent, intégrant l’évolution des comportements, des pratiques et des connaissances. La photographie des différentes périodes de campagnes d’éducation sanitaire permet de suivre l’évolution du concept de santé. a) L’approche traditionnelle Elle constitue la plus longue période et a pris fin autour des années 1970-1980. La plupart des programmes mettent en avant la santé comme une absence de maladie (définition dite « négative » de la santé). Issue de ce modèle médical, la priorité est donnée à la prévention des maladies. Les messages sont de conception hygiéniste. La pédagogie utilisée s’appuie sur des méthodes affirmatives, du niveau conseil/ordre. L’éducateur possède le savoir, les usagers ne savent rien, on parle de relation ou de pouvoir enseignant/enseigné. C’est ainsi que l’éducation nutritionnelle « traditionnelle », appelée hygiène alimentaire, s’est développée dans le registre du curatif, les messages véhiculés comportant règles, normes, listes d’aliments permis et interdits… S’appuyant sur l’hypothèse qu’un manque de connaissance est à l’origine des mauvaises habitudes alimentaires, l’approche traditionnelle (appelée approche « cognitiviste ») vise à augmenter ou modifier les connaissances en nutrition en vue de changer le comportement alimentaire par une rationalisation consciente du régime. Les interventions sont le plus souvent ponctuelles, s’appuyant sur des techniques utilisant les cours magistraux, les conférences, les démonstrations et les consultations. b) L’approche contemporaine Les années quatre-vingt ont vu l’émergence d’une nouvelle définition de la santé, dynamique, globale, positive. La maladie est présentée comme une composante humaine et la santé s’exprime en terme de capacité à maîtriser, surmonter de manière active et créative risques et changements. L’éducation à la santé contemporaine s’inscrit dans un contexte de prévention et de promotion de la santé, favorisant le développement de conditions propices à la santé, s’adressant à des populations. S’intéressant à l’aspect positif de nouvelles habitudes proposées (conception hédoniste des messages), fondée sur l’écoute, 15 cette approche met l’accent sur l’acquisition des attitudes, l’estime de soi et la confiance, la responsabilité, l’habileté à prendre des décisions. c) Comparaison des deux approches La comparaison de ces deux approches permet de résumer l’évolution dans les finalités, la démarche, les pratiques et les moyens. De l’éducation sanitaire à l’éducation à la santé Education sanitaire Education à la santé traditionnelle contemporaine Les priorités • Prévention des • Promotion de la maladies santé, ressource • Enseignement des pour la vie principes d’hygiène quotidienne • Développement de conditions favorables Les attitudes Prescriptives, parfois Fondées sur l’écoute, culpabilisantes et aucun comportement manipulatrices n’étant dénué de sens La conception Médicalisée et individualiste Globale et environnementaliste Les activités Ponctuelles, ciblées Programmées, progressives, coordonnées et intégrées Le rôle des participants • Considéré comme • Considéré comme passif (détermination actif extérieure) • Autonomisation • Relation • Comportements enseignant/enseigné irrationnels • Comportements rationnels La stratégie Directe, fondée sur Indirecte, fondée sur l’acquisition des connaissances les motivations, les attitudes… et les connaissances 2) Les champs de l’éducation nutritionnelle La nutrition étant l’ensemble des processus de transformation et d’assimilation des aliments dans l’organisme, l’adjectif « nutritionnel » pourrait ne renvoyer qu’à cette composante biologique. Ce serait oublier les composantes psychoaffective, sociologique et symbolique. La nutrition et le comportement 16 alimentaire sont le résultat à un moment donné de l’adaptation d’un individu à son milieu, résultat d’une trajectoire alimentaire issue de nombreuses générations. Les déterminants de notre consommation alimentaire sont multifactoriels (en témoigne la figure 1 que l’on trouve dans l’annexe), liés à des facteurs biologiques, socioculturels, économiques, politiques et géographiques. S’il est des facteurs sur lesquels aucune action n’est possible, comme les facteurs biologiques, il en existe de nombreux autres sur lesquels une action directe ou indirecte peut être entreprise. Les champs d’action se trouvent à la croisée de multiples disciplines : responsables politiques et décideurs, journaliste, chercheurs en sciences humaines (sociologues, psychologues), professionnels de la programmation, de l’évaluation, de l’épidémiologie, acteurs du monde médical et paramédical (médecins, infirmières, diététiciens), professionnels de l’enseignement, du travail social (assistantes sociales, éducateurs), professionnels du secteur agroalimentaire, des métiers de bouche (cuisiniers, personnels de la restauration). Cet aspect pluridisciplinaire, très riche mais également très complexe, va permettre une approche plus globale, une meilleure compréhension des comportements alimentaires et une plus grande efficacité des actions. (La fiche 1, située en annexe 2, présente un programme où la dimension inter institutionnelle et pluridisciplinaire qui a été incontestablement un facteur de succès). Sur un même thème, on peut avoir différentes approches éducatives (cf. annexe 3). L’éducation nutritionnelle doit permettre aux individus d’acquérir les compétences et les connaissances nécessaires sur les questions alimentaires et nutritionnelles pour que, avec une plus grande liberté, ils puissent développer et choisir leur comportement alimentaire, en intégrant les contraintes socioéconomiques, en harmonie avec leur motivation culturelle. (La fiche 2, située en annexe 4, décrit une action où la diversité culturelle a enrichi la démarche d’éducation). C’est ainsi que les objectifs de l’éducation nutritionnelle vont de pair avec les objectifs de l’éducation pour la santé : - donner aux individus et aux groupes les moyens d’acquérir ou de renforcer des comportements favorables à leur santé ; - développer chez les individus le sens des responsabilités pour ce qui est de leur propre santé et celle de la collectivité, et leur aptitude à participer de manière constructive à la vie en collectivité ; - promouvoir le sens de la dignité et de la responsabilité de l’individu en même temps que celui de la solidarité et de la responsabilité collective. Cette réflexion globale sur l’éducation nutritionnelle débouche sur une nouvelle démarche qui prend en compte une vision globale en ce qui concerne la promotion de la santé et préconisent une multitude d’actions qui se coordonnent. 17 Cette réflexion a également été prise en compte par l’état français qui en a fait une véritable préoccupation nationale. V Une préoccupation nationale L’état des connaissances actuel invite à la prudence et suggère de préférer l’éducation alimentaire à l’éducation nutritionnelle, pour prendre en charge les différentes finalités de l’acte alimentaire – son lien à la santé, son lien au plaisir et ses dimensions sociales et symboliques – et pour respecter les différents particularismes alimentaires, sociaux, régionaux, religieux qui contribuent à la construction des identités sociales. L’aspect nutritionnel n’est donc pas le seul pris en compte. Les actions de l’état reflètent tout à fait la nouvelle démarche issue de l’évolution des concepts concernant l’éducation alimentaire : une promotion globale de la santé. Nous verrons dans un premier temps une action à l’échelle nationale, dans un second temps une action à l’échelle locale et enfin nous montrerons en quoi l’école est un acteur privilégié dans cette éducation. 1) Plan National Nutrition Santé 1 a) Contexte Il est aujourd’hui parfaitement établi que l’alimentation et l’état nutritionnel participent de façon essentielle au développement et à l’expression clinique des maladies qui sont aujourd’hui les plus répandues en France, comme dans l’ensemble des pays industrialisés. Conscients de ces enjeux, la France a fait de la nutrition l’une des priorités de sa présidence de l’Union Européenne . Une résolution sur ce thème a été votée lors du conseil des ministres européens le 14 décembre 2000. Le Premier Ministre, dans son discours de clôture des États Généraux de l’Alimentation du 13 décembre 2000, a annoncé le lancement en janvier 2001 d’un Programme National Nutrition Santé (PNNS), coordonné par la Secrétaire d’État à la Santé et aux Handicapés, en lien avec les membres du gouvernement chargés de l’Éducation nationale, de l’Agriculture et de la Pêche, de la Recherche, de la Jeunesse et des Sports et de la Consommation. Il en a fixé les grandes orientations. Le PNNS associe l’ensemble des acteurs publics et privés impliqués dans les champs d’intervention retenus : • recherche, formation, et surveillance, • actions de terrain, de promotion, de prévention et de soins, • offre alimentaire, distribution et contrôle. 1 Pour plus de détails, cf. annexe 5 pour l’adresse du site internet. 18 b) Objectif général Le Programme National Nutrition-Santé (PNNS) a comme objectif général d’améliorer l’état de santé de l’ensemble de la population en agissant sur l’un de ses déterminants majeurs qu’est la nutrition. Neuf objectifs nutritionnels prioritaires en terme de Santé Publique 1.Augmenter la consommation de fruits et légumes. Réduire de 25% le nombre de petits consommateurs de fruits et légumes. 