Stockage de CO2 dans les fonds marins
L'Institut norvégien de recherche sur l'eau (NIVA) a
prévu d’injecter fin juillet, à titre expérimental, cinq
tonnes de CO2 liquéfié dans la mer à 110 km au large de
Kristiansund (ville côtière de Norvège). Le but de cette
opération est d’étudier l’impact de cette infiltration,
censée être pérenne dans des eaux très profondes. Avec,
à terme, l’idée de se débarrasser du CO2 émis par nos
sociétés dans des "poubelles" de ce genre. Greenpeace a
exprimé son opposition à ce projet et compte être
présent sur les lieux au moment propice.
Le projet initial portait sur une quantité plus
importante (60 tonnes de CO2) et devait se
situer au large d’Hawaï. Mais les groupes de
défense de l’environnement de l’île ont fait
capoter le projet, mettant en lumière les
risques d’acidification des fonds marins
(lire Nature n°401, p.315, 1999). Ces
recherches sur la séquestration du CO2 ont
été initiées en 1997 par le Japon, les Etats-
Unis et la Norvège. Force est de constater
que, outre les risques environnementaux
qu’elle sous-tend et son manque de
rentabilité économique, cette idée de stocker le CO2 et
de le transmettre aux générations futures n'est qu’une
fuite en avant qui laisse un goût amer. Elle détourne de
l’attention sur la nécessité de réduire avant tout les
émissions et encourage la poursuite de l’utilisation des
combustibles fossiles. Par ailleurs, la Norvège viole de
ce fait des accords internationaux car nul ne peut
garantir l’absence d’impacts de ces rejets .
Dans le dernier numéro de La Recherche, dédié à la
mer, Paul Tregeur, directeur de l’Institut universitaire
européen de la mer à Brest, explique que "certains
modèles [de stockage massif de CO2 dans les fonds
marins] prévoient un abaissement du pH océanique
global" et cette acidification peut avoir des
conséquences lourdes au niveau des grands fonds.
D’aucuns répondront que l’utilité de ce projet est
justement d’étudier ses conséquences. Or, le passé nous
a souvent montré que nos œuvres dépassent nos
attentes. L’océan a beau être un réservoir naturel de
CO2, une injection locale et massive dans des couches
superficielles modifiera l’équilibre actuel et pourra
conduire à un relargage rapide du CO2. Certains
préconisent alors d’enfouir le CO2 plus profondément
(entre 1500 et 3000 mètres) pour que ce déséquilibre
n’intervienne pas avant quelques centaines d’années.
Pour en savoir plus sur les principales mesures
palliatives proposées pour refroidir la planète sans
réduire les émissions de gaz à effet de serre, des plus
délirantes aux plus effrayantes, cf. Ben Matthews,
Climate Engineering, disponible sur
http://www.chooseclimate.org/cleng/mf.html
Sommet de la Terre : préparatifs
L’idée d’un échec au Sommet de Johannesburg a
dominé la réunion préparatoire des Nations Unies au
cours de laquelle les délégations de 25 pays ont essayé
de construire un agenda pour les gouvernements. Alors
que les pays européens soutiennent des objectifs clairs
pour limiter l’impact du développement sur
l’environnement (notamment le
climat), les Etats-Unis résistent. Ces
derniers préfèrent une formule
imprécise qui leur permettra
d’échapper encore aux standards
environnementaux
internationaux(mais les USA ne sont
pas seuls en cause).
La mise en application du
Protocole de Kyoto doit néanmoins
être abordée lors du Sommet de la
Terre. Ce sera l’occasion d’évaluer l’avancement des
différents pays signataires. Le Dr. R. K. Pachauri,
Président du Groupe d’experts Intergouvernemental
sur l’Évolution du Climat (GIEC), reste pessimiste sur
les résultats possibles : il estime que le sommet se
focalisera davantage sur des sujets comme la pauvreté
ou l’éducation, sans faire de liens directs avec
l’environnement.
De leur côté, les ONG et associations françaises se
préparent pour ce sommet et les évènements parallèles
ne manqueront pas d’avoir lieu. Certaines d’entres elles
(dont le RAC-F) ont participé à l’élaboration du Livre
Blanc du gouvernement qui servira de support pour la
France à l’occasion de ce sommet. Ce document
contient la philosophie française du développement
durable mais hélas ne satisfait pas globalement les
ONG : Le groupe "energie" par exemple critique
fermement "l’oubli" d’envisager des politiques
energétiques durables pour la France. Trop de fois, le
développement durable semble servir de prétexte pour
un développement économique sans que les autres
piliers (environnement et social) ne soient
suffisamment pris en compte. Cet aspect est celui qui
transparaît de manière générale dans toutes les craintes
relatives à la réussite du Sommet.
International
"la seule véritable solution
est de remplacer les
énergies fossiles avec des
énergies non-polluantes
combinées à une baisse de
la consommation
énergétique", Truls
Gulowsen, Greenpeace
Norvège.
Ratification, où en est-on ?
En date du 22 juillet, il y avait 76 Parties au Protocole de Kyoto, parmi lesquelles 23 de l’Annexe 1, comptabilisant
ensemble 36,13% des émissions de 1990. Les derniers pays à avoir rejoint les signataires sont la Bulgarie (mi-
juillet) et dernièrement, le Brésil. Le gouvernement Polonais souhaite ratifier avant août. De façon générale, une
vague de ratifications devrait avoir lieu juste avant le Sommet (incluant peut-être la Corée et l’Inde). Avec les
élections prochaines en Nouvelle Zélande, la ratification initialement prévue pour août a été reportée mais ne
devrait pas être remise en cause. Le Premier Ministre australien a, quant à lui, profité de l’imminence du Sommet
pour annoncer que son pays ne ratifierait pas, s'alignant sur la position de l'Administration Bush. Une étude
récente de l’association Environment Business Australia conclut pourtant que le retrait australien risque
d’entraîner de lourdes pertes économiques pour le pays. L’Australie et les Etats-Unis ont annoncé conjointement
le lancement d’un programme de recherche et développement sur les stratégies de réduction des émissions et du
dialogue commercial appelé Climate-Action, qui renforce le fossé entre ces deux pays et le reste du monde.
En savoir plus sur : www.cen.org
Négociations
Infos de Serre - Août 2002 - N° 4- p3