Arch
Inst. Pasteur
Madagascar,
1982 (1983), 50, 1
LES
roONOSES
A MADAGASCAR
>.
par
JJ.
RIBOTet P
COULANGES
«La vie de
l'homme
est
étroitement
mêlée à celle de ses frères
dits inférieurs,
tout
aussi bien de çeux qui embellissent son intimité
que
de
ceux
qui
assurent sa survivance».
Pr.TREFOUEL
C'est en
1952
que le terme de zoonose a
été
consacré
par
l'O.M.S., àVienne. La définition en a alors été : maladie ou infec-
tions
qui
se
transmettent
naturellement des animaux vertébrés à
l'homme
et vice-versa. Bien que nous préférions la terminologie
anthropo-zoonoses, nous conserverons le
mot
de zoonose large-
ment
utilisé
partout
dans le monde.
AMadagascar d'ailleurs c'est sous le
nom
de zoonoses que Buck
et
Courdurier
ont
décrit en
1962
les maladies communes à
l'homme
et
aux animaux
(4).
Il nous est
apparu
utile, voire nécessaire, 20 ans
après, de faire une mise au
point
sur ce sujet toujours d'actualité.
Dans un première
et
longue partie nous reprendrons les maladies
décrites
par
nos prédécesseurs
pour
en
étudier
le processus évolutif
ou régressif
tout
au long de ces vingt années. '
Dans
une
deuxième partie nous examinerons les nouvelles zoo-
noses malgaches, c'est-à-dire celles apparues après
1962
et
connues
àce jour.
1).
Docteur
Vétérinaire E.E.S.S.A. Université de Madagascar.
2). Médecin du Service de
Santé
des Armées.
Directeur
de
l'Institut
Pasteur
de Madagascar.
.-
147
-
'.
}O partie
Les zoonoses malgaches jusqu'en 1962.
Par
souci de
clarté
nous
reprendrons
la classification
adoptée
par
nos
aînés
en
:maladies àvirus, rickettsioses. maladies
bactériennes,
mycoses, maladies à
protozoaires,
helminthiases,
infestations
trans-
mises
par
les
arthropodes
et
par
les insectes.
10)Maladies àvirus
La Rage
AMadagascar la rage
continue
à
être
essentiellement
une
maladie
du
chien
errant
qui
en
constitue
le réservoir de virus.
Maladie
normalement
endémique,
chaque
année
des cas de rage
sont
diagnostiqués à
l'Institut
Pasteur
de Tananarive.
On
a
noté
en
1974
une
recrudescence
exceptionnelle
de
l'enzootie
rabique
qui
s'est
soldée
dans
la Province de Tananarive
par
un
nombre
particu-
lièrement
élevé de
traitements
humains
et
plusieurs décès.
Depuis
cette
date
les
nombres
de
prélèvements
positifs relevés
chez
le chien
sont
les
suivants:
année
1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981
Tananarive.
. . . . . . 54 21 21
104
121 47 ,30
Madagascar
.......
89 51 51 169 149 67 42
On
note
donc
une
progression irrégulière
de
l'enzootie
canine
avec
un
premier
pic
en
1975
et
un
deuxième
pic
de
recrudescence
àTananarive en
1979.
Malgré
l'existence
d'une
police
sanitaire
stricte
rendant
obliga-
toire
en
tout
temps
l'abattage
des
chiens
errants
sur
toute
l'étendue
du
territoire
de la
République
malgache, la maladie persiste
et
pré-
sente
des
périodes
d
'hyperendémicité
synchrones
de
l'augmenta-
tion
et
de
l'errance
de la
population
canine.
C'est
ainsi
que
de
1959
à
1979,
1882
prélèvements
examinés
sur
2150
envoyés
appartien-
nent
àdes
chiens
(83,8
%). En
outre,
parmi
les
prélèvements
étudiés
certains
proviennent
de chiens
ayant
un
propriétaire,
d'autres
de
chiens
inconnus,
sans
propriétaire
et
déclarés
errants.
On
relève
que
51% des chiens de
propriétaires
ont
été
reconnus
enragés
et
64,8% de chiens
errants
.•
92% des
personnes
traitées
au
dispensaire
antirabique
de l'Insti-
tut
Pasteur
de Madagascar
(13
331
sur
14475)
ont
été
ou
mordues
ou en
contact
avec des chiens (chiens
errants
dans 62%
du
cas).
