CiïJSl* * * * * * * COUNCIL CONSEIL * DE L'EUROPE OF EUROPE * * * * Committee of Ministers Comité des Ministres Strasbourg, le 17 décembre 1991 CMD007006 Restricted CM(91)220 Addendum II révisé <CAHBI(91)1.7 Addendum II révisé> Pour examen à la 469e réunion des Délégués des Ministres (janvier 1992) COMITE AD HOC D'EXPERTS SUR LA BIOETHIQUB (CAHBI) RAPPORT FINAL D / ACTIVITE préparé par: le Groupe de travail sur les tests génétiques pour les besoins de la police et de la "justice pénale (CAHBI/CDPC-GT) lors de sa réunion tenue à Strasbourg les 6 et 7 mai 1991 adopté par: le Comité ad hoc d'experts sur la bioéthioue CAHBI) à sa 14ème réunion (Strasbourg, 5 - 8 novembre 1991) à l'attention du: Comité des Ministres R E S U M E Projet de Recommandation sur l'utilisation des analyses de l'acide désoxyribonucléique (ADN) dans le cadre du système de justice pénale et projet d'Exposé des Motifs - 2 Projet de Recommandation sur L'UTILISATION DES ANALYSES DE L'ACIDE DESOXYRIBONUCLEIQOE (ADN) DANS LE CADRE DO SYSTEME DE JUSTICE PENALE (Adopté par le Comité des Ministres le.... à la.... réunion des Délégués des Ministres.) Le Comité des Ministres, en vertu de l'article 15 b. du Statut du Conseil de l'Europe, Considérant que le Conseil de l'Europe a pour but de réaliser une union plus étroite entre ses membres, . Tenant compte de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et de la Convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel du 28 janvier 1981 ("la Convention pour la protection des données"), Considérant que' la lutte contre le crime exige le recours aux méthodes les plus modernes et les plus efficaces; Convaincu de lai nécessité de mener contre la criminalité une politique pénale commune visant à protéger les individus et la société dans laquelle ils vivent, Prenant en considération le fait que les techniques d'analyse de l'ADN peuvent présenter de l'intérêt pour le système de justice pénale, notamment lorsqu'il s'agit d'établir l'innocence ou la culpabilité; Prenant en considération cependant que de telles techniques, qui sont en, constante évolution, doivent être mises en oeuvre de manière fiable; Conscient, toutefois, qu'en l'adoptant et en appliquant ces techniques il faut tenir pleinement compte de principes aussi fondamentaux que la dignité intrinsèque de l'individu et le respect du corps humain,, les droits de la défense et le principe de la proportionnalités dans l'administration de la justice pénale, et éviter de por.ter atteinte à ces principes, RECOMMANDE aux gouvernements des Etats membres de s'inspirer dans leur législation et leur politique des principes et des recommandations formulés ci-après. CHARGE le Secrétaire Général de porter le contenu de la présente Recommandation à l'attention des Etats non membres et les organisations internationales qui ont participé à son élaboration. f^^ '^Jr - 3 - PRINCIPES ET RECOMMANDATIONS 1. Définitions Aux fins de la présente Recommandation: L'expression "analyse[s] de l'ADN" s'entend de tout procédé susceptible d'être utilisé pour analyser l'acide désoxyribonucléigue (ADN) , qui constitue le matériel génétique de base de l'homme et des autres êtres vivants. Le terme "échantillons" s'entend de tout matériel d'origine biologique, susceptible d'être utilisé pour les besoins d'analyses de l'ADN. L'expression "fichier de l'ADN" s'entend de tout recueil structuré des .résultats de tests d'analyse de l'ADN, qu'ils soient conservés sous une forme matérielle, comme les fichiers établis à la main, ou dans une base informatisée de données. 2. Champ d'application et limitations La présente Recommandation s'applique au prélèvement d'échantillons et à l'utilisation des analyses de l'ADN aux fins d'identification d'un suspect ou toute autre personne dans le cadre d'enquêtes et de poursuites pénales. 3. Utilisation des échantillons et des informations qui , en découlent Les échantillons prélevés pour effectuer des analyses de l'ADN et les informations dégagées de ces analyses aux fins d'enquêtes et de poursuites pénales ne doivent pas non plus être utilisés à d'autres fins. Cependant, lorsque la personne sur laquelle les échantillons ont été prélevés le souhaite, l'information doit lui être donnée. Les échantillons prélevés sur des personnes vivantes pour effectuer des analyses de l'ADN à des fins médicales, et les informations obtenues à partir de ces échantillons, ne peuvent être utilisés pour les besoins d'enquêtes et de poursuites pénales, si ce n'est dans des cas expressément prévus par le droit interne. L'utilisation d'échantillons prélevés pour effectuer des analyses de l'ADN, et des informations ainsi recueillies, peut s'imposer à des fins de recherche et de statistiques. Une telle utilisation est admissible à condition que l'identité de l'individu en cause ne puisse être établie. Aussi faut-il au préalable retirer de ces échantillons et de ces informations les noms des intéressés et les autres mentions permettant de les identifier. - 4 - 4. Prélèvement d'échantillons aux fins d'analyse de l'ADN Le prélèvement d'échantillons aux fins d'analyse de l'ADN ne devrait être effectué que dans des circonstances déterminées par le droit interne, étant entendu que dans certains Etats, un tel prélèvement soit subordonné à l'autorisation expresse d'une autorité judiciaire. Lorsque le droit interne admet que des échantillons soient prélevés sans le consentement du suspect, un tel prélèvement ne devrait être effectué que si les circonstances de l'affaire exigent une telle mesure. 5. Recours aux analyses de l'ADN Le recours aux analyses de l'ADN doit être autorisé dans tous les cas appropriés, quel que soit le degré de gravité de l'infraction. 6. Agréments de laboratoires et d'institutions et contrôle des analyses de l'ADN L'analyse de l'ADN est un procédé scientifique complexe qui ne doit être employé que par des laboratoires possédant les installations et l'expérience requises. Les Etats membres devraient veiller à ce que soit établie une liste de laboratoires ou d'instituts agréés, répondant aux critères suivants: niveau élevé des connaissances et des compétences professionnelles, associé à des procédures appropriées de contrôle de la qualité; intégrité scientifique; sécurité adéquate des installations et des matériels faisant l'objet d'examens; mesures pertinentes pour garantir une confidentialité absolue eu égard à l'identification de la personne à laquelle se rapportent les résultats de l'analyse de l'ADN; et garanties que les conditions énoncées dans la présente recommandation seront respectées. Les Etats membres devraient prendre des dispositions pour que leurs laboratoires agréés fassent périodiquement l'objet d'un contrôle. 7. Protection des données Les échantillons doivent être prélevés et les analyses de l'ADN utilisées conformément aux normes du Conseil de l'Europe pour la protection des données, telles qu'elles sont prévues dans la Convention No. 108 relative à la protection des données et dans les Recommandations sur. la protection des données, notamment - 5 dans la Recommandation R (87) 15 visant à réglementer l'utilisation des données à caractère personnel dans le secteur de la police. 8. Conservation des échantillons et des données Les échantillons prélevés sur le corps d'individus aux fins d'analyse de l'ADN ne doivent pas être conservés une fois que la décision finale a été rendue dans l'affaire en vue de laquelle ils ont été utilisés, à moins qu'une telle conservation ne s'impose pour des besoins directement liés à ceux en vue desquels ils ont été prélevés. ~ II faut veiller à effacer les données des analyses de l'ADN et les informations obtenues au moyen de ces analyses dès lors qu'il n'est plus nécessaire de les conserver aux fins en vue desquelles elles ont été utilisées.- Les données des analyses de l'ADN et les informations ainsi recueillies peuvent toutefois être conservées lorsque l'intéressé a été reconnu coupable d'infractions graves portant atteinte à la vie, à l'intégrité ou à la sécurité des personnes. En prévision de tels cas, la législation nationale devrait fixer des délais précis de conservation. Les échantillons et autres tissus humains, pu . les informations qui en découlent, peuvent être conservés pour de plus longues périodes : (i) lorsque la personne concernée demande; ou (ii) lorsque l'échantillon ne peut être attribué à une personne, par exemple lorsqu'il est trouvé sur le lieu du crime. Dans les cas où la sûreté de l'état est en cause, le droit interne peut permettre la conservation des échantillons, des résultats de l'analyse de l'ADN et de l'information qui en découle, même si la personne concernée n'a pas été inculpée ou condamnée pour une infraction. En prévision de tels cas, la législation nationale devrait fixer des délais précis de conservation. L'établissement et la gestion de tout fichier ADN pour les besoins d'enquêtes et de poursuites pénales doivent être réglementés par la loi. 9. Egalité des armes Les Etats devraient assurer que l'analyse de l'ADN en tant que moyen spécifique de preuve soit accessible de la même manière à la défense, soit par décision d'une autorité judiciaire, soit par l'intermédiaire d'un expert indépendant. Lorsque la quantité des substances disponibles pour des analyses est limitée, il y a lieu de veiller à ce qu'aucune atteinte ne soit portée aux droits de la défense. - 6 - 10. Normes techniques Les Etats membres devraient encourager la normalisation des méthodes d'analyse de l'ADN, tant à l'échelon national qu'à l'échelon international. Cette normalisation pourrait obliger les divers laboratoires à collaborer en matière d'homologation des procédés d'analyse ou de contrôle. 