SALLE I LE PÈLERINAGE, UN CHEMIN RITUEL DE PURIFICATION ET CONNAISSANCE A PEREGRINACIÓN. UN CAMIÑO RITUAL DE PURIFICACIÓN E COÑECEMENTO Aller en pèlerinage est devenu, de nos jours, une évocation sentimentale des lieux qui ont marqué notre vie et notre mémoire. Mais ce pèlerinage est appelé ainsi par analogie à un phénomène qui est, par excellence, religieux. Le lieu saint peut adopter différentes formes : arbre, fontaine, montagne ou toute ville ou temple où des reliques sont vénérées ; un signe visible du contact entre le caractère humain et divin. Mais, sur le chemin, métaphore de la vie sur terre, on assiste déjà à une transformation personnelle visible au travers d’une série de rites dont le point culminant est le moment de l’arrivée. Là, après avoir franchi la ligne d’arrivée, le pèlerin renait transformé en homme nouveau. Presque toutes les formes de culte ont créé cette figure de conciliation avec ce qui est sacré. Des indices de pèlerinages préhistoriques apparaissent déjà dans les cultures mésopotamienne, égyptienne et grecque. Au Moyen Âge chrétien et musulman, ils connaissent un essor qui se prolonge jusqu’à nos jours, de même que les voyages vers les lieux sacrés de l’Inde ou la Chine. Le pèlerinage est un chemin rituel entrepris à titre individuel ou collectif dans le but de rechercher la purification, la perfection ou le salut. Une série de liens se nouent pendant cette expérience religieuse : entre un lieu profane et un monde supérieur, entre un marcheur solitaire et une communauté, et entre le pèlerin en chair et en os et celui qui renait purifié après avoir atteint son but. Ces liens font la différence entre le pèlerinage et n’importe quel autre type de déplacement ou voyage. Pour qu’il y ait pèlerinage, il faut donc absolument avoir un lieu, un parcours qui suppose un sacrifice et un effort physique et un objectif sacré. Cette carte est le fruit d’un travail de recherche continu débuté en 2003 par le Musée des Pèlerinages. Son but est de situer les différents pèlerinages du monde : leurs emplacements et objets de cultes, leurs fêtes, leurs rituels, leur histoire et tout ce qui permet de connaître chaque pèlerinage, ainsi que la culture dont il provient. De cette manière, nous allons inclure progressivement sur la carte les noms des lieux de pèlerinage qui seront découvert. Nous vous invitons à participer à ce projet en apportant des données sur les pèlerinages qui n’apparaissent pas actuellement sur cette carte. À cet effet, vous trouverez des formulaires à la sortie du musée. D’avance merci de votre collaboration. 1 No soy capaz de caminar: 500 pares de zapatos de vidrio en dirección a Nidaros (sélection) Borgny Svalastog Norvège, 2006 Verre soufflé dans un moule Don de l’auteure Les chaussures en verre symbolisent l’arrivée du Chemin, au travers de sept couleurs utilisées d’une manière symbolique en lien avec l’Universalité du Pèlerinage. Cette sélection faisait partie d’une installation intitulée : Je ne suis pas capable de marcher : 500 paires de chaussures en verre en direction de Nidaros, faisant partie de l’exposition : 14+1 Saisons. Expériences de con:tact. Pèlerinage à Grabarka. « La montagne aux 6.000 croix » Cristina García Rodero 1997-1998 Positifs en NB sur papier Don de l’auteure Grabarka, « la montagne aux 6.000 croix », est actuellement le centre de pèlerinage le plus important pour l’Église Orthodoxe Polonaise, même si, depuis quelques années, certains croyants du culte catholique y participent aussi. Deux traditions sont à l’origine de la sacralisation de cette montagne et de la création du sanctuaire. La plus ancienne remonte au XIIIe siècle, lorsque que les gens de la région, terrorisés par les invasions tartares, y cachèrent une icône de la Transfiguration du Christ qui n’a jamais été retrouvée. L’autre tradition est née en 1710, pendant l’épidémie de choléra qui a frappé la zone. C’est à cette époque qu’un paysan a eu un rêve, considéré comme une révélation