2. Augmenter la consommation de calcium. . 3. Réduire les apports lipidiques à moins de 35% de l’apport énergétique journalier. 4. Augmenter l’apport glucidique à plus de 50% de l’apport énergétique journalier, en particulier l’apport en fibres de 50% 5. Réduire la consommation d’alcool à moins de 20g par jour dans la population générale. 6. Réduire de 5 % la cholestérolémie moyenne 7. Réduire de 10 mm de Hg la pression artérielle systolique des adultes 8. Réduire de 20 % la prévalence du surpoids et de l’obésité. Interrompre l’augmentation de la prévalence de l’obésité chez les enfants 9. Augmenter l’activité physique journalière c) Principes généraux La population doit pouvoir bénéficier d’actions concrètes et visibles permettant, en améliorant l’état nutritionnel, de réduire le risque de maladies et d’optimiser l’état de santé et la qualité de vie, à tous les âges de la vie. Les mesures et actions développées dans le cadre du PNNS s’appuient sur certaines règles : • Le choix alimentaire individuel est un acte libre. • Outre sa vocation biologique, l’acte alimentaire a une forte charge culturelle, sociale, affective ; c’est, en France, un moment de plaisir revendiqué. Le PNNS, prend en compte la triple dimension biologique, symbolique et sociale de l’acte alimentaire. • Le choix d’aliments et de plats comme le comportement alimentaire global doivent être éclairés par une information scientifiquement valide, compréhensible, et indépendante. • Les actions mises en œuvre par le PNNS ont comme finalité de promouvoir, dans l’alimentation, les facteurs de protection et de réduire l’exposition aux facteurs de risque vis-à-vis des maladies chroniques et, aux niveaux des groupes à risque, de diminuer l’exposition aux problèmes spécifiques. • Le PNNS prend en compte tant la composante apports nutritionnels que la composante dépenses, en particulier la dépense énergétique liée à l’activité physique, afin de maintenir un équilibre entre les deux. 19 d) Six axes stratégiques v Informer et orienter les consommateurs vers des choix alimentaires et un état nutritionnel satisfaisant ainsi qu’éduquer les jeunes et créer un environnement favorable à une consommation alimentaire et un état nutritionnel satisfaisant. Nombres d’ouvrages offrent la possibilité au public de s’informer tels que La santé vient en mangeant, le guide alimentaire pour tous2 qui fonctionne par portraits-types reflétant une diversité de comportements alimentaires (ex : la bouffe, je m’en fous / Je prépare à manger pour ma famille / Je ne cuisine pas…). Cette approche tient compte des constats actuels selon lesquels il n’y a pas de modèle alimentaire unique qu’il faudrait « inculquer » comme norme. v Prévenir, dépister et prendre en charge les troubles nutritionnels dans le système de soins v Impliquer les industriels de l’agroalimentaire et la restauration collective ainsi que les consommateurs au travers des associations de consommateurs et de leurs structures techniques v Mettre en place des systèmes de surveillance alimentaire et nutritionnelle de la population v Développer la recherche en nutrition humaine : recherches épidémiologiques, comportementales et clinique v Engager des mesures et actions de santé publique complémentaires destinées à des groupes spécifiques de population Le Plan National Nutrition Santé reflète tout à fait une perspective d’éducation alimentaire qui s’inscrit dans une promotion globale de la santé incluant de nombreux partenaires. 2) Des exemples d’actions locales Dans l’optique du PNNS, voici trois exemples d’actions locales. a) « Autour de l’alimentation », un projet Saône et Loire en 2001/2002 Depuis 1997, le service de promotion de la santé en faveur des élèves a initié en lien avec de nombreux partenaires, un travail « autour de l’alimentation ».Dans le cadre de ce projet, il apparaît important, si nous voulons avoir un impact, que la sensibilisation autour de ce sujet puisse se faire à tous niveaux en même temps : enfants, adolescents/parents/adultes en général, professionnels de la restauration collective, professionnels de santé, organismes liés à l’agroalimentaire, éducateurs et animateurs en charge de publics jeunes et adultes, organismes de formation, d’où la proposition de créer une dynamique « Autour de l’alimentation » sur l’ensemble du département en travaillant sur ce thème à tous les âges de la vie, en facilitant l’interaction entre publics et 2 Cette publication est consultable sur le net. Cf. annexe 5 pour l’adresse. 20 professionnels de diverses origines. Cette démarche s’inscrit dans une volonté d’aborder l’alimentation de manière globale. b) L’ogre du Nord-Pas-de-Calais « Profigraicaosuglu » : c’est le nom de la formule magique qui vient en aide à un ogre désemparé par son régime alimentaire. Un spectacle permet d’amorcer joyeusement avec des familles des réflexions sérieuses sur les pratiques alimentaires dans une démarche globale de santé. Le programme « Alimentation : pratiques et santé » est né d’une volonté commune du Comité régional d’éducation pour la santé (Cres) du Nord-Pas-de-Calais et de professionnels de structures amenées à faire de l’accompagnement alimentaire. Tous souhaitaient réfléchir à un type d’action d’éducation nutritionnelle novateur dans la région. Fin 2001, le Cres a lancé ce programme, financé par la Drass, la Cram et le Conseil général du Pas-de-Calais dans le cadre du Programme régional de santé « santé cardiovasculaire », sur huit sites. Ce programme a pour objectifs d’inviter les familles à se questionner sur leurs pratiques alimentaires (habitudes et choix, histoire familiale ou régionale), de façon ludique, en prenant du recul sur leur quotidien, sans jugement ni culpabilisation, de trouver elles-mêmes des réponses, de partager leur savoirfaire avec d’autres et de proposer d’autres actions de santé. c) « Mon restau de l’an 2002 » C’est un programme d’éducation nutritionnelle initié par la ville de Montpellier en partenariat avec l’espace de prévention Epidaure du Centre régional de lutte contre le cancer. Destiné aux enfants fréquentant les écoles élémentaires de la ville, il réunit les personnels techniques de la cuisine centrale, les agents et équipes d’animation des restaurants scolaires, ainsi que les enseignants et représentants des parents des écoles concernées. Les objectifs poursuivis sont de deux ordres. Il s’agit, d’une part, de travailler avec les enfants afin d’améliorer leurs connaissances sur l’alimentation, la nutrition et les métiers de la restauration, et également de développer leurs aptitudes sensorielles et gustatives. D’autre part, le programme se fixe comme objectifs de développer, chez les enfants, des compétences qui dépassent le cadre de la nutrition, et de la restauration scolaire pour s’inscrire dans une dynamique plus large de promotion de la santé. Ces compétences se déclinent autour de trois axes : aiguiser l’esprit critique, favoriser l’expression et la créativité, et inscrire les enfants dans une démarche citoyenne de « bien vivre ensemble ». Cette action rejoint tout à fait le Bulletin Officiel Spécial n°9 du 28 juin 20011. (cf. annexe 6 pour un extrait) Ce n’est qu’un tout petit échantillon des nombreuses actions engagées dans ce domaine et répondant tout à fait à la démarche engagée de promotion globale de la santé. 1 Ce bulletin est consultable sur le net. Cf. annexe 5 pour l’adresse. 21 Après avoir vu que l’éducation alimentaire était préconisée d’un point de vue national et relayée par de nombreuses actions locales, nous allons nous intéresser à l’école qui est, bien entendu, un acteur privilégié dans cette volonté d’éduquer l’homme à s’alimenter. 3) L’école élémentaire, un acteur privilégié a) Rôle de l’école et son évolution Si l’école a toujours transmis des savoirs, fidèle en cela à sa mission initiale, elle est devenue progressivement un lieu affirmé d’éducation, également concerné par la transmission de savoir-faire et de savoir-être. L’élève est en effet d’abord un enfant. Il est impossible de s’adresser à lui sans l’appréhender dans sa globalité et en particulier à partir de son inscription spécifique dans la vie et le monde. S’intéresser à ses comportements alimentaires semble tout aussi important que de se préoccuper de son hygiène, d’un état de fatigue lié à un manque de sommeil ou de son niveau de socialisation. Ce sont en effet des paramètres qui interfèrent sur sa disponibilité face aux apprentissages mais qui participent également à cette construction progressive d’un souci de soi, responsabilisé, qui conduit à l’autonomie de l’individu devenu adulte. L’éducation nutritionnelle s’inscrit directement dans cet objectif d’éducation globale. Rappelons que cet enseignement est explicitement présent dans les instructions officielles : l’approche concrète de l’hygiène alimentaire, du développement des capacités sensorielles mais aussi d’une prise de conscience des risques de certains comportements est au programme de l’école élémentaire en sciences. Par ailleurs, en éducation civique, il est question d’une éducation à la consommation, au respect de l’environnement mais aussi à la solidarité. Il est important que ces contenus ne suscitent pas de simples « leçons » mais s’inscrivent dans l’élaboration