ÉDITORIAL
La lettre de l’Académie des sciences n°
en profitant de l’abaissement du « ticket d’entrée »
permis par les nouvelles technologies.
Du côté des chercheurs, pour lesquels l’accès aux
collections électroniques est devenu crucial, on
s’inquiète de l’augmentation constante et impor-
tante des coûts d’abonnement (5 ou 7 % par an
actuellement) en faisant remarquer que les orga-
nismes de recherche en sont à payer trois à quatre
fois l’IST dont ils sont à la fois les auteurs, les
évaluateurs et les consommateurs.
C’est, de fait, sous l’impulsion d’un collectif de
chercheurs et d’organismes que fut signée en
octobre 2003 à Berlin une déclaration prônant
« l’accès ouvert à la connaissance dans les scien-
ces et les humanités ». Elle a donné naissance,
en France, à la base d’articles en accès libre
HAL. Aux États-Unis, les pouvoirs publics ont
accompagné ce mouvement en votant le Conso-
lidated Appropriations Act (2008) : il stipule que
tout article concernant des résultats de recherche
bénéficiant du soutien des National Institutes of
Health (NIH) doit être en libre accès sur la base
PubMed au plus tard un an après sa publication.
Le Conseil de l’Union européenne quant à lui a
pris, fin 2007, une recommandation incitant les
États-membres à aller dans ce sens.
En tout état de cause, l’information et la sensibi-
lisation des chercheurs représentent des enjeux
primordiaux : information sur la politique des
Par Jean Salençon1 et Alexandre Moatti2
1. Président de l’Académie des sciences,
professeur honoraire à l’École polytechnique
et à l’École nationale des ponts
et chaussées.
2. Ingénieur en chef des Mines.
éditeurs en matière d’accès libre – avec appui
des chercheurs dans la négociation des clauses
correspondantes de leurs contrats –, et sensibili-
sation à l’importance de l’enjeu – l’objectif étant
de passer de 15 % à 75 % de la production de
recherche française dans les bases à accès libre.
L’IST au cœur de la politique
de recherche et de compétitivité
L’évaluation de la recherche est une nécessité
qui ouvre la voie au développement de nouveaux
outils prétendant mesurer la qualité de la recher-
che par la bibliométrie. Fondés sur les facteurs
d’impact des revues et les indices de citation,
ils introduisent chez les chercheurs des « règles
du jeu nouvelles », nouvelle forme du « publish
or perish », qui peuvent avoir des effets pervers
concernant la déontologie, les stratégies de publi-
cation et, tout à la fois, l’accroissement du nom-
bre de journaux et la prééminence des « grandes
revues » de « grands éditeurs ».
L’aspect économique de l’édition scientifique et
technique doit être abordé au niveau européen
où apparaissent de réels enjeux : un examen de la
concurrence effective entre éditeurs par champ
scientifique, ainsi qu’une réflexion sur l’harmo-
nisation des taux de taxes entre l’information
scientifique sur papier et sur Internet sont néces-
saires.
En conclusion
La problématique posée à la recherche publi-
que a bien des points communs à celle qui est
posée aux groupes industriels en matière d’IST
ou de veille technologique, mais aussi d’accès
libre. Outre la nécessité de clarifier les différen-
tes initiatives publiques françaises d’accès libre,
organiser le partage des expériences et straté-
gies entre recherches publique et privée serait
bénéfique. Ce partage pourrait avoir lieu au sein
des pôles de compétitivité, y associant les PMI
technologiques, avec l’avantage complémentaire
d’une meilleure circulation de l’IST Q