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INSTITUT NATIONAL DE FORMATION SUPERIEURE
PARAMEDICALE DE CONSTANTINE
Cours de Bactériologie préparé et édité par
M. Ryad TAOUTAOU (PEPM)
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Génétique Bactérienne
I-
Historique :
L'histoire de la génétique a connu cinq grandes étapes :
 En 1880 : Gregor Mendel publie ses Essais sur les hybrides naturels, ouvrage
dans lequel il énonce les lois fondamentales de la génétique.
 En 1910, Thomas Hunt Morgan et Calvin Bridges étudient la mouche du vinaigre
(Drosophila melanogaster) et ils formulent la théorie chromosomique de
l'hérédité.
 En 1941, George Wells Beadle et Edward Tatum, à partir de résultats obtenus
avec Neuropsora crassa, montrent que les gènes gouvernent la synthèse des
enzymes.
 En 1944, Oswald Avery, Colin MacLeod et Maclyn McCarty prolongent les
travaux de Frederick Griffith sur Streptococcus pneumoniae et ils établissent le
rôle de l'ADN en tant que support des caractères héréditaires.
 En 1953, James Watson, Francis Crick, Maurice Wilkins et Rosalind Franklin
élucident la structure de l'ADN.
II-
Introduction :
L'étude des procaryotes a initialement permis d'établir le rôle de l'ADN (Avery,
MacLeod et McCarty). Ultérieurement, elle a conduit au développement des bases de la
méthodologie génétique et à l'établissement de nouvelles stratégies telles que le clonage
des gènes ou l'utilisation d'outils génétiques (plasmides, phages, cosmides, etc.).
La génétique bactérienne a pour objet l'étude du génome et de sa variabilité et elle
débouche sur d'importantes applications biotechnologiques (voir l'enseignement de
Biologie moléculaire).
III-
Structure du génome Bactérien :
Jusqu'en 1985, la structure du génome bactérien n'était comme que par
l'intermédiaire d'analyses génétiques, c'est à dire l'établissement de cartes
génétiques. Ces études, réalisées sur un petit nombre d'espèces accessibles à
de telles méthodes, permettaient de conclure que le génome des bactéries était
formé d'un chromosome unique circulaire.
A partir de 1985, grâce au développement de la technique d'électrophorése en
gel en champ pulsé (ECP), l'étude de la structure physique du génome a pu être
étendue à un nombre croissant de bactéries. En 1989, deux exceptions à la règle
du chromosome unique circulaire étaient publiées. Premièrement, il était
démontré que le génome de Borrelia burgéorferii était formé d'un chromosome
unique mais linéaire d'environ 1 Mb et de plasmides circulaires et linéaires
(1,2). Deuxièmement, l'existence de deux chromosomes circulaires de 3 et 0,9 Mb
était décrite dans le génome de Rhadobacter sphaeroides (3). Trés vite,
d'autres exemples de génomes formés de chromosome linéaire ou de chromosomes
multiples étaient retrouvés chez d'autres bactéries
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1- Notion de variabilité :
La variabilité du génome bactérien est due aux mutations et aux transferts horizontaux
de gènes. Toutes ces modifications génétiques sont la source de la variabilité génomique
qui est à la base de l'évolution.
2- Notion de mutation :
La stabilité des caractères héréditaires repose sur l'intégrité de l'information portée par
l'ADN. L'ADN est soumis en permanence à des agressions physiques et chimiques
susceptibles de l'altérer. Pour remédier aux dommages subis, la cellule bactérienne
possède des systèmes enzymatiques de réparation : réparation par excision - resynthèse,
réparation par recombinaison et réparation SOS (voir l'enseignement de Biologie
moléculaire). En dépit de ces systèmes de réparation la molécule d'ADN peut être
modifiée ce qui donne lieu aux mutations.
