recommandations bichat* pour la prise en charge clinique des

Eurosurveillance – 2004 Vol 9 Issue 12 – http://www.eurosurveillance.org/ 1
RECOMMANDATIONS BICHAT* POUR LA PRISE EN CHARGE CLINIQUE DES PATIENTS
PRESENTANT UNE ENCEPHALITE VIRALE LIEE OU NON A UN ACTE DE BIOTERRORISME
P Bossi, A Tegnell, A Baka, F Van Loock, J Hendriks, A Werner, H Maidhof, G Gouvras
Task Force sur les menaces biologiques et chimiques, Direction de la santé publique, Commission européenne, Luxembourg
Correspondance: P. Bossi, Pitié-Salpêtrière Hospital, Paris, France, courriel: philippe.bossi@psl.ap-hop-paris.fr
La plupart des virus responsables des encéphalites sont
transmis par les arthropodes, à l’exception des arénavirus
qui sont transmis par les rongeurs. Même si les
informations dont on dispose sont peu nombreuses, il y a de
bonnes raisons de croire que la plupart des virus
responsables des encéphalites pourraient être utilisés dans
des aérosols au cours d’une attaque bioterroriste. Il a été
suggéré que le virus passait du sang au système nerveux
central (SNC) par l’appareil respiratoire. La contamination
peut aussi s’effectuer par des vecteurs tels que moustiques
ou tiques infectés. Les virus qui seraient le plus
probablement utilisés comme arme biologique sont les
alphavirus. L’évolution clinique des maladies provoquées
par ces virus n’est généralement pas spécifique, mais il est
possible de les différencier à l’aide d’un instrument
diagnostique adéquat. Il n’existe pas de thérapie
médicamenteuse efficace contre ces maladies et le
traitement est surtout un traitement de soutien, mais on
dispose de vaccins contre certains de ces virus.
Eurosurveillance 2004; 9 (12)
http://www.eurosurveillance.org/em/v09n12/0912-240.asp
Introduction
Les bioterroristes sont susceptibles d’utiliser comme agents la
plupart des virus. Ceux qui provoquent une encéphalite sont
transmis par les arthropodes, à l’exception des arénavirus qui
sont transmis par les rongeurs (TABLEAU 1). Tous les virus
connus transmis par les arthropodes et susceptibles de
provoquer une encéphalite sont aussi impliqués dans les
zoonoses. Leur cycle de vie est complexe et fait intervenir un
hôte vertébré non humain et un arthropode comme vecteur
primaire. L’homme et les animaux domestiques peuvent
développer la maladie clinique mais sont généralement des
hôtes terminaux car ils ne développent pas de virémie grave qui
contribuerait au cycle de transmission. Un grand nombre
d’arbovirus susceptibles de provoquer une encéphalite ont des
hôtes vertébrés très variés et l’on sait que certains d’entre eux
sont transmis par plus d’un vecteur. Leurs histoire scientifique,
distribution géographique, virologie, épidémiologie, vecteurs,
hôtes vertébrés, transmission, pathogenèse, caractéristiques
cliniques, contrôle, traitement et diagnostique de laboratoire
sont très différents et requièrent de ce fait des descriptions
distinctes.
L’évolution clinique des maladies causées par ces virus est
généralement banale, mais il est possible de différencier celles-
ci à l’aide de méthodes diagnostiques de laboratoire
appropriées et efficaces. Pour beaucoup de ces maladies, la
plupart des infections humaines sont asymptomatiques ou
peuvent entraîner un syndrome grippal banal (TABLEAU 2).
L’apparition de la maladie peut être insidieuse ou soudaine et
accompagnée de fièvre, de myalgies, d’une sensation de malaise
et parfois de prostration. L’infection peut toutefois entraîner une
encéphalite à l’issue fatale ou laissant des séquelles
neurologiques permanentes. Des études expérimentales ont
révélé que l’invasion du système nerveux central succède
généralement à la réplication initiale du virus dans divers sites
périphériques et à une période de virémie. Il n’existe pas de
thérapie médicamenteuse efficace pour traiter ces maladies et le
traitement est surtout un traitement de soutien, mais il existe des
vaccins protégeant contre certains de ces virus.
Encéphalite, virus et bioterrorisme
Bien que les informations dont on dispose soient très limitées,
de nombreux auteurs pensent que la plupart des virus
responsables des encéphalites pourraient être utilisés par
aérosolisation au cours d’une attaque bioterroriste (TABLEAUX 3
et 4). Il a été suggéré que le passage du virus du sang au SNC
pouvait s'effectuer par l’appareil olfactif. Une autre voie
possible de contamination serait le recours à un vecteur de
transmission tel que moustiques ou tiques infectés. Les
alphavirus, et notamment les virus de l’encéphalite équine,
seraient les plus simples à utiliser comme arme biologique.
