Rapport d’activité. Période 2005-2008
1. Introduction
Dans les dernières années, la volcanologie a connu de rapides progrès dans plusieurs domaines. Les
systèmes d’observation, qu’ils soient permanents ou temporaires, se sont grandement améliorés,
entraînant une augmentation de la qualité, de la quantité et de la variété des données disponibles. Pour
exploiter la masse d’information obtenue, des méthodes d’analyse détaillée et de traitement
systématique des signaux ont été développées. Des observations multi-méthodes se multiplient et
l’interprétation conjointe des différents types de données permet de mieux comprendre les
phénomènes dans les systèmes magmatiques et hydrothermaux. Ces résultats apportent des contraintes
à des modèles physiques de ces systèmes. Par exemple, des modèles de dynamique des écoulements
de magma dans des conduits et de l’évolution des dômes de lave (Melnik et Sparks, 2005) rendent
compte de nombreux aspects du comportement complexe des éruptions de volcans andésitiques.
D’autres études montrent que les effets du dégazage des colonnes magmatiques jouent un rôle
fondamental dans l’évolution des systèmes et dans leur réponse sismique (Sturton et Neuberg,
2003 ;2006 ; Jousset et al., 2003 ; Collombet, 2009). Une meilleure compréhension des processus
physique dans les volcans repose donc sur le développement de modèles conceptuels et numériques
ainsi que sur des expériences analogiques. En parallèle, les études de structure ont été l’objet de
développements remarquables. La résolution des méthodes d’imagerie a été améliorée grâce à la
densification des réseaux de capteurs et à l’amélioration des méthodes. Sur des volcans très actifs et
particulièrement bien instrumentés comme l’Etna, des tomographies à 4D ont mis en évidence des
évolutions temporelles de la structure en relation avec des intrusions magmatiques (Patané et al.,
2008). Toutefois, malgré les progrès mentionnés ci-dessus, la connaissance partielle que l’on a des
structures génère de fortes incertitudes sur la localisation et le mécanisme des sources sismiques.
1.1 Composition de l’équipe
Nom Statut Age
Thématique principale
Jean-Luc Got PR 53 Sismologie et mécanique
Philippe Lesage MCF 54 Sismologie volcanique
Jean-Philippe Métaxian CR 47 Sismologie volcanique
Virginie Pinel CR 33 Modélisation mécanique et déformation
André Revil DR 39 Méthodes électriques
Jean Vandemeulebrouck MCF 50 Systèmes hydrothermaux
Jacques Grangeon IE 55 Instrumentation
Pascale Bascou IE (50%) 33 INSAR
1.2 Thèses soutenues
Nom Université
d’inscription Date
soutenance Mot-clé Type de
financement Situation actuelle
Vadim
Monteiller Université de
Savoie 12/2005 Tomographie sismique, décalage
temporel, inversion MESR Post-doc
Olivier
Lengliné Université de
Savoie 01/2009 Contraintes, sismicité, volcan, faille Europe Post-doc
Aurélie
Legaz Université de
Savoie 03/2009 Imagerie géophysique, activité
hydrothermale MESR Post-doc
Alexandre
Bolève Université de
Savoie 03/2009 Potentiel spontané, fuite, digue,
barrage CIFRE CDI Sté Fugro
Equipe Géophysique des volcans 1 Rapport d’activités 2005-2008
1.3 Communications
Publications dans revues à comité de lecture : 6 (2005), 4 (2006), 7 (2007), 21 (2008)
Communications dans des congrès avec actes : 30
Chapitres de livre et édition de livre : 12
Conférences grand public : 12
1.4 Bilan financier
Projet européen VOLUME oct 2005 – mars 2009 (contrat n° 018471) : 240 k€
Contrat CEA C2004-73 : « Etudes sur la méthode des doubles-différences » : 155 480 Euros.
ANR EFIDIR : 9 k€ en 2008, 9 k€ en 2009
PNTS : 2 k€ en 2007, 2 k€ en 2008
BQR Université de Savoie : 2005 : 14 k€ ; 2006 : 25 k€
2. Sismo-mécanique et structure des volcans
Au début de ce quadriennal, notre effort a porté sur la mise au point d’une méthode de tomographie en
doubles-différences (Thèse de Vadim Monteiller, soutenue en Novembre 2005). Cette méthode permet
l’utilisation de décalages temporels d’ondes P premières arrivées, mesurés très précisément par
méthode interspectrale dans le cas de séismes semblables, pour une tomographie en vitesse sismique
du milieu de propagation. Cette méthode nécessite un calcul direct très précis (effectué par retracé des
rais dans le champ des temps de parcours calculé par un algorithme Podvin-Lecomte) et une inversion
robuste, une attention particulière étant portée aux problèmes de conditionnement du système
d’équations à inverser. Elle a nécessité la mise en œuvre d’un algorithme d’inversion Tarantola-
Valette dans l’espace des paramètres, et donc une approximation correcte de l’inverse de la matrice de
covariance des paramètres (vitesses), réalisée grâce à une relation de récurrence originale.