d’attitudes et de pratiques de la vie quotidienne. Pourquoi l’école doit-elle prendre en charge une éducation censée s’intégrer dans les modes de vie familiaux ? Les raisons sont multiples. Il ne s’agit pas d’une éducation de substitution. Au contraire, cet apprentissage s’appuiera forcément sur des pratiques existantes qui ne sauraient être globalement contestées. Cette démarche doit favoriser une forme de partenariat confiant avec les familles : échange de recettes, fabrication de mets appartenant à diverses cultures, rencontres autour d’expositions, de collation préparées par les enfants à partir d’une collaboration des familles avec l’école. L’évolution du rôle de l’école dans l’éducation alimentaire et plus généralement dans l’éducation à la santé est comparable à l’évolution de l’éducation alimentaire elle-même. L’éducation à la santé à l’école s’est mise en place en France par couches successives. Les enseignements ont une antériorité à travers celui de l’hygiène. A la fois en réaction et en complément à ceux-ci, 22 l’institution a encouragé les établissements et les personnels à prendre des initiatives, à engager les « actions » en majorité orientées vers l’information et la prévention. Puis, un accent nouveau a été porté sur l’école promotrice de santé à travers le cadre et les rythmes de vie. Cette évolution se retrouvent dans les instructions officielles, véritables références pour l’enseignant. b) Les Instructions Officielles (1995-2002) Ce sont à partir des années 70 que l’on voit apparaître dans les programmes une véritable préoccupation vis-à-vis de l’éducation à la santé. A partir de 1985, de nouveaux programmes pour l’école élémentaire témoignent d’une étape supplémentaire. Sur un plan général, ils sont marqués par le retour à un enseignement de l’éducation civique dont l’intitulé même traduit la volonté retrouvée de l’école d’éduquer aussi à travers les enseignements. Outre « les règles d’hygiène, de sécurité, de tenue », ses contenus comportent diverses questions en rapport avec la nouvelle conception, large, de la santé. En sciences et technologie, il est stipulé que « fort de ses manipulations et des expériences qui lui sont rapportées ou montrées, l’enfant perçoit les problèmes de responsabilité que pose la transformation des rapports de l’homme et de son milieu (santé, environnement) ». Au total, à la fin de la décennie 80, les programmes comportent un grand nombre et une grande variété de questions en rapport avec la santé. Dans les programmes de 1995 (cf. annexe 7), cette éducation apparaît progressive en tenant compte du vécu de l’enfant et de son développement. Au cours des cycles 1 et 2, l’enfant manipule, cherche, découvre, explore… L’éducation passe par la découverte, la prise de conscience progressive de son corps et le développement sensoriel qui lui permettra de se situer dans le monde qui l’entoure. Goûter, sentir, toucher, voir, entendre se concrétisent dans l’éducation nutritionnelle . De nombreux autres thèmes transversaux viennent se greffer à l’éducation nutritionnelle comme l’éducation au risque, les prises de conscience sur la fatigue, le sommeil, les rythmes de vie… Durant le cycle 3, l’enfant est mieux dans son corps qu’il connaît un peu mieux et qu’il maîtrise davantage. Il est plus ouvert et plus disponible pour des apprentissages intellectuels. A ce niveau, pourront être affinés et complétés des apports de connaissances de type scientifique. En effet, bien que ces savoirs « scientifiques » soient abordés dès le cycle des apprentissages premiers, on les retrouvent dans les 3 cycles de l’école élémentaire mais de plus en plus approfondis. Les nouveaux programmes de 2002 (cf. annexe 8) poursuivent les objectifs des précédents tout en étant conscients qu’il ne peut s’agir que d’une sensibilisation qui va s’effectuer tout au long de la scolarité et que c’est au travers de 23 l’interdisciplinarité et de la transversalité des disciplines que l’enfant va prendre conscience de son corps et de ses besoins. Pour une éducation à l’alimentation, les programmes recommandent d’associer des moments de découvertes, de classification par les cinq sens et par le mode de consommation, la constitution de règles d’hygiène à respecter et l’éducation du consommateur pour la lecture des étiquettes. Ces nouveaux programmes sont dans la lignée d’une promotion globale de la santé qui ne cloisonnent en aucun cas les différentes composantes de cette éducation ; ainsi un des thèmes abordés au cycle 3 s’intitule : « Le corps humain et l’éducation à la santé ». De plus, cette éducation se poursuit à plus long terme au collège et au lycée témoignant dès lors d’une prise en compte d’un processus long et continu. c) Exemples d’activités réalisables en classe L’éducation alimentaire touche toutes les disciplines et fait donc appel à la pluridisciplinarité des enseignements. Pour être tout à fait dans une démarche d’éducation nutritionnelle incluse dans une promotion globale de la santé, il faut que ce soit un véritable problème à résoudre, avec ses composantes scientifiques, mais aussi plus largement humaines. Les activités n’émanent pas alors de la directivité plus ou moins déguisée du maître, mais de la logique de ce problème : les élèves savent ce qu’ils cherchent, sont lucides quant aux investigations à entreprendre, pour lesquelles l’enseignant fournit outils et conseils. Ainsi ce qui prime ce n’est pas les thèmes traités mais le mode du traitement des activités. Voici quelques pistes d’activités à adapter selon les cycles. Je présente les différentes activités par disciplines seulement par souci de présentation et de classement mais en aucun cas, cela doit empêcher l’interdisciplinarité et la transversalité entre les matières. De plus se pose le problème des intitulés des disciplines qui sont différents pour chaque cycle. Pour simplifier la présentation, je précise les équivalences : - Français regroupe Le langage au cœur des apprentissages (cycle 1) Maîtrise du langage et de la langue française (cycle 2) Maîtrise du langage et de la langue française + Littérature (dire, lire, écrire) et Observation réfléchie de la langue française (cycle 3) - Vivre ensemble regroupe Vivre ensemble (cycles 1 et 2) Education civique (cycle 3) - Mathématiques regroupent Découvrir le monde (cycle 1) Mathématiques (cycles 2 et 3) - Sciences regroupent Découvrir le monde (cycles 1 et 2) Sciences expérimentales et technologie (cycle 3) - Histoire/Géographie regroupent Découvrir le monde (cycles 1 et 2) Histoire et Géographie (cycle 3) 24 - Langues regroupent Langues étrangères ou régionales (cycles 2 et 3) - Arts visuels regroupent La sensibilité, l’imagination, la création (cycle 1) Education artistique (cycles 2 et 3) - Musique regroupe La sensibilité, l’imagination, la création (cycle 1) Education artistique (cycles 2 et 3) ü Français : § Travail d’enrichissement de la langue : recherche d’expressions de la langue utilisant le thème de l’alimentation (avoir une faim de loup, être rouge comme une tomate…), enrichissement du vocabulaire appartenant au champ lexical de l’alimentation (légumes, fruits, ustensiles, actions…) § Littérature : travail sur un album (Bon appétit, Monsieur lapin !) ou sur un roman ou encore sur un poème § Travail sur les types d’écrit : les recettes, les affiches publicitaires, les menus, les comptes-rendu… § Production de textes explicatifs, narratifs (pour raconter ce qu’ils s’est passé), prescriptifs (les recettes) § Extraire les informations des emballages alimentaires ü Vivre ensemble : § Jouer son rôle dans une activité de dégustation par exemple en adoptant un comportement individuel qui tient compte des apports et des contraintes de la vie collective § Avoir compris et retenu quelques principes d’hygiène personnelle et collective et leur justification : se laver les mains, se tenir à table… § Respecter les règles de la vie commune (respect de l’autre, du matériel, des règles de politesse…) et appliquer dans son comportement vis-à-vis des camarades quelques principes de vie collective (l’écoute, l’entraide, l’initiative…) lors d’une discussion sur les goûts de chacun § Découvrir des cultures et des pays différents, par l’intermédiaire de leur cuisine spécifique pour apprendre à mieux se connaître et à vivre ensemble (éducation à la tolérance et à l a citoyenneté). ü § § § § § § § § Mathématiques : Elaboration de recettes avec mesure et pesée de quantités Conversion des unités de masse Tri et classement d’aliments Elaboration et comparaison de collections par correspondance terme à terme lors de la préparation d’une table Résoudre des problèmes liés aux achats Construire un calendrier des saisons et y coller des vignettes de fruits et légumes Construire des tableaux comparatifs (prix, valeurs nutritives…) Lecture de tableaux à double-entrée 25 § Travail sur les pourcentages, les fractions, à l’aide de supports concrets (boîte à fromage, tableaux…) ü Sciences : § Le corps de l’enfant et l’éducation à la santé : - hygiène bucco-dentaire - hygiène alimentaire (équilibre alimentaire) § Le goût : ateliers de dégustation § Composition des aliments § Les 7 groupes d’aliments § L’appareil digestif § Les 5 sens § Les répercussions de l’alimentation sur la santé (obésité, diabète, cholestérol, régimes) § Etude : du blé au pain (culture en