divine, où il portait une croix jusqu’au sommet de la montagne pour être épargner. Depuis, aussi bien les orthodoxes que les catholiques vont en pèlerinage jusqu’à Grabarka pour y clouer leurs croix dans la forêt et boire l’eau de la fontaine miraculeuse. La taille de la croix dépendra de l’intensité de l’offrande et de la pénitence. Comme beaucoup d’autres endroits de culte et de pèlerinage, Grabarka est une élévation du terrain (lieu de révélation) liée à l’élément naturel qu’est l’eau (symbole de la purification des pêchés) et à la croix (symbole chrétien de la Passion de Jésus). Pèlerins à Ajmer (Inde) Nacho Castellanos 1995-1997 Positifs en NB Don de l’auteur Ajmer, ville du nord de l’Inde de la région de Rajasthan, a été fondée au XIIe siècle. C’est un lieu saint pour 90 millions de musulmans soufis du souscontinent asiatique. Plus de 150.000 fidèles provenant de l’Inde, du Bengladesh, du Pakistan et de l’Afghanistan se rendent tous les ans à Ajmer, ce qui représente le pèlerinage musulman le plus important de cette zone géographique. Ils commémorent l’Urs, l’anniversaire de la mort de Khawaja Moinuddin Chisti (1139-1236), saint soufi précurseur de l’Islam en Inde. À leur arrivée, les pèlerins posent leurs mains, leur front et leurs lèvres sur un des arcs de l’entrée au tombeau. Après, pendant toute la journée, ils écoutent la musique mystique des Qawwali, pendant que des rations de riz et de thé sont distribuées aux participants, quelque soit leur religion. Le soufisme est le courant le plus ouvert et tolérant de l’islamisme. 2 Pèlerinage à Lalibela. Éthiopie Fernando Moleres 2001 Positifs en NB Don de l’auteur Lalibela, petite ville perdue au cœur de l’Éthiopie, a été construite à l’instar de Jérusalem : avec un petit ruisseau appelé Yordanos (Jourdain) et une colline appelée Tabor. Elle accueille un merveilleux ensemble de onze églises et un monastère creusés dans le roc au XIIe siècle. La mort par empoisonnement du roi Lalibela est à l’origine de cet ensemble. Après sa mort, un ange emmena son âme au ciel où il put observer des constructions merveilleuses que Dieu lui demanda d’imiter sur terre. Une fois son âme de retour sur la terre, des hommes et des anges ont construit Lalibela. Près de 50.000 chrétiens (de culte monophysite et copte) s’y rendent pour célébrer Noël, l’Épiphanie et Pâques. De même qu’il y a huit siècles, tous les ans, les célébrations commencent avec différentes processions de fidèles provenant de chacune des églises ; ils se réunissent tous sur l’esplanade centrale pour, ensuite, renouveler leur baptême dans les piscines remplies d’eau du Jourdain. La tradition révèle aussi que l’Arche de l’Alliance serait conservée à Lalibela. Devant le sanctuaire de Qoyllur Rit’i. Pérou Christoph Lingg Mai 2002 Photographie en NB Le pèlerinage vers le sanctuaire du Seigneur de Qoyllur Rit’i au Pérou est la fête indigène qui réunit le plus de personnes en Amérique et c’est l’une des manifestations les plus profondes de la religiosité andine. Le rituel se compose d’un pèlerinage de plusieurs jours pendant lequel les pèlerins se dirigent vers les limites des neiges éternelles pour atteindre le cœur du sanctuaire. Une foule de fidèles arrive à la vallée de Sinakara trois jours avant la célébration du Corpus Christi. Les actes liturgiques se succèdent accompagnés du son des cloches, de feux d’artifices, de fusées, de danses et de chants populaires, le soir en récitant son rosaire et pendant le jour en célébrant des messes. Pendant le « Jour Principal », il se peut que près de 70.000 pèlerins s’y rendent pour assister à des actes religieux et festifs : la procession, le défilé folklorique et, enfin, la Bénédiction et les Adieux. Le Chemin de Kumano. Japon 1999 Positifs en couleur sur papier Don du Gouvernement de la Préfecture de Wakayama. Japon À l’origine, Kumano était une terre sacrée où habitaient les dieux shintoïstes de la primitive religion Shinto. Grâce à la propagation du