Les ressources en eau sont limitées. Le potentiel
hydraulique mobilisable est estimé à 21 milliards de m3.
La part réservée à l’agriculture est de 17 milliards de m3,
soit plus de 80% des eaux mobilisées. La concurrence
sur ces ressources se sent de plus en plus entre les
différents secteurs utilisateurs, à savoir l’agriculture,
l’eau potable et l’industrie en raison notamment de
l'accroissement démographique et de l’essor industriel.
L’agriculture, grand consommateur des eaux mobilisées,
est ainsi appelée à utiliser plus rationnellement cette
ressource avec le maximum d’efficacité et d’efficience.
Ce devoir est dicté également par le poids financier des
lourds investissements qu’a nécessité la mobilisation de
ces ressources mais également, vu le caractère structurel
que commence à avoir la sécheresse, qui a frappé le
pays de façon presque continuelle durant les deux
dernières décennies.
3. Contexte actuel de l’utilisation de l’eau dans les
grands périmètres d’irrigation au Maroc
Dans un contexte de rareté des ressources en eau, d’une
sécheresse ayant pris un caractère structurel et face à
une demande croissante de la part des différents secteurs
d’utilisation de l’eau et aux problèmes liés à son
allocation entre ces différents secteurs, le Maroc s’est
trouvé depuis quelques années, dans l’obligation de
s’engager sur la voie d’une rationalisation de
l’utilisation de ses ressources hydriques afin d’en
assurer la durabilité quantitative et qualitative.
Aussi, avec les mutations, de plus en plus accélérées, de
l’environnement économique et socio institutionnel des
exploitations agricoles dans les grands périmètres
irrigués, liées entre autres à la libéralisation progressive
et continue du secteur agricole, aux engagements dans le
cadre d’accords de libre échange, au passage inéluctable
à la gestion déléguée des périmètres de grande
hydraulique, au rattrapage tarifaire…, les usagers de
l’eau d’irrigation se sentent doublement défier par la
nécessité de s’adapter à cette nouvelle donne :
- améliorer aussi bien la qualité que la compétitivité
de leurs productions pour pouvoir faire face aux
changements du contexte international et à la rude
concurrence avec leurs voisins de l’autre rive;
- continuer à exister en affrontant les diverses
modifications du contexte national, entre autres la
révision à la hausse des tarifs de l’eau d’irrigation
dans le cadre du plan de rattrapage tarifaire.
La valorisation de l’eau est ainsi incontestablement, le
plus grand défi auquel doit faire face l’agriculture
irriguée du Maroc en ce début du 21ème siècle. Cette
valorisation passe d’une part par une maîtrise des
gaspillages comme par une augmentation de la
productivité de l’eau d’irrigation, choses qui impliquent
des adaptations à différents niveaux, à savoir : dans la
conception des réseaux d’irrigation, dans les techniques
d’irrigation à la parcelle, dans les méthodes de gestion
de l’irrigation, dans la composition des systèmes de
production, dans les choix des cultures et techniques
culturales, etc.
4. Un nouveau concept pour une meilleure efficacité
de l’utilisation de l’eau
Bien que l’irrigation au Maroc ait toujours constitué un
instrument privilégié pour assurer l’accroissement de la
production agricole, lutter contre les effets de la
sécheresse, et contribuer à l’amélioration des revenus
des agriculteurs, elle a également toujours fait l’objet de
plusieurs reproches dont les plus importantes sont :
- Une consommation d’eau excessive ;
- Une efficacité médiocre et une faible valeur
ajoutée;
- Des subventions considérables ;
- Des risques de pollution de plus en plus inquiétants.
L’introduction du concept ‘‘Valorisation” dans les
grands périmètres irrigués au Maroc est assez récente.
On parlait plutôt avant de l’économie de l’eau qui se
base uniquement sur la recherche d’une réduction des
pertes en irrigation, en réduisant les quantités d’eau
apportées et en maîtrisant les nouvelles techniques
d’irrigation. La valorisation de l’eau d’irrigation, quant
à elle peut être définie comme étant la recherche du
maximum d’efficacité, d’efficience, et de productivité
technique et financière de l’utilisation de l’eau
d’irrigation. L’expérience acquise au fil des années dans
les grands périmètres irriguées du Maroc, notamment au
Loukkos, en matière d’irrigation a montré que la
réflexion doit être élargie du concept d’économie de
l’eau à celui plus large de sa valorisation.
On peut parler de valorisation agronomique dont
l’objectif est d’optimiser le rapport d’unité d’eau
consommée par unité de produit.
On peut parler aussi de valorisation économique dont
l’objectif cette fois est l’optimisation du rapport : valeur
de la production, valeur de la marge brute ou valeur
ajoutée par volume d’eau consommée.
Cette révision conceptuelle est dictée aussi par le fait
que, à l’échelle micro-économique, la consommation de
l’eau d’irrigation varie en fonction des cultures
pratiquées et la valeur de ces mêmes cultures est loin
d’être la même sur le marché intérieur ou d’exportation.
Cette différence importante mène à poser des questions
fondamentales quant aux choix des cultures dans les
grands périmètres d’irrigation. Elle interpelle également
une réflexion sur les voies de recherche-développement
de cultures adaptées à notre problématique de rareté de
l’eau tout en étant à la fois compétitives et le plus
possible rémunératrices.
Par ailleurs, l’importance que prend de plus en plus la
dimension sociale et environnementale dans le monde
ainsi que l’ampleur des répercussions sur la qualité des
ressources hydriques superficielles et souterraines,
engendrés par une activité agricole et industrielle de
plus en plus intense, impose, encore une fois,
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