Communiqué de presse
Aux représentant-e-s des médias Genève, le 1er mars 2011
Sous embargo jusqu’au jeudi 3 mars 2011, 20h
Comment l’embryon élabore-t-il des organes d’une taille précise?
Une équipe pilotée par des chercheurs de l’UNIGE découvre un mécanisme de
contrôle de croissance dynamique qui régule la taille des organes en développement
La nature a fait en sorte que les proportions de nos membres soient respectées,
indépendamment de notre taille. Les mécanismes qui contrôlent la taille et la
structuration des tissus relèvent des aspects les plus insaisissables dans le domaine
de la biologie du développement. En élucider les rouages permettrait notamment de
comprendre comment le manque de coordination entre la croissance du tissu et la
spécialisation des cellules qui le constituent se traduit par des malformations. Une
équipe menée par Marcos Gonzalez-Gaitan, professeur à l’Université de Genève
(UNIGE), met au jour un processus de contrôle de croissance qui module la taille des
tissus. Les scientifiques dévoilent comment des acteurs moléculaires appelés
morphogènes déterminent la dynamique de prolifération au sein des organes en
développement. Les auteurs de cette étude, publiée dans l’édition du 4 mars 2011 de
Science, cherchent désormais à savoir si cette «règle de croissance» intervient
également dans des processus aboutissant au développement de tumeurs.
Au cours du développement, la croissance et l’organisation des organes et des
membres sont coordonnées de façon stricte. Tandis que la taille d’un tissu augmente,
les cellules qui le constituent doivent se spécialiser en vue d’assumer des fonctions
spécifiques. La synchronisation est effectuée par des morphogènes, des substances
biochimiques qui assurent l’organisation du développement du tissu, ainsi que les
positions des différents types de cellules spécialisées. Ces molécules de signalisation,
présentes aussi bien chez la mouche que l’humain, diffusent à partir d’une source
localisée, au sein du tissu en formation. Tandis que les morphogènes se répandent
alentours, leur concentration diminue. Une cellule donnée percevra donc une
concentration spécifique selon sa position, ce qui influencera sa fonction et son
destin.
Un Shiva moléculaire
Comment les morphogènes peuvent-ils fournir des informations géographiques, tout
en contrôlant la croissance dans le temps? «Nous savons comment ces molécules
régulent l’organisation d’un tissu: les cellules qui le composent activent des gènes
distincts en réponse à différentes concentrations de morphogènes et, par conséquent, se
spécialisent dans diverses voies. La façon avec laquelle les morphogènes contrôlent la
croissance demeurait toutefois un mystère», explique Marcos Gonzalez-Gaitan,
professeur aux Départements de Biochimie et de Biologie moléculaire de l’UNIGE.
Une pièce essentielle de ce puzzle est désormais fournie par son groupe, en
collaboration avec des chercheurs de l’Institut Max Planck pour la physique des
Université de Genève
systèmes complexes à Dresde, en Allemagne. Les biologistes ont utilisé pour leur
projet un organisme modèle bien établi : la mouche du vinaigre Drosophila. Les larves
de cet insecte subissent une métamorphose complète, grâce à des tissus spécifiques,
les disques imaginaux, qui se développeront pour former la plupart des structures du
corps adulte, telles que les ailes.
Le centre du disque imaginal de l’aile de la mouche est composé de cellules distinctes
qui sécrètent un morphogène appelé Decapentaplegic (Dpp). Cela provoque la
formation d’un gradient de concentration décroissant, au fur et à mesure que l’on
s’éloigne du centre du disque. Les chercheurs ont voulu comprendre comment des
cellules distantes du centre pouvaient croître et se diviser aussi rapidement que des
cellules proches, en réponse au signal du Dpp, tout en percevant des concentrations
différentes de ce morphogène.
Un paradoxe apparent
Leur projet a mené à deux découvertes-clé. «D’une part, nous avons trouvé que le
gradient de Dpp s’étend dans le temps et dans l’espace, au fur et à mesure que l’aile
croît, et qu’il s’adapte à la taille du tissu. Etant donné que la structuration du tissu
s’effectue en réponse au gradient lui-même, son augmentation garantit que les
proportions de l’aile soient conservées», commente Ortrud Wartlick, auteur de l’étude.
L’expansion du gradient de morphogènes implique une augmentation de la
perception de Dpp par toutes les cellules de l’organe croissant, au cours du temps.
Ceci constitue une énigme, car les biologistes pensaient que toutes les cellules se
divisent lorsqu’elles détectent une concentration spécifique du signal chimique. Ce
paradoxe apparent a été résolu avec la deuxième découverte: «Nous avons observé
que les cellules de l’aile se divisent lorsque le signal de Dpp qu’elles perçoivent a
augmenté de 50%, indépendamment de leur position et quel que soit le moment du
développement», détaille Marcos Gonzalez-Gaitan. Le fait que les cellules puissent
estimer la vitesse d’expansion du gradient et utiliser cette information pour savoir
quand se diviser change de façon drastique le concept établi jusqu’ici.
Morphogènes et cancer
L’équipe de Marcos Gonzalez-Gaitan, qui est un membre des deux Pôles nationaux de
recherche Chemical Biology et Frontiers in Genetics, cherche désormais à savoir si un
tel mécanisme de contrôle est également impliqué dans des processus pathologiques
de prolifération de tissus, tels que le développement tumoral. En effet, le
morphogène Dpp, qui est appelé Transforming Growth Factor-beta chez l’humain, est
impliqué dans la plupart des cancers. Il est donc crucial de comprendre comment les
cellules malignes mesurent la concentration de morphogènes et la vitesse de leur
expansion.
Contacts:
Pour obtenir de plus amples informations, n’hésitez pas à contacter
Prof. Marcos Gonzalez-Gaitan, tel + 41 22 379 64 61, [email protected]
Presse Information Publications:
24 rue du Général-Dufour - CH-1211 Genève 4 - Tél. 022 379 77 17 - Fax 022 379 77 29
E-mail: presse@unige.ch, www.unige.ch/presse
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