11. Propriété intellectuelle Tout en reconnaissant que les droits de propriété intellectuelle liés à telles ou telles méthodes d'analyse de l'ADN pourraient demeurer acquis à certains laboratoires, les Etats membres doivent veiller à ce que ce fait n'entrave pas l'accès à l'utilisation de l'analyse de l'ADN. 12. Echange transfrontière d'informations II est possible de solliciter d'un laboratoire ou d'un institut établi dans un autre pays des analyses de l'ADN pour les besoins d'enquêtes et de poursuites pénales à condition que ce laboratoire ou cet institut remplisse toutes les conditions énoncées dans la présente Recommandation. La communication transfrontière des conclusions d'analyses de l'ADN ne devrait s'effectuer qu'entre des Etats qui se conforment aux dispositions de la présente Recommandation, et en particulier dans le respect des traités internationaux pertinents sur l'échange d'informations en matière pénale, ainsi que de l'article 12 de la Convention relative à la protection des données. ^ - 7 PROJET D'EXPOSE DES MOTIFS INTRODUCTION 1. Le Conseil de l'Europe s'intéresse, depuis plusieurs années, à l'incidence des nouvelles technologies sur les questions de droits de l'Homme et de libertés fondamentales parce qu'il a le sentiment que l'évolution et l'emploi de ces nouvelles techniques sont justifiés et nécessaires au progrès de la société, mais aussi que leur utilisation risque de porter atteinte aux droits de l'Homme et aux libertés fondamentales, si l'on ne tient pas compte des intérêts divergents et de ce qui est nécessaire dans une société démocratique. 2. Le Comité ad hoc d'experts sur la bioéthique (CAHBI) a donc étudié plusieurs de ces techniques et leur incidence sur les questions d'éthique et de valeurs humaines. Il a constaté qu'une nouvelle méthode, l'analyse de l'acide désoxyribonucléique (ADN) , avait été mise au point depuis 1970 mais était utilisée surtout depuis 1980. En 1985, on a, lors d'un procès au Royaume-Uni, utilisé les sondes pluri-locus (MLP) (voir glossaire à l'Annexe I); c'était la première fois que l'on employait l'analyse de l'ADN en médecine légale (A. J. Jeffreys et al, "Positive Identification of an Immigration Test Case Using Human DNA Fingerprints", Nature 317:818-819, 1896). Cette technique pourrait être très utile pour identifier un individu dans le cadre d'enquêtes et de poursuites pénales parce qu'elle permet, soit de disculper le suspect, soit de prouver sa culpabilité. Cependant, il est évident qu'elle comporte des risques, non seulement sur le plan de l'application technique mais surtout sur celui des droits fondamentaux, comme les droits au respect de la vie privée et familiale, à un procès équitable et au respect du corps humain. Le CAHBI a donc décidé de proposer au comité européen pour les problèmes criminels (CDPC) de constituer un groupe de travail pour étudier l'utilisation des analyses de l'ADN dans le cadre des enquêtes et des poursuites pénales. 3. C'est ainsi qu'a été créé, en 1990, le groupe de travail sur les tests génétiques pour les besoins de la police et de la justice pénale (CAHBI/CDPC-GT). 4. Il a été chargé d'examiner la question des analyses de l'ADN et de formuler une recommandation en la matière. 5. Le CAHBI/CDPC-GT se compose d'experts de huit Etats membres du Conseil de l'Europe (Autriche, Belgique, France, Allemagne, Malte, Suède, Suisse et Royaume-Uni), quatre de ces experts étant nommés par le CAHBI et quatre par le CDPC. Ce système a pour but de garantir la représentation de nombreux domaines comme la médecine légale, les sciences sociales, l'éthique, les sciences biomédicales, mais aussi le droit pénal et la magistrature. - 8 M. T. Rothwell (Royaume-Uni) a été élu président du groupe de travail. Ce dernier a été aidé, à différents stades de ses activités, par des experts de la protection des données. Le secrétariat a été assuré par la Direction des affaires juridiques du Conseil de l'Europe. 6. Le CAHBI/CDPC-GT a tenu sa première réunion en septembre 1990. L'avant projet de recommandation, élaboré à cette occasion, a été examiné par le CAHBI réuni en décembre 1990, ainsi que par un groupe de travail que le comité d'experts sur la protection des données a constitué en février 1991. Le CAHBI/CDPC-GT a révisé le projet de recommandation à la lumière des observations formulées lors de ces réunions et des réponses au questionnaire transmis aux chefs de délégation du CDPC sur la possibilité de procéder à des prélèvements de sang sans le consentement du suspect. Le projet a été examiné par le CDPC à sa quarantième session plénière, en juin 1991. Le CAHBI en a approuvé le texte à sa session plénière de novembre 1991 et l'a transmis au Comité des Ministres, qui l'a adopté à la ... ème réunion de ses délégués, le .. février 1992, et a autorisé la publication de l'exposé des motifs. GENERALITES ET COMMENTAIRES DU PREAMBULE L'UTILISATION DES ANALYSES DE L'ADN DANS LE CADRE DE LA JUSTICE PENALE 7. La lutte contre la criminalité est une préoccupation essentielle dans tous les Etats membres du Conseil de l'Europe et exige le recours aux méthodes les plus modernes et les plus efficaces dont puisse disposer l'enquêteur. La médecine légale peut être d'une aide considérable dans les enquêtes pénales, exploitant - comme elle le fait - les recherches scientifiques menées dans de nombreux domaines. L'analyse de l'ADN (appelée souvent profil génétique) constitue l'une des nouvelles techniques employées. Il s'agit d'une méthode permettant d'identifier un individu par l'examen d'une quantité infime de son sang ou d'autres tissus du corps. 8. L'analyse de l'ADN lors d'une enquête pénale peut soit apporter la preuve qu'un suspect a participé au crime soit, et c'est tout aussi important, l'innocenter. 9. Lorsqu'une technique aussi puissante est employée dans le cadre du système pénal, il est bon d'en soumettre l'usage à certaines garanties. Le Conseil de l'Europe, connaissant l'ensemble des activités de ses nombreux Etats membres, est tout à fait à même de proposer des directives sur son application. 10. La complexité des analyses d'ADN exige un haut niveau de sophistication dans les méthodes de travail des laboratoires - 9 procédant à ces examens. Les gouvernements des Etats membres ont besoin d'être tout-à-fait sûrs non seulement que les résultats communiqués par les laboratoires sur leur territoire sont fiables, mais aussi que les travaux menés dans les Etats membres voisins sont d'une qualité égale, le crime ne connaissant pas de frontière. 11. Il est également essentiel de garantir le respect des principes fondamentaux, à savoir le respect du corps humain et de la dignité de la personne humaine. Si tous les Etats membres reconnaissent les droits de l'Homme fondamentaux, leur législation interne varie. Ainsi, lors de ses délibérations, le groupe de travail a constaté des différences notables quant à la manière pair laquelle on peut obtenir, aux fins d'examen, du sang ou d'autres "substances prélevées dans l'organisme. Les présentes recommandations énoncent les principes pertinents dont la mise en oeuvre, par voie législative, incombe à chaque Etat membre. 12. L'analyse de l'ADN, technique d'application coûteuse et longue, ne devrait peut-être pas être utilisée pour les infractions mineures. Toutefois, pour de tels délits, il importe de se rappeler que cette méthode permet d'établir l'innocence d'un individu. Il ne faut pas non plus négliger les droits de là défense à quelque égard que ce soit : le recours aux analyses de l'ADN et l'information en la matière doivent être accessibles, au même titre, à l'accusation et à la défense. 