L’application réalisée sur le volcan Kilauea a permis de mettre en évidence, à petite échelle, le
système d’approvisionnement magmatique du volcan avec une résolution et une stabilité jamais
atteintes jusqu’ici (Monteiller et al., 2005, J. Geophys. Res.).
Deux autres résultats notables de cette étude ont été la mise en évidence dans le volcan et ses rifts d’un
noyau rapide (donc dense, mis en place par intrusion) entouré de matériau lent (léger, mis en place par
extrusion), et d’un système plan de décollement (au toit de la croûte océanique) – faille inverse (dans
la croûte océanique) à la limite du noyau rapide. Une modélisation mécanique des déformations du
volcan a été effectuée en différenciant le noyau dense et élastique de la couverture périphérique, légère
et élasto-plastique.
Elle permet de retrouver une faille
inverse dans la croûte, créée sous
l’action du poids du noyau et des
contrastes de propriétés mécaniques
noyau/remplissage. Un édifice de la
taille du Mauna Loa peut atteindre la
masse critique permettant de poinçonner
profondément la croûte océanique, en
engendrant un système de faille qui
traverse la croûte, créant les conditions
pour l’ascension du magma et la
naissance d’un nouvel édifice volcanique
(le Kilauea et ses rifts).
Modélisation mécanique du volcan Mauna Loa, Hawaii, et
de la lithosphère sous-jacente (Got et al., 2008)
L’introduction d’une poussée horizontale du magma provoque un poinçonnement de la couverture
d’origine effusive, légère et élasto-plastique par le noyau dense et plus rigide, engendrant une zone de
déformation intense exactement à l’endroit où l’on observe les gigantesques escarpements de failles
d’Hilina Pali, dont les mouvements sont à l’origine de tsunamis (Got et al., 2008, Nature).
Equipe Géophysique des volcans 2 Rapport d’activités 2005-2008
La même méthode, comportant une nouvelle paramétrisation en Vp, Vp/Vs et un nouveau test de
validation de la position des séismes localisés, a été utilisée pour étudier la structure des volcans
Cotopaxi (Equateur) et Etna (Italie). Pour le Cotopaxi, l’étude a nécessité la mise au point d’un modèle
de vitesse régional à l’échelle de l’Equateur, puis à celle du volcan Cotopaxi. Le résultat montre une
zone de vitesse plus élevée au Sud-Est du Cotopaxi, dans la région où Molina et al. (2009) ont localisé
un essaim de séismes très longue période accompagnant une intrusion. Cette zone rapide délimite
probablement le système d’alimentation du volcan. Deux articles sont en cours de publication dans
Geophys. Res. Letters (Equateur et Etna).
3. Etude et modélisation des sources sismo-volcaniques
Nous avons étudié les sources sismo-volcaniques et la sismicité des volcans en combinant plusieurs
méthodes.
Nous avons développé, en collaboration avec l’OPGC, une approche multi-méthode pour observer en
détail des explosions volcaniques. Elle consiste à déployer simultanément un réseau de sismomètres
large-bande, des antennes sismiques, des capteurs acoustiques, un radar Doppler, complétés si possible
par des mesures de flux de gaz par spectromètres UV (DOAS) et des enregistrements vidéo. Cette
approche permet de mieux mettre en évidence la complexité et la variabilité des phénomènes et aussi
de mieux contraindre les modèles interprétatifs. Des expériences de ce type ont été menées sur les
volcans Arenal (Costa rica), Popocatépetl (Mexique) et Yasur (Vanuatu). Les données obtenues sont
en cours d’analyse (Donnadieu et al., 2008 ; Mora et al., 2009) et montrent une grande complexité des
phénomènes. Nous avons proposé un modèle conceptuel de la source des trémors volcaniques de
l’Arenal (Lesage et al., 2006). Ce modèle fait intervenir un couplage entre un flux intermittent de gaz à
travers des fractures du bouchon de lave et la résonance du conduit magmatique. Les observations
multi-méthodes effectuées récemment sur ce volcan sont en accord avec ce modèle (Donnadieu et al.,
2008).