Les mutations sont des événements rares, stables et héréditaires. Elles se traduisent par
l'apparition de cellules différentes du type normal (ou sauvage) par un ou plusieurs
caractères. Ces cellules sont appelées des mutants. Les mutants peuvent posséder un
avantage sélectif et être sélectionnés dans certaines conditions environnementales.
a- Définition de la mutation bactérienne :
Une mutation est une modification brusque, rare, aléatoire et héréditaire du génome
bactérien. Il n'y a pas de différence de nature entre la mutation d'une cellule procaryote
et la mutation d'une cellule eucaryote.
b- Révélation de la présence d’une mutation :
Il est nécessaire d'utiliser une technique sélective. Par exemple, un milieu contenant un
antibiotique pour identifier un mutant résistant à cet antibiotique, un milieu contenant
un facteur de croissance pour mettre en évidence un mutant auxotrophe pour ce facteur
de croissance, un milieu contenant des bactériophages virulents pour caractériser un
mutant résistant à la lyse, etc.
Un moyen simple de mise en évidence d'une mutation est présenté dans le schéma 1. Une
unique cellule bactérienne sensible à la streptomycine est cultivée dans un bouillon apte
à assurer sa croissance. Par définition, sa multiplication donnera naissance à un clone.
En ensemençant 108 ou 109 bactéries issues de ce clone sur un milieu contenant de la
streptomycine, on peut voir apparaître une ou quelques colonies qui sont donc
constituées de bactéries ayant acquis une propriété nouvelle : celle de résister à la
streptomycine. Ces bactéries sont des mutants capables de transmettre la résistance à la
streptomycine à leur descendance.
c- Différents types de mutation :

Mutations ponctuelles : La substitution d'une base ainsi que la délétion ou
l'addition d'une base conduisent à des mutations ponctuelles.

Mutations par délétion ou insertion ou inversion de séquences : Deux cassures de
l'ADN peuvent survenir et conduire à la perte du segment d'ADN compris entre
ces deux cassures. De telles mutations sont fréquemment létales.
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Des séquences d'ADN peuvent être insérées ou dupliquées ou changées dans leur
orientation. Ces mutations sont dues à des éléments génétiques mobiles tels que des
séquences d'insertion, des transposons, des phages tempérés ou des épisomes (plasmides
pouvant s'intégrer de manière réversible dans le chromosome).
Si le nombre de paires de bases enlevées ou insérées est un multiple de trois le cadre de
lecture n'est pas altéré, mais la protéine est allongée d'un ou de quelques acides aminés
ce qui peut altérer sa fonction.
IV-
Les transferts génétiques :
Un transfert génétique se fait d'une bactérie donatrice de matériel génétique (exogénote)
à une bactérie réceptrice dont le génome constitue l'endogénote. La bactérie réceptrice
peut acquérir des caractères nouveaux ce qui suppose que l'exogénote soit exprimé par
la bactérie réceptrice et qu'il soit transmis à la descendance. Les bactéries ne restent pas
indifférentes à la pénétration d'un ADN étranger et elles mettent en œuvre des
mécanismes de protection connus sous le nom de phénomène de restriction -modification
(voir l'enseignement de Biologie moléculaire). La restriction -modification permet à des
bactéries d'échanger leurs informations génétiques sans qu'elles soient pour autant
capables d'incorporer n'importe quel fragment d'ADN.
Les échanges d'ADN entre bactéries donatrices et bactéries réceptrices s'effectuent selon
trois grandes modalités :
1- Transformation :
La transformation est un transfert génétique au cours duquel de l'ADN bicaténaire,
libre, nu et en solution est introduit dans une bactérie réceptrice, puis intégré au
chromosome.
La transformation a été mise en évidence chez Streptococcus pneumoniae par Frederick
Griffith en 1928, Griffith travaillait alors sur l'épidémiologie des infections à
Streptococcus pneumoniae.
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Découverte de la transformation : travaux de Griffith sur Streptococcus pneumoniae
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2- Conjugaison :
La conjugaison est un transfert génétique unidirectionnel, à déterminisme plasmidique,
qui s'effectue entre des bactéries "sexuellement" différenciées et qui nécessite un contact
étroit entre une bactérie donatrice (ou mâle) et une bactérie réceptrice (ou femelle).
