INTERVENTION DE M. FRANCK BIANCHERI
ASSOCIATION DES ENTREPRENEURS ITALIENS
Mercredi 15 septembre 2004
Monsieur le Consul Général,
Madame le Président,
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames, Messieurs,
C’est pour moi un grand plaisir, en ma qualité de Conseiller
de Gouvernement pour les Finances et l’Economie, de répondre à votre
aimable invitation à participer ce soir au lancement officiel de
l’Association des Entrepreneurs Italiens qui s’est récemment constituée.
Personne n’ignore à Monaco la part active que prennent les
entrepreneurs italiens à la vie économique de la Principauté. Nul doute
cependant que l’apparition de votre Association marque votre volonté de
contribuer encore plus fortement à l’essor de l’économie monégasque
dont je retracerai dans quelques instants les principales orientations et
caractéristiques. Nous verrons ensemble comment votre Association
pourra contribuer pleinement à des initiatives nouvelles, des projets, des
réalisations.
Vous me permettrez auparavant de rappeler l’ancienneté et
la multiplicité des liens qui unissent Monaco et l’Italie et qui tiennent à la
fois :
- à la proximité géographique ;
- à une Histoire parfois partagée : ai-je besoin d’évoquer à cet
égard tout ce qui rapproche, depuis plus de sept siècles, notre Rocher de
la Ville de Gênes ;
- mais aussi à une culture commune, comme l’attestent les
racines ligures de la langue monégasque.
Chacun sait également que nombreuses sont les familles de la
Principauté qui puisent leurs origines dans votre beau pays et qui se
plaisent donc à s’y ressourcer, notamment à l’occasion des vacances, en
particulier dans le Piémont tout proche.
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Ainsi se sont créés, au fil du temps, des liens très forts,
parfois presque affectifs. Pour bien des raisons, nous ne nous sentons pas
« dépaysés » chez vous, de même que chez nous, vous êtes en « pays de
connaissance ».
Le sont aussi les touristes italiens qui, tout au long de
l’année, découvrent Monaco ou y viennent à intervalles réguliers. Ils
goûtent ici la sécurité des biens et des personnes ainsi qu’une certaine
qualité de vie et nous sommes heureux de les accueillir, appréciant leur
prédilection pour le raffinement, voire la fête. La clientèle touristique
italienne, la première de la Principauté, est sans doute l’une de celles avec
laquelle les acteurs du tourisme monégasque ont le plus d’affinités parce
qu’elle contribue assurément à forger l’âme de Monte-Carlo.
Au-delà de ces Italiens de passage qui emportent de la
Principauté l’image d’une destination touristique proche de leurs
aspirations et dont nous espérons la fidélité des visites, il y a, au cœur de
la population qui a fait souche ici, de nombreux Italiens qui ont choisi de
vivre, travailler ou investir à Monaco.
Vous faites partie de cette communauté dynamique dont
l’esprit d’initiative concourt à l’élan de l’économie monégasque.
Vous savez donc, pour le constater au quotidien, sur le
terrain, que la Principauté est, certes, une terre de loisirs et de tourisme,
mais qu’elle mobilise également toutes ses énergies, tant publiques que
privées, dans le labeur, pour conserver à son économie sa prospérité. Une
conjoncture difficile le lui impose, du fait d’une compétitivité sans cesse
accrue et de son insertion, de fait, dans des ensembles toujours plus
puissants enclins à méconnaître ou sous-estimer les spécificités des petits
Etats, ce qui contraint le Gouvernement Princier à une vigilance sans
relâche dans la défense de nos particularismes.
Dans ce contexte, l’économie monégasque n’a évidemment
pas d’autre choix que celui de la diversification. Au demeurant, cette
diversification est devenue une constante de la politique économique et
financière conduite par le Gouvernement Princier sous la haute autorité
du Prince Souverain tant il serait désormais risqué pour notre économie
de reposer essentiellement sur un ou deux grands secteurs prédominants
-comme ce fut le cas dans le passé pour le tourisme- ce qui l’en rendrait
trop étroitement tributaire.
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Riche et diversifié, notre tissu économique l’est. Nous savons
que l’économie de la Principauté, avec son millier de PME et ses
9,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, se caractérise par son industrie
de pointe, sa technologie, ses innovations et sa place financière
d’excellence. Nous savons que la prospérité de notre modèle économique
est unique quand on la rapporte à la taille de la Principauté. Nous savons
que Monaco est un Etat moderne, qui travaille, qui recherche, qui innove,
qui commerce, qui attire et qui investit à l’international. Nous devons
d’abord cette prospérité à nos entreprises car Monaco est le siège
d’entreprises performantes, largement exportatrices, et pionnières dans
de nombreux domaines.
Ainsi, les échanges commerciaux avec l’Italie sont-ils
importants puisque :
- 13,73 % de nos exportations sont en direction de l’Italie ;
- 34,60 % de nos importations sont en provenance de l’Italie.
L’Italie est de la sorte le troisième pays d’exportation pour la
Principauté et, de loin, le premier pays d’importation.