Les localisations de sources d’événements émergents, tels que les séismes LP et les trémors, que l’ont
peut effectuer à l’aide d’antennes sismiques, sont fortement perturbées par les hétérogénéités de la
structure. Nous avons étudié et pris en compte les effets de topographie et des couches superficielles à
faibles vitesses en calculant les sismogrammes synthétiques complets par la méthode Lattice-
Boltzman de O’Brien et Bean (2004). Nous avons montré ainsi que l’on peut améliorer les
localisations et mieux choisir les sites d’installation des antennes (Métaxian et al., soumis).
La localisation, le mécanisme et la fonction
temporelle des sources sont des informations
essentielles pour mieux comprendre la
dynamique des systèmes éruptifs. Nous avons
abordé le problème de la détermination du
tenseur des moments sismiques des sources
associées aux explosions par l’inversion des
formes d’onde. Ce travail est mené en
collaboration avec l’University College of
Dublin et l’INGV de Pise. Nous avons
appliqué cette méthodologie aux explosions de
l’Ubinas (Pérou) qui présentent des formes
d’onde très similaires suggérant une source
non destructive. Dans ce cas, le modèle de
source le plus probable correspond à une
fracture de 40° de pendage (Monteiller et al.,
2008). D’autres applications sur les volcans
Arenal (Davi et al., 2008) et Yasur (thèse de
Laurence Perrier) sont en cours.
Modèle de source sismique dans le volcan Ubinas
Par ailleurs, nous avons développé divers outils d’analyse. Un logiciel dédié au traitement des signaux
sismo-volcaniques avec interfaces graphiques a été réalisé et distribué dans des observatoires et des
groupes de recherche (Lesage, 2008 ; 2009). Un système de classification automatique de signaux basé
Equipe Géophysique des volcans 3 Rapport d’activités 2005-2008
sur les Chaînes de Markov Cachées (Benitez et al., 2009) a été mis au point en collaboration avec
l’Universidad de Granada (Espagne) et l’Universidad de Colima (Mexique). Celui-ci sera intégré dans
des systèmes de surveillance pour améliorer les diagnostiques en temps réel. De plus, ce système sera
utilisé pour classer l’ensemble des événements enregistrés sur plusieurs volcans et obtenir des
catalogues complets et cohérents de sismicité par classe d’événement.
4. Etude de l'évolution temporelle des signaux géophysiques
(sismicité, déformation) associée au stockage et au transport
du magma.
Des modèles mécaniques prenant en compte le couplage entre la roche encaissante et le magma fluide
ont été développés afin d’expliquer l’évolution temporelle de la sismicité et de la déformation induite
par le stockage et le transport du magma. Ces modèles ont été appliqués avec succès à plusieurs
volcans basaltiques. Lengliné et al. 2009 montrent une évolution exponentielle de la sismicité et de la
déformation au Kilauea (Hawaii) et au Piton de la Fournaise (La Réunion) compatible avec un
stockage de magma dans un réservoir superficiel alimenté par une source profonde ayant une pression
constante. La constante de temps déterminée apporte une information sur les dimensions du système
d’alimentation profond. Traversa & Grasso, 2009 et Traversa et al. (soumis à JGR) montrent une
stationnarité de la sismicité lors de l’épisode de propagation de dyke sur plusieurs volcans basaltiques
(par ex. Etna, Piton de la Fournaise) compatible avec un flux d’injection de magma constant dans le
temps. Ce modèle apporte des contraintes sur la taille et la surpression du réservoir superficiel
nourrissant l’intrusion magmatique. Par ailleurs, Albino et al. (soumis à GJInt) ont montré que l’étude
des déformations enregistrées sur un cycle éruptif et des volumes de magma émis permettait d’obtenir
une estimation de la résistance à la fracturation en tension des roches et de la compressibilité du
magma. Enfin, Pinel et al (soumis à JGR) montrent que ces modèles peuvent également servir à
interpréter des données pétrologiques obtenues à des échelles de temps beaucoup plus grandes : ils
permettent d’expliquer des variations temporelle de flux magma émis en surface.
Un travail important a été effectué sur les effets des perturbations externes au système volcanique.
Nous avons caractérisé la déformation induite par une variation superficielle de charge. Ceci a apporté
une estimation du module de Young caractérisant la croûte superficielle en Islande (Pinel et al. 2007,
Grapenthin et al 2006) et de séparer la déformation induite par un apport de magma de celle due à des
phénomènes externes (Sturkell et all 2008, Pinel et al. 2009). Nous avons estimé les perturbations de
pression induite dans une zone de stockage superficielle et les conséquences pour la sismicité
enregistrée et le déclenchement des éruptions (Pinel et al. 2009, Albino et al. soumis à GJint). Les
modèles développés apportent une information sur la forme du réservoir magmatique, sa taille et sa
profondeur.