Bouddhisme, ces dieux étaient aussi considérés comme l’incarnation de Bouddha. Le chemin de Kumano est ainsi devenu un exemple du syncrétisme religieux et de la cohabitation de deux religions. L’itinéraire du Chemin Kumano part depuis la ville de Kyoto et son parcours s’étend sur 370 km parsemés de petits sanctuaires et de grands temples. Il a atteint son apogée entre les Xe et XIIe siècles, puisque des gens de toutes les classes sociales, y compris la famille impériale, participaient à ce 3 pèlerinage. Depuis le XVIIe siècle, il a vécu un petit déclin qui tend à disparaître actuellement grâce à une revitalisation. Quatre fêtes, se déroulant pendant les quatre saisons et dont deux sont liées au feu comme élément purificateur, sont associées à ce chemin. Les ressemblances et parallélismes de beaucoup de caractéristiques historiques entre le Chemin de Kumano et le Chemin de Saint-Jacques ont contribué à la signature de la Déclaration Officielle d’Amitié entre la Communauté Autonome de la Galice et la Préfecture de Wakayama. e siècle. Depuis lors, des milliers d’hindous sont allés en pèlerinage vers cette ville pour se purifier dans les eaux du fleuve grâce à de larges escaliers, appelés ghâts, et y réaliser leur offrandes, écouter les guides spirituels, sâdhus et gourous, et même pour y mourir. VII Lustres siècle ap. J.-C. Argile modelée Provenant éventuellement des catacombes de Saint Sébastien (Rome) I Pèlerins dans un ghât à Bénarès. (Inde) Luís Baylón 2001 Positifs en NB sur papier Don de l’auteur Bénarès ou Vanarasi, est une des villes de pèlerinage les plus emblématiques du monde. L’hindouisme étant la religion majoritaire en Inde, la force de son vécu religieux devient totalement flagrant dans cette ville baignée par le sacro-saint Ganges. Le caractère sacré de ce fleuve lui vient déjà depuis sa source dans l’Himalaya, mais c’est à Bénarès où sa vénération atteint son sens le plus profond. Même si en Inde toutes les rivières sont sacrées, parce qu’elles sont assimilées avec la divinité et qu’elles octroient une fertilité physique et spirituelle – en arrosant les champs et en purifiant l’âme –, le Ganges se distingue parmi tous puisqu’il est considéré comme leur origine. C’est Ganga, déesse de l’eau, qui offre la vie et, aussi, celle qui reçoit les cendres des morts, pour conduire l’âme du défunt jusqu’à Shiva (dieu de la mort) et permettre, en même temps, sa renaissance. Les récits sur le pèlerinage de Bénarès semblent remonter au er Les lustres étaient utilisés, entre autre, pour l’éclairage des lieux funéraires. Dans les catacombes près des niches d’enterrement, il y avait des petits creux ou des tablettes où ils étaient posés. Ils possédaient un allumoir (bico-rostrum) pour la mèche (ellychnium) qui était normalement en étoupe, chanvre ou fibres de ricin, papyrus ou d’autres matériels et un réservoir pour le combustible, en général de l’huile. Croix reliquaires. Encolpia e e XII et XIII siècle Bronze et argent Leur véritable nom en grec encolpion (« sur la poitrine ») nous suggère comment s’utilisaient ces croix. Elles servaient à introduire des reliques, que les pèlerins apportaient souvent des centres chrétiens les plus importants de pèlerinage de la Méditerranée Orientale (Syrie, Palestine, Égypte…) au Moyen Âge ; elles furent fréquemment utilisées su IVe au XIIIe siècle. Elles étaient formées de deux pièces articulées grâce à une 4 charnière, ce qui permettait d’y garder à l’intérieur la relique correspondante. Grâce à un anneau, les fidèles pouvaient la suspendre à une chaînette ou à une cordelette sur la poitrine. Leur décoration montrait presque toujours le Christ Crucifié, la Vierge et même les évangélistes. L’encolpion était, en même temps, un signe distinctif du croyant chrétien et un objet de dévotion. De nos jours, la croix que portent les évêques de l’Église catholique reçoit ce nom. Moulin à prières. Khorten Tibet, XIXe siècle Bois, ivoire, turquoises et corail. Le khorten ou moulin