13. Puisque l'on tient pour acquis que chaque individu possède des empreintes digitales uniques, un suspect peut être déclaré coupable sur cette seule preuve. Si l'analyse de l'ADN est souvent appelée "empreintes d'ADN", l'analogie est incorrecte. La différenciation obtenue par profil génétique dépend de plusieurs facteurs, comme la technique employée et surtout la qualité du matériel d'origine. Lorsque le profil génétique est établi au mieux, il peut n'y avoir qu'une chance sur plusieurs millions pour que l'ADN provienne de quelqu'un d'autre. Dans le cas contraire, la différenciation peut laisser à désirer'. Il n'est donc pas possible de généraliser l'application des analyses d'ADN comme unique fondement de culpabilité: il appartient au tribunal de décider dans chaque cas. 14. Il ne faut jamais perdre de vue que l'analyse de l'ADN est une technique en évolution rapide. Les présentes recommandations visent à en garantir une utilisation sensée et ne cherchent nullement à freiner le progrès scientifique. L'analyse de l'ADN devrait cependant pouvoir évoluer et se développer sans compromettre aucun des principes fondamentaux énoncés ci-après. Nécessité d'établir des distinctions entre les individus 15. Dans de nombreux domaines, il est nécessaire de posséder des moyens fiables pour distinguer les individus les uns des autres. - 10 Cette différenciation peut prendre des formes multiples. Au niveau le plus élémentaire, il est évident que la couleur des cheveux varie, élément qui peut être utilisé pour distinguer une personne d'une autre. De même, on se sert des empreintes digitales depuis des années en matière pénale, puisque chaque individu possède, jusqu'à preuve du contraire, des empreintes uniques. Pour qu'un système d'identification soit fiable et crédible, il doit s'appuyer sur les caractéristiques fondamentales de l'individu. Une particularité comme la couleur des cheveux a peu d'intérêt, bien qu'elle soit le reflet de la constitution génétique de la personne, car elle est facile à changer. Les groupes sanguins constituent un bon exemple de caractéristiques permettant de distinguer un individu d'un autre. Ils font partie du patrimoine génétique. En conséquence, le groupe sanguin d'un individu reflète ce que l'enfant a hérité de chacun de ses parents. Il est immuable du début à la fin de la vie. Emploi des groupes sanguins 16. Le système ABO a été le premier découvert, en 1901, par Landsteiner. C'est encore le plus connu, mais on a trouvé par la suite de nombreuses autres méthodes. L'intérêt médical des groupes sanguins est lié aux transfusions, qui nécessitent l'emploi de groupes compatibles pour prévenir les réactions de rejet chez le patient. Ces techniques ont été adoptées en vue d'identifier les individus pour les besoins de la justice pénale et à d'autres fins judiciaires. Ainsi, lors d'une agression, le sang de la victime peut éclabousser la veste de l'agresseur. La détermination du groupe auquel appartient ce sang peut contribuer à démontrer la relation entre le suspect et le crime. Le sang n'est pas la seule substance qui permette l'établissement du groupe sanguin, car des substances similaires se trouvent dans la plupart des liquides du corps. Ainsi, après une agression sexuelle, l'analyse de traces de sperme permet parfois de déterminer le groupe sanguin de l'agresseur. Comme le groupe sanguin de tout individu reflète l'apport génétique de chacun de ses parents, l'établissement du groupe sanguin peut être utile dans les enquêtes en cas de contestation de paternité. L'examen des groupes de l'enfant, de sa mère et du père putatif peut apporter la preuve d'un lien de parenté entre l'homme et l'enfant. Le groupage sanguin est donc, depuis de nombreuses années, un outil important au service de l'expert légiste. La découverte, par exemple, de sang du groupe A sur la veste d'un suspect peut indiquer que celui-ci s'est attaqué à une victime de ce groupe. - 11 Dans de nombreuses populations, le groupe A se rencontre chez deux personnes sur cinq. Cette découverte constitue donc une preuve, limitée, qu'il existe un lien entre le suspect et le crime. En revanche, une analyse complète de l'ADN peut démontrer qu'il y a seulement une chance sur un million pour que le sang provienne d'une personne autre que la victime de l'agression. C'est dans ce contexte qu'il faut situer l'apparition de l'analyse ADN. Elle est la plus récente d'une série de techniques élaborées pour permettre aux juristes, et responsables des enquêtes pénales d'identifier les individus. C'est toutefois, potentiellement, un outil infiniment plus puissant que tous ceux dont on se servait auparavant et il convient d'en soumettre l'usage à certaines garanties. L'ADN, support de l'hérédité 17. S'il n'est pas nécessaire de connaître la structure et la fonction de l'ADN pour comprendre l'intérêt de son analyse dans lé cadre du système pénal, quelques informations de base, ainsi qu'une introduction aux termes en usage, pourraient être utiles à ceux qui ne maîtrisent pas le sujet. 18. Le corps humain est composé de millions de cellules microscopiques, qui sont'les éléments de base de tout organisme vivant. Ces cellules sont trop petites pour être vues à l'oeil nu. Dans la plupart d'entre elles, il existe une structure appelée noyau, qui contient les chromosomes, supports de l'hérédité. Les chromosomes sont des structures minuscules, visibles uniquement à l'aide de techniques microscopiques spécialisées. 19. Le mécanisme de l'hérédité, le code génétique qui caractérise la structure de l'individu, est contenu dans une substance complexe appelée acide désoxyribonucléique - en abrégé ADN - dont est constitué le chromosome. L'ADN se compose, luimême, de milliers d'éléments encore plus petits, disposés en séquences particulières; c'est la forme et la disposition de ces séquences qui constituent le code génétique et qui, à leur tour, contrôlent la production des différentes substances qui conduisent au développement de l'individu. • 20. Un chromosome est une structure en forme de bâtonnets: la cellule humaine compte 46 chromosomes, soit deux jeux fondamentalement semblables de 23. Un jeu est hérité de la mère et l'autre du père. Les caractères héréditaires sont déterminés par les gènes dont chacun est une petite partie de la séquence d'ADN. La localisation des gènes sur le chromosome est bien définie. Ainsi, la couleur des yeux dépendra d'un gène situé à un certain locus, c'est-à-dire à un point précis d'un chromosome précis. Ce locus se trouve sur un chromosome du jeu hérité de la mère et sur le chromosome correspondant du jeu hérité du père. Ces chromosomes, qui comportent des loci de gênes équivalents, - 12 - sont qualifiés "d'homologues". Toute caractéristique d'un individu sera donc le résultat de l'activité de deux gènes, un de chacun des parents. 21. Ainsi, au locus du groupe sanguin ABO (qui se trouve sur le chromosome 9), le gène situé sur le chromosome hérité de la mère peut être du groupe A tandis que l'autre, hérité du père, peut être du groupe B. L'individu sera donc de groupe sanguin AB et l'on dira donc qu'il est hétérozygote, eu égard au groupe sanguin ABO. Si la mère et le père donnent un gène du groupe A, l'enfant sera du groupe sanguin A et l'on dira qu'il est homozygote, eu égard au groupe sanguin ABO. Les gènes responsables des différents aspects d'un caractère donné (comme les groupes A et B au sein du système du groupe sanguin ABO) sont dits alléliques 22. Les cellules ne contiennent pas toutes deux jeux de chromosomes. Lorsque les gamètes (ovule ou spermatozoïde) se forment, la moitié seulement des chromosomes entre dans l'ovule ou le spermatozoïde bien que chacun des 23 types de chromosomes soit présent. Lors de la fécondation de l'ovule par un spermatozoïde, les gamètes fusionnent et les chromosomes de l'un et l'autre gamètes s'apparient pour donner à l'embryon la totalité de son matériel génétique. C'est ce processus qui fait que l'individu reçoit de chacun de ses parents une part égale de son code génétique. Des jumeaux *identiques* sont le résultat d'une division de l'embryon en cours de développement. Chacun de ces jumeaux possédera ainsi le même code génétique. 23. Les variations dans les séquences d'éléments présents dans l'ADN déterminent les différences physiques entre les individus; d'autres facteurs, comme la prédisposition à certaines maladies, peuvent également dépendre de la structure de l'ADN. 24. L'analyse de l'ADN, appelée souvent établissement du profil génétique, permet de déceler les séquences qui y sont contenues, et met donc à notre disposition l'une des méthodes les plus efficaces jamais conçues pour identifier les personnes. L'analyse de l'ADN: description succincte de la technique 25. L'ADN qui comprend le chromosome est une molécule constituée de deux longues chaînes enroulées en spirales. La chaîne est constituée d'un grand nombre de petits sous-éléments. Ces souséléments sont de quatre types et c'est leur enchaînement qui constitue le code génétique. La chaîne, double, est formée de deux brins et l'enchaînement sur un brin impose strictement l'enchaînement sur l'autre brin. Les deux brins forment la célèbre "double hélice", découverte par Watson et Crick il y a une quarantaine d'années. L'analyse de l'ADN dépend de la séparation et de l'identification des diverses séquences présentes dans la chaîne. 