Nous avons choisi de décrire les virus susceptibles d’être utilisés
comme armes biologiques en les classant par familles.
Togaviridae
Les virus de l’encéphalite équine de l’est (EEE), de
l’encéphalite équine de l’ouest (EEO) et de l’encéphalite équine
vénézuélienne (EEV) sont des alphavirus qui peuvent provoquer
une encéphalite chez l’homme et chez les équins. Tous ces virus
sont transmis à l’homme par des piqûres de moustique. Or, ils
peuvent également être transmis par aérosolisation, comme cela
a déjà été signalé lors d’accidents de laboratoires. Ces particules
hautement infectieuses ont provoqué plus de maladies acquises
en laboratoire que tout autre arbovirus [1]. Ces virus se
prêteraient bien à une utilisation comme armes biologiques pour
les raisons suivantes: ils ont un taux de réplication très élevé,
peuvent être manipulés facilement dans des systèmes peu
complexes car ils sont relativement stables et hautement
infectieux pour l’homme par aérosolisation; il existe des souches
provoquant des infections invalidantes ou létales chez l’homme ;
il y a de nombreux sérotypes, ce qui rend difficile la production
d’un vaccin approprié [1]. La dose infectieuse d’inhalation est
extrêmement faible pour certains virus (1 unité formant plaque
(pfu) pour l’EEV selon les informations militaires), mais on ne
la connaît pas pour chacun des différents virus. Certains auteurs
pensent aussi que ces virus pourraient être facilement modifiés
par manipulation génétique [1]. Bien que ces virus provoquent
des syndromes cliniques similaires, les conséquences et
2 Eurosurveillance – 2004 Vol 9 Issue 12 –http://www.eurosurveillance.org/
l’évolution des différentes maladies associées sont différentes.
Une transmission d’homme à homme n’a jamais été rapportée,
bien qu’elle soit théoriquement possible (par exemple l’EEV
par le nasopharynx).
Encéphalite équine de l’Est (EEE)
Le virus de l’EEE a été identifié pour la première fois dans les
années 30 et se rencontre actuellement le long de la côte est,
dans le Golfe du Mexique et à certains endroits du centre-ouest
des États-Unis. Bien que de petites flambées de la maladie
humaine soient apparues aux États-Unis, les épizooties équines
sont fréquentes en été et à l'automne. Le réservoir naturel de ce
virus est constitué par les oiseaux vivant dans les marais. La
maladie se transmet d’un oiseau à l’autre par le moustique
Culiseta melaneura. La transmission aux chevaux et à l’homme
se fait par un moustique du genre Aedes. Les cas humains sont
généralement précédés de cas équins.
La période d’incubation varie de 4 à 15 jours après une piqûre
par un moustique infecté. Les symptômes peuvent aller du
syndrome pseudo-grippal banal à l’encéphalite, voire au coma
et au décès. Ils se caractérisent par un début brutal, associant
fièvre élevée, frissons, vomissements, myalgies et céphalées
d’intensité croissante. La fièvre peut persister jusqu’à 11 jours
avant le début des signes neurologiques. Un œdème
périorbitaire ou de la face est fréquent chez l’enfant. Des
atteintes neurologiques plus graves peuvent apparaître :
notamment confusion, somnolence, délire, stupeur,
désorientation, aphasie, parésies, ataxie, myoclonies, atteintes
des nerfs crâniens, convulsions, coma et mort. Un patient
infecté sur 23 développe des signes encéphalitiques [2]. En
dépit du développement rapide d’une réponse humorale
neutralisante, le virus ne disparaît pas du SNC
l’inflammation et la destruction neuronale progressent [1].
L’EEE est la plus grave des encéphalites arbovirales ; elle
entraîne le décès de 50 à 70% des patients, principalement des
jeunes enfants et des sujets âgés. Les survivants présentent
souvent des séquelles neurologiques nécessitant une prise en
charge médicale permanente voire une institutionnalisation
(convulsions, paralysie spastique et atteintes des nerfs
crâniens). La morbidité et la mortalité par transmission
aérosolisée du virus de l’EEE sont inconnues.
Les résultats de laboratoire révèlent une augmentation des
ASAT, une lymphopénie et un début de leucopénie, suivie
d’une leucocytose. On observe souvent une pléocytose
lymphocyte dans le liquide céphalorachidien (LCR).
L’isolation du virus (dans le rhinopharynx, le sang, le LCR), les
sérologies et la PCR permettent de confirmer le diagnostic.
Il n’existe pas de traitement spécifique. Des antisérums peuvent
être utilisés mais sont peu efficaces en cas d’atteinte
encéphalitique. Il n’existe pas de vaccins autorisés destinés à
l’homme. Un vaccin expérimental à usage humain existe mais
il est peu immogène et nécessite plusieurs rappels avant de
conférer une protection efficace.