Schéma 01 : Découverte de la conjugaison (Lederberg et Tatum 1946)
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Expérience 1a : (voir schéma 2)
La souche A, auxotrophe pour la thréonine et la leucine, est résistante à la
streptomycine.
La souche B, auxotrophe pour la biotine, la méthionine et la thiamine, est sensible à la
streptomycine.
Une culture mixte des deux souches est réalisée en bouillon puis 108 cellules sont
ensemencées sur deux milieux gélosés dépourvus de thréonine, de leucine, de biotine, de
méthionine et de thiamine. Un des milieux contient de la streptomycine alors que l'autre
en est dépourvu.
Des recombinants prototrophes sont obtenues sur les deux milieux avec une fréquence
normale.
Expérience 1b : (voir schéma 2)
La souche A, auxotrophe pour la thréonine et la leucine, est sensible à la streptomycine.
La souche B, auxotrophe pour la biotine, la méthionine et la thiamine, est résistante à la
streptomycine.
Une culture mixte des deux souches est réalisée en bouillon puis 108 cellules sont
ensemencées sur des milieux gélosés identiques à ceux utilisés dans l'expérience
précédente.
Des recombinants prototrophes sont obtenus sur le milieu sans streptomycine alors
qu'aucune colonie n'est observée en présence de streptomycine.
En comparant les résultats de ces deux expériences il apparaît que la viabilité de la
souche A est nécessaire pour obtenir des recombinants.
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Schéma 02 : Mise en évidence d'une différentiation sexuelle lors de la
conjugaison : première expérience de Willian Hayes (1952)
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Expérience 2 : (voir schéma 3)
Les deux souches parentales utilisées sont sensibles à la streptomycine.
La streptomycine est utilisée pour tuer l'une des deux souches. Le traitement à la
streptomycine ne provoque pas une lyse des cellules et une bactérie tuée par la
streptomycine reste apte à participer à une conjugaison.
Si la souche B est tuée par la streptomycine avant le mélange des deux cultures, des
recombinants prototrophes sont obtenus.
Si la souche A est tuée par la streptomycine avant le mélange des deux cultures, aucun
recombinant prototrophe n'est obtenu.
Comme précédemment, les résultats obtenus montrent que la viabilité de la souche A est
essentielle.
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Schéma 03 : Les différentes modalités de transferts génétiques
L'ensemble de ces résultats conduit à admettre l'existence d'une différenciation sexuelle
entre les souches A et B.
Les bactéries de la souche B sont donatrices de gènes et elles se comportent comme des
bactéries mâles. Elles transfèrent les gènes permettant l'utilisation de la thréonine et de
la leucine, même lorsqu'elles sont tuées par la streptomycine.
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Les bactéries de la souche A, sont réceptrices de gènes. Elles se comportent comme des
bactéries femelles et elles doivent rester vivantes au cours du processus de conjugaison.
Hayes remarqua également que la souche donatrice pouvait donner naissance à un
variant "stérile", incapable de donner des recombinants et se comportant comme une
bactérie réceptrice. Hayes suggéra alors que le caractère donneur était sous la
dépendance d'un facteur de fertilité.
3- Transduction :
La transduction est un transfert de matériel génétique (ADN chromosomique ou extra
chromosomique) par des bactériophages dits transducteurs. Compte tenu de l'étroite
spécificité existant entre les phages et les bactéries, ces transferts se font essentiellement
entre bactéries appartenant à une même espèce.
Il existe deux types de transduction :
a- Transduction généralisée :
La transduction généralisée est due à des phages virulents. Lors du cycle productif,
l'ADN bactérien est détruit par une désoxyribonucléase d'origine phagique. Au moment
de la morphogénèse, un fragment d'ADN bactérien peut être encapsidé par erreur et
venir remplacer l'ADN phagique.
b- Transduction localisée :
La transduction localisée est réalisée par des phages tempérés. Elle ne correspond pas à
une erreur d'encapsidation mais à une excision anormale du prophage. Lorsque le
répresseur est inactivé, un cycle productif succède à un cycle lysogénique.