-
148
Si la valeur du vaccin
antirabique
type
Fermi
utilisé à Madagas-
car
pour
le
traitement
de
l'homme
n'est
plus
à
démontrer,
puisqu'
en
20
ans
d'utilisation
(17) le
taux
d'échec
est
inférieur
à
0,52
pour
1000,
le vaccin lyophilisé
type
Flury
L.E.P.
préparé
au
laboratoire
central de l'élevage depuis
1959
ne
peut
servir à
immuniser
que
les
chiens.
En
effet
en
1970
on
a
noté
le
premier
cas de rage vaccinale
chez le
chat
ayant
reçu
une
injection
de vaccin
Flury
L~.KP.
Depuis
cette
date
la vaccination des
chats
et
àe
certains chiens
est
réalisée
avec des vaccins
d'importation.
àvirus tués. La vaccination des
chiens
n'est
pas
non
plus
un
moyen
de
protection
absolue
contre
la
rage. Les
conditions
de
cette
vaccination
laissent parfois àdésirer
(mauvaise
conservation
des
produits
biologiques
en
brousse
par
rupture
de la chaîne de froid, rappels de vaccination tardifs
et
irré-
guliers).
Sur
1801
prélèvements de chiens examinés,
141
avaient
été
vaccinés,
et
28
sur
ces
141
furent
reconnus
enragés
soit
1
sur
5
ou
20%. Des
proportions
identiques
sont
observées en
Côte
d'Ivoire.
En 21 ans, les archives du service de l'Elevage
montrent
que
59
029
chiens'
ont
été
vaccinés
soit
environ
2810
par
an, ce
qui
est
relativement
peu
comparé
à la
population
canine
qui
n'est
pas re-
censée, mais
qui
peut
être
évaluée à au moins
200.000
têtes
pour
le
pays.
Les dernières
statistiques
du Service de l'Elevage
font
d'ailleurs
état
de :
année
1978
1979
1980
Chiens
abattus
•••••
~
4 • • •
14405
969
3196
Chiens
vaccinés.
. . . . . . . . .
1647
1814
351
Cette
sorte
de démobilisation dans la
lutte
contre
la rage
qui
comme
le souligne les
rapports
du service .de l'élevage «se
heurte
à
l'incompréhension
des
ruraux
et
àl'inconscience des collecti-
vités décentralisées»
pourrait
avoir
pour
conséquence
une
nou-
velle flambée de rage. Espérons
qu'il
ne
faudra
pas
en
arriver
pour
déclencher
l'application
stricte
des mesures de police sani-
taire
et
l'obligation
de
vaccination
de
tous
les chiens domestiques.
- La lymphoréticulose ou maladie des griffes du chat a
été
signalée une fois
seulement
àMadagascar
(33).
On observe de
temps
en
temps
au
laboratoire
d'anatomie
pathologique
des
l~ions
gan-
glionnaires
évoquant
ce diagnostic.
Malheureusement
il
est
impossi-
ble de
confirmerces
cas, du fait de l'absence
d'intradermo-réaction
et
de la méconnaissance de
l'évolution
de la maladie.
- La maladie de Newcastle des uolailes,
l'ecthyma
contagieux
des ovins
et
caprins
sontdes
affections
courantes
du
cheptel
rnalga-
149
-
che.
Jusqu'à
ce
jour
à
notre
connaissance,
aucun
cas
humain
n'a
été
diagnostiqué. On
peut
'donc qualifier ces maladies de zoonoses po-
tentielles.
- La vaccine
est
actuellement
une
maladie de «laboratoire» ino-
culée à des bovins
pour
fabrication du vaccin
contre
la variole.
Grâce à la vaccination
cette
variole a
été
éradiquée àMadagascar
dès
1914
alors qu'elle
continuait
à sévir dans la région de l'Océan
Indien (Ethiopie, Djibouti, Somalie)
jusqu'à
ces dernières années.
20)Rickettsioses
- La Fièvre Q
A ce
jour
Rickettsia burnetti
n'a
encore jamais
été
isolée à Mada-
gascar, bien
que
la présence d'anticorps ait
été
détectée lors d'en-
quêtes sérologiques humaines ou animales,
ou
lors de maladies de
l'homme. (34).