classe, visite de boulangerie, moulin) § Reconnaissance des fruits et légumes vus en classe § Connaître les habitudes alimentaires d’autres pays § Histoire/Géographie : L’histoire de l’alimentation : évolution des menus… Témoignages de personnes âgées quant à leur alimentation au début du siècle Evolution des repas Evolution des techniques (notamment agricoles) Connaissance des régions (à travers les plats régionaux) Action de l’homme sur le paysage pour ses besoins alimentaires (défrichements, cultures en terrasses, rizières, bocages) Usines agroalimentaires locales ü § § § Langues : Les mots de l’alimentation Jeux sur le thème de l’alimentation Situations liées à l’alimentation (restaurant, marché…) ü § § § Arts visuels : Compositions avec des graines Fruits et légumes en pâte à sel pour approvisionner la marchande Observer des tableaux de nature morte : Arcimboldo, Cézanne, Millet, Warhol, Van Gogh… Compositions avec des morceaux de fruits et de légumes pour représenter un personnage Composer et décorer un menu Estamper avec des moitiés de fruits ou de légumes « Déguiser » des fruits pour les humaniser ü § § § § § § § § § § 26 ü Musique : § Répertoire de comptines et chansons sur le thème de l’alimentation En plus de ces activités en classe, il est nécessaire d’aller sur « le terrain » : § Visiter un marché, des commerces § Examiner les menus de la cantine et commenter l’équilibre alimentaire § Visiter une cuisine de restaurant De nombreux ouvrages offrent des pistes pour traiter de ce thème (cf. annexe 9). Mais la véritable démarche qui s’inscrit dans le processus d’une promotion globale de la santé se traduit par une pédagogie de projet. Travailler par projet, c’est permettre à l’enfant de s’approprier les apprentissages et de prendre conscience de leurs enjeux. Le projet représente une motivation et un élément fédérateur pour le groupe classe. Il est important qu’il naisse d’un besoin, d’une situation problème à résoudre et fait donc de l’enfant l’acteur, le décideur et l’organisateur de ses apprentissages. Par exemple : projet 1 Préparer des goûters variés (cf. annexe 10) L’école doit s’efforcer d’être un acteur sans conteste dans l’éducation à l’alimentation en variant ce thème que l’on réduit souvent à la biologie. Bon nombre de pistes sont à explorer concernant ce sujet. B] Pratique de classe Le grand paradoxe des stages par rapport à ce que j’ai exposé précédemment , c’est que je ne peux en aucun cas avoir une démarche de promotion de globale de la santé efficace sachant que les stages ne durent que 3 semaines chacun. De plus, il est difficile durant ce laps de temps d’aborder toutes les dimensions de l’acte alimentaire avec les enfants. I 3 semaines en CE2 (1er stage en responsabilité) 1) Présentation Mon objectif général était le suivant : faire prendre conscience aux élèves de l’importance d’une alimentation équilibrée pour être en bonne santé. Je disposais d’1h30 par semaine pour mener à bien mon projet. Les enfants n’avaient, semble-t-il, jamais abordé ce thème. Je me suis appuyée sur une mallette pédagogique de l’école éditée par le groupe agroalimentaire Nestlé surtout pour les nombreuses planches d’aliments qui ont servi de point de départ pour la séquence. 27 2) Séquence et prolongements Voici le tableau synthétique du déroulement de la séquence1 SEQUENCE Cycle : 3 Niveau : CE2 OBJECTIF(S) SEANCES 1 2 3 4 LES ALIMENTS Discipline : sciences expérimentales et technologie Nombre de séances prévues : 5 / réellement faites : 7 - Réaliser divers classements d’aliments en explicitant et justifiant son ou ses critères - Comprendre le rôle de chaque groupe d’aliments et les matières nutritives apportées - Comprendre la notion d’un repas équilibré TITRES Recueil des représentations initiales concernant le rôle des aliments et travail de classification avec les planches d’aliments Emergence des groupe d’aliments avec la présence de couleur et justification des aliments qui sont dans le même groupe Recherche de ce qu’il faut au corps pour qu’il grandisse et ait de l’énergie (tient compte des propositions des enfants) et association des besoins du corps trouvés avec les groupes d’aliments) = rôle des aliments A partir d’un texte, recherche sur les matières nutritives contenues dans les aliments Evaluation normative sous forme de QCM Travail sur les repas équilibrés 5 6 Prolongements : Comme chaque groupe d’aliments apporte des matières nutritives différentes et nécessaires au corps, il faut manger de tout. De plus, dans chaque groupe d’aliments, il y a des équivalences qui permettent de varier notre alimentation. Travail sur les apports caloriques, toujours en vue d’équilibrer l’alimentation. Etudes de certains problèmes liés à l’alimentation : obésité, malnutrition pour bien montrer le lien entre notre alimentation et notre santé. Etudes de différents plats régionaux ou nationaux … 3) Analyse de pratique La séquence débute par un recueil des représentations qui n’est pas sans poser quelques problèmes de gestion de classe. En effet, les question posées sont très ouvertes : « Pourquoi mangeons-nous ? » et « A quoi servent les aliments ? » et appellent de multiples réponses et de multiples formulations par 1 Les fiches de préparation sont présentes en annexe 11. 28 les enfants. Il est parfois difficile de faire comprendre à des élèves que leur idée est la même. Cela prend donc beaucoup plus de temps que prévu. Mais pour rendre ce travail pertinent, il aurait fallu faire un retour sur ces représentations entre la 5ème et 6ème séance pour compléter les idées de départ. Pour les phases de recherche de classement, je les ai mis par groupe de 4 sachant qu’ils étaient 31 et qu’ils n’avaient pas l’habitude de travailler en groupe vu l’espace de la classe. La première recherche était très peu guidée, c’est-àdire que je leur donnais les planches d’aliments et qu’ils devaient trouver un classement en définissant eux-mêmes les critères. Le deuxième classement faisait travailler un autre aspect du classement : je leur imposais de regrouper les cartes qui avaient la même couleur et de trouver un titre pour chaque groupe ainsi constitué. Aussi, devaient-ils prendre de la distance par rapport à leur propre classement effectué lors de la séance précédente. Ces deux recherches débouchèrent sur la justification du classement adopté par les nutritionnistes. La deuxième phase a fait découvrir aux élèves le rôle des groupes d’aliments. Dans la séance 3, les enfants savaient déjà que notre corps a des besoins, on les a listé. Puis ils ont associé un besoin du corps, quelque peu sélectionné par l’enseignant lors du relevé de leurs propositions au tableau, à un groupe d’aliments trouvés la séance dernière. La séance suivante, approfondie encore le rôle des aliments avec les matières nutritives contenues dans chaque groupe. L’évaluation n’a pas bien fonctionné car je pense que je suis allée trop vite : les rapport d’inclusion (groupe bleu produits laitiers les os calcium) sont difficiles à construire et à percevoir. Mais cette évaluation a eu lieu le dernier jour de mon stage. Je n’ai pas pu mener une remédiation qui aura repris certaines notions déjà vues mais sous d’autres aspects. Dans cette première approche, pour moi, de l’enseignement concernant l’alimentation, je me suis fixée trop d’objectifs notionnels pour 3 semaines de stage et j’ai bien peur que si je refaisais une évaluation aujourd’hui dans cette même classe, rien n’ait vraiment été retenu comme le montrait déjà l’évaluation faite à la fin des 3 semaines. Par ailleurs, l’objectif général n’est pas atteint. Il fallait sûrement rester modeste dans les objectifs poursuivis et introduire les autres dimensions de l’acte alimentaire et non pas seulement l’aspect nutritionnel. II 10 jours en toute petite et petite section (2ème stage en responsabilité) 1) Présentation : Mon objectif général était de faire prendre conscience aux enfants que pour reconnaître les aliments et plus particulièrement les fruits et les légumes, on utilise différentes parties du corps dans un ordre particulier : les yeux, puis les doigts puis le nez et la bouche/langue ; ce sont les organes des sens. Malheureusement, ayant eu des problèmes de santé, je n’ai fait que la moitié de 29 mon stage et je n’ai pas pu expérimenter les activités les plus intéressantes concernant mon projet. Les enfants de petite section étaient répartis en trois groupes. Différentes activités étaient menées parallèlement. 2) ü Activités faites et suite envisagée : Ateliers en groupe qui se sont étalés sur 3 jours afin que les 3 groupes passent Activités de langage :Discussion avec l’enseignante pour voir l’étendue des connaissances des petits sur les fruits et les légumes (« connaissez-vous des fruits, des légumes ? », « quels sont ceux que vous avez déjà mangé ? ») Activités de langage : Les tout petits entourent les fruits et les légumes qu’ils aiment. Activités mathématiques : collage de gommettes pour compléter leur fiche de préférence (TP et P), travail en lien avec l’écriture des nombres 1 et 2, reconnaissance des fruits et des légumes à partir de leur silhouette… ü Temps collectif : Lecture d’image : travail sur l’affiche de la reproduction du tableau : Vendeuse de marché de Joachim Bencklaer. Travail de rappel de ce qui a été vu ensemble : nommer les fruits et les légumes. Activité de langage : faire le bilan sur les fruits et les légumes apportés par les enfants Dégustation de fruits et de légumes : l’enseignante remplit simultanément un tableau des préférences pour chaque enfant (j’aime, je n’aime pas, je ne veux pas goûter). Activités sportives : jeu chanté : « tous les légumes » avec reprise du vocabulaire des fruits et légumes. Des livres étaient à leur disposition portant sur le thème : Le jardin potager (Héliadore, Galimmard-Jeunesse, 2001), Pomme (Valat, Gallimard, 1989), Vive les pommes (Weninger et Möller, Nord-Sud, 2001) ou encore Mon jardin, mon potager(May, Bilboquet/Valbert, 2001). J’avais également un projet en arts visuels et pour cela j’avais demandé à la famille que leur enfant apporte un fruit ou un légume qu’il aimait bien. Les légumes et fruits apportés serviraient de matériau pour leur production en arts visuels. Durant la première semaine, les enfants avaient amené divers fruits et légumes que nous avons répertoriés tous ensemble. Mon projet était le suivant : dans une assiette en carton blanche, faire à l’aide des morceaux de légumes et de fruits, apportés par les enfants eux-mêmes, un bonhomme. Pour garder une trace de leur travail, l’appareil photo numérique aurait été d’un grand secours ; tout cela en vue de faire une affiche. La dégustation était juste une étape découverte pour les enfants et j’envisageais de faire d’autres jeux sensoriels pour mettre en évidence l’implication de tous les sens dans la reconnaissance d’un fruit ou d’un légume(jeux de kim : 30 reconnaissance qu’avec la bouche, qu’avec le toucher…). Pour montrer que les yeux sont parfois trompeurs, je voulais utiliser les eaux aromatisées incolores au citron, à la pomme et à la fraise. 3) Analyse de pratique La première phase de ce projet était plutôt faite pour que tous les enfants aient à peu près les mêmes connaissances en matière de fruits et légumes courants sachant que cela dépend beaucoup de l’environnement familial. Les enfants ont pu goûter, lors de la dégustation, certains des fruits et légumes évoqués ensemble sans analyser le processus selon lequel on reconnaît les aliments. D’ailleurs cette séance de dégustation n’a pas laisser assez de liberté aux enfants, étant contrainte de prendre en note pour leur fiche personnalisée de préférences. Il aurait fallu rendre plus actifs les enfants en leur faisant coller leur étiquette-prénom sur une grande affiche lorsqu’ils aimaient tel ou tel fruit ou légume. Je n’ai donc pas pu me servir de ces fiches pour faire un retour dessus à la fin des 3 semaines et ainsi montrer aux enfants qu’ils connaissaient plus de fruits et de légumes qu’au début et qu’ils en avaient goûté davantage. Mon projet n’a pas été mené à son terme et les enfants ne sont pas rentrés dans la phase d’analyse prévue durant les 10 jour restants qui aurait ainsi permis de sortir de la seule expression d’opinion (j’aime/ je n’aime pas). Pourtant, les enfants et les familles semblaient « changer leurs habitudes alimentaires » ; en effet, dans cette école c’étaient les parents à tour de rôle qui étaient chargés de fournir le goûter pour toute la classe. Durant la deuxième semaine, une maman a amené des fruits et tous les enfants ont pris plaisir à reconnaître les fruits et a les dégusté au grand étonnement des Atsem. Les arts visuels auraient aussi permis de toucher, de « jouer » avec la texture de certains fruits qui effraient comme par exemple le kiwi et peut-être d’associer plaisir avec les fruits et légumes. Dans ce stage, je n’ai pas pu introduire la notion souhaitée mais j’ai pu explorer ce qui me manquait lors de mon premier stage : l’aspect affectif et social véhiculé par la prise d’aliments. 31 Conclusion L’acte alimentaire apparaît comme une activité indispensable pour vivre, mais il ne peut se limiter à une simple réponse aux besoins physiologiques de chacun. Nos choix alimentaires se révèlent dépendants de réalités pratiques, telles que le budget disponible, le temps que nous pouvons consacrer à la préparation des repas et aux repas eux-mêmes, la disponibilité des aliments. Ces choix sont également liés à la représentation que nous nous faisons de la « bonne alimentation », source de plaisir guidé par nos goûts, expression d’une culture à laquelle nous avons été initiés dès le plus jeune âge, insertion au sein d’une communauté dont un des rites le plus fréquent est celui de la prise du repas en groupe. Par conséquent, l’alimentation ne se réduit pas à sa seule dimension nutritionnelle. Lorsque nous nous intéressons à ce thème, nous devons prendre en considération tous les aspects liés à l’acte alimentaire. C’est l’écueil dans lequel était tombée l’éducation nutritionnelle : un modèle préventif qui repose sur une vision mécaniste du corps humain qui doit être entretenu et préservé de tout élément qui pourrait l’endommager et où la responsabilité individuelle est seule sollicitée par l’expert, qui dit autoritairement ce qu’il convient de faire. Pour ce faire, les ambitions éducatives en matière de nutrition doivent être resituées dans un mouvement plus large de médicalisation de la société. L’éducation nutritionnelle s’inscrit en effet dans un processus de promotion globale de la santé après une évolution en lien avec les progrès de la recherche dans ce domaine. La politique actuelle en témoigne comme le montre cet extrait de la circulaire n°98-237 (BO n°45 du 24/11/1998) : « l’éducation à la santé doit s’inscrire dans un projet éducatif global. Elle doit commencer très tôt, car beaucoup de comportements favorables à la santé s’acquièrent d’autant plus aisément qu’ils font l’objet d’un apprentissage précoce. L’éducation à la santé doit trouver pleinement sa place dans le projet d’école ou d’établissement, instrument privilégié de la prise en compte cohérente de la santé dans l’enseignement et la vie scolaire. » De nombreuses actions sont entreprises. Mais face à la multitude d’actions de terrain menées ici et là, et aux trop nombreux messages, il s’avère nécessaire aujourd’hui, d’asseoir un ensemble enfin cohérent de messages validés par des experts indépendants, d’inscrire ces actions dans le temps, d’instaurer une prise de conscience collective autour de quelques repères simples et de promouvoir une démarche en différents lieux et en différentes circonstances (milieu scolaire, milieu familial, restauration collective, établissements de santé…). Dans cette optique, nous retrouvons d’ailleurs le Plan National Nutrition Santé. La réflexion menée à travers ce mémoire m’a fait prendre conscience de la nécessité d’une programmation qui va bien au-delà d’une seule année scolaire. L’équipe pédagogique a pris plus de sens pour moi en n’incluant pas seulement les enseignants de l’école : famille, médecins scolaires, nutritionnistes,… En créant 32 une cohérence, nous pouvons peut-être influer sur les pratiques des enfants, tout en étant conscient que le chemin est encore long pour arriver à une véritable éducation alimentaire où les individus deviennent des mangeurs éclairés, capables d’effectuer des choix alimentaires bons pour leur santé, tout comme d’apprécier toutes sortes de mets dans leur dimension culturelle et sensorielle. 33 Bibliographie TAVERNIER (Raymond), Enseigner la biologie et la géologie à l’école élémentaire, Bordas pédagogie, 2001. RAOULT-WACK (Anne-Lucie), « Dis-moi ce que tu manges… », Découvertes Gallimard, 2001. MORGUET (Brice), Je sais ce que je mange, Magnard Education à la citoyenneté, 2001. BAUDIER, BARTHELEMY, MICHAUD, LEGRAND, Education nutritionnelle : équilibres à la carte, CFES (la santé en action : guide méthodologique et pratique pour la santé), 1995. LARUE (Robert), Ecole et santé : le pari de l’éducation, Hachette Education, CNDP, 2000. POULAIN (Jean-Pierre), Manger aujourd’hui : attitudes, normes et pratiques, Editions Privat, 2001. La Santé de l’homme n°358 (mars-avril 2002), dossier : de l’alimentation à la santé, CFES. Articles : - CHIVA (Matty), Evolution de l’alimentation des enfants et des adolescents au cours des dernières années. - BAROU (Jacques), Alimentation et société. - LACROIX (Brigitte), Alimentation et santé. 34 ANNEXE 1 I Extrait de Enseigner la biologie et la géologie à l’école élémentaire, Tavernier ANNEXE 2 FICHE 1 : SANTALIM, bien manger pour bien être1 Cadre général En 1987, un programme de sensibilisation et d’éducation pour la santé voit le jour sous l’impulsion de cinq partenaires (du département de la Loire) ayant mis en commun leurs compétences : la Caisse primaire d’assurance maladie, la Mutualité, l’Association départementale de promotion et d’éducation sanitaire et sociale, l’Union départementale des associations familiales et l’Udac. Il doit son nom à l contraction des deux mots : Santé et Alimentation. Son objectif principal est d’INFORMER, d’Eduquer, mais surtout de RESPONSABILISER la population, celle-ci réapprenant à s’alimenter sainement d’une part, en modifiant son comportement alimentaire, et d’autre part, en approfondissant ses connaissances en matière d’hygiène alimentaire. Pour mener à bien ce programme, ses responsables s’organisent : • En un comité technique chargé de définir les buts poursuivis, la stratégie d’action et d’élaborer les documents nécessaires à la réalisation de l’opération. Différents supports pédagogiques sont ainsi créés, tels une plaquette santé et alimentation donnant des conseils simples pour bien manger et bien vivre au quotidien (…) ou des fiches pédagogiques, différents dossiers techniques adaptés à chaque tranche d’âge. • En un comité de pilotage regroupant les présidents ou directeurs de chacun des organismes et prenant en charge l’aspect « politique » de l’opération. Quatre sites ont participé au programme SANTALIM : Firminy, Le ChambonFeugerolles, Montbrison et Bourg-Argental. Dans chacun de ceux-ci, divers professionnels et acteurs de terrains se sont associés et impliqués : les médecins du travail et les médecins scolaires, des enseignants, des animateurs de centres sociaux, des sociologues, des infirmières, des diététiciennes… L’action Nous décrirons l’action menée sur Le Chambon-Feugerolles de novembre 1989 à juin 1990. Au Chambon-Feugerolles, le programme SANTALIM a débuté par une soirée d’information sur le thème « Le cancer et l’alimentation ». Celle-ci a réuni de nombreux Chambonnaires, soucieux de l’hygiène alimentaire. 