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V-
Plasmides bactériens :
1- Définition :
Un plasmide désigne en microbiologie ou en biologie moléculaire une molécule d'ADN
distincte de l'ADN chromosomique, capable de réplication autonome. Le terme plasmide
fut introduit par le biologiste moléculaire américain Joshua Lederberg en 19521.
Les plasmides sont généralement circulaires. Ils se trouvent quasi-exclusivement dans
les bactéries, à l'exception notable du plasmide 2Mu que l'on trouve hébergé par le
micro-organisme eucaryote.
Shéma représentant une bactérie contenant des plasmides. 1 ADN chromosomique
(bactérien). 2 Plasmides.
2- Rôle :
Les plasmides participent aux transferts horizontaux de gènes entre les populations
bactériennes, et donc à la dissémination des gènes conférant des avantages sélectifs (par
exemple des résistances aux antibiotiques ou des facteurs de virulence).
La mobilité des plasmides (par conjugaison) au sein des populations bactériennes accroît
le spectre d’hôte des gènes impliqués dans la virulence.
Ces gènes offrent en contrepartie un avantage sélectif pour le plasmide et les bactéries
hôtes. On conçoit donc la nature quasi-ubiquitaire et persistante des plasmides chez les
bactéries pathogènes.
3- Différents types de plasmides :
a- Les plasmides conjugatifs :
On les appelle aussi facteurs de fertilité ou plasmides F. Ces plasmides confèrent à la
bactérie hôte la capacité de synthèse de pili dit sexuels. Par l'intermédiaire de ces pili, la
bactérie porteuse (donneuse) peut transférer une copie du plasmide F par processus de
conjugaison bactérienne. Les plasmides F possèdent au minimum une origine de
réplication et tous les gènes nécessaires à la synthèse des pili et du transfert du plasmide.
Certains plasmides F sont des épisomes, c'est-à-dire qu'ils peuvent s'intégrer dans le
génome chromosomique.
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b- Les plasmides de résistances :
Les plasmides de résistance, appelés aussi plasmides ou facteurs R, codent des
résistances aux antibiotiques et aux métaux lourds.
Ces plasmides peuvent protéger la cellule par différents moyens : La synthèse d'une
protéine de résistance à la substance toxique : elle va neutraliser (en la dénaturant,
hydrolysant, etc.) l'activité toxique de la substance. Les plasmides peuvent aussi
modifier les propriétés d'enveloppe de la cellule et la rendre imperméable à la substance
toxique (comme c'est le cas pour les métaux lourds).
c- Les plasmides métaboliques :
Les plasmides métaboliques portent des gènes permettant l'utilisation de certains
nutriments. Chez E. coli, les gènes portés par ces plasmides sont par exemple :
l'utilisation du citrate comme source de carbone, la production de soufre, l'hydrolyse de
l'urée. Chez les salmonelles on a observé la dégradation du lactose ce qui est totalement
inhabituel chez ce genre bactérien. La plupart de ces plasmides codent la synthèse d'une
ou de plusieurs enzymes.
d- Les plasmides de virulence :
Il s’avère que les bactéries pathogènes hébergent très souvent des plasmides conjugatifs
qui participent à la pathogénicité. Les plasmides de virulence portent des gènes codant
des facteurs de virulence, ayant un rôle dans le pouvoir pathogène des bactéries.
Par exemple les Escherichia coli entérotoxigéniques (ETEC) responsable de la diarrhée
du voyageur (ou tourista) hébergent au moins deux plasmides, l'un portant les gènes
codant un facteur de colonisation, l'autre codant des toxines.
e- Les plasmides de bactériocines :
Ces plasmides codent la synthèse d'une protéine extracellulaire dont la biosynthèse est
létale pour la bactérie productrice ainsi que pour les autres bactéries non -productrices
environnantes.
Cependant, ces plasmides codent aussi une deuxième protéine intracellulaire de
résistance à cette première toxine. Les bactériocines agissent sur des fonctions vitales de
la bactérie.
VI-
Conclusion :
C’est à vous de la faire.
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