26. L'une des méthodes d'analyse intéresse les sections de la chaîne d'ADN sur lesquelles se répètent, parfois à plusieurs _ i -D _ réprises, de brèves séquences. Le nombre des répétitions varie selon l'individu et ces sections d'ADN sont souvent appelées "nombre variable de répétitions disposées en tandem" (séquences VNR) ou "régions mini-satellitaires hypervariables", autre nom pour "mini-satellites". Ces sections .d'ADN ne font généralement pas partie d'un gène, mais semblent ponctuer les séquences codantes. Ces régions très variables de la chaîne sont souvent appelées "ADN non codant". L'utilisation de cet ADN non codant pour les besoins de la justice pénale présente un certain intérêt éthique; l'établissement de profils génétiques ne pourra aboutir qu'à l'identification ou à l'exclusion d'un individu et l'on ne pourra rien déduire de ses caractéristiques physiques, parce que l'analyse ne fait pas appel aux gènes. 27. Cette technique d'analyse implique l'extraction et la purification de l'ADN à partir d'une source appropriée, de matériaux cellulaires comme le sang ou le sperme. L'ADN purifié est ensuite mélangé à une enzyme de restriction, substance chimique qui sectionne en petits fragments les molécules d'ADN relativement grandes. Elle sectionne ces molécules en reconnaissant une certaine séquence dans l'ADN et en attaquant la structure à ce point précis. Si on choisit des enzymes appropriées, les séquences VNTR peuvent être sectionnées de la chaîne d'ADN. Tout échantillon d'ADN se divise en un certain nombre de fragments de taille différente mais tout à fait précise. L'ADN génère des fragments de longueur différente selon l'individu et c'est la répartition des dimensions des fragments qui constitue le profil d'ADN. On sépare ensuite ces fragments inframicroscopiques par électrophorèse, procédé qui classe les fragments en groupes, en fonction de leur taille et à l'aide d'un gradiant créé par un courant électrique. Les fragments d'ADN sont ensuite traités à l'aide d'une sonde afin de pouvoir en discerner et en enregistrer de façon permanente les différents groupes. Une sonde est un type d'ADN préparé tout spécialement pour reconnaître les séquences spécifiques à l'ADN analysé et s'y fixer. La sonde est généralement radioactive, ce qui permet d'enregistrer la présence du matériel sur une image photographique. Après traitement, l'image révélera des zones sombres correspondant à la position des différents fragments d'ADN produits par l'analyse. 28. Les profils génétiques établis pendant les premiers stades de la mise au point de cette technique se présentaient sous la forme de codes-barres, comme ceux dont on se sert pour indiquer le prix des denrées dans le commerce de détail. Chaque "barre" correspondait à des fragments d'ADN d'une taille donnée. Pour établir des profils de cette sorte, on se servait de sondes plurilocus (MLP), matériaux spécialement préparés pour rendre visible tout l'éventail des fragments d'ADN résultant de l'analyse. La comparaison des profils provenant, par exemple, du sperme produit lors d'un viol et du sang de l'agresseur se fait en - 14 - plaçant les profils l'un à côté de l'autre et en comparant les positions des bandes d'ADN. Si l'ADN des échantillons examinés n'est pas dégradé, de nombreuses bandes - parfois plus de 15 peuvent être localisées, et leurs positions les unes par rapport aux autres sont les mêmes sur les deux profils. C'est ce processus d'identification des différents points de correspondance des profils qui fait l'analogie avec les empreintes digitales et a conduit à utiliser l'expression "empreintes d'ADN". L'analyse de l'ADN n'a toutefois rien de commun avec la dactyloscopie, aussi vaut-il mieux ne pas employer l'expression "empreintes d'ADN". 29. Si l'analyse résultant de l'utilisation des sondes plurilocus (MLP) peut permettre d'établir des distinctions très fines entre les individus, renforçant ainsi la valeur *probatoire* de l'analyse, le profil obtenu est complexe et souvent difficile à interpréter. L'ADN dégradé, qui, pour une raison ou une autre, s'est détérioré après le prélèvement de sang ou d'un autre tissus du corps, risque de donner un profil inapproprié dans lequel ne sera visible qu'un petit nombre de bandes. C'est pourquoi des analyses plus récentes ont été effectuées avec des sondes unilocus (SLP) dont les inconvénients sont moindres à cet égard. 30. On procède de la même façon dans les premiers stades de l'analyse, mais la sonde unilocus ne réagit pas avec tous les fragments d'ADN. En effet, elle répond à une structure particulière de la chaîne d'ADN et à un locus génétique précis, et l'image photographique qui est l'aboutissement de l'analyse montre que le profil ne comprend qu'une ou deux bandes. Si l'individu est homozygote, les deux allèles situés au même locus génétique sont identiques et une seule bande transversale de fragment d'ADN apparaît dans le profil. L'individu hétérozygote possède, pour ce même locus, deux allèles différents qui donneront, à leur tour, deux bandes de fragments d'ADN dans le profil. En conséquence, un profil établi à l'aide d'une sonde unilocus (SLP) est plus simple et plus facile à interpréter qu'une analyse effectuée avec une sonde plurilocus (MLP). 31. Comme dans le procédé MLP, ce qui importe est la position relative des bandes d'ADN apparaissant dans le profil. La comparaison des profils se fait de la même manière, c'est à dire en les plaçant côte à côte et en observant si les bandes occupent les mêmes positions les unes par rapport aux autres. Si l'analyse est tout aussi fiable avec la sonde unilocus et avec la sonde plurilocus, les distinctions établies par la première sont, par essence, bien moins fines et l'on devra généralement effectuer des analyses à l'aide des sondes unilocus variées, pour mieux différencier les intéressés.. 32. Les sondes unilocus peuvent être supérieures aux sondes plurilocus lorsque l'ADN est dégradé; la sensibilité globale du procédé est améliorée, de sorte que de plus petits échantillons de matériel sont nécessaires pour l'analyse. Les informations obtenues à l'aide d'une sonde unilocus peuvent être codées sous une forme se prêtant à la manipulation et à la conservation en - 15 ordinateur. Il se peut, de ce fait, que les responsables d'enquêtes pénales et autres personnes intéressées demandent la création d'un registre d'ADN, d'une base de données de profils d'ADN qui permettrait d'effectuer des comparaisons avec de nouveaux profils, pour établir un lien entre des délits et des individus déjà reconnus coupables d'infractions pénales graves. 33. L'une des prochaines étapes de l'analyse de l'ADN sera probablement l'introduction de la technique dite de "réaction en chaîne par la polymérase". Cette technique exploite les potentialités d'autoréplication intrinsèques de l'ADN dans des conditions favorables. Elle permet de constituer de relativement grandes quantités d'ADN à partir d'un très petit échantillon du matériel: l'ADN ainsi constitué est identique à l'ADN original. Ce procédé rend l'analyse de l'ADN bien plus sensible et permettra d'établir un profil génétique à partir d'échantillons de matériel bien plus petit. 34. Toute évolution scientifique présente toutefois des aspects positifs et négatifs. Dans le cas de la technique dite de "réaction en chaîne par la polymérase", le processus d'amplification multipliera dans l'échantillon outre la quantité d'ADN intéressant, celle d'ADN non désiré, présent peut-être dans des bactéries contaminant l'échantillon examiné. En conséquence, il faudra peut-être.lier l'application de cette technique à de nouveaux procédés " permettant de garantir l'intégrité et la propreté des matériaux à 1'étude. Application de l'analyse d'ADN 35. Comme l'ADN se trouve dans le noyau des cellules qui forment le corps, on peut l'analyser à partir d'une grande variété de matériaux. Ainsi, l'on obtiendra pour un individu le même profil donné quel que soit-l'échantillon examiné, qu'il s'agisse de sang ou d'autres /tissus.comme les racines des cheveux. Les fluides du corps comme la salive, qui ne contiennent généralement que très peu de cellules, ne donneront sans doute pas assez d'ADN pour établir un profil satisfaisant; le sperme d'un homme ayant subi une vasectomie entre dans cette catégorie. Le sang, fluide qui renferme de nombreuses cellules, est un matériel adapté à l'analyse, bien qu'il y ait lieu de souligner que seuls les leucocytes sont responsables du profil. Les hématies, bien plus nombreuses, ne contiennent pas de noyau et donc pas d'ADN chromosomique. L'analyse de l'ADN trouve donc de vastes applications dans les enquêtes sur les agressions et les délits sexuels. Cette technique ne se limite d'ailleurs pas obligatoirement aux matériaux d'origine humaine, car le code génétique des animaux et des plantes est également constitué d'ADN. 36. L'établissement de profils d'ADN est une technique scientifique nouvelle. Elle évolue donc rapidement. L'on ne cesse de mettre au point des tests plus sensibles, moins fragiles, réalisables plus vite et qui apportent des résultats plus fins. C'est pourquoi il importe, dans les lignes directrices pour l'emploi de ces tests, de ne pas seulement tenir compte des - 16 réalisations d'aujourd'hui, mais de se placer dans une perspective d'avenir, pour permettre à cette