à prières est un des objets les plus utilisés par les croyants bouddhistes. À l’entrée des temples, il y en a de très grands, mais ceux qui tiennent dans la main sont les plus utilisés par les pèlerins qui les emportent lors de leurs voyages. Le corps cylindrique est gravé avec des emblèmes mystiques ou des prières en sanskrit et, à l’intérieur, se trouvent à leur tour de petits papiers qui contiennent des textes ou des invocations sacrées (mantras). Le cylindre tourne sur le manche de sorte que la personne qui le porte le fait tourner, toujours en direction du soleil, pendant qu’elle marche ou médite, de sorte que chaque tour équivaut à une récitation multiple des prières qu’il contient. Ce mouvement continu produit un son doux et cadencé qui est en harmonie avec les pas du marcheur. Le bouddhisme possède essentiellement quatre lieux de pèlerinage, tous associés avec la vie de Bouddha au Népal et en Inde : Lumbini, son lieu de naissance ; Sarnath, où il a prêché son premier sermon ; Bodh-Gaya, où il a atteint l’Illumination ; et Kushinagara, endroit où il mourut. [Le Livre du pèlerin à la Mecque] 1830 env. Manuscrit sur papier de fil ciré Couvertures en cuir avec des rivets en or Le pèlerinage à la Mecque, hayy, est pour tout croyant musulman adulte et sain un des « Cinq piliers de l’Islam », d’après la sourate 3:93 du Coran. Dès lors que sa situation économique le lui permet et que tous ses autres besoins sont couverts, ce pèlerinage est obligatoire au moins une fois dans sa vie. Il représente un grand pardon qui permet au croyant d’atteindre la rémission de tous ses pêchés précédents. Une personne qui va en pèlerinage peut le refaire au nom de quelqu’un qui est malade ou qui ne peut pas le faire lui-même. La Mecque (Arabie Saoudite) est la première des villes sacrées de pèlerinage de l’Islam. Les deux autres villes les plus importantes sont : Jérusalem (Israël – Palestine) et Médine (Arabie Saoudite), tombe du prophète Mahomet. Sandales. Waraji Japon, 1999 Fibre végétale Don de José Isorna, OFM Sandales utilisées couramment par les moines et même par les pèlerins bouddhistes. Ce furent les plus utilisées par les moines Zen, Kakuju Matsubara de Tokyo et Hakuho Hanahoka du Monastère de Saitama-Ken, pour parcourir le Chemin de Saint-Jacques pendant l’Année Sainte 1999. Ils réalisèrent le pèlerinage en compagnie de deux japonais chrétiens et, ensembles, ils ont mis sur pied cette initiative dans le but de favoriser l’œcuménisme entre les différentes religions et la paix entre tous les êtres humains, comme le prouve un document remis à l’Évêque de Saint-Jacques et au Prieur du Couvent de Saint François. Au Japon, il y a de nombreux lieu de pèlerinage, aussi bien de la religion bouddhiste que de la shintoïste ; les plus importants sont Ise, Nara ou Kumano. 5 Promenade sur les terres de Portomarín. Chemin de SaintJacques Luisa Rubines 2002-2004 Papier satiné en couleur Don de l’auteure LES ALLÉGORIES DU PÈLERINAGE AS ALEGORÍAS DA PEREGRINACIÓN Le concept de pèlerinage est utilisé par toutes les cultures de manière allégorique pour exprimer la ressemblance entre le voyage physique de l’individu pour vénérer un endroit sacré et le voyage spirituel que celui-ci doit suivre dans sa vie. L’allégorie est une manière de communication symbolique, où un fait réel, une image visuelle ou écrite n’est qu’apparente et elle contient un sens avec un caractère différent et caché, parfois compréhensible seulement pour un groupe réduit de personnes. Le voyage physique du pèlerin représente, en même temps, un voyage interne à caractère spirituel. Le caractère physique de l’effort et des avatars pour atteindre le but que représente le pèlerinage est pris en compte comme une métaphore ou exemple de ce qu’est en réalité le voyage spirituel de l’être humain sur la terre. L’objectif de ce voyage est d’atteindre le plus haut niveau de Connaissances, de Sagesse, la Rénovation Spirituelle, la Gloire, le Paradis ou s’approcher de Dieu. De cette manière, grâce à des ouvrages artistiques, littéraires et même ludiques, vous trouverez de nombreux exemples de la perspective allégorique du pèlerinage. Dans la tradition chrétienne, le voyage des apôtres afin de diffuser la doctrine de Jésus-Christ était déjà comparé au voyage des pèlerins, des voyageurs des terres inconnues. Même le nom de Jéhovah veut dire Dieu sur le Chemin. Le livre du philosophe chinois Lao Tzé (570 – 490 av. J.