DEPARTEMENT DES RELATIONS EXTERIEURES Communication Recherche Aéropole de Charleroi Av. Lemaître 19 – 6041 Charleroi Nathalie Gobbe, T +32 (0)71 60 02 06, +32 (0)474 84 23 02, M [email protected] Nancy Dath, T +32 (0)71 60 02 03, M [email protected] Communiqué de presse Charleroi, le 28 mai 2008 Publication du laboratoire d’Eco-Ethologie évolutive de l’ULB dans PNAS (27/05/08) : étranges mœurs des orchidées européennes Comment la pollinisation d’orchidées européennes est-elle réalisée par des abeilles solitaires ? Question centrale pour Nicolas Vereecken, chercheur FRIA/FNRS au sein du laboratoire d’Eco-Ethologie évolutive de l’ULB : il y a consacré sa thèse de doctorat (défendue en avril 2008 à l’Université libre de Bruxelles) et il signe ce mardi 27 mai, en 1er auteur, un article autour des « étranges mœurs » des orchidées européennes dans la prestigieuse revue américaine « Proceedings of the National Academy of Sciences » (PNAS), sous le titre « The evolution of imperfect floral mimicry ». Au cours de l’évolution, les plantes à fleurs ont développé de multiples stratégies pour s’attirer les faveurs d’organismes « intermédiaires » qui assurent leur reproduction par pollinisation, soit une interaction biologique « win-win » puisque la plante assure sa reproduction via le transfert de son pollen tandis que l’insecte prélève au passage du pollen, du nectar et parfois d’autres formes de récompenses florales. Toutefois toutes les plantes ne jouent pas la stratégie « win-win » : certaines fleurs – en particulier parmi les orchidées – trompent l’insecte en émettant un parfum ou une couleur évoquant une récompense qui en réalité n’est pas délivrée. La région méditerranéenne abrite de multiples espèces d’orchidées terrestres qui ont fait de la tromperie florale et du mimétisme leur spécialité : appartenant au genre Ophrys, ces orchidées comptent quelques représentants en Belgique. Les fleurs d’orchidées Ophrys arborent des couleurs ou des poils qui leurs donnent l’apparence d’un corps d’insecte perché sur une tige de graminée. Dès la 1re moitié du 20e siècle, la naturaliste français Maurice Pouyanne découvrait le mécanisme de pollinisation des Ophrys : imitant les femelles de certains insectes, ces fleurs attirent des mâles qui les perçoivent comme une partenaire sexuelle. Au cours de ces pseudo-copulations, les mâles d’insectes décrochent les pollinies de l’orchidée qu’ils déposeront sur une autre fleur lorsqu’ils se laisseront tromper une nouvelle fois par une orchidée. Notons que le mimétisme entre les fleurs d’Ophrys et les femelles d’insectes est non seulement visuel mais aussi – et surtout – de nature chimique : le parfum floral des Ophrys imite précisément la phéromone sexuelle des femelles d’insectes visés. L’article que Nicolas Vereecken, chercheur FRIA-FNRS à l’ULB – Laboratoire d’EcoEthologie évolutive signe en 1er auteur ce 27 mai dans PNAS s’intéresse à cette pollinisation d’orchidées européennes par des abeilles solitaires. Le chercheur montre que le parfum de l’orchidée étudiée (Ophrys exaltata) contient les mêmes composés que ceux utilisés par les femelles pour attirer les mâles : le mimétisme chimique est évident. On sait que les femelles d’abeille utilisent systématiquement les mêmes composés chimiques pour attirer leurs partenaires mais dans des proportions qui varient d’une population à l’autre : les femelles italiennes ont leur propre dialecte chimique qui diffère de celui des femelles suisses, autrichiennes, anglaises… Comment les orchidées s’adaptent-elles à cette variation géographique du signal qu’elles sont censées imiter (les dialectes chimiques) et aux préférences – démontrées dans cette étude – des mâles d’abeilles pour des femelles exotiques ? Le chercheur montre que le parfum des orchidées est relativement différent de celui des femelles locales (mimétisme « imparfait ») et que, en plus, cette différence rend les orchidées plus attractives que les vraies femelles : les Ophrys ont développé un parfum floral imitant la phéromone sexuelle d’une femelle exotique et optimisent par là même leur attractivité vis-à-vis de leurs pollinisateurs ! Grâce à ces expériences, près d’un siècle après la découverte du mécanisme de pollinisation par leurre sexuel chez les Ophrys, les chercheurs lèvent un voile sur certaines stratégies développées par les orchidées Ophrys pour s’attirer les faveurs des mâles d’abeilles solitaires. Ils soulèvent également une série de nouvelles questions : une espèce d’orchidée peut-elle attirer d’autres pollinisateurs, même occasionnellement ? Comment les relations entre ces orchidées et les pollinisateurs affectent-elles la différenciation des parfums floraux, des couleurs ou des formes des fleurs trompeuses ? etc. Vereeecken NJ et Schiestl FP, The evolution of imperfect floral mimicry, Proceedings of the National Academy of Sciences of the USA, 27 mai 2008. Article complété par une vidéo de pseudo-copulation entre orchidée Ophrys et abeille solitaire mâle. Informations scientifiques : Nicolas J. Vereecken, Eco-Ethologie évolutive (EEE) - ULB, +32 (0)2 650 22 67, +32 (0)473 60 35 63 ou [email protected]