un silence religieux
42
Pour ma part, comme je l’ai déjà dit, je comprends que les
musulmans soient exaspérés de devoir sans cesse expliquer
qu’ils n’ont rien à voir avec les attentats perpétrés sur notre
sol. Je m’associe à votre indignation face à certains des propos
qui ont été tenus. Mettre en relation les exactions de quelques
individus avec les comportements et les valeurs de cinq
millions de Français musulmans relève soit d’une coupable
ignorance, soit d’une malhonnêteté inacceptable. » Après
les attentats du 13 novembre, cette fois, le même souci
guidait encore diverses figures de la gauche, à commen-
cer par Jean-Luc Mélenchon : « Il faut le dire avec force :
l’islam n’a rien à voir avec cela », déclarait le chef de file
du Front de gauche 1.
À bien y réfléchir, pourtant, ces déclarations politiques,
qui visent à maintenir la paix sociale, pourraient se révéler
à double tranchant. Affirmer sur tous les tons que les djiha-
distes n’ont « rien à voir » avec l’islam, en effet, c’est consi-
dérer que le monde musulman ne se trouve pas concerné
par les fanatiques qui se réclament du Coran. C’est suggérer
que le djihadisme n’aurait nul lien avec l’islamisme, qui
n’aurait lui-même aucun rapport avec l’islam. Malgré ses
bonnes intentions, une telle prise de position présente
deux graves inconvénients : d’abord, elle occulte la guerre
qui ravage l’islam de l’intérieur, et dont la terreur djiha-
diste est un produit direct ; ensuite, elle prend à revers tous
les musulmans qui se battent sur ce front, justement, en
1. Émission spéciale On est solidaire, présentée par Laurent Ruquier,
le 14 novembre 2015, sur France 2.