-C. env.), Tao Tê-King, qui est à l’origine de la pensée et de la religion taoïstes, compare le Tao à un chemin vers la Perfection. Bouddha (563 – 486 av. J.-C. env.), en plus d’avoir voyagé dans toute la vallée du Ganges pour prêcher ses enseignements, a aussi fait en même temps un voyage intérieur dans le but d’atteindre le Nirvana ou l’Illumination. Dans sa doctrine, la voie permettant à l’individu de se libérer du monde matériel a reçu le nom de Noble Sentier Octuple ou Noble Voie aux Huit Étapes. Même l’expérience mystique a été décrite métaphoriquement comme un voyage vers Dieu. Les musulmans du courant mystique soufi ou les penseurs arabes du XIIe siècle comme Avempace (Le régime du solitaire) ou Ibn Tofaïl (Hay ben Yaqdane) le décrivent aussi de cette manière. Le mystique chrétien allemand du XIIIe siècle, Maître Johannes Eckhart l’exprime pareillement : « Le chemin sans chemins, où les fils de Dieux se perdent et, en même temps, se retrouvent ». Paraphrasis in Novum Testamentum. Peregrinatio...Petri et Pauli Érasme de Rotterdam Lugduni [Lyon], Sébastien Gryphius, imprimeur (1542-1544) Papier imprimé, lettre italique, xylographies À partir de 1522, Érasme s’est lancé dans la difficile tâche de commenter les textes évangéliques, plus concrètement, les Faits des Apôtres, en y incluant des notes critiques qui essaient de démontrer le peu de rigueur de la version latine de la Bible Vulgate. Il a dédié cette publication à différents hommes d’état et monarques de l’époque, parmi eux, à Charles Quint, Henri VIII et François Ier, pour les aider à bien gouverner le monde et à faire cesser les luttes qu’ils maintenaient entre leurs royaumes. En 1542, il y ajouta le Peregrinatio...Petri et Pauli, exprimé d’une manière analogue aux Écritures Sacrées comme une allégorie du passage de l’être humain tout au long de sa vie, en établissant un parallélisme avec le rôle des Apôtres qui parcouraient alors tous les chemins connus pour diffuser la doctrine de Jésus-Christ. D’une autre part, alors qu’Érasme continuait à soutenir cette ancienne comparaison évangélique, il n’encourageait pas, comme le faisaient tant d’humanistes de l’époque, les pratiques religieuses de culte aux reliques et le pèlerinage, parce qu’il les considérait comme des rituels remplis de traits caractéristiques superstitieux. 6 Mandala Népal, fin du XXe siècle Peinture sur toile en tissu Dans le bouddhisme tantrique, courant pratiqué essentiellement au Tibet, un des éléments de dévotion les plus utilisés sont les mandalas, des représentations personnalisées des différents aspects de Bouddha et de sa doctrine. Un mandala est un schéma ou diagramme de structures qui permet de méditer en « voyageant » avec la pensée et avec l’esprit jusqu’au centre, c’est-à-dire, jusqu’à Bouddha ou la représentation de l’Illumination. Grâce à des techniques de méditation, des gestes rituels pour méditer et prier (mûdras) et les mandalas, l’initié médite sur les différents aspects de Bouddha jusqu’à atteindre un jour l’union avec lui, c’est-à-dire le nirvâna ou la sagesse maximale, l’Illumination, grâce à la libération de tous les désirs et, par conséquent, de toutes les souffrances. Jeu de l’Oie Interprétation basée sur des originaux du XVIIe siècle Dessin d'Heliodoro Fernández Vitoria, Pos. Heraclio Fournier, imprimeur 1960-70 Lithographie Le traditionnel Jeu de l’Oie possède, comme tant d’autres jeux de société communs, une origine ancienne avec un puissant caractère symbolique. On y suit un « itinéraire » en