- Le
Typhus
murin
En
1944,
M. Millau identifia la maladie àTananarive
et
par
ino-
culation au cobaye
mit
en évidence les rickettsies chez l'animal.
Une
enquête
sérologique
effectuée
en
1970
vis à vis de Rickettsia
mooseri (29) apermis la mise en évidence
d'anticorps
sur 20 p.
100
d'une
population
de rats àTananarive, mais aucune souche
n'a
pu
être
isolée. La participation humaine, même chez
l'homme
pro-
fessionnellement exposé est rare.
3
0)Maladies
bactériennes
-Brucellose
Plusieurs fois soupçonnée chez des bovins,
porcins
ou
petits
ruminants, l'existence de la brucellose chez ces
animaux
n'a
jamais
pu
être
démontrée
de façon formelle. En
1973
une
souche
de Bru-
cella (47) a
été
isolée
pour
la première fois dans l'île
chez
une
chien-
ne. Cette souche a pu
être
assimilée à Brucella suis
biotype
5 de
Meyer plus
connu
sous le
nom
de Brucella canis. Ce
premier
isole-
ment
d'une
souche de Brucella àMadagascar depuis
que
la maladie
yest recherchée par les services médicaux
et
vétérinaires, souligne
la valeur exceptionnelle de la
protection
sanitaire
naturelle
que con-
fère à Madagascar son insularité mais aussi les dangers qui la mena-
cent. Dans ces conditions on ne saurait
trop
conseiller aux autori-
tés sanitaires médicales
et
vétérinaires de Madagascar de renforcer
le dépistage systématique
de
l'infection brucellique
tant
chez
l'homme
que
l'animal,
d'autant
plus
que
la maladie existe dans
l'île voisine de Maurice.
-150
-
A la suite d'avortements chez des caprins importés la maladie a
été
fortement
suspectée. Les différentes missions
d'experts
de di-
verses nationalités
ayant
étudié ce problème
n'ont
pas réussi àisoler
unebrucelle
de leurs prélèvements. Asignaler enfin le premier cas
positif de séro-diagnostic de Wright chez
l'homme,
mais
l'anamnèse·
n'est
pas suffisante
pour
conclure àune infection contractée
sur
place ou àl'extérieur.
-- Charbon bactéridien
Reléguée au rang de maladie sporadique grâce àla vaccination
massive systématique annuelle des ruminants, le
charbon
tend
à
redevenir endémique àMadagascar. Le nombre de foyers constatés
par le service de l'élevage ces dernières années a
été
le
suivant:
année 1976 1976 1977 1978 1979 1980
nombre
de
foyer
........
39 420 27 28 2 .
Parallèlement deux cas suspects de
charbon
humain diagnostiqués
cliniquement
ont
été
rapportés dans les archives de
l'Institut
Pasteur
de Madagascar en 1976. Ces
deux
'cas mortels
n'ontpas
eu de éon-
firmation bactériologique. Les difficultés de la vaccination des ani-
maux (personnel et moyens généraux insuffisants) ajoutées àla prati-
que quasi exclusive
d'un
élevage extensif donc essentiellement mo-
bile et àune certaine «insouciance» des éleveurs expliquent le
réveil de la maladie. L'incidence humaine
est
certainement beau-
coup
plus élevée qu'elle
n'apparait
en réalité. La consommation de
viande d'animaux malades ou morts est malheureusement
une
prati-
que encore
trop
courante en brousse. Seuls l'éducation des masses
rurales
et
le renforcement des personnels chargés des prophylaxies
et
de l'inspection sanitaire
permettront
d'obtenir
une diminution
des foyers
et
d'éviter ainsi
l'atteinte
des hommes.
,
--
Infection
àKlebsielle
Klebsiella pneumoniae, agent
courant
de pneumopathies (40)
du porc malgache, se retrouve également dans certaines affections
des lapins et des cobayes sous forme septicémique, éventuellement
il complique des strongyloses pulmonaires de ruminants.
La Klebsielle est un germe assez
fréquemment
isolé en milieu
hospitalier.
L'incidence de la maladie animale sur
l'homme
ou de la mala-
die humaine sur l'animal
n'a
encore jamais
été
signalée àMada-
gascar, il est possible
qu'elle
existe.
r
- 151 -
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