En effet, Monaco n’est pas seulement une station balnéaire
de luxe ; c’est d’abord un centre majeur d’échanges économiques et
commerciaux, qui a sa raison d’exister au sein du système économique
mondial. L’économie de Monaco n’est pas celle d’un micro Etat
autarcique, c’est celle d’un Etat souverain prospère qui se place au cœur
des échanges internationaux. Les entreprises monégasques sont souvent
leaders sur leur marché ; elles sont innovantes et tournées vers
l’exportation dans le monde entier. A titre d’exemple, tel groupe s’est
développé depuis Monaco en Europe, en Afrique, dans les Caraïbes et
l’Océan Indien, tel autre en Asie ou aux USA.
Je me réjouis de cette réalité. Mais elle m’inspire une
ambition plus élevée encore : celle de voir la Principauté de Monaco
participer pleinement à la compétition économique mondiale. Cette
volonté peut paraître étrange à ceux qui connaissent mal le
fonctionnement de l’économie mondiale. Je suis toutefois persuadé que
Monaco a toutes ses chances aujourd’hui dans l’économie mondiale
parce que, dans cette compétition, l’important n’est pas la taille mais la
volonté et la stratégie.
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De la volonté et de la stratégie, c’est ce qu’il faut à une ville
Etat comme Monaco dans le mouvement de mondialisation de
l’économie. Quel peut être le poids d’un pays de 2 km2 dans un monde
les échanges sont dominés par des multinationales tentaculaires, qui
peuvent parfois employer jusqu’à plusieurs centaines de milliers de
personnes ? Comment nos entreprises peuvent-elles tirer leur épingle du
jeu ? Dans un tel contexte, l’existence même de Monaco ne ressemble-t-
elle pas à un anachronisme ?
Je voudrais vous faire partager trois convictions fortes à ce
sujet.
Ma première conviction est que les petits Etats comme
Monaco bénéficient aujourd’hui d’un contexte extrêmement favorable.
Deux éléments clé nous le confirment :
- D’abord, si l’on doit retenir un fait majeur dans l’économie
mondiale de ces dix dernières années, c’est bien l’apparition fulgurante
de la Chine comme un acteur incontournable capable par sa seule
croissance de séquilibrer des marchés mondiaux de matières
premières, comme celui de l’acier. Or on ne peut pas nier le rôle qu’ont
joué et que jouent des plates-formes géoéconomiques comme Singapour,
et surtout Hong Kong, dans le développement chinois. A la fois au cœur
des échanges commerciaux et à la marge de l’espace politique, Hong
Kong a eu un véritable rôle de levier pour le décollage de l’économie
chinoise, en la préparant à l’ouverture sur l’extérieur grâce à sa position
géographique et à son statut. Je crois qu’un tel exemple est bien la
preuve qu’un micro-Etat peut jouer un rôle sans commune mesure avec
son poids géopolitique, en étant un facilitateur d’échanges commerciaux
et en fluidifiant les relations économiques interrégionales. Au contraire,
la modestie du poids géographique ou géopolitique d’un pays est même
un atout qui lui permet de jouer ce rôle qu’aucun grand pays ne peut
jouer. Il y a bel et bien, à l’échelle de l’économie internationale, des
stratégies de « niche » qui sont autant d’opportunités pour des Etats
comme Monaco.
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- Second fait majeur : le retour de la croissance américaine,
qui s’établit aujourd’hui à un rythme annuel de 4,5 % et qui entraîne
dans le même mouvement le Japon et l’Amérique Latine. Elle
s’accompagne naturellement d’une hausse des taux d’intérêt et d’une
augmentation du besoin de financement de l’économie. Face à ce besoin
de financement des économies en croissance des grands pays, le rôle de
petits Etats, qui sont également des plates-formes financières, n’est pas
négligeable. Ils ont l’opportunité d’aider au financement de la croissance
à travers les placements de capitaux.
Ces deux grandes tendances macroéconomiques constituent
donc de réelles opportunités pour des villes Etats comme Monaco : c’est
dans ces circonstances en effet que leur taille et leur rôle de plate-forme
d’échange deviennent non seulement des atouts à faire fructifier, mais
des éléments clé de la prospérité du commerce mondial.
Ma deuxième conviction s’applique aux règles mêmes de la
mondialisation. Au premier abord, on pourrait en effet se laisser aller à
penser que l’accroissement des mouvements de biens, de services, de
main-d’œuvre, de technologie et de capital à l’échelle internationale ne
peut profiter qu’aux multinationales étrangères et aux économies des
grands pays. Mais c’est oublier que la mondialisation de l’économie se
traduit également par une uniformisation des règles du commerce à
l’échelle mondiale, dans les voies tracées par le GATT et depuis
quelques années par l’OMC. Les règles du jeu deviennent les mêmes
pour tous les acteurs, quel que soit leur pays d’origine. Ainsi désormais
chacun peut concourir dans la grande compétition de l’économie
mondiale, et chacun a sa chance de l’emporter. L’accroissement de la
concurrence, conséquence de cette mondialisation réglementée,
redistribue les cartes et offre de vraies opportunités.
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