technique de mûrir dans un cadre juridique et éthique sûr. OBSERVATIONS SUR LES RECOMMANDATIONS 1. Définitions 37. Le groupe de travail a exprimé l'opinion que la recommandation ne devrait renfermer que les définitions nécessaires à sa bonne compréhension. Après examen, on a estimé qu'il n'était pas utile d'y préciser ce que l'on entend par "infraction pénale". Il a semblé préférable de considérer que cette question relève de la législation nationale qui peut comporter ou non des sanctions pénales administratives comme les "Ordnungswidrigkeiten" en Allemagne. Le groupe a pris connaissance du glossaire établi, dans le domaine des tests et du dépistage génétiques à des fins médicales, par un autre groupe de travail relevant du CAHBI (CAHBI-GT-GS). Au vu du haut niveau scientifique de ce glossaire, le CAHBI/CDPC-GT a décidé de rédiger son propre glossaire à l'intention d'un autre groupe-cible, à savoir les juges, juristes, législateurs, ainsi que les non-juristes et nonscientifiques qui parcourraient, pour la première fois peut-être, une publication du Conseil de l'Europe sur les analyses d'ADN et ne connaîtraient pas la terminologie très spécialisée utilisée par les experts. Le groupe a également considéré que, dans le cas d'un procès devant un jury, il faudrait expliquer aux jurés, dans un langage simple et précis, l'objectif de l'analyse de l'ADN. C'est pourquoi il a été décidé de rédiger de manière simple et fonctionnelle le glossaire joint à l'exposé des motifs (voir annexe I). Le groupe s'est demandé quelle expression employer pour décrire correctement le prélèvement et l'analyse d'ADN aux fins de justice pénale. La presse parle fréquemment d'"empreintes génétiques", expression qui a été jugée inexacte. La formule "établissement de profils génétiques" présente l'inconvénient de soulever des questions quant aux limites des méthodes, alors que des libellés comme "tests d1"ADN" ou "typologie de l'ADN" sont trop vagues. Il serait préférable d'employer l'expression "identification par l'ADN" pecur indiquer que la méthode utilisée à des fins de justice pénale m'intéresse que l'identification des personnes et non, par exemple,, les maladies. Le groupe de travail s'est finalement prononcé pour l'expression plus neutre d'"analyse de l'ADN". L'"analyse de l'ADN" ne comprend pas forcément les seuls procédés de laboratoire. La définition s'étend aussi à l'analyse informatique. Le terme "échantillon" désigne tout matériel biologique pouvant être utilisé aux fins d'analyse Certaines juridictions, notamment dans les pays coutumier, font une distinction entre les échantillons d'origine de l'ADN. de droit "intimes" - iv et "non intimes", s'agissant de la possibilité de prélever des échantillons sans le consentement du suspect. Le terme "échantillon" s'applique aux deux catégories. Le groupe de travail a préféré à l'expression "registre d'ADN" celle de "fichier d'ADN" à la demande des spécialistes de la protection des données pour qui l'expression "registre d'ADN" donnerait l'impression qu'une conservation prolongée des données en ordinateur est nécessaire. L'expression "fichier d'ADN" laisse entendre que les données ne seront pas conservées pendant des périodes longues et n'intéresseraient pas de grandes parties de la population (cf. commentaire de la Recommandation n° 8). 2. Champ d'application et limitations 38. Le Groupe de travail a estimé qu'il fallait circonscrire le champ d'application du dispositif à l'analyse de l'ADN aux fins d'identification d'un individu dans le cadre du système de justice pénale. Il en découle que l'identification d'un individu dans d'autres buts, par exemple à des fins médicales ou dans le cadre d'une demande d'immigration, est exclue du champ d'application de cet instrument. La Recommandation 3, paragraphes 2 et 3, prévoit cependant deux exceptions (cf. commentaire de ces dispositions). Le Groupe de travail s'est interrogé sur l'opportunité de recommander que l'utilisation de l'analyse de l'ADN soit restreinte à l'ADN non-codant, comme proposé dans certains pays. Il a pensé que ceci limiterait inutilement l'action des pays qui permettent l'utilisation de l'analyse de l'ADN codant. Le champ d'application de la Recommandation n'est pas limité au suspect mais s'applique aussi aux autres personnes qui peuvent être concernées par une enquête pénale, par exemple les victimes. La législation de la plupart des pays prévoit que des échantillons peuvent être prélevés sur des tiers, avec leur consentement. Il est arrivé que l'on procède à des prélèvements sur des personnes qui n'étaient ni victimes, ni suspects, par exemple tous les habitants d'un village. Si la législation nationale autorise ces méthodes, la Recommandation sera également applicable. La Recommandation s'applique "dans le cadre" du système de justice pénale (voir titre). En adoptant cette terminologie extensive, les experts ont voulu indiquer que les résultats d'une analyse d'ADN pourraient être utilisés, par exemple lorsqu'une victime d'une infraction demande réparation à l'auteur de l'infraction, bien que de telles procédures puissent, dans certains pays, être considérées comme relevant du droit civil et non pénal. Dans de telles affaires cependant, la demande de réparation fait suite à une infraction pénale. Dans des cas exceptionnels, il est possible que l'analyse d'ADN soit utilisée afin d'identifier le "modi operandi" d'un auteur. Dans la mesure où l'objectif serait aussi, dans un tel cas, l'identification d'un auteur, le CAHBI a estimé que ce cas - 18 était également couvert par la Recommandation. Bien que la Recommandation porte sur le prélèvement d'échantillons, ceux-ci ne constituent pas nécessairement des données personnelles pour les besoins de la législation en matière de protection des données (cf. recommandation 7). 3. découlant Utilisation des échantillons et informations en 39. On peut craindre, légitimement ou non, que les échantillons recueillis aux fins d'analyse de l'ADN soient utilisés dans des buts autres que ceux pour lesquels ils ont été prélevés. Il importe donc de définir des règles claires et précises pour éliminer la crainte d'une utilisation illégale des échantillons et des informations dégagées de leur analyse. En revanche, on peut admettre, lorsque des intérêts véritablement légitimes le justifient, que les échantillons et l'information soient utilisés à d'autres fins. Le groupe de travail a défini quelques exceptions. Lorsque la personne sur laquelle les échantillons ont été prélevés en fait la demande, l'information devrait lui être communiquée. Elle serait alors en mesure d'utiliser l'information à des fins de santé. Une autre exception serait à des fins de recherche et de statistique. Lorsque la personne est décédée, sa famille ou ses représentants légaux pourraient souhaiter avoir accès à l'information, par exemple à des fins médicales. Lorsque le droit national le permet, ceux-ci devraient se voir reconnaître l'accès à l'information. Le deuxième paragraphe porte sur un cas qui n'entre pas, a. priori, dans le champ d'application de la Recommandation, à savoir le prélèvement d'échantillons à des fins médicales. Ces échantillons et les informations dégagés de leur analyse ne doivent pas servir à des enquêtes et poursuites pénales, sauf s'il existe des circonstances qui justifient une telle exception, par exemple lorsque le patient donne son consentement ou que le secret médical peut être levé, conformément à la législation nationale, dans des cas extrêmement graves. Le CAHBI a estimé que de telles circonstances doivent rester exceptionnelles. Il va sans dire que ce principe ne peut pas être interprété de manière à permettre à la police ou au ministère public d'avoir ,un libre accès aux dossiers médicaux. Un tel accès est, dans chaque Etat membre, assorti de garanties juridiques adéquates dans la législation nationale. Le droit de secret professionnel pour les médecins est généralement reconnu dans la plupart des Etats. Par *"droit national"*, au deuxième paragraphe du principe, on ne veut pas indiquer qu'il soit nécessaire d'élaborer une législation spécifique en la matière. Les *"références d'identification"* mentionnées au troisième paragraphe pourraient être des numéros d'identification personnelle ("PINs"). La question des échantillons est abordée dans le commentaire de la recommandation 7. - 19 4. Prélèvement d'échantillons aux fins d'analyse de l'ADN 40. Le groupe de travail a procédé à une étude pour déterminer s'il était possible dans les Etats membres de prélever des échantillons à des fins d'analyse de l'ADN dans le cadre d'enquêtes pénales sans le consentement du suspect, de la victime ou d'un tiers n'ayant pas participé à l'infraction. L'étude révèle que les questions abordées sont tellement nouvelles pour certains pays que ceux-ci ne disposent en la matière d'aucune loi ni jurisprudence spécifique. De façon générale, on relève une différence entre les pays de droit coutumier et les pays de droit continental: les premiers exigent habituellement le consentement, voire le consentement écrit tandis que les seconds admettent fréquemment l'usage de la contrainte pour l'obtention d'un échantillon de sang. Toutefois, le consentement est généralement requis lorsqu'il s'agit de victimes ou de tiers. Les pays de droit coutumier sont apparemment les seuls à établir une distinction entre les échantillons intimes et non intimes. Le recours à la contrainte pour le suspect serait autorisé sur la base d'une législation spécifique ou en raison de propositions ou d'une interprétation des textes, par exemple, dans les cinq pays nordiques, en Allemagne, en Grèce, au Luxembourg, aux Pays-Bas et en Suisse. En général, la décision de prélever un échantillon est assortie de plusieurs garanties d'ordre procédural ou bien le prélèvement d'échantillons peut seulement être autorisé dans certaines circonstances ou dans des cas particuliers, tels que les exemples suivants: s'il y a de fortes présomptions qui pèsent sur l'auteur de l'infraction; si le délit est passible d'une privation de liberté (d'une certaine durée dans la plupart des cas) ou constitue une infraction grave en vertu de la législation; s'il y a des raisons de croire que l'analyse des échantillons est capitale pour l'enquête; si le prélèvement luimême ou l'examen peut être effectué sans risque ni douleur excessive; s'il existe une loi qui permet le prélèvement d'échantillons; si celui-ci est dans l'intérêt public; s'il n'est pas contraire au principe de proportionnalité; si l'analyse est limitée à l'ADN non codant. Le consentement est exigé en France et, pour certains types de prélèvements, au Royaume-Uni, avec de légères différences entre l'Angleterre, le Pays de Galles, l'Ecosse et l'Irlande du Nord. Les règles juridiques sont également différentes selon qu'il s'agit d'échantillons intimes (sang, sperme, etc) ou d'échantillons non intimes (cheveux, ongles, etc.). De façon générale, le prélèvement d'échantillons intimes ne semble possible qu'avec le consentement écrit de l'intéressé, en cas d'infraction grave et si l'on peut raisonnablement penser que l'échantillon permettra de confirmer ou de démentir la participation du suspect à l'infraction. Le refus d'un suspect de donner son consentement écrit peut être considéré comme une preuve supplémentaire de sa culpabilité et retenu par les tribunaux en sa défaveur. Un degré raisonnable de contrainte peut être exercé dans le prélèvement d'échantillons non intimes - 20 lorsque le suspect se trouve en garde à vue, avec l'autorisation d'un officier supérieur de police. A Chypre, le prélèvement d'échantillons n'est pas autorisé, tout au moins, pour ce qui est des échantillons qui supposent une pénétration dans le corps humain. En Belgique, le prélèvement des échantillons qui supposent une pénétration dans le corps humain peut être autorisé, mais à la stricte condition d'obtenir le 'consentement de la personne; aucune .contrainte ne peut être utilisée à cette fin. Les raisons invoquées sont liées à la protection de la dignité humaine, à la constitution et à la Convention européenne des Droits de l'Homme. S'agissant du prélèvement d'échantillons chez la victime ou des tiers, le consentement est généralement exigé. En Allemagne, les échantillons peuvent être prélevés seulement en cas d'absolue nécessité pour déterminer la vérité; tous les autres cas sont exclus. En Ecosse, la police peut théoriquement obtenir un mandat, mais cela n'est pas envisagé dans la pratique. La plupart des pays exigent que la décision de prélever un échantillon .soit prise par un juge (Norvège, Danemark s'agissant d'échantillons autres que des échantillons de sang à moins d'un consentement écrit, Suède, Islande, Luxembourg, Suisse, Allemagne). Des situations exceptionnelles comme l'urgence ou l'existence d'un consentement écrit peuvent justifier que l'autorisation de prélèvement soit prise par le parquet ou un officier supérieur de police, cette décision pouvant être ultérieurement soumise à un juge. En règle générale, les échantillons de sang ne peuvent être prélevés que par du personnel médical qualifié, c'est-à-dire des médecins ou infirmiers. Certaines lois prévoient des règles particulières (tests réalisés à l'intérieur d'un bâtiment, dans une pièce séparée, consignés par écrit) ou des règles générales (droit de demander une contre-expertise, droit d'intenter un recours contre une décision - dans certains pays seulement). Les médecins qui ne travaillent pas dans le service public peuvent, dans certains pays, refuser d'effectuer le test (Danemark, Suisse), tandis que la situation inverse est légale dans d'autres pays, c'est-à-dire que les médecins du service public ne peuvent refuser d'effectuer le test sauf pour des motifs exceptionnels (Norvège, Danemark - les médecins peuvent refuser si le prélèvement est risqué, douloureux, d'un résultat aléatoire, ou si le patient est en mauvaise condition physique Suède, Suisse, Allemagne - médecins travaillant pour la police). Au Royaume-Uni et en Islande, le médecin peut refuser d'effectuer le test pour des raisons d'éthique professionnelle et médicale. 41. Le groupe de travail a étudié certaines décisions de la Commission européenne des Droits de l'Homme (requêtes n° 8239/78 - 21 et 8278/78), concernant des requêtes présentées par des personnes soumises à un examen sanguin ordonné lors d'une procédure en désaveu de paternité ou parce qu'elles étaient soupçonnées d'avoir conduit en état d'ébriété. La Commission a estimé que le fait de contraindre une personne à un examen du sang constituait une privation de liberté au regard de l'article 5 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, même si cette privation est de très courte durée. L'alinéa l.b dudit article autorise toutefois la détention d'une personne "pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue de garantir l'exécution d'une obligation prescrite par la loi". La Commission a également souligné qu'une intervention médicale forcée, même mineure, doit être considérée comme une atteinte au droit au respect de la vie privée, garanti par l'article 8 de la Convention. Il convient donc d'examiner, à la lumière des dispositions de l'article 8, paragraphe 2, de l'instrument, si cette atteinte est justifiée ou non. Ledit paragraphe 2 stipule .qu'il ne peut y avoir ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée que pour autant qu'elle est prévue par la loi et constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire dans certains domaines bien définis comme la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales ou la protection des droits et libertés d'autrui. Un certain nombre de garanties doivent exclure tout arbitraire ou abus. Dans le cas ou des intérêts vitaux sont en jeu et où il n'existe aucune autre possibilité, il faut admettre le non respect du droit garanti par l'article 8. Lorsqu'un automobiliste conduit en état d'ébriété, la protection de la société et plus particulièrement la sécurité routière et la santé d'autrui justifient une exception à l'article 8, paragraphe 1, de la Convention européenne. 42. Ayant constaté les grandes disparités des codes de procédure pénale et ayant surtout tenu compte de la jurisprudence des organes de la Convention européenne des Droits de l'homme, le groupe de travail a adopté une démarche très prudente dans la rédaction. Le prélèvement d'échantillons doit, conformément aux décisions prises par la Commission européenne, être défini par la loi et se justifier pour les raisons mentionnées dans la Convention. Le Groupe de travail a relevé que l'utilisation du dépistage de masse sur de larges populations pourrait soulever une question relative à la présomption de l'innocence. Si une personne refuse de se soumettre à un dépistage, ceci ne devrait pas automatiquement susciter la suspicion. Il pourrait y avoir des raisons valables à un tel refus. 43. Le principe de proportionnalité dans le recours à la contrainte est reconnu dans tous les Etats membres, parfois en vertu de la Constitution. Ce principe est expressément évoqué au deuxième paragraphe. Il appartient à chaque Etat de définir les conséquences d'un refus à se soumettre à un examen sanguin. - 22 5. Recours à l'analyse de l'ADN 44. La Recommandation 5 a pour but de souligner qu'il doit être possible dans la pratique de recourir à l'analyse de l'ADN pour tous les types de délits, et pas uniquement pour les infractions graves. Ce point est particulièrement important pour la défense qui, grâce à l'utilisation de cette technique, sera en mesure d'innocenter le suspect. C'est pourquoi le principe de proportionnalité n'a pas été mentionné dans ce paragraphe, car la défense pourrait souhaiter recourir à des analyses d'ADN dans des affaires moins graves. Toute autre est la question de savoir s'il convient, dans la pratique, de réserver aux infractions graves l'analyse de l'ADN, surtout lorsqu'elle est demandée ou effectuée pair le ministère public. Cette technique ne devra évidemment pas, ne serait-ce que pour des raisons de rentabilité, être appliquée dans de simples cas de vol à l'étalage (si tant est qu'on puisse le faire) ou à des infractions mineures au code de la route. L'utilisation du mot "recours", au lieu d'"accès" met en lumière cette distinction. La règle de la meilleure preuve possible devra cependant être prise en compte. 6. Agrément et contrôle des analyses d'ADN 45. Si elle est faite correctement, l'analyse de l'ADN aboutit à des différenciations bien plus fines que les tests sanguins, mais son application, en évolution constante, exige un matériel très sophistiqué. Il importe donc, lorsque elle est utilisée à des fins de justice pénale, de ne faire appel qu'aux laboratoires répondant aux normes les plus élevées en matière d'intégrité scientifique, de compétence technique et d'expérience. Un moyen d'y parvenir serait d'instituer un système d'agrément et de contrôle. Ainsi, le ministère français de l'Intérieur a fait contrôler 18 laboratoires et constaté que 5 seulement remplissaient les conditions ministérielles requises. Il a été officiellement recommandé aux juges de faire appel aux seuls laboratoires agréés. Il n'est toutefois pas possible d'imposer aux juges le recours à certains laboratoires car l'on porterait atteinte à leur liberté de choix. Cependant, un système efficace d''agrément et de contrôle les orienterait vers ' les laboratoires les plus qualifiés pour effectuer l'analyse. Il arrive que l'analyse de l'ADN soit fournie par des autorités publiques (Ministère britannique de l'Intérieur, des laboratoires de police comme celui du Bundeskriminalamt allemand etc.) ce qui pose le problème, du moins en théorie, de l'indépendance des laboratoires. En revanche, on peut craindre que les tests effectués par des entreprises privées soient favorables à celui qui paie l'analyse. Ces craintes seraient dissipées si le laboratoire satisfaisait aux normes d'intégrité scientifique requises par la présente recommandation. Il parait important que des méthodes d'analyse d'une grande précision soient développées, afin d'éviter d'obtenir des - 23 informations non-pertinentes, comme par exemple des informations concernant la santé d'une personne. 7. Protection des données 46. La Recommandation, ainsi que le préambule, visent à rappeler l'importance, dans ce domaine, des aspects liés à la protection des données. Dans ce contexte, on rappelle la Recommandation n° R (81) 1 relative à la réglementation applicable aux banques de données médicales automatisées, bien qu'une nouvelle recommandation qui pourrait couvrir des données génétiques soit actuellement en cours d'élaboration. Les échantillons recueillis ne constituent pas, en soi, des données à caractère personnel au regard d'une législation sur la protection des données. Tout au plus peuvent-ils être considérés comme tels lorsque les échantillons sont analysés et que des informations en sont dégagées. C'est pourquoi la collecte d'échantillons n'est pas effectuée conformément à la législation sur la protection des données mais en vertu des dispositions normales régissant les pouvoirs de la police ou du code de procédure pénale. En revanche, la conservation des données et .l'exploitation des informations seront régies, entre autres, par la législation sur la protection des données. Au sujet de la collecte des informations, référence est faite au principe n° 2 de la Recommandation N° R (87) 15 visant à réglementer l'utilisation des données à caractère personnel dans le secteur de la police. Ce principe est le suivant: la collecte de données à caractère personnel à des fins de police devrait se limiter à ce qui est nécessaire à la prévention d'un danger concret ou à la répression d'une infraction pénale déterminée. Toute exception à cette disposition devrait faire l'objet d'une législation nationale spécifique. Ce principe exclut une collecte illimitée et sans discrimination de données par la police. L'expression "danger concret" doit être comprise comme ne se limitant pas une infraction ou à un auteur d'infraction particulier, mais englobant tous les cas où des présomptions suffisantes permettent de penser qu'une infraction pénale grave a été ou pourrait être commise et excluant des possibilités éventuelles non assorties de preuves. 8. Conservation des échantillons et des données 47. Le groupe de travail, tout à fait conscient des difficultés de rédaction de la Recommandation 8, parce qu'elle met en jeu divers intérêts protégés, de nature très sensible, a estimé nécessaire de trouver un juste équilibre entre ces intérêts. La Convention européenne des droits de l'Homme et la Convention sur la protection des données prévoient, toutes deux, des exceptions dans les domaines de la répression des infractions pénales et de la protection des droits et libertés des tiers. Les exceptions ne sont toutefois admises que dans la mesure où elles sont compatibles avec ce qui est nécessaire dans une société démocratique. - 24 48. Les principes 3 et 7 de la Recommandation N° R (87) 15 prévoient que l'enregistrement de données à caractère personnel à des fins de police devrait ne concerner que des données exactes et ne se limiter qu'aux données nécessaires pour permettre aux organes de police d'accomplir leur tâche légale. Il convient d'effacer les données dès lors qu'elles ne présentent plus d'intérêt aux fins pour lesquelles elles ont été conservées. 49. Puisque l'objectif premier de la collecte d'échantillons et de la conduite d'analyses d'ADN sur ces échantillons est l'identification des délinquants et la disculpation des suspects, les données devront être effacées dès que les suspects auront été innocentés. La question se pose alors de savoir combien de temps les informations obtenues par analyse de l'ADN, ainsi que les échantillons sur lesquels elles s'appuient, peuvent être conservés en cas de découverte de culpabilité. 50. Le'principe général est que les informations sont effacées lorsqu'elles ne sont plus nécessaires aux fins pour lesquelles elles ont été recueillies et utilisées. Ceci serait généralement le cas lorsqu'une décision finale concernant la culpabilité de l'auteur a été rendue. Par *"décision finale"*, le CAHBI entend couvrir normalement, en droit national, une décision judiciaire. Le groupe de travail a toutefois reconnu la nécessité de constituer des bases de .données dans certains cas et pour certaines catégories d'infractions, qui peuvent être considérés comme constituant des circonstances justifiant d'autres solutions, en raison de leur gravi.té. Il est parvenu à cette conclusion après une analyse approfondie des dispositions pertinentes de la Convention européenne des Droits de l'Homme, de la Convention sur la protection des données et d'autres instruments juridiques élaborés dans le cadre du Conseil de l'Europe. En outre; il a examiné la possibilité que tous les Etats membres instaurent un système de casier judiciaire pouvant être utilisé pour les besoins du système de justice pénale (cf. Recommandation N° R (84) 10 sur le casier judiciaire et la réhabilitation des condamnés). En conséquence, il a admis que l'on pouvait constituer des banques de données, à titre exceptionnel et à certaines conditions strictes, à savoir: - lorsqu'il y a eu condamnation; - lorsque celle-ci est due à une infraction grave, à 1'encontre de la vie, l'intégrité ou la sécurité d'une personne; - lorsque la période de conservation des données est strictement limitée; - lorsque la conservation est définie et réglementée; - lorsqu'elle fait l'objet d'un contrôle du parlement ou d'un organe indépendant. 51. Il appartient à chaque Etat de définir ce qu'il entend par "infraction grave contre la vie, l'intégrité ou la sécurité des personnes". Les rédacteurs de la Recommandation souhaiteraient que les fichiers d'ADN soient limités aux seuls cas méritant la conservation des informations recueillies après analyse de l'ADN. - 25 52. Le groupe de travail a estimé nécessaire de prévoir quelques autres exceptions au principe général. Lorsque la personne concernée en fait la demande, des échantillons ou tissus corporels pourraient être stockés pour une plus longue période, comme par exemple afin de fournir des preuves d'une éventuelle erreur judiciaire. Une autre exception concerne des échantillons trouvés sur le lieu d'un crime, qui ne peuvent pas être attribués à une personne déterminée. De tels échantillons peuvent être stockés jusqu'au moment où il y a prescription de la poursuite de l'infraction, selon le droit national. L'exception énoncée au paragraphe 4 du Principe 8 intéresse les cas où la sécurité nationale d'un pays est en jeu. En élaborant cette disposition, le groupe de travail a considéré que l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme prévoit une exception dans l'intérêt de la sécurité nationale. Cette exception s'appliquerait en particulier aux actes de terrorisme dont la répression constitue depuis longtemps une priorité pour le Conseil de l'Europe (cf. notamment la Convention européenne pour la répression du terrorisme, 197.7 (STE N° 90) et la Recommandation n° R (82) 1 concernant la coopération internationale en matière de poursuite et de répression des actes de terrorisme). 9.Egalité des armes 53. Cette recommandation tient compte des disparités des codes de procédure pénale entre les Etats membres, et notamment des différences entre les méthodes d'enquête et de poursuites, selon que la procédure est accusatoire ou inquisitoire. Il importe que les analyses d'ADN soient accessibles à la défense, surtout dans les pays où seuls les laboratoires de police les effectuent ou dans les cas où la défense voudrait obtenir une contre-expertise. Le fait que la décision de recourir à cette technique soit prise par le juge, selon des critères définis par la loi, ne serait pas contraire à ce principe. 54. L'expression "égalité des armes" se réfère à une terminologie en usage concernant la notion de "procès équitable" telle que la conçoit la Convention européenne des droits de l'Homme. Si le matériel analysé risque d'être complètement détruit, la défense doit en être informée afin que ses propres experts puissent assister aux tests chaque fois que possible. L'égalité des armes est particulièrement importante en la matière. L'analyse de l'ADN permet aussi à la défense de lever des présomptions pouvant peser ultérieurement sur une personne. 10. Normes techniques 55. On s'efforce déjà - notamment l'Académie suisse des sciences médicales et l'EDNAP (qui réunit quinze laboratoires de différents pays au sein de la "International Society of Forensic Haemogenetics"), d'harmoniser, aux plans national et européen, les différentes méthodes d'analyse de l'ADN. La présente recommandation a pour but d'encourager ce travail jugé - 26 indispensable pour obtenir les normes les plus élevées possibles, tant au niveau national qu'international. 11. Propriété industrielle 56. Cette recommandation cherche à mettre en garde contre les monopoles de certaines sociétés biomédicales ou des laboratoires de police, qui paraissent actuellement dominer le marché. Ces monopoles risquent, en particulier, d'empêcher la défense d'avoir accès à l'analyse de l'ADN, ce qui serait contraire à l'esprit du présent instrument. Il faut reconnaître, en outre, l'existence de droits de propriété intellectuelle liés à certaines méthodes d'analyse de l'ADN. Ces droits ne sont évidemment pas remis en : cause par la recommandation, qui encourage le détenteur des droits de propriété à permettre l'accès à cette technique. 12. Echange d'informations transfrontières 57. Si toutes les conditions énoncées dans cette Recommandation, notamment celles contenues dans la recommandation No 6 et qui concernent les connaissances professionnelles etc, sont remplies, un pays qui le demanderait, devrait pouvoir obtenir une analyse d'ADN dans un autre pays,' en vue de la faire valoir devant ses propres tribunaux. Ainsi, en Allemagne par exemple, des tribunaux ont déjà utilisé les analyses faites par des laboratoires britanniques. Il faut alors s'assurer que les conditions requises par la recommandation sont bien remplies. Si elles ne le sont pas, les Etats ne devront pas faire appel à des laboratoires fonctionnant dans les pays qui n'appliquent pas ces normes. De telles conditions s'appliquent aussi aux laboratoires situés dans les Etats non membres du Conseil de l'Europe. 58. La communication transfrontière des conclusions de l'analyse, ou en l'occurrence des échantillons, peut se faire en vertu des traités pertinents sur l'échange d'informations en matière pénale, la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (STE 30) notamment. Cette aide peut prendre de multiples formes, comme celle d'une commission rogatoire, aux termes de l'article 3 de la Convention, qui demande à un expert du laboratoire effectuant l'analyse d'ADN de déposer sous serment. "59. L'article 12 de la Convention pour la protection des données prévoit qu'un pays "ne peut pas, aux seules fins de la protection de la vie privée, interdire ou soumettre à une autorisation spéciale, les flux transfrontières de données à caractère personnel à destination du territoire d'une autre partie". La Convention prévoit deux exceptions à ce principe. - 27 ANNEXE Glossaire ADN Acide désoxyribonucléique - substance chimique complexe qui se trouve dans les chromosomes. Elle est composée d'un très grand nombre de petits sous-éléments disposés en séquences. La dimension des séquences et l'organisation des souséléments en leur sein est propre à chaque individu. ADN non codant Les parties de l'ADN qui ne représentent pas des gènes et qui donc ne contrôlent pas des caractéristiques physiques, mais qui peuvent dans certaines circonstances être analysées en utilisant des profiles génétiques. Allèles Différentes formes que peuvent prendre un gène localisé à un même locus sur un chromosome précis. Des allèles sont responsables d'un même caractère héréditaire comme les groupes sanguins ABO, mais permettent des variations de ce caractère, par exemple groupe sanguin A,B ou O. Cartographie gènes Détermination des localisations relatives des des différents gènes sur un chromosome donné. Cellule Ces structures, minuscules et visibles uniquement au microscope, sont toutefois les composantes fondamentales de tous les tissus et de tous les organes, végétaux ou animaux. Les organismes vivants sont composés de millions de cellules. Chromosomes Eléments du noyau porteurs des caractères héréditaires. La cellule humaine contient 46 chromosomes, repartis en deux groupes fondamentalement semblables. Dans chaque jeu, un chromosome est hérité de la mère et l'autre du père. Les chromosomes sont des structures en forme de bâtonnets portant les gènes dans leur partie longue. Chromosomes homologues Chromosomes correspondants, l'un provenant de la mère et l'autre du père, et portant les mêmes gènes. Code génétique L'information qui détermine l'hérédité. Empreinte Autre expression pour "profil génétique" décrivant d'ADN plus précisément le modèle complexe de fragments d'ADN révélé par une sonde plurilocus (voir "sonde"). Le procédé n'a rien de commun avec la dactyloscopie, aussi vaut-il mieux éviter l'expression "empreintes d'ADN". - 28 Enzyme de Des "ciseaux biologiques" produits par certaines restriction bactéries, utilisés pour sectionner l'ADN en petits fragments. Etablissement des profils génétiques Technique d'analyse de l'ADN qui suppose le sectionnement de la structure d'ADN en petits fragments composés de séquences de souséléments. La dimension et l'organisation des séquences sont propres à chaque individu. En rendant visibles ces .groupes de fragments d'ADN à l'aide d'un certain nombre de techniques biochimiques, on obtient le profil génétique de l'individu. Gamète Cellule participant au processus de reproduction; le gamète femelle est l'ovule et le gamète mâle, le spermatozoïde. Gène Unité fondamentale, physique et fonctionnelle, de l'hérédité. Les gènes contrôlent le développement d'un caractère héréditaire de l'individu comme, par exemple, la couleur des yeux. Il se compose d'une séquence de sous-éléments d'ADN et tous les gènes sont- localisés en un point défini d'un chromosome, (cf. dictionnaire médical). Puisque la.cellule comporte deux jeux fondamentalement semblables de chromosomes, un de chaque parent, le locus responsable de la production d'un caractère donné se retrouvera deux fois dans chaque cellule. Chaque caractère est ainsi déterminé par deux gènes, l'un du père et l'autre de la mère. Génome Ensemble du matériel génétique contenu dans une cellule, ou plus précisément porté par un gamète. Hétérozygote Individu possédant deux formes différentes (allèles) d'un gène, situé à un locus donné sur des chromosomes homologues. Il en est ainsi d'une personne de groupe sanguin AB qui. possède le gène du groupe A sur un chromosome et le gène du groupe B sur l'autre chromosome au locus déterminant le groupe sanguin ABO. Homozygote .Individu possédant deux formes identiques (allèles) d'un gène situé à un locus donné sur des chromosomes homologues. Locus Site d'un gène ou d'une autre séquence d'ADN sur un chromosome. Le locus peut être occupé par un ou plusieurs allèles. Noyau Structure située, à l'intérieur de la cellule. Les cellules contiennent presque toutes un noyau, l'exception la plus remarquable étant le globule rouge humain. Le noyau contient les chromosomes. - 29 - * Réaction en chaîne de polymérase Technique permettant d'accroître la sensibilité de l'analyse d'ADN. C'est un moyen d'amplifier une séquence de l'ADN, pour en obtenir davantage, de même structure que le matériel initial, afin de disposer d'assez de substance d'ADN pour 1'analyse. Sonde Un échantillon d'ADN spécialement préparé pour visualiser l'ADN pendant l'analyse. Les sondes unilocus (SLP) ne réagissent qu'avec des fragments spécifiques d'ADN, révélant uniquement une partie du profil génétique. Des sondes multilocus (MLP) révèlent un grand nombre de profils.