Quasi-contact à distance Le concept de force à distance Voyons maintenant comment peuvent se formaliser et surtout se concevoir clairement les transferts d’énergie à distance pour les deux types de systèmes (champ proche non-rayonnant et champ lointain). Plus explicitement, si nous utilisons le vocabulaire précédemment proposé, il s’agit de décrire séparément ; d’une part les systèmes à Induction ou Influence et d’autre part ceux mettant en œuvre la propagation des ondes. Les actions à distances telles que les concevaient Newton, s’expriment essentiellement à travers le concept de force. Pour Newton il s’agissait essentiellement de la gravitation dont l’effet se fait sentir sur des distances considérables. Les forces électriques et magnétiques identifiées séparément dès l’antiquité, révélèrent après le travail méticuleux de Coulomb puis celui d’Ampère des lois de décroissance élémentaires1 identiques à celle de la gravitation à un coefficient près. Ce coefficient de proportionnalité est en faveur des forces électriques, il est énorme à l’échelle des particules2, pourtant nous n’en percevons que de très faibles effets à distance à notre échelle humaine, voyons brièvement pourquoi. Pour la gravitation les effets exclusivement attractifs de chaque masse élémentaire3 s’ajoutent à l’infini et finissent par agir sur l’univers dans son ensemble. Dans le cas électrique, la force qu’une charge exerce sur une autre charge distante est dépendante du signe de la charge. S’il existe dans un volume donné, un équilibre entre les charges positives et négatives et un équilibre entre des courants électriques circulants dans des sens opposés, la force résultante à grande distance relative est très faible. Sur le plan mathématique les champs électriques ou magnétiques prennent une structure multipolaire et leur décroissance avec la distance est d’autant plus rapide que les charges ou les courants opposés sont nombreux et rapprochés les un des autres. La neutralité électrique observée à grande échelle, l’absence de monopoles magnétiques et la distribution aléatoire des moments magnétiques dans la matière ordinaire, font donc que ces forces ne sont usuellement perceptibles que pour de petites distances. Cette courte portée est cependant relative, par exemple les protubérances solaires sont courbées par le champ magnétique issu de l’astre sur des distances se chiffrant en centaines de milliers de kilomètres. Nous montrerons dans la suite, mais cela doit sembler assez intuitif dès à présent pour le lecteur ayant assimilé la notion de distance relative, que la portée dépendra surtout de la taille des dipôles électriques ou magnétiques considérés. 1 Pour le cas magnétique il faut considérer des monopoles virtuels car nous n’observons que des structures dipolaires dans la réalité. 2 La force d’attraction gravitationnelle entre l’électron et le proton de l’atome d’hydrogène est environ 1040 fois plus faible que la force d’attraction électrique qui les unit. 3 Toutes les masses sont positives et s’attirent entre elles ; même l’antimatière a une masse positive. -1www.tmms.co.jp/wireless-power PDF processed with CutePDF evaluation edition www.CutePDF.com Le « miracle » électrique Les forces que nous avons considérées jusqu’à présent ont la même loi de décroissance avec la distance. Toutefois, en dehors de leur intensité relative par rapport à la gravitation, les forces électromagnétiques posent un vrai problème conceptuel. En effet si l’on comprend bien que des masses importantes puissent se constituer naturellement dans l’espace par accrétion progressive de masses s’attirant mutuellement, la situation est tout autre dans le domaine électromagnétique car des charges de même polarité se repoussent. Les fragments d’une masse originelle s’attirent faiblement Les fragments d’une charge originelle se repoussent fortement fortement Fig.1 : Une différence fondamentale entre la gravitation et la force électrique En effet si nous cherchons à réaliser une charge électrique de très grande valeur il faut accumuler des charges élémentaires qui se repoussent avec une force de plus en plus grande au fur et à mesure que se bâtit cette charge macroscopique. Dans la pratique dès que le déséquilibre électrique dans la matière devient infime en proportion du nombre total de charges existant dans les atomes considérés, les charges se repoussent tellement qu’elles commencent à migrer sur les parties les plus éloignées de l’objet que l’on cherche à charger. Si l’on augmente encore la charge, des électrons ou des ions sont alors éjectés dans le gaz ou dans le vide entourant l’objet. On peut ainsi obtenir de relativement grands dipôles mais avec des charges infinitésimales par rapport à celles présentes dans la matière considérée. C’est ce mécanisme qui explique la neutralité électrique observée sur de grandes échelles1. Précisons encore un peu les choses en nous tournant maintenant du côté microscopique et essayons d’imaginer un électron ou un proton à l’aide des concepts classiques. On cherchera par exemple à réaliser par la pensée une bille matérielle portant en surface la charge élémentaire donnée par l’expérience de Millikan : e = 1,6.10-19C. Pour réaliser cette charge en amenant des morceaux infinitésimaux depuis l’infini, il faut réaliser un travail et donc fournir de l’énergie au système et ce d’autant plus que la sphère que l’on veut obtenir est petite2. Par des considérations sur l’énergie on peut cependant définir la taille minimale que l’électron pourrait avoir dans un monde classique. En effet on sait depuis Einstein que l’énergie et la masse sont équivalentes. Techniquement on impose que l’énergie électrostatique totale donne une masse égale à celle mesurée pour l’électron3. Cela nous permet d’obtenir le rayon dit 1 En complément du fait que l’Univers observé est neutre dans sa globalité. Notons en passant qu’aucune expérience n’a encore réussi à trouver une structure interne pour l’électron qui est de fait considéré comme le prototype même de la particule matérielle fondamentale. 3 Pour les matheux on impose : eV=mec2 2 -2www.tmms.co.jp/wireless-power classique de l’électron ; on obtient une valeur de l’ordre de rec=2,8.10-15m. Il est alors possible de calculer le champ au niveau de la surface de l’électron, on obtient E=1,6.109V/m soit plus de un milliard de volt par mètre. On en déduit directement les forces de répulsion au niveau de cette dernière, exprimées en termes de pression on trouve Pe=114Bar. Il est donc miraculeux que l’électron n’explose pas sous l’effet de ses propres contraintes internes. On en déduit que l’électron n’est pas constitué de matière ordinaire et qu’il se passe en son sein des phénomènes d’un autre ordre1. Le rayon classique de l’électron sert de transition entre le monde classique et le monde quantique où de nombreux concepts doivent absolument être remplacés par d’autres notions. Le lecteur ne sera pas surpris d’apprendre que les tailles des noyaux atomiques sont de l’ordre de cette valeur de transition. Il en résulte que l’intérieur du noyau des atomes ne peut être compris que dans le cadre de ces nouveaux concepts mais que par contre les orbitales électroniques ainsi que de nombreux autres phénomènes chimiques peuvent s’expliquer, au moins partiellement, dans le cadre classique. On sait de nos jours que, classés par ordre d’intensité dégressive, les structures atomiques, les liaisons chimiques et de nombreux effets comme la tension superficielle s’expliquent en partie par ces fameux jeux d’attraction/répulsion entre particules chargées élémentaires distantes2. En particulier les forces de contact peuvent s’interpréter comme des forces de répulsion électrostatiques entre les nuages électroniques des atomes et molécules se faisant face dans les matériaux concernés. Les forces n’expliquent pas tout Les forces constituent l’un des concepts fondamentaux de la mécanique classique et restent très présentes dans les théories quantiques bien que dans un sens sensiblement différent. Dans le cadre classique, elles permettent à elles seules de décrire les actions mécaniques instantanées3 à courte distance mais sont insuffisantes pour traiter le cas d’actions qui mettent un certain temps pour atteindre leur objectif. Dans ce dernier cas on fait appel à la notion de propagation et au concept associé d’ondes. Bien avant Newton, les anciens savaient que les sons se propagent sur de grandes distances comme les vagues sur l’océan. De nos jours nous savons que la lumière qui nous parvient du soleil et des astres lointains, ainsi que plus généralement toutes les particules matérielles, présentent aussi un aspect ondulatoire. Dans le domaine technologique, en utilisant des ondes électromagnétiques en faisceaux concentrés, il est possible de transmettre de l’énergie sur des distances considérables. Une difficulté particulière que nous allons rencontrer dans le domaine de l’énergie sans fils est la confusion souvent présente entre les deux modes de transfert : par force à courte distance ou par ondes à grande distance. Cette confusion provient, comme nous allons le préciser maintenant, d’une extension impropre du concept de dualité onde/corpuscule. 1 Notez que la constitution d’une masse par accrétion dégage de l’énergie alors que pour constituer une charge il faut en fournir. Malgré leur similitude formelle, gravitation et force électrique sont très différentes. 2 Si l’on tient compte des règles de quantification on parle alors d’approximations semi-classiques. 3 Qui ne le sont nécessairement instantanées dans l’absolu mais que l’on peut traiter comme telles avec une précision suffisante dans le cadre considéré. -3www.tmms.co.jp/wireless-power L’unification moderne des deux concepts Les deux concepts forces à distance et ondes peuvent être liés. La propagation dans un milieu continu déformable peut se voir comme une transmission de proche en proche d’un stress sous l’effet d’une contrainte. De ce point de vue ce sont les forces qui donnent naissance aux ondes. Mouvements de la main La force génère l’onde ? Propagation Corde Fig.2 Génération d’une onde par une force oscillante Inversement, l’impact d’une onde sur une surface matérielle plus dense que le milieu de propagation produit une force de recul sur cette dernière. Dans ce cas ce sont les ondes qui donnent naissance aux forces. Miroir Onde réfléchie Ou l’onde génère la force ? Force de recul Onde incidente Fig. 3 : La force de recul liée à la pression de radiation sur un mur réfléchissant Tout ce passe alors comme si les ondes transportaient une quantité de mouvement au même titre qu’une particule matérielle. A travers cet artifice on peut même parfois oublier les spécificités de la propagation pour en revenir à des problèmes purement mécaniques de trajectoires et de collisions. Cette approche n’est toutefois possible que dans le cadre l’optique géométrique, c'est-à-dire pour des ondes se propageant en lignes droites. Ces situations ne sont obtenues que pour des objets présentant des surfaces planes à l’échelle de la longueur d’onde ou lorsque l’on considère le champ lointain d’un objet. Il existe cependant de nombreuses situations, telle que production d’interférences et diffractions, où cette approche n’est plus valide et ou il faut utiliser un modèle plus élaboré basé par exemple sur la notion de milieu continu déformable. L’idée moderne d’interaction entre deux objets ou deux particules est une manière d’unifier les différents types d’interactions. Toutefois ce n’est qu’un titre générique qui masque une grande diversité de mises en œuvre pratiques. Ainsi, si deux personnes peuvent interagir de nombreuses manières différentes (par contact direct, en se parlant, par courrier,…), les objets et les particules peuvent en faire de même. Dans le modèle standard de la physique moderne, les particules fondamentales peuvent interagir selon quatre forces fondamentales: La gravitation, la force électromagnétique, la force nucléaire faible, la force nucléaire forte. -4www.tmms.co.jp/wireless-power Nous ne nous intéresserons ici qu’à la force électromagnétique qui domine très largement à notre échelle humaine et que nous savons maitriser pour en faire de si merveilleuses applications. Le lecteur aura surement noté que dans le cadre du modèle standard, tout ce qui a été évoqué précédemment : les forces électriques, magnétiques, les ondes et la propagation, est résumé en un seul terme : « force électromagnétique ». Nous allons maintenant expliquer l’origine de ce terme et en quoi il peut devenir très réducteur. Les difficultés d’interprétation de la mécanique quantique Après la découverte de la quantification de la matière (existences de particules fondamentales ayant une masse et une charge parfaitement déterminées), est venue celle de la quantification du rayonnement lumineux, clairement perceptible dans l’effet photoélectrique et plus généralement dans les émissions/absorptions atomiques. Toutefois il faut bien voir que ce n’est pas le fait que la lumière soit émise sur des fréquences très précises qui constitue l’aspect majeur de la quantification du rayonnement mais le fait que cette lumière soit émise par paquets indivisibles d’énergie. Ainsi une guitare quantique n’émettrait pas seulement des notes bien définies comme le fait déjà une guitare classique mais elle émettrait les sons faibles par paquets distincts. Ces paquets du rayonnement électromagnétique, appelés photons, sont les médiateurs de l’interaction électromagnétique. Ils permettent selon les théoriciens de décrire aussi bien le champ lointain que le champ proche, bien que dans le cas du champ proche le formalisme soit bien plus complexe. Il en résulte le raccourci simpliste : force électromagnétique = échange de photons, fin de l’histoire. Cependant la situation n’est pas aussi simple que certains promoteurs de l’EDQ nous l’ont suggéré1. Pour paraphraser on peut utiliser la citation de Mark Twain : « Les faits sont têtus ; il est plus facile de s’arranger avec les statistiques ». Si la quantification des échanges d’énergie en grains indivisibles n’est pas en cause, plusieurs types de photons sont introduits en EDQ suivant les cas. Par ailleurs, si les prévisions du formalisme complexe appliqué au cas du champ proche sont largement confirmées par l’expérience, l’absence d’image physique claire que l’on peut associer à ce cas particulier conduit le public non informé à cet amalgame réducteur voire dogmatique. Pour illustrer certaines incohérences courantes, prenons le cas de la vision de l’électron dans le cadre quantique. Il est à la fois ponctuel, puisque l’on ne met en évidence aucune sous structure même sur des distances très faibles, et étendu, sinon comment expliquer qu’un seul électron puisse passer simultanément par les deux fentes d’un dispositif pour produire des interférences. On masque cette difficulté fondamentale à l’aide du concept abscons d’ondeparticule. Jusque là rien de bien nouveau, mais voyons la suite. Dans le même temps l’EDQ et plus généralement le modèle standard décomposent consciencieusement l’électron en deux objets séparés, la particule matérielle centrale ponctuelle, et l’onde qui l’accompagne traitée sous la forme d’un nuage de particules virtuelles. Ainsi pour caricaturer un peu, certains physiciens quantiques pourraient dire que ce n’est pas l’électron qui interfère avec lui-même dans l’expérience des fentes, mais le nuage de particules virtuelles qui structurent son champ proche et qui l’accompagnent dans sa marche. Ainsi dans la dualité onde-corpuscule, l’onde ne ferait pas vraiment partie de l’objet. Admettez que tout cela est un peu nébuleux. 1 D’après Feynman toutes les interactions entres particules chargées se ramèneraient « in fine » à de simples échanges de photons. -5www.tmms.co.jp/wireless-power L’espace-temps est courbe autour de la singularité qui échappe à notre regard La particule « nue » est entourée d’un nuage de particules « virtuelles » Fig.3 : Représentations classique et quantique d’une singularité centrale Une fois de plus, le formalisme quantique n’est pas en cause, c’est l’interprétation physique telle que présentée de manière courante qui est souvent réductrice et révélatrice d’un manque de maitrise des processus sous-jacents. La démarche proposée dans ces pages n’est pas de commettre une telle erreur en tentant d’introduire de manière dogmatique des photons pour expliquer le champ proche mais plutôt de partir d’une approche phénoménologique et de choisir sans préjugés les concepts les mieux adaptés à la situation. Nous verrons que la notion de milieu continu reviendra souvent et comment elle peut permettre de résoudre élégamment le conflit ponctuel/étendu. La notion de fluide continu n’est d’ailleurs pas incompatible avec la quantification, un fluide pouvant paraître continu à certaines échelles et quantifié à d’autres1. Une approche totalement empirique Dans l’approche empirique proposée nous verrons émerger à partir de considérations très simples, une rupture formelle fondamentale au sein même des équations de Maxwell. Nous verrons que la physique du champ proche est très différente de celle du champ lointain ; ceci en même temps par ses spécificités mathématiques et par la manière dont on peut la conceptualiser. En particulier émergera la notion de globalité indissociable par opposition à celle de localité sécable, cœur du modèle standard. Nous ferons ainsi un parallèle étroit entre le comportement du champ électromagnétique et celui des fluides matériels qui présentent le même double aspect conceptuel : proche/lointain. Nous utiliserons, pour lutter contre le dogmatisme ondulatoire grandissant, le vocabulaire proposé précédemment, à la fois fidèle au contexte historique et non ambigu dans ses termes. Cette démarche sera avant tout basée sur une redécouverte de notions classiques, un peu trop vite mises à l’écart nous semble–t’il au siècle dernier. Pour quelques lecteurs ce sera l’occasion d’une méditation plus poussée sur la pertinence de ces choix passés et sur les formes que pourraient prendre de possibles alternatives. 1 La quantification n’apparait pas forcément uniquement à petite échelle ; ainsi dans un fluide chauffé par le bas on observe une structure macroscopique régulière de cellules de convection qui peut faire penser à une distribution régulière d’atomes dans un cristal. -6www.tmms.co.jp/wireless-power En résumé : une image de quasi-contact à distance et son prolongement métaphysique Le contact matériel n’a pas de réalité physique, ce qui nous semble pourtant bien concret et solide n’est que le résultat de forces de répulsion quasi-statiques entre atomes ou molécules distants. Les dispositifs de champ proche non rayonnant sont du même type et font intervenir la même physique. Toutefois ils le font sur des distances considérablement plus grandes. Cette immatérialité du contact, rendue clairement apparente dans les dispositifs récents, ne va pas sans susciter des questions plus métaphysiques que physique sur cette notion de contact à distance et, de manière sensiblement plus appliquée, sur la question de l’extension spatiale des électrons et plus généralement des particules élémentaires. Si l’on admet que les particules sont étendues, jusqu’où le sont elles, de quoi sont elles constituées et comment expliquer qu’elles forment un tout insécable ? Dans la suite nous proposerons en marge du formalisme classique et des modèles opérationnels, quelques éléments de réponse à ces questions fondamentales en les illustrant par des modèles physiques particulièrement simples. Dans le dernier article consacré à cette approche conceptuelle générale, le lecteur trouvera des éléments plus quantitatifs et qualitatifs, dérivés du cadre empirique des équations de Maxwell, qui permettront de révéler clairement cette bifurcation fondamentale entre le champ proche et le champ lointain. Z Champ lointain (propagation) Champ proche (forces) Ce n’est pas fondamental ça ? Quasi-électrostatique Z 1 C Z Z L Quasi-magnétostatique d / 2 La bifurcation magnétique/électrique -7www.tmms.co.jp/wireless-power