UN POIGNARD DU XVIe SIÈCLE - Bibliothèque municipale de Dijon

PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES 241
ANNEXE
UN POIGNARD DU XVIe SIÈCLE
(par M. J. Fléty, associé)
«En 1867, lors des travaux exécutés dans un des immeubles de
l'ancienne abbaye de Saint-Etienne, à Dijon, le sieur Michon, maître-
ouvrier plâtrier, trouva un. poignard entre les lattes d'un plafond
et le plancher de l'étage supérieur. Il est peu commun de rencontrer
une telle arme dans une cachette de ce genre ; il est rare de trouver
une œuvre de si petit volume dont l'exécution résume tant d'idées.
» II mesure en longueur 26 cm. 6, répartis ainsi : 10 cm. 5 pour la
poignée, 16 cm. 1 pour le fourreau. Son poids est de 350 grammes
pour la poignée et la lame et de 100 grammes pour le fourreau. Le
manche mesure 9 centimètres à Sa face antérieure et 10 centimètres
à sa face postérieure. Il paraît être, comme le fourreau, en bronze
ou en cuivre argenté. Il représente une vieille femme solidement
établie sur deux démons. Sa chevelure est hirsute ; son frontal
surmonté de deux cornes lui donne une apparence diabolique ; la
contraction de ses arcades sourcillières marque une volonté im-
placable ; la bouche entr'ouverte, dont la commissure des lèvres
s'abaisse, de même que l'orientation de la tête à droite, expriment
la lassitude et le dégoût. Le buste est nu ; une tunique, serrée à la
taille et retenue par une bride passant sur l'épaule gauche, laisse
paraître les membres supérieurs et les seins. A noter qu'en amples
plis la tunique couvre le bassin, de la taille jusqu'à mi-cuisse. Le
reste du corps est dissimulé par une jupe qui laisse néanmoins ap-
paraître le genou droit. C'est une vieille femme : son faciès, les rides
de son front, son cou maigre, son thorax desséché, ses seins pendants
le démontrent. Elle a vécu, elle a certainement procréé. Elle a lutté.
Elle est lasse. Son bras gauche musclé, terminé par une main soli-
dement appuyé sur sa hanche, de même que la jambe gauche qu'on
devine cambrée, dénotent cependant un reste d'énergie. Son bras
droit terminé par une main tenant une torche enflammée qu'elle
abaisse, l'index étendu s'appuyant sur elle, alors qu'aucun muscle
n'est contracté prouve qu'elle n'a pas de haine, mais un désir de
justice.
»
La garde est composée de deux démons au corps humain. Ils
sont opposés quant à l'orientation. Tous deux ont la tête ornée de
cornes et le dos portant des ailes allongées. L'un élève son bras
droit replié, la main reposant sur sa nuque, son visage paraît scruter
l'horizon, son torse est relevé, son bras gauche allongé ; il paraît
prêt à partir et de la main semble appeler son voisin. L'autre semble
s'éveiller, il est las, ses deux bras plies, les mains derrière le cou
il fait une demi-torsion du corps.
»
Le fourreau présente deux faces différentes. L'antérieure est
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DES
SÉANCES
ornée,
à sa
partie supérieure, d'une tête
de
faune
aux
oreilles
en
pointe s'élevant presque jusqu'aux cornes
de
bélier surmontant
le
front. Les arcades sourcillières sont contractées,
les
yeux immenses,
les pommettes,
le
nez, les lèvres très saillants,
le
mouton garni d'une
barbe abondante.
En
dessous, nous voyons
un
homme
nu, les
bras
élevés
et
écartés,
le
visage regardant
en
haut.
Il
paraît attaché
sur
une croix
de
saint André. Entre
ses
deux bras
se
trouve
une
ins-
cription difficile à lire : IXION probablement.
Il
est ceint d'une écharpe
dont les pans flottent
au
vent.
En
dessous, une rosace d'où part
un
ruban retenant deux cornes d'abondance.
Il en
sort deux serpents
dont
les
têtes
se
réunissent pour former
une
sorte
de
pointe
de
flèche.
La
face postérieure présente sensiblement
les
mêmes
par-
ticularités, avec cette différence qu'elle
ne
porte
pas
d'inscription
et qu'au lieu
d'un
homme nous trouvons comme sujet
une
femme
nue
qui d'un
geste élancé fait tourbillonner
un
voile.
La
tête
de
faune est reproduite, de même que
la
rosace, les deux cornes d'abon-
dance
et
les deux serpents.
» Ce document
me
paraît être
de la fin du xve ou du
début
du
xvie
siècle ».
Séance du 9 mars 1938
PRÉSIDENCE
DE M. C.H. ouiiSEL, vire-président
Le président donne lecture d'une invitation
de
l'Association
Guillaume Budé
à
assister
à son
congrès annuel,
à
Strasbourg,
au
mois d'avril prochain.
Il est
décidé que
la
Commission
s'y
fera repré-
senter.
Le président annonce
en
outre que,
par
délibération
du 5
mars
courant,
le
Conseil municipal
de
Dijon
a
donné
un
avis favorable
au classement
du
cours
du
Parc, propriété privée de
la
ville, comme
site pittoresque
et
historique
et
rappelle
que
cette demande
de
classement proposée
par la
Commission départementale
des
monu-
ments naturels
et des
sites avait
été
appuyée
par la
Compagnie
en
séance
du 9
février dernier.
Il signale enfin que M. Henri Drouot, membre résidant, vient
de
soutenir avec grand succès
sa
thèse
de
doctorat, Mayenne et la Bour-
gogne. IL lui adresse les vives félicitations de la Commission et souligne
l'intérêt capital
que
présentent, tant pour l'histoire
de la
province
que pour l'histoire générale
de. la
France,
les
deux forts volumes
consacrés
par son
confrère
à
cette étude
sur la
Ligue.
M.
G.
Grémaud, secrétaire, rend compte
de
deux excursions aux-
quelles
il
prit part les 27 février
et 6
mars derniers dans les environs
de Dijon,
la
première avec MM.
le
chanoine Chaume
et P.
Lebel,
POIGNARDS DL XVIe SIKCLli
présentés par M. J. Fl-KTY, le 23