spirale, de l’extérieur vers l’intérieur, sur un parcours séparé généralement en trois fragments par un mur ou une clôture. Sur ce chemin, on rencontre toute sorte de situations adverses (puits, labyrinthe, prison et même la mort) et aussi bénéfiques (les ponts, les dés ou les oies). Il y a un point de départ et une arrivée, qui n’est pas la mort, mais la dernière case où il y a normalement une belle demoiselle et un cygne. Ses origines seraient grecques et elles sont attribuées au roi Palamède pendant la guerre de Troyes. Aussi bien l’oie que le cygne représentaient, dans le monde classique, un symbolisme en relation avec la Sagesse, avec l’entraînement de ceux qui s’initiaient à de nouvelles disciplines et, aussi, avec la sécurité des propriétés étant donné qu’ils donnaient l’alerte avec leurs cacardements si des étrangers s’approchaient. D’autres indices soulignent sa relation avec l’Ordre du Temple et avec la sauvegarde des chemins de pèlerinage chrétiens, ainsi qu’avec d’autres ordres à caractère religieux et militaire. Dans ce sens, le Jeu de l’Oie serait comme une version allégorique et réduite du Chemin de Saint-Jacques avec l’être humain en tant que marcheur. Les treize oies seraient les maisons du Temple, des lieus sûrs qui correspondraient aussi avec les treize étapes signalées par le Codex Calixtinus. La Mort serait donc le sépulcre de l’Apôtre Saint-Jacques, dans la case 58, et la ville une oie (case 59), et non pas la fin du Chemin qui serait plutôt la case du Cygne, c’est-à-dire la véritable fin : physiquement, Finisterre (le Finis Terrae de l’Antiquité) ; symboliquement, le renouvellement de l’esprit, la Gloire, la Connaissance Suprême, la Résurrection. L’identification physique des autres cases, en se basant – parmi d’autres preuves – sur les calculs de la symbologie numérique, permet de mettre en rapport, par exemple, le premier pont avec Puente la Reina, le puits avec Castrojeriz ou Carrión de los Condes, le labyrinthe avec la zone de Leon et les oies avec Jaca, Pampelune, Estela, Rabanal del Camino ou Triacastela et Saint-Jacques, entre autres. Théâtre Moral de la vie humaine en cent tableaux ; avec l’Enchiridion d’Épictète. Cébès, Épictète Gentil, Enchiridion Otto Van Veen (Vaenius), Paulus Pontius, graveur Antwerp (Anvers), veuve d’Henrico Verdussen 1733 Impression sur papier ; reliure en cuir du XIXe siècle Nous devons le texte contenant le dialogue philosophique et moral connu sous le nom de Tabula Cebetis (Tableau de Cébès) au philosophe Cébès qui l’écrivit au Ier siècle ap. J.-C. La philosophie morale qu’il renferme dérive du Stoïcisme gréco-latin, valeurs qui ont aussi été utilisées par le Christianisme. Le dialogue présente la vie de l’être humain de manière allégorique dévoilée comme un pèlerinage sur la terre. Pendant la période de l’Humanisme de la 7 Renaissance, le texte du dialogue a été complété par une représentation graphique. L’allégorie prend la forme d’un parcours sur un chemin ascendant, divisé en trois secteurs par des murailles, où l’être humain doit faire constamment face, depuis son enfance, à des choix, il jouit ou souffre en fonction des options adoptées et les avatars de sa vie et il vivra toujours la douleur, la purification ou la souffrance. Ceux qui sont capables de parcourir tout le chemin (représentés d’ailleurs par des marcheurs avec les vêtements des pèlerins de l’époque), parviennent à réaliser une construction en forme de temple qui peut symboliser en même temps : la Gloire, la Sagesse et les Connaissances. Une autre particularité de la représentation graphique du Tableau de Cébès est sa possible relation avec le Jeu de l’Oie, d’origine antique ou médiévale, et aussi de manière symbolique puisqu’il pourrait représenter l’allégorie de la vie humaine comme un pèlerinage, avec un point de départ, un parcours entouré de murailles divisé en trois secteurs, situations favorables et adverses, la mort et une arrivée au Paradis ou à la Connaissance. 8