La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VI - mai-juin 2003
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ACTUALITÉ THÉRAPEUTIQUE
La distribution de ces mutants pré-C est ubiquitaire et particu-
lièrement fréquente à travers le monde, avec une prévalence de
7 à 30 % des malades porteurs d’infection chronique par le VHB.
Ces variants sont essentiellement trouvés en Méditerranée, avec
une prévalence de 50 à 80 % et, en Asie, avec une prévalence de
40 à 55 %. En France, alors qu’il y a une dizaine d’années seu-
lement 20 % des cas d’hépatite chronique B étaient liés au virus
pré-C, cette proportion a fortement augmenté et approche les 50%
dans les dernières estimations (7, 8).
DES OUTILS DIAGNOSTIQUES
DE PLUS EN PLUS PERFORMANTS (9, 10)
Le diagnostic de l’infection à VHB ainsi que son stade évolutif
sont déterminés par les marqueurs sérologiques que sont les anti-
gènes HBs et HBe, les anticorps anti-HBs, anti-HBc et anti-HBe.
Des tests moléculaires permettent de quantifier l’ADN viral, reflet
du degré d’infectivité et du taux de réplication, et de suivre l’évo-
lution de la maladie sous traitement.
La détection-quantification de l’ADN du VHB est donc le
meilleur marqueur de la réplication virale. Il peut être réalisé par
hybridation de l’ADN viral à des sondes spécifiques, éventuel-
lement associée à une amplification du signal (technique des ADN
branchés) ou par amplification génique de type Polymerase Chain
Reaction(PCR). La technique PCR, ou “réaction d’amplification
en chaîne” réalise l’amplification exponentielle et sélective des
séquences d’ADN cible. Cette technique est extrêmement sen-
sible, puisqu’elle permet de détecter des concentrations d’ADN
inférieures à 200 copies/ml. Les techniques se classent donc de
la façon suivante, par ordre de sensibilité croissante : hybrida-
tion, amplification du signal (ADN branché), amplification
génique. La mise en évidence d’une réplication virale est indis-
pensable pour poser l’indication thérapeutique au cours de l’hé-
patite B.
Ces nouveaux tests de détection de l’ADN obligent à repenser la
définition de l’hépatite B. Ainsi, de nombreux patients répon-
deurs à un traitement antiviral continuent de présenter une charge
virale détectable par PCR, ce qui pose la question de la défini-
tion de la réponse et de l’arrêt du traitement (4, 5). Environ 90 %
des patients inactifs ont de l’ADN du VHB détectable par PCR
(11). Récemment, les conclusions de la conférence de consensus
internationale sur l’hépatite B ont proposé le seuil de 100000
copies d’ADN VHB pour définir une hépatite chronique active
et l’indication du traitement antiviral (12).
LES NOUVELLES THÉRAPEUTIQUES
L’objectif du traitement de l’hépatite B est de prévenir la pro-
gression de l’infection jusqu’à la cirrhose ou le carcinome hépa-
tocellulaire et donc de réduire la morbidité et la mortalité asso-
ciées à cette pathologie. Afin d’atteindre cet objectif, il est
nécessaire d’éliminer ou de réduire significativement la réplica-
tion virale et d’obtenir une diminution de l’activité nécrotico-
inflammatoire au niveau du foie.
Les molécules antivirales actuelles trouvent leur efficacité maxi-
male et leur justification lorsqu’elles interviennent en renfort du
processus d’éradication immune des cellules infectées, c’est-à-
dire lors des phases d’activité de la maladie.
Jusqu’à présent, le traitement de l’hépatite chronique B reposait
sur l’interféron alpha ou la lamivudine en monothérapie (12, 13).
Cependant, l’un ou l’autre de ces traitements n’entraîne une
réponse virologique prolongée que dans environ 20 à 30 % des
cas, aussi bien chez les malades atteints d’hépatite chronique B
à virus sauvage (AgHBe positif) que chez ceux atteints d’hépa-
tite chronique B liée à un virus mutant pré-C (AgHBe négatif).
De plus, la fréquence d’apparition du VHB résistant à la lamivu-
dine augmente avec le temps de 24 % à 1 an, 38 % à 2 ans, 50%
à 3 ans et 67% à 4 ans.
Récemment, de nouveaux antiviraux (analogues nucléotidiques
et nucléosidiques), élaborés d’abord pour le virus de l’immuno-
déficience humaine, ont fait l’objet d’une évaluation dans l’hé-
patite chronique B. Le chef de file de cette nouvelle génération
d’antiviraux est l’adéfovir, dont les résultats des études de phase
III confirment l’efficacité (14, 15, 16). L’adéfovir dipivoxil est
particulièrement intéressant dans la mesure où il n’induit pas de
résistance virale, au moins après 48 semaines d’administration,
et qu’il peut être efficace sur le virus de l’hépatite B résistant à
la lamivudine (17). Pour d’autres antiviraux en cours de phase I
ou II, les premiers résultats sont également encourageants (13).
Dans deux études contrôlées de l’adéfovir (10 mg par jour) contre
placebo conduites chez des patients atteints d’hépatite B chro-
nique, AgHBe positif ou négatif, un nombre significativement
plus élevé de patients (p < 0,001) ont présenté une amélioration
histologique à la semaine 48 (respectivement 53 et 64 %) par rap-
port aux groupes placebo (25 et 33 %) (15, 16). Une améliora-
tion histologique a été observée, quelles que soient les données
démographiques initiales des patients et les caractéristiques ini-
tiales de leur hépatite B, incluant l’existence ou non d’un traite-
ment préalable par l’interféron alpha.
Dans les deux études mentionnées ci-dessus, le traitement par 10mg
d’adéfovir dipivoxil a été associé à une réduction significative des
taux sériques d’ADN du VHB (respectivement 3,52 et 3,91 log10
copies/ml versus 0,55 et 1,35 log10 copies/ml), à une augmentation
de la proportion de patients présentant une normalisation des taux
d’ALAT (48 et 72 % versus 16 et 29 %) et à une augmentation de
la proportion de patients présentant des taux sériques d’ADN du
VHB indétectables, inférieurs à 400 copies/ml (LLQ Roche Ampli-
cor) (21 et 51 % versus 0 %) par rapport au placebo.
Dans l’étude conduite chez des patients AgHBe positifs, les taux
de séroconversion AgHBe (12 %) et de perte de l’AgHBe (24 %)
ont été significativement plus élevés chez les patients traités par
10mg d’adéfovir dipivoxil que chez les patients sous placebo