1 extrait de Education nutritionnelle :équilibres à la carte CFES II ANNEXE 2 suite SANTALIM s’est ensuite poursuivi dans trois quartiers représentatifs de la ville (…), à partir des écoles primaires, des centres sociaux et de loisirs, des centres de soins. L’action s’est déroulée en trois phases : • Une phase d’étude du comportement et des habitudes alimentaires réalisée auprès de 90 personnes représentatives de la population des trois quartiers. (…) • Une phase de sensibilisation et d’action éducative auprès de la population : - Milieu scolaire : la plupart des établissements ont travaillé avec les enfants sur le thème de l’alimentation, sous forme d’apports théoriques, de jeux, de recherches…(…) - Centres sociaux : un groupe de mamans pour la plupart étrangères a mis au point une plaquette présentant des menus maghrébins accompagnés de conseils alimentaires. Celle-ci a été présentée lors d’une réunion débat en présence d’une diététicienne, d’un médecin arabe du quartier, d’un pharmacien et d’une infirmière du centre de soins, et s’est terminée par la fabrication d’une marionnette en légumes faisant participer 350 enfants. Il y a également eu, en collaboration avec un club de retraités, la création d’une exposition sur l’évolution de l’alimentation de 1900 à nos jours. - Centre ville : de nombreuses animations ont été mises en place : une conférence grand public sur la prévention du diabète ; plusieurs tables rondes ayant pour thème l’alimentation, des rencontres avec des nutritionnistes et une conférence sur « Alimentation et équilibre ». • Une phase de communication : l’ensemble des travaux réalisés a été présentés sous forme d’exposition à la bibliothèque municipale pendant quinze jours et dans le cadre d’une journée de foire avec un stand d’information et de prévention. L’évaluation Le partenariat a été une réussite : aucun document ou décision n’a été accepté sans l’accord de l’ensemble des organismes participant. De plus, les différentes actions menées ont permis de rassembler, autour de ce thème, divers professionnels de santé qui étaient déjà des intervenants locaux (…) et qui ont pu continuer l’échange ultérieurement. Autre point positif : c’est la première fois que Français et Etrangers participaient ensemble à des actions de santé. Celles-ci ont permis un échange interculturel bénéfique pour la vie des quartiers dans l’avenir. III Approche SANITAIRE Autour : Ø des règles d’hygiène et de propreté Ø des polluants chimiques potentiels et de leurs conséquences sur l’environnement Approche NUTRITIONNELLE Côté « RAISON » Autour : Ø de la qualité nutritive des aliments Ø de l’équilibre alimentaire Ø des alimentations « alternatives » Ø des dérives alimentaires et conséquences sur la santé Approche ORGANOLEPTIQUE Côté « PLAISIR DE MANGER » Autour : Ø des cinq sens Ø de la dégustation et de l’assaisonnement des plats Ø de la présentation des plats Ø de la variété des aliments et des plats Ø de la découverte des aliments ANNEXE 3 Autour d’un repas, QUELLES APPROCHES EDUCATIVES peut-on avoir ? En mettant en place des actions éducatives, ateliers, animations… Approche CULTURELLE Autour : Ø des aliments ou de la restauration dans les différents arts : littérature, sculpture, peinture, cinéma Ø des cultures alimentaires étrangères Approche CONVIVIALITE Autour : Ø des relations amicales entre enfants Ø du cadre (aménagement et décoration de la salle) Ø de l’accueil par le personnel Approche CIVISME et CITOYENNETE Autour : Ø de l’accompagnement de l’enfant dans son épanouissement (autonomie) Ø des règles de vie (droits et obligations) des enfants durant le repas Ø des relations éducatives (attention et autorité) avec les enfants, de la gestion des cas difficiles Approche SOCIALE et SOCIETALE Autour : Ø des métiers de la chaîne agroalimentaire Ø des préparation culinaires locales ou étrangères (habitudes alimentaires) Ø de l’environnement, du développement durable, des enjeux mondiaux Ø du tri sélectif et du recyclage des déchets IV ANNEXE 4 FICHE 2 : Céréales et légumes secs d’ici et d’ailleurs1 Marie-Pierre Lefevre, conseillère en économie sociale et familiale, Centre socioculturel de Koenigshoffen, Strasbourg Projet aboutissant à une exposition animation dans deux faubourgs strasbourgeois : Koenigshoffen et Cronenbourg entre mars et mai 1993. Constats Un double constat : - perte de savoir-faire alimentaires, par effet de mode, de mode de vie, par désir d’intégration de façon plus ou mois marquées pour les populations françaises ou d’origine étrangère ; - consommation excessive de viandes, de graisses et de sucres, appauvrissement et déséquilibre de la variété alimentaire. Une double ambition : mettre simultanément en valeur deux approches différentes autour du thème des céréales et des légumes secs : l’une s’inscrivant dans le cadre d’une dynamique d’éducation nutritionnelle, l’autre s’appuyant sur un point de vue culturel, à partir de la rencontre et de l’échange de traditions et d’usages autour de ce thème. Objectifs Valoriser des pratiques alimentaires en montrant comment elles ont eu une importance historique à travers le temps et les différentes cultures. Souligner la pertinence actuelle, en terme de santé, de la pérennité de ces savoir-faire. La démarche mise en œuvre à Koenigshoffen est une démarche participative et « enracinée » dans le temps. La commission Santé, associant des bénévoles et des salariés, a élaboré la trame du projet et l’a étoffé. Elle a sollicité le soutien de personnes ressources dans les domaines nutritionnel, historique, économique, humanitaire… Le fait d’avoir des ateliers alimentation « Cuisine aux céréales » et « Manger autrement » depuis septembre 1990 a facilité l’enracinement du projet : préparation de spécialités à base de céréales dans le cadre des assemblées générales, des fêtes de quartier, du Carnaval 1993… De même, l’implication des femmes participant aux cours de français dès septembre 1992 sous forme d’échanges de recettes lors de séances pratiques, et la mise en œuvre d’un recueil avec l’aide d’u graphiste, ont orienté la prise en charge des ateliers en cours de l’exposition. Pendant un an, les « céréalistes » et les « légumignonnes » ont « préparé le terrain » auprès de leurs familles et amis par rapport à ce thème, amenant des mamans à prendre en charge certaines de leurs actions, sollicitant des 1 extrait de Education nutritionnelle :équilibres à la carte CFES V ANNEXE 4 suite professionnels pour leurs animations. L’atelier-journal du Secteur Enfant a assuré la couverture interne de l’opération. Un week-end de travail, en janvier 1993, a réuni les intervenants bénévoles et salariés intéressés des deux centres, sur le contenu et la mise en place de l’exposition dans chaque structure, en présence de la diététicienne et du graphiste. Conclusion Sept micro-projets dans les écoles (…) ont permis de sensibiliser des enfants de CP à CM1, aux céréales et aux légumes secs. De dix à vingt heures par classe ont été consacrées à la réalisation de panneaux, de jeux, d’éléments décoratifs présentés et utilisés lors de l’exposition animation. Une démarche globale : - mettant en évidence, dans le contenu, la convergence et la complémentarité des approches historique, nutritionnelle, économique et humanitaire ; - présentant céréales et légumes secs du semis à l’assiette, dans des ambiances spécifiques ; - associant à la dynamique des personnels de 7 à 77 ans, de cultures et d’origines diverses, disposant chacun d’un savoir, d’un savoir-faire dans ce domaine, et permettant la rencontre et la collaboration avec des professionnels. VI ANNEXE 5 Sites internet ü www.sante.gouv.fr Ce site donne tous les détails du Plan National Nutrition Santé. (mot clé : nutrition). ü www.eduscol.education.fr/D0117/default.htm Ce site expose les recommandations en matière de restauration scolaire et notamment la circulaire relative à la composition des repas servis en restauration scolaire et à la sécurité des aliments (juin 2001). ü www.lasantevientenmangeant.inpes.sante.fr/ au guide élaboré dans le cadre du PNNS. On accède VII ANNEXE 6 Extrait du Bulletin Officiel de l’Education Nationale BO spécial n°9 du 25 juin 2001 « Les enfants ne prennent en général dans le cadre scolaire qu’un nombre restreint de leurs repas annuels ; l’école ne peut donc à elle seule assurer l’équilibre alimentaire des enfants. En revanche, elle peut assurer une formation élémentaire du goût, en multipliant les occasions de découverte et une éducation nutritionnelle en expliquant la nécessité de la diversité alimentaire et les inconvénients des stéréotypes. Il n’est pas question de favoriser un modèle déterminé, même s’il a la faveur des élèves, mais de montrer que la diversité des modèles dans des cultures différentes répond à des choix ancestraux justifiables. Dans ce souci de libérer la créativité des cuisiniers et des gestionnaires, les nouvelles recommandations visent à ne conserver comme contraintes que ce qui est rigoureusement indispensable. On peut couvrir les besoins des élèves avec de nombreuses combinaisons alimentaires. Aucun schéma unique ne s’impose. L’aspect éducatif du repas est peut-être trop souvent oublié ou négligé. Il est bon d’en souligner l’intérêt chez les jeunes enfants qui peuvent acquérir tôt des notions simples sur les principaux aliments, en même temps qu’un bon comportement alimentaire. En, les habitudes alimentaires s’acquièrent dès le plus jeune âge. Il est donc important de commencer l’éducation nutritionnelle quand les comportements et les attitudes n’ont pas encore été établis. L’école jour un rôle important, notamment dans l’éveil au goût chez les élèves. Elle doit les aider, en complémentarité avec les familles, à choisir leurs propres aliments chaque fois qu’ils peuvent le faire en dépit des tendances, des médias et des traditions et de leur faire connaître les effets de l’alimentation sur la santé. L’éducation nutritionnelle à l’école doit être reliée à la vie sociale et tenir compte des différentes cultures. Il ne faut pas oublier que le goût s’apprend. Il se forme, s’éduque, s’acquiert et ceci tout le temps, tout au long de la vie et dans un contexte culturel et sociologique donné. Il est également une possibilité de point d’ancrage et de point de départ pour toute une série d’activités. Le repas de midi n’est pas seulement la prise de nutriments ou de calories. C’est aussi le moment où les élèves, après l’attention du matin, se détendent et où les échanges sociaux sont favorisés. L’alimentation est nécessaire physiologiquement, indispensable au bien-être et à la santé, mais elle ne doit pas être vécue uniquement comme une obligation. Elle doit devenir un moment privilégié de découverte et toujours rester un moment de plaisir. Il serait souhaitable d’organiser autour de l’alimentation des animations dont les grands axes pourraient être : VIII ANNEXE 6 suite - d’éduquer le goût des élèves, valoriser le patrimoine culinaire et promouvoir des produits de bonne qualité gustative et nutritionnelle ; - de mettre en avant un vocabulaire précis concernant les saveurs, surtout auprès des enfants qui font des confusions afin qu’ils soient capables de définir clairement leurs sensations ; - d’expliquer les secrets de fabrication des aliments et leur composition ; - de déguster des spécialités de pays ; - de découvrir les odeurs, les épices et les essences. Il importe d’impliquer tous les personnels de l’école ou de l’établissement ainsi que les familles dans cette démarche d’éducation. Il est en particulier recommandé d’utiliser le temps d’interclasse de midi pour organiser des ateliers d’expression artistiques et culturels consacrés à l’éducation du goût, avec le concours possible d’intervenants extérieurs qualifiés, sans que cela ne conduise à écourter le temps de la prise alimentaire. Ces actions peuvent être également développées à d’autres occasions de la vie scolaire dans le cadre du projet d’école ou du projet d’établissement, lors des cours ou à l’occasion d’activités ou d’animations diverses. » IX ANNEXE 7 Programmes de 1995 en matière d’alimentation : ü Cycle 1 : ð Découverte du monde vivant : première approche des grandes fonctions du vivant (croissance, locomotion, nutrition, reproduction) ð Sensibilisation aux problèmes d’hygiène et de consommation, éducation à la sécurité : (…) approche concrète de l’hygiène de l’alimentation (régularité des repas, composition…) ; (…) développement des capacités sensorielles (goût, toucher, odorat, ouïe, vue) ;première approche des problèmes de consommation : les différents types de commerce (grands surfaces, marchés), publicité. (…) ü Cycle 2 : ð Le monde du vivant : le corps de l’enfant et l’éducation à la santé àimportance des règles de vie : hygiène (habitudes quotidiennes de propreté, d’alimentation, de sommeil, de rythme de vie…) ð La vie en commun : respect du bien commun et du cadre de vie à éducation à la consommation ü Cycle 3 : ð Sciences et technologie : le corps humain et l’éducation à la santé à les fonctions de nutrition à conséquences à court et à long terme de notre hygiène (actions bénéfiques ou nocives de nos comportements) ð Géographie : le travail de l’homme et l’organisation de l’espace français à quelques grands aspects de l’activité des hommes : exemple d’une exploitation agricole, d’une usine, d’un centre commercial ou d’un centre de loisirs… (nature de l’activité, infrastructures, personnels, voies de communication, marchés, impacts sur l’environnement). ð Education civique : le devoir de responsabilité face aux problèmes liés à la santé et à la protection qu’on lui doit. X ANNEXE 8 Programmes de 2002 en matière d’alimentation ü Cycle 1 :Etre capable de : ð Décrire, comparer et classer des perceptions élémentaires (tactiles, gustatives, olfactives, auditives et visuelles) ð Reconnaître des manifestations de la vie animale et végétale, les relier à de grandes fonctions : croissance, nutrition, locomotion, reproduction ð Connaître et appliquer quelques règles d’hygiène du corps (lavage des mains…), des locaux, (rangement, propreté), de l’alimentation (régularité des repas, composition des menus) ü Cycle 2 : Avoir compris et retenu : ð Quelques caractéristiques du fonctionnement de son corps (croissance, mouvement et squelette, alimentation, dents) ; ð Les différents caractéristiques des cinq sens ; ð Quelques règles d’hygiène relatives à la propreté, à l’alimentation et au sommeil. ü Cycle 3 : Le corps humain et l’éducation à la santé L’éducation à la santé est liée à la découverte du fonctionnement du corps en privilégiant les conditions de maintien du corps en bonne santé : ð Première approche des fonctions de nutrition (digestion, respiration et circulation) ð Conséquences à court et long terme de notre hygiène ; actions bénéfiques ou nocives de nos comportements (notamment dans l’alimentation). Avoir compris et retenu : ð Les principes élémentaires des fonctions de nutrition et de mouvement à partir de leurs manifestations chez l’homme. XI ANNEXE 9 Liste d’ouvrages : ð 50 activités pour apprendre le goût à l’école, Laurent Sicre, CDDP Tarn et Garonne, CRDP Midi-Pyrénées, Pédagogie ð Pour une pédagogie de projet en PS – MS : L’alimentation, Edition Magnard 2002 ð 40 recettes et fiches d’activités 3-4 ans, Edition EBLA, 1998 ð Se nourrir, 64 planches d’activités, GS – CP – CE1, Education Retz ð 1001 idées pour la classe : miam ! le goût, Magnard De nombreux dossiers sont consacrés à la nutrition dans : ð ð ð ð ð Education enfantine Journal des Instituteurs La classe La classe maternelle TDC XII ANNEXE 10 ð Trame du projet : Séquence 1 : je veux devenir un fin gastronome Séance1 : je découvre d’autres saveurs sucrées : les sirops à l’eau Séance 2 : je perçois les différentes saveurs des fruits pressés Séance 3 : je reconnais 4 saveurs de base Séance 4 : je goûte des biscuits salés et des biscuits sucrés Séance 5 : je tartine des aliments et je les goûte Séquence 2 : je veux répondre à une commande Séance 1 : je sers des tartines à mes amis Séance 2 : je produis une commande de biscuits variés Séance 3 : je lis et je réponds à une commande de biscuits Séquence 3 : je veux fabriquer un imagier Séance 1 : je fabrique l’imagier de ce qui se mange Séance 2 : je fabrique l’imagier de ce qui se boit Séance 3 : je trie et je classe l’imagier Séance 4 : je fais le menu des goûters de la semaine XIII ANNEXE 11 Date : 24/11/03 Classe : CE2 Discipline : sciences et technologie : SVT Séance : 1 Durée : 1 h Titre de la séquence : les aliments Objectif général : prendre conscience de l’importance d’une alimentation équilibrée pour être en bonne santé Objectifs spécifiques : - réaliser divers classements d’aliments - expliciter et justifier son ou ses critères de classement - formuler des hypothèses Matériel : mallette : les aliments, source de bien-être et de découvertes, cycle 3 Nestlé Déroulement temps forme de travail 15’ binôme feuille photocopiée 8 séries de 4 planches divers cahier d’essai, une enveloppe avec des cartes d’aliments contenu observation ⇒ recueil des représentations initiales : Pourquoi mangeons- nous ? par écrit sur le cahier A quoi servent les aliments ? de brouillon Que mangez-vous le plus souvent ? 15’ collectif Mise en commun au tableau : « Nous mangeons pour : » / « les aliments servent à : » 15’ Groupes de 4 (7) et un groupe de 3 ⇒ travail de classification avec les planches d’aliments consigne : je vais vous donner une enveloppe par groupe, elle contient des cartes d’aliments ; vous allez regrouper ces Ecrit dans le aliments en plusieurs catégories. Attention vous devez justifier cahier d’essai votre classement. 15’ collectif Mise en commun : comment avez-vous classés ? Expliquez votre choix. Prise de conscience qu’il y a autant de classements possible que de critères retenus. XIV ANNEXE 11 suite Date : 29/11/03 Classe : CE2 Discipline : sciences et technologie : SVT Séance : 2 Durée : 30 min Titre de la séquence : les aliments Objectif général : prendre conscience de l’importance d’une alimentation équilibrée pour être en bonne santé Objectifs spécifiques : - Donner un titre à un classement déjà fait en tenant compte de tous les éléments qui composent la collection - Formuler des hypothèses Matériel : mallette : les aliments, source de bien-être et de découvertes, cycle 3 Nestlé Déroulement temps forme de travail 5’ collectif feuille photocopiée colorier les cartes d’aliments divers une enveloppe avec des cartes d’aliments, les planches de cartes originales ou les couleurs sont visibles, feuille A4 contenu observation ⇒ mettre en évidence avec les cartes originales de la présence de couleur en haut à droite consigne : vous allez regrouper les cartes qui ont la ou les mêmes couleurs, puis vous trouverez un titre pour chaque ensemble. Tous ceci apparaîtra sur le feuille que je vous distribue : titre : aliments : 6 colonnes identiques 10’ Groupes de 4 (7) et un groupe de 3 Recherche dans les mêmes groupes que la séance précédente. 15’ collectif Mise en commun au tableau : propositions des différents groupes : groupe des « bleu » / groupe des « rouge »/ groupe Cas des « vert »/ groupe des « jaune »/ groupe des « beige »/ groupe particulier de l’eau des « marron » Prkoi a-t-on regroupé tels aliments ensemble ? ex les aliments bleus, les aliments jaunes… 5’ collectif puis individuel Traces écrites : qu’avons-nous vu aujourd’hui ? Les aliments sont répartis en 6 groupes : …. Copier sur le cahier d’essai XV ANNEXE 11 suite Date : 01/12/03 Classe : CE2 Discipline : sciences et technologie : SVT Séance : 3 Durée : 1 h Titre de la séquence : les aliments Objectif général : prendre conscience de l’importance d’une alimentation équilibrée pour être en bonne santé Objectifs spécifiques : - Formuler des hypothèses - Chercher des informations dans un texte Matériel : mallette : les aliments, source de bien-être et de découvertes, cycle 3 Nestlé Déroulement temps forme de travail 10’ collectif 10’ 10’ individuel collectif feuille photocopiée doc. les apports des aliments + conclusion divers cahier d’essai contenu ⇒ consigne : Vous avez dit lundi dernier que les aliments font grandir et donnent de l’ énergie (on espère) ; à votre avis, que faut-il au corps pour qu’il grandisse et ait de l’énergie ? - avoir des aliments qui permettent aux os de grandir et d’êtres solides - avoir des aliments qui permettent aux muscles de se développer - avoir des vitamines pour être en pleine forme - avoir de l’énergie pour longtemps - avoir de l’énergie pour un effort immédiat - de l’eau ( idées des réponses qui devraient émerger) Le corps a besoin de beaucoup de choses pour être en bonne santé. ⇒ Consigne : associer maintenant un besoin du corps avec un groupe que l’on a fait samedi. Qui peut me rappeler les différents groupes ? (les groupes st écrits au tableau) Mise en commun : les élèves complètent ou corrigent sur leur cahier d’essai : - Les produits laitiers pour les os (bleu) - Les viandes/œufs/poissons pour les muscles (rouge) - Les fruits et les légumes pour les vitamines, les fibres, les sels minéraux et « tout bien faire fonctionner » dans son corps (à rajouter après les matières grasses apportent aussi des vitamines) (vert) - Les matières grasses pour l’énergie qui dure longtemps (jaune) - Les féculents pour l’énergie qui dure longtemps (marron) - Les produits sucrés pour avoir de l’énergie tout de suite (beige) - L’eau observation Le maître note au fur et à mesure les propositions. Ecrit sur le cahier d’essai ⇒ Consigne : Que contiennent ces aliments qui permettent de XVI 10’ Individuel 10’ Collectif 10’ collectif fournir les besoins au corps ? Pour cela , je vais vous distribuer un document. Avec ce doc. vous répondrez à la question posée que je vais écrire au tableau . Mise en commun - produits laitiers : calcium - fruits et légumes :fibres, vitamines et minéraux Réponse sur - matières grasses : lipides, vitamines et acides gras cahier - viandes/œufs/poissons : protéines d’essai - féculents : glucides - produits sucrés : glucides ⇒ que peut-on conclure ? conclusion : les aliments contiennent différents sortes de matières nutritives : - les protéines constituent les « matériaux de construction » du corps ; on dit alors que le groupe viandes/œufs/poissons sont des aliments bâtisseurs. - Les glucides contenus dans les sucres et les lipides contenus dans les graisses apportent l’énergie nécessaire au corps pour ses mouvements et le maintien de sa température ; on dit alors que les groupes matières grasses, féculents et produits sucrés sont des aliments énergétiques. - Les vitamines et les sels minéraux permettent le bon fonctionnement de l’organisme ; on dit alors que le groupe légumes et fruits sont des aliments fonctionnels. traces écrites : feuille photocopiée où la conclusion est donnée. XVII ANNEXE 11 suite Date : 13/12/03 Classe : Discipline : sciences et Séance : 6 Durée : 30 min CE2 technologie : SVT Titre de la séquence : les aliments Objectif général : prendre conscience de l’importance d’une alimentation équilibrée pour être en bonne santé Objectifs spécifiques : - Connaître les groupes d’aliments, sur quoi ils agissent et les matières nutritives apportées - Comprendre la notion d’un repas équilibré Matériel : mallette : les aliments, source de bien-être et de découvertes, cycle 3 Nestlé Déroulement temps forme de travail 15’ individuel 15’ feuille photocopiée évaluation : les apports des aliments + les repas équilibrés divers contenu observation Evaluation normative Feuille QCM collectif puis individuel Repas équilibrés Travail sur les repas équilibrés Feuille les repas équilibrés Prolongement : importance d’avoir alimentation équilibrée donc variée une XVIII LES APPORTS DES ALIMENTS 1) Retrouve la ou les couleurs qui correspondent à chaque aliment : a. les crevettes : ________________________________________________ b. les petits pois :________________________________________________ c. la soupe de légumes :___________________________________________ d. la compote de pommes :________________________________________ e. la margarine :_________________________________________________ f. un croque-monsieur :___________________________________________ g. un œuf :_____________________________________________________ h. la purée :____________________________________________________ i. les lardons :___________________________________________________ 2) Entoure la bonne réponse : La viande et le poisson t’apportent de quoi construire tes muscles. VRAI ou FAUX 3) Entoure la bonne réponse : Le groupe des produits sucrés est de couleur rouge ? VRAI ou FAUX 4) Que t’apportent les aliments du groupe des fruits et légumes ? ___________________________________________________________________________ ___________________________________________________________________________ ___________________________________________________________________________ _____________________ 5) Entoure l’intrus parmi ces trois aliments : a. un pain au chocolat b. des biscuits apéritifs c. la pâte à tartiner Pourquoi est-ce un intrus ? Explique ton choix : ___________________________________________________________________________ ___________________________________________________________________________ ____________________ 6) Cite quatre aliments du groupe des produits « rouge » : _____________________________________________________________________ _____________________________________________________________________ ____________________ 7) Entoure l’aliment qui ne contient pas de calcium : – le riz au lait – le roquefort – la confiture 8) Entoure la bonne réponse : Les produits du groupe des féculents t’apportent : - de l’énergie de « courte durée » - de l’énergie de « longue durée » - aucune énergie 9) Entoure la bonne réponse : Pour renforcer ses os, il faut consommer des produits sucrés. VRAI ou FAUX 10) Entoure la bonne réponse : Les produits du groupe des matières grasses t’apportent : - des lipides - des glucides - des minéraux XIX - L’éducation nutritionnelle : comment l’aborder à l’école élémentaire ? RESUME : Malgré les politiques anciennes de santé publique, les problèmes liés à l’alimentation persistent. Il apparaît donc toujours nécessaire d’éduquer la population à s’alimenter. Ce constat « d’échec » conduit à remettre en cause les pratiques d’éducation mises en place jusqu’à aujourd’hui. L’école, véritable lieu d’éducation autant que d’instruction, a un rôle primordial dans cette éducation qui doit s’acquérir dès le plus jeune âge. L’école tient compte de la réflexion sur ce thème et adopte une démarche de promotion globale de la santé où les actions se multiplient avec de nombreux partenaires. L’important est de veiller à une cohérence entre toutes ces actions et tous ces partenaires pour espère un jour un changement des pratiques des enfants qui deviendront des adultes éclairés. MOTS CLES : - alimentation éducation alimentaire actions partenariat interdisciplinarité