Encéphalite équine de l’Ouest (EEO)
L’EEO a été isolée initialement en Californie dans des biopsies
cérébrales d’un cheval atteint d’encéphalite. Elle reste une
étiologie importante des encéphalites chez l’homme et chez les
chevaux d’Amérique du Nord, principalement dans l’ouest des
Etats-Unis, et au Canada. La séroprévalence des sujets vivant
en zone d’endémie est proche de 100% [1. La plupart des cas
sont asymptomatiques ou peu symptomatiques avec des signes
cliniques non spécifiques. Les cas humains surviennent
préférentiellement en juin ou en juillet. Ce virus est transmis
par les moustiques. Le délai d’incubation est de 5 à 10 jours.
L’intensité de l’atteinte neurologique liée au virus de l’EEO est
nettement moins importante que celle liée au virus de l’EEE ;
néanmoins les signes et les symptômes sont identiques.
Les patients présentent brutalement une fièvre élevée, une
altération de l’état général et des céphalées suivies de nausées,
de vomissements et d’anorexie. Les symptômes s’intensifient
progressivement avec un ralentissement psychique, de la
somnolence, des signes d’irritation méningée, du délire qui peut
dégénérer en coma. Les enfants, surtout âgés de moins d’un an,
sont atteints plus sévèrement que les adultes et peuvent
présenter, dans 5 à 30% des cas, des séquelles permanentes. Le
taux d’encéphalite est estimé à 1/1 150 infections chez l’adulte,
1/58 chez l’enfant et 1/1 chez les enfants en bas âge [3]. Le taux
de mortalité est d’environ 3%. La récupération complète peut
prendre des mois, voire des années. Les résultats de laboratoire
sont les mêmes que ceux observés pour l’EEE. L’isolation du
virus ou les sérologies permettent de confirmer le diagnostic.
Comme pour l’EEE, il n’y a pas de traitement spécifique. Il
existe un vaccin expérimental mais il est peu immogène. Il
n’existe pas de vaccin autorisé destiné à l’homme.
Encéphalite équine vénézuélienne (EEV)
L’EEV est un important problème de médecine vétérinaire et de
santé publique en Amérique Centrale et en Amérique du Sud.
Elle peut entraîner, de façon occasionnelle, des épidémies à
l’origine d’infection de milliers d’équins et d’êtres humains. Des
informations militaires révèlent que ce virus a fait l'objet
d'études approfondies en vue de son utilisation comme arme par
les États-Unis, le Royaume-Uni (UK) et l'Union soviétique. Il
peut être disséminé par aérosolisation de manière très efficace et
infecter 100% des personnes exposées en provoquant des signes
cliniques similaires à ceux de l’infection naturelle.
Dans la nature, les moustiques peuvent transmettre à l’homme
différentes souches de virus de l’EEV. Une importante épidémie
animale a débuté en Amérique du Sud en 1969 pour atteindre le
Texas en 1971 ; 200 000 chevaux sont morts, et des milliers de
cas humains ont été rapportés. Une épidémie plus récente est
survenue à l’automne 1995 au Vénézuela et en Colombie ;
environ 90 000 cas humains ont été rapportés. L’infection par le
virus de l’EEV est moins grave que celle des virus de l’EEE ou
de l’EEO. Les décès sont rares.
La période d’incubation varie de 28 heures à 6 jours [1].
Habituellement, les patients se plaignent de céphalées
persistantes et souvent invalidantes. Ils peuvent aussi développer
une fièvre élevée, une photophobie, des myalgies, une
pharyngite, une hyperhémie conjonctivale, des vomissements,
une diarrhée et un syndrome pseudo grippal. L’encéphalite est
souvent observée seulement chez l’enfant : moins de 0,5% des
adultes et 4% des enfants présentent une encéphalite [4].
L’apparition d’une léthargie, d’une somnolence, d’une
confusion, de crises convulsives, d’une ataxie, d’une paralysie
voire d’un coma est possible. La récupération neurologique se
fait en une à deux semaines. Les résultats de laboratoire sont les
mêmes que ceux observés pour l’EEE et l’EEO. Au cours des
trois premiers jours, le virus de l’EEV peut être isolé dans le
sang où dans le nasopharynx. Le traitement n’est que
symptomatique. Différente sérologies permettent de confirmer
le diagnostic.
Des vaccins efficaces contre l’EEV sont disponibles pour les
équins. Il existe des vaccins vivants atténués (TC-83 et C-84)
ainsi qu’un vaccin totalement inactivé (C-84) destinés aux
humains, mais ils entraînent de nombreux effets indésirables [1].
Le vaccin vivant atténué est le seul qui pourrait être utilisé en
cas de dissémination volontaire par aérosolisation du virus de
l’EEV [1].
Flaviviridae
Eurosurveillance – 2004 Vol 9 Issue 12 – http://www.eurosurveillance.org/ 3
La récente épidémie d’encéphalite de West Nile aux Etats-Unis
et en Israël a permis de souligner la menace potentielle
représentée par l’encéphalite provoquée par ces arbovirus qui
sont de petits virus enveloppés à ARN, de la famille des
flaviviridae, genre flavivirus [5].
Beaucoup de virus de cette famille sont à l’origine
d’encéphalites. Le virus de l’encéphalite Japonaise (EJ) reste le
plus répandu, responsable chaque année de nombreux cas.
L’utilisation de ces virus comme armes est seulement
hypothétique mais néanmoins théoriquement possible. On ne
dispose d’aucune thérapie antivirale spécifique pour traiter ou
guérir les infections provoquées par des membres de la famille
des Flaviviridae. Il existe toutefois un vaccin autorisé contre
l'EJ destiné à l’homme. [6].
Encéphalite japonaise (EJ)
L’EJ est largement répandue dans toute l’Asie, principalement
dans les zones agricoles. C’est la cause la plus importante
d’encéphalite arbovirale dans le monde avec plus de 50 000 cas
rapportés chaque année et plus de 15 000 décès [5].
Ces dernières années le virus a été observé dans le Pacifique où
plusieurs épidémies ont été rapportées. Les épidémies
surviennent en été ou en automne dans les régions tempérées.
Dans de nombreuses régions tropicales d’Asie la maladie est
endémique et survient tout au long de l’année. Le cycle de
développement du virus se fait via les moustiques et les oiseaux
aquatiques vivants dans les régions agricoles (zones de culture
et d’élevage de porcs). Le virus est transmis aux humains par
les moustiques de l’espèce Culex. Les porcs domestiques
représentent le mode d‘amplification virale le plus important.
Chez l’homme, la période d’incubation varie de 5 à 14 jours.
La plupart des infections sont peu symptomatiques ou
asymptomatiques. Dans les cas d’atteintes plus marquées, les
symptômes surviennent brutalement avec de la fièvre, des
frissons, des céphalées, des nausées et des vomissements. Si le
SNC n’est pas atteint, le malade guérit spontanément en 5 à 7
jours. Dans les cas les plus graves apparaît une encéphalite
avec confusion, agitation, paralysie, crises convulsives, coma
puis mort. Dans la plupart des épidémies, la mortalité est
inférieure à 10%. Chez les enfants elle peut s’élever à 30%.
Des séquelles neuropsychiatriques surviennent dans 30% des
cas [5]. Il n’existe pas de traitement spécifique de cette
maladie.
Un vaccin inactivé à la formaline, préparé chez des souris, est
largement utilisé au Japon, en Chine, en Inde, en Corée, à
Taiwan et en Thaïlande, et s’est avéré efficace. En Europe, ce
vaccin est disponible dans quelques pays pour les personnes
appelées à voyager dans des régions rurales de pays où la
maladie est endémique pendant au moins quatre semaines.
Encéphalite de West Nile (EWN)
Le virus de l’EWN a été mis en évidence pour la première fois
dans le sang d’une femme fébrile dans le district de West Nile
en Ouganda en 1937 [7]. Il se trouve habituellement en
Afrique, au Moyen Orient, à l’ouest de lAsie et au sud de
l’Europe. Les premières épidémies ont été décrites en Israël de
1951-1954 et en 1957. Des épidémies ont aussi été rapportées
en France dans le delta du Rhône en 1962 et en Roumanie en
1996. L’épidémie la plus importante reste celle de 1974 en
Afrique du Sud.
Les récentes épidémies d’EWN aux États-Unis ont permis de
mieux comprendre les moyens de dispersion et de contrôle de
ce virus ainsi que sa pathogénie. De nombreuses théories ont
été rapportées afin d’expliquer l’arrivée du virus aux États-
Unis : importation d’oiseaux exotiques, moustiques transportés
par les avions, les navires porte-conteneurs, réfugiés européens
ou africains, bioterrorisme. L’hypothèse d’une importation
d’oiseaux provenant d’Israël parait la plus probable [7-12]. Le
virus de l’EWN est transmis par un moustique de l’espèce
Culex. Il peut aussi être transmis par les Aedes, les Anopheles et
d’autres espèces. La plupart des patients infectés par le virus de
l’EWN sont peu symptomatiques ou asymptomatiques, souffrant
habituellement d’un syndrome pseudo-grippal pendant 3 à 4
jours. Certains peuvent présenter une encéphalite ou une
méningo-encéphalite fatale [13]. Habituellement la maladie est
symptomatique chez les patients âgés et ayant des pathologies
associées comme un cancer, une hypertension, un diabète
mellitus, une cardiopathie ischémique, une insuffisance rénale,
une BPCO, ayant été transplantés, ou toute autre situation
entraînant une immunodépression notamment la chimiothérapie
[14]. La durée d’incubation varie de 3 à 4 jours. Le patient
présente alors de la fièvre, des frissons, une asthénie, un
ralentissement psychomoteur, des céphalées, une éruption
érythémateuse cutanée, des nausées, des vomissements, des
douleurs abdominales, une diarrhée, des myalgies et une toux
[14-15]. Les atteintes neurologiques incluent la méningite,
l’encéphalite ou la méningo-encéphalite [14-15].
Les résultats de laboratoire, non spécifiques, sont notamment les
suivants : légère hyponatrémie pouvant être liée à une sécrétion
inappropriée d’hormone anti-diurétique, légère élévation des
taux d’enzymes hépatiques, nombre de leucocytes normal. On
observe souvent une lymphocytose dans le LCR ainsi qu’un
taux de protéines un peu élevé et un taux de glucose normal.
L’incidence de la survenue d’atteintes neurologiques graves et le
taux de mortalité augmentent avec l’âge [13]. Le taux de
mortalité des patients ayant une encéphalite ou une méningo-
encéphalite est de 12 à 14% [13-14]. Plus de 50% des survivants
présenteront des séquelles neurologiques [15].
Le diagnostic peut être établi par une RT-PCR (reverse
transcriptase PCR), par l’immunohistochimie et la sérologie ou
le test ELISA dans des échantillons de sérum, de LCR et de
tissus du cerveau [11].
En cas d’encéphalite, le traitement est uniquement
symptomatique. La ribavirine est inefficace et a même donné de
mauvais résultats (décès) chez des patients atteints d’encéphalite
[14]. Il n’existe pas de vaccin contre l’EWN mais la recherche
se poursuit et les scientifiques espèrent disposer d’un nouveau
vaccin d’ici quelques années.
Encéphalite de St Louis (ESL)
Le virus de l’ESL est le pathogène humain transmis par les
moustiques le plus courant aux États-Unis. Depuis 1964, il y a
eu 4 437 cas confirmés avec, en moyenne, 193 cas par an (de 4 à
1 967 cas rapportés). A la fin de l’été et au début de l’automne,
le virus suit une amplification périodique en alternant l’infection
des moustiques Culex et des oiseaux péridomestiques.
Chez l’homme, la durée d’incubation varie de 5 à 15 jours.
Moins de 1% des infections par le virus de l’ESL sont
symptomatiques. Tous les stades de gravité peuvent être
observés depuis les céphalées fébriles jusqu’à la méningo-
encéphalite. Le début de la maladie est marqué par l’apparition
d’une fièvre et de céphalées suivies dans certains cas par des
signes d’encéphalite ou de méningo-encéphalite [16]. En cas
d’atteinte neurologique, le décès survient dans 3 à 30% des cas.
La gravité de la maladie est souvent moindre chez l’enfant, mais
chez les enfants atteints, il y a un grand risque d’encéphalite.
Les sujets âgés ont un risque très élevé de développer une
atteinte grave et de décéder. La sérologie ou la RT-PCR
permettent de confirmer le diagnostic. Il n’existe pas de
traitement spécifique ni de vaccin disponible contre l’ESL.
Encéphalites transmises par les tiques (TBE) : encéphalite
verno-estivale de Russie (EVER) et encéphalite d’Europe
centrale (EEC)
4 Eurosurveillance – 2004 Vol 9 Issue 12 –http://www.eurosurveillance.org/
La TBE est une infection virale du système nerveux central
transmise par une morsure de tique. Plus rarement la maladie
est contractée après l’ingestion de produits laitiers non
pasteurisés issus du lait de vaches, de brebis ou de chèvres
infectées [17,18]. Elle est provoquée par deux flavivirus très
proches mais biologiquement distincts. Le sous-type de l’Est
est à l’origine de l’EVER et est transmis par l’Ixodes
persulcatus. Le sous-type de l’Ouest est transmis par l’Ixode
ricinus et est associé à l’EEC. La TBE est souvent observée en
Autriche, en Estonie, en Lettonie, en République Tchèque, en
Slovaquie, en Allemagne, en Hongrie, en Pologne, en Suisse,
en Russie, en Ukraine, en Biélorussie et en Slovénie. Elle
survient moins fréquemment en Bulgarie, en Roumanie, au
Danemark, en France, dans l’archipel d’Aland, le long du
littoral sud de la Suède et sur les côtes Finlandaises, et
occasionnellement dans d’autres régions de la Suède. L’EVER
est présente en Chine, en Corée, au Japon et dans certaines
régions de l’est de la Russie. Les infections sont plus
fréquentes d’avril à août, époque où les Ixodes ricinus sont les
plus actifs. Les signes et les symptômes de l’EVER et de l’ECC
sont communs aux deux maladies, mais ils sont plus intenses
dans l’EVER.
La durée d’incubation varie de 7 à 14 jours. L’atteinte est
habituellement modérée à type de syndrome pseudo-grippal ou
de méningite aseptique. La TBE est classiquement une maladie
évoluant en deux phases [19]. La première phase est marquée
par l’apparition de fièvre, de myalgies et de céphalées intenses
persistant une semaine. Après un phase de répit de 1 à 3 jours
en moyenne (mais pouvant durer jusqu’à 3 semaines), un quart
à un tiers des patients symptomatiques développent des
atteintes du SNC (rigidité, paralysie transitoire des membres,
des épaules ou plus rarement des muscles respiratoires)
secondaires à l’existence d’une méningo-encéphalite ou d’une
méningite plus ou moins associée à une myélite. La
récupération est très lente ; 20% des patients gardent des
séquelles : parésies, troubles de la coordination, céphalées
persistantes, troubles auditifs ou troubles psychiatrique
mineurs. L’EVER est la plus grave des deux infections avec un
taux de mortalité de plus de 25% ; pour l’EEC, le taux de
mortalité est proche de 4%.
On observe fréquemment une leucopénie, une
thrombocytopénie, un accroissement de la vitesse de
sédimentation des érythrocytes, du taux de protéine C réactive
(CRP) et une pléocytose dans le LCR [19]. La sérologie ou la
RT-PCR permettent de confirmer le diagnostic [20].
Encéphalite australienne:
Encéphalite de la Murray Valley (EMV) et virus Kunjin
L’EMV et les virus Kunjin sont des virus transmis par des
moustiques, qui peuvent provoquer une maladie mortelle; ils
sont endémiques en Papouasie Nouvelle Guinée et dans la
moitié nord de l’Australie. La plupart des cas surviennent entre
février et avril. Les infections sont asymptomatiques dans 99%
des cas [21]. La plupart des patients symptomatiques sont des
enfants ou des sujets récemment immigrés dans une région
endémique. L’homme est géralement infecté par une piqûre
de moustique. Trois cas d’infection de techniciens de
laboratoire par le virus de l’EMV ont été rapportés après
exposition à des aérosols ou à des solutions infectées. La durée
d’incubation est de 5 à 15 jours. Le début de la maladie est
brutal avec une forte fièvre et des céphalées. Certains patient
présentent dans un second temps une raideur de nuque et des
signes neurologiques tels que stupeur, tétraplégie spastique,
crises convulsives, coma. Le taux de mortalité des patients avec
une atteinte neurologique est supérieur à 60% ; 40% auront des
séquelles neurologiques (paraplégie, troubles de la marche,
déficience intellectuelle, etc.) [21]. La sérologie permet de
confirmer le diagnostic. Il n’existe pas de traitement ni de
vaccin spécifique.
Encéphalite de Powassan (POW)
L’encéphalite de Powassan est une arbovirose transmise par les
tiques, survenant aux États-Unis et au Canada (22). Il semble
que la transmission soit aussi secondaire à l’ingestion de lait
frais issu d’un animal infecté. Deux cas de transmission après
exposition à des aérosols de solutions infectées ont été rapportés
chez des techniciens de laboratoire. Récemment un virus proche
de celui de Powassan a été isolé chez la tique du cerf Ixode
scapularis. Ses relations avec l’encéphalite de Powassan ainsi
que son pouvoir pathogène chez l’être humain n’ont pas encore
été clairement définis.
La POW est une forme rare d’encéphalite virale ; à ce jour
moins de 50 cas ont été rapportés dans la littérature [22-23].
Comme la plupart des autres virus transmis par les tiques à
l’origine d’encéphalites, le virus de Powassan n’entraîne que
peu ou pas de symptômes. La durée d’incubation est de 7 à 34
jours [23]. Le début de la maladie est brutal avec de la fièvre,
des céphalées, une pharyngite, des nausées, des vomissements,
une raideur de la nuque et de la léthargie. Peu à peu, des signes
neurologiques apparaissent : détresse respiratoire, tremblements,
paralysie spastique, convulsions, méningite aseptique, coma, et
dans quelques cas, mort. L’hémiplégie est fréquente [23]. La
mortalité est de 10 à 15% [22]. D’importantes séquelles
neurologiques durables surviennent dans 50% des cas [22-24].
La sérologie (ELISA) et la RT-PCR permettent de confirmer le
diagnostic. Il n’existe aucun traitement spécifique ni vaccin.
Virus Rocio
Virus Rocio.
Ce virus a été identifié pour la première fois en 1978 à Sao
Paulo, au Brésil, où environ 1 000 patients ont été infectés [25].
La maladie est transmise par les moustiques. Les oiseaux
sauvages constituent l’hôte préférentiel et le réservoir du virus.
Les caractéristiques de la maladie sont mal définies. Le début de
cette maladie est marqué par de la fièvre, des céphalées, des
vomissements et une conjonctivite. Dans un second temps, les
patients présentent des signes neurologiques et une fatigabilité
musculaire. Environ un tiers de ces patients entrent dans le
coma et un tiers d’entre eux décèdent. 20% présenteront des
séquelles neurologiques. Le diagnostic est établi par la
sérologie.
Virus de Louping ill
Ce virus a été mis en évidence en Ecosse. Il est transmis par la
tique de brebis Ixodes ricinus. Moins de 50 cas d’encéphalites
humaines ont été rapportés [26]. Des cas de transmission par
aérosolisation de solutions infectées ont été décrits chez des
techniciens de laboratoire [26-27]. La maladie associe un
syndrome pseudo grippal, une encéphalite évoluant en deux
phases, une atteinte pseudo-poliomyélitique et une fièvre
hémorragique [26].
Bunyaviridae
Encéphalite de La Crosse (LAC)
L’encéphalite de La Crosse est l’arbovirose la plus fréquemment
observée chez les enfants aux États-Unis. La plupart des cas
surviennent chez des enfants de moins de 16 ans. Environ 75 cas
sont rapportés chaque année [28-29]. Les virus du Canyon de
Jamestown, de Trivittatus et de la Cache Valley sont proches de
celui de La Crosse mais ils sont rarement à l’origine
d’encéphalites.
Le virus de La Crosse est un pathogène zoonotique dont le cycle
se déroule entre le moustique Aedes triseriatus et de petits
Eurosurveillance – 2004 Vol 9 Issue 12 – http://www.eurosurveillance.org/ 5
vertébrés des forêts de feuillus [28]. La multiplication virale
s’effectue dans ces petits animaux. L’hiver, le virus est
préservé dans les œufs de moustiques ; la femelle infectée pond
des œufs contaminés (transmission trans-ovarienne). Les
moustiques nés de ces œufs, qui ont atteint l’âge adulte,
peuvent alors transmettre le virus aux écureuils et aux êtres
humains.
Après une période d’incubation de 3 à 7 jours, l’encéphalite de
La Crosse débute, comme les autres maladies arbovirales
transmises par les arthropodes, par de la fébrilité, des frissons,
des céphalées, des nausées, des vomissements et des douleurs
abdominales persistant 1 à 4 jours. L’existence d’une éruption
érythémateuse est rare. Les atteintes graves (encéphalite,
méningite et méningo-encéphalite) surviennent plus
fréquemment chez les enfants de 6 mois à 15 ans. La maladie
se caractérise par de la somnolence, de l’obnubilation, des
crises comitiales, de l’aphasie, des troubles de la coordination,
des déficits moteurs focaux et un coma [30]. Elle dure rarement
plus de 10 à 14 jours. Des séquelles neurologiques existent
dans 10% des cas : paralysie du VI, hémiparésies, troubles de
l’élocution, aphasie, troubles de la mémoire à court terme et
troubles de l’équilibre. Le taux de patients atteints
d’encéphalite qui décèdent est inférieur à 1%. La numération
formule sanguine est généralement normale. Il peut y avoir une
hyponatrémie [30]. L’examen du LCR révèle un taux de
glucose normal, un taux de protéines un peu élevé et la
présence de polymorphonucléaires puis une lymphocytose.
L’examen du cerveau par TI ou par IRM n’est pas spécifique.
Des épreuves sérologiques spécifiques ou la PCR [31,32]
permettent de confirmer le diagnostic. Il n’y a pas de thérapie
ni de vaccin disponibles.
Virus de Toscana (TOS)
Le virus de Toscana se retrouve dans toute l’Italie mais surtout
dans la province de Sienne. Il est transmis à l’homme par un
phlébotome. Le tableau clinique est généralement similaire à
ceux des infections virales décrites précédemment. Les formes
cliniques vont de la méningite aseptique à la méningo-
encéphalite et surviennent pendant l’été. Les encéphalites sont
peu fréquentes et généralement bénignes [33-35].
Fièvre de la Rift Valley
La fièvre de la Rift Valley se rencontre le plus souvent dans les
régions de l’est et du sud de l’Afrique mais aussi dans la
plupart des pays d’Afrique subsaharienne et à Madagascar ; elle
est récemment apparue dans la péninsule Arabe. C’est une
zoonose qui atteint essentiellement les animaux domestiques
(chats, buffles, moutons, chèvres, chameaux), et plus rarement
l’homme [36]. Les moustiques, habituellement du genre Aedes,
transmettent le virus mais beaucoup d’autres espèces peuvent
transmettre la maladie. Les êtres humains peuvent également
être contaminés par un contact avec le sang ou les fluides
corporels d’un animal infecté. Des contaminations par des
aérosols ont aussi été décrites chez des techniciens de
laboratoires où étaient utilisées des cultures virales ou des
échantillons infectés.
La durée d’incubation varie de deux à six jours ; au terme de
celle-ci apparaît une fièvre bi-phasique. Le premier accès
fébrile persiste environ quatre jours. Après un ou deux jours de
répit apparaît une deuxième poussée de fièvre qui dure deux à
quatre jours. Habituellement l’atteinte est modérée et associe à
la fièvre des perturbations du bilan hépatique. Dans les cas
graves, des hémorragies et des atteintes cérébrales et
rétiniennes peuvent survenir [37]. Moins de 1% des patients
développent un syndrome hémorragique dans les deux à quatre
jours après le début de la maladie. Les symptômes observés
sont ceux notés dans toutes les FHV (épistaxis, méléna,
hématémèse et saignements gastrointestinaux). La guérison
survient habituellement en deux à sept jours. Les rétinites et les
méningo-encéphalites surviennent habituellement entre la
première et la troisième semaine après le début de la maladie.
Dans 1 à 10% des cas, il peut y avoir une atteinte de la macula
avec baisse de l’acuité visuelle. Le taux de mortalité des patients
atteints par la fièvre de la Rift Valley est proche de 1%,
essentiellement chez les patients ayant des manifestations
hémorragiques [37].
On observe fréquemment une thrombocytopénie et une
leucopénie, une protéinurie, une élévation des taux d’enzymes
hépatiques et une jaunisse [38]. Parmi les méthodes de
diagnostic figurent l’isolation du virus, la détection des
antigènes par capture des antigènes révélée par ELISA, la
recherche des anticorps IgM par capture des anticorps révélée
par ELISA et la RT-PCR [38]. Il n’existe pas de traitement
spécifique. Seul un médicament antiviral, la ribavirine, est
recommandé pour le traitement de cette maladie [39-41]. Il
n’existe aucun vaccin autorisé mais un vaccin expérimental est
disponible aux États-Unis pour le personnel des laboratoires et
l'armée américaine.
Arenaviridae
Chorioméningite lymphocytaire (LCM)
Il s’agit d’une maladie virale infectieuse transmise par les
rongeurs. Elle a été décrite en Europe, en Amérique du Nord et
du Sud, en Australie et au Japon. L’infection est transmise à
l’homme par inhalation de particules d’aérosols émises par des
rongeurs infectés, ingestion d’aliments contaminés,
contamination des membranes muqueuses par des sécrétions
corporelles infectées ou par contact direct (en cas de
dermabrasion et de plaies) avec des produits infectés par le
virus. De nombreux cas de contamination de laboratoire ont été
décrits. La transmission materno-fœtale est également possible ;
elle se traduit par des avortements spontanés, des
hydrocéphalies congénitales, des choriorétinites et des retards de
croissance [42].
La période d’incubation est de 8 à 13 jours [43]. La plupart des
patients sont asymptomatiques ou ne présentent pas de signes
spécifiques de la maladie. Celle-ci est marquée par l’apparition
d’une fièvre bi-phasique, de malaises, d’anorexie, de myalgies,
de douleurs rétro-orbitaires, de douleurs abdominales, de
nausées et de vomissements, d’une pharyngite, d’une toux,
d’arthralgies prédominant aux niveaux des mains, de douleurs
thoraciques, de douleurs testiculaires, de douleurs parotidiennes,
d’adénopathies périphériques, d’alopécie, et d’une éruption
maculo-papuleuse. Ces symptômes peuvent persister une
semaine. Après quelques jours de rémission, survient une
rechute marquée par l’apparition de troubles neurologiques à
type de méningite, d’encéphalite ou de méningo-encéphalite.
Des hydrocéphalies aigues, des myélites et des myocardites ont
également été rapportées. Une leucopénie, une
thrombocytopénie et une légère augmentation du taux des
enzymes hépatiques sont courantes au cours de la première
phase de la maladie [43]. Au cours de la seconde phase, on
observe habituellement dans le LCR une augmentation des taux
de protéines, une pléocytose et une diminution du taux de
glucose.
Chez les patients présentant une atteinte neurologique, la
mortalité est inférieure à 1%. Ces patients présentent
fréquemment des séquelles neurologiques. La sérologie
spécifique et la PCR ou l’isolation du virus dans le LCR
permettent de confirmer le diagnostic. Il n’existe pas de
traitement spécifique, mais la ribavirine est efficace in vitro.
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