Au procès de la filière Cannes-Torcy, défense et parties

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Au procès de la filière Cannes-Torcy, défense et parties civiles à couteaux
tirés
vendredi 12 mai 2017, par Thémis
La tension est palpable depuis le premier jour. Au procès de la filière jihadiste de Cannes-Torcy, les questions
récurrentes des parties civiles sur la pratique religieuse des accusés exaspèrent la défense, qui craint de voir le
débat biaisé par de trop nombreux "procureurs bis".
Premier accrochage : au lendemain de l’attentat du 20 avril sur les Champs-Élysées, l’avocat du Conseil représentatif des
institutions juives de France (Crif), partie civile, demande et obtient du président de la cour une minute de silence à la mémoire du
policier tué. Une "instrumentalisation" vivement dénoncée par la défense.
En ce début de procès, la cour cherche à mieux cerner la personnalité des accusés, vingt hommes - dont trois absents - jugés pour
leur appartenance à un groupe longtemps considéré comme la plus dangereuse filière jihadiste en France.
Originaires de Torcy (Seine-et-Marne) ou de Cannes (Alpes-Maritimes), ils encourent presque tous entre 20 ans de réclusion et la
perpétuité pour un attentat à la grenade dans une épicerie casher de Sarcelles en 2012, des projets d’attaques contre des militaires
ou des départs en Syrie.
L’accusation interroge sur le rapport à la violence et à la religion, mais aussi sur l’enfance, la détention, les rêves brisés. Les avocats
d’institutions juives ou d’associations de victimes du terrorisme concentrent, eux, leurs questions sur la conversion, le jihad, les
mouvances salafistes, traquent la haine de l’autre dans la pratique de l’islam.
"Des procureurs bis", selon l’avocat de la défense Michel Konitz. Or sur la quinzaine de parties civiles, seules cinq sont des victimes
physiques.
"Il y a une surreprésentation des associations" à laquelle, relève Me Bruno Vinay, un arrêt de la Cour de cassation a posé un frein en
2016 en n’autorisant à se constituer partie civile que les personnes ayant subi un préjudice direct en lien avec l’infraction.
- "Mauvais islam" -
Pour Antoine Mégie, maître de conférences à l’université de Rouen, "les parties civiles, omniprésentes, installent une vision très
déterminée des enjeux du procès, en posant comme centrale la place de l’antisémitisme". Les accusés, rappelle ce spécialiste du
traitement judiciaire de l’antiterrorisme qui assiste aux audiences, "sont d’abord jugés pour leur appartenance à une entreprise
terroriste, avec pour certains la circonstance aggravante de l’antisémitisme".
Pour lui, "l’enjeu est de faire la différence entre l’engagement dans une religion qui peut être radicale et une idéologie qui mène à la
violence".
Or la multiplication des questions sur la religion biaise le débat : "la question n’est pas de savoir comment ils vivent leur religion
mais pourquoi ils s’engagent dans un groupe qui va prôner la violence. S’ils étaient marxistes, on ne leur demanderait pas
d’expliquer tout Marx".
Un positionnement totalement assumé par l’avocat du Crif et de la Chambre de commerce France-Israël, Pascal Markowicz : "Les
parties civiles ont été ciblées parce que juives. L’antisémitisme est au coeur de ce dossier, annonciateur des attentats de 2015,
alors c’est normal qu’on pose des questions."
L’antisémitisme du chef de la filière, Jérémie Louis-Sidney, tué lors de son arrestation, n’est contesté par personne. Un accusé se
souvient de lui "vraiment joyeux" après les assassinats de Mohamed Merah dans une école juive, six mois avant l’attentat de
Sarcelles. D’autres étaient prêts à "tuer des mécréants".
Mais la haine des juifs est-elle un moteur pour tous ? "Certains sont antisémites, mais ils ne sont pas tous pareils !", lance un jour un
avocat, exaspéré de voir les mêmes questions posées quel que soit le parcours.
A force de répétitions, ce questionnement donne parfois l’impression qu’on fait "le procès de l’islam" ou d’un "mauvais islam", ce qui
n’est "vraiment pas le sujet", déplorent plusieurs avocats.
Certains développent des stratégies de déminage. Me Marie-Pompéi Cullin demande ainsi à son client converti : "Si vous invitez des
gens à dîner et qu’on vous apporte une bouteille de vin, vous acceptez de la toucher ?
- Oui, bien sûr.
- Bon, ça c’est fait."
Plus rarement, certains témoins recadrent eux-mêmes le débat. Comme cet homme d’affaires à la laïcité revendiquée, à qui la
partie civile demande s’il a tenté de comprendre pourquoi son fils s’était tourné vers l’islam, et qui répond : "votre question est
carrément raciste. Le fait de se convertir à l’islam serait dangereux ?".
Source : lexpress.fr
Auteur : AFP
Date : 12 mai 2017
P.-S.
Source : lexpress.fr
Auteur : AFP
Date : 12 mai 2017
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