Vitesse moyenne dans la ligne de visée du satellite pour le volcan de Colima (les valeurs positives correspondent à un
éloignement du satellite). Les résultats sont présentés sur le Modèle Numérique de Terrain SRTM. (d’après Pinel et. al,
2008).
Les modèles développés ayant montré l’intérêt d’avoir une bonne information sur l’évolution
temporelle de la déformation, nos efforts ont également porté sur l’acquisition de données de
déformation par InSAR dans le cas des strato-volcans andésitiques. Ces volcans présentent des
changements rapides et mal compris de leur dynamisme éruptif et leur étude par interférométrie
Equipe Géophysique des volcans 4 Rapport d’activités 2005-2008
présente des difficultés certaines principalement due à la topographie importante des édifices. Nous
avons travaillé sur des séries temporelles de données SAR en incorporant des corrections des artéfacts
atmosphériques par apport d’informations météorologiques. Cette étude a été appliquée à deux
volcans Mexicains : le Popocatepetl et le Colima (Pinel et al. 2008).
5. Dynamique des fluides hydrothermaux
Cet axe de recherche de l’équipe Volcans vise à reconnaître et comprendre les processus physiques qui
régissent le fonctionnement des systèmes hydrothermaux. Il s’appuie d’une part sur l’observation et
l’imagerie géophysique de ces systèmes, et d’autre part sur la modélisation analogique et numérique.
L’observation des processus naturels a été réalisée par des suivis temporels et des campagnes
d’imagerie géophysique multi-méthodes (a) à grande échelle sur des volcans actifs, (b) à petite
échelle, sur des zones laboratoires choisies pour leur activité cyclique comme la zone hydrothermale
de Waimangu (thèse A. Legaz) ou les geysers de Yellowstone (thèse en cours d’E. Cros). Les
techniques d’imagerie utilisées, acoustique, thermique et électrique, se sont révélés très
complémentaires et bien applicables aux champs hydrothermaux (Revil et al., 2008). L’application des
méthodes géophysiques est allé de pair avec des développements méthodologiques en acoustique et
électrique, comme par exemple l’application de techniques acoustiques sous-marines, comme le
Matched Field Processing (Gouédard, 2008 ; Legaz et al, 2008) en liaison avec l’équipe acoustique du
LGIT, le développement de méthodes inverses en polarisation spontanée (Jardani et al., 2008) et en
méthode sismo-électrique, et le développement d’un modèle mécanistique en polarisation provoquée.
La modélisation analogique des systèmes hydrothermaux a tout d’abord permis de caractériser leurs
instabilités intrinsèques, ces systèmes étant gravitationnellement instables à cause de leur structuration
thermique (liquide au dessus de vapeur). En utilisant des milieux poreux saturés soumis à des
conditions thermiques similaires aux systèmes naturels, on a d’abord pu montrer qu’ils pouvaient
présenter une activité cyclique naturelle (Vandemeulebrouck et al., 2005), similaire à celle observée
sur plusieurs sites volcaniques dont Waimangu (Vandemeulebrouck et al., 2008). Dans un deuxième
temps, nous avons étudié la réponse mécanique et thermique d’un système hydrothermal à un forçage
externe, comme un dégazage d’origine magmatique. L’injection instantanée de vapeur à la base du
milieu poreux étudié précédemment provoque une rapide surrection du milieu, suivie d’une lente
subsidence sur laquelle viennent se superposer des oscillations amorties. Une telle évolution est tout à
fait semblable aux variations du mouvement du sol observées depuis 1980 aux Champs Phlégréens
(Italie), comme le montre la figure ci-dessous, et prouve que la réponse hydrothermale est complexe et
contient des composantes non magmatiques. Une coopération en cours avec M. Todesco de l’INGV
Bologne sur l’application du code numérique TOUGH2 va permettre d’étudier le passage à grande
échelle des processus observés analogiquement à petite échelle.
(a) (b)
Comparaison (a) de la déformation verticale obtenue suite à d’un injection de vapeur (trait pointillé) sur un modèle poreux
analogique avec (b) le déplacement vertical du sol mesuré aux Champs Phlégréens, d’après Chiodini et al., 2003 . Le modèle
analogique montre qu’une seule injection suffit pour générer la totalité de l’évolution observée, y compris les épisodes de
mini-uplifts.
Equipe Géophysique des volcans 5 Rapport d’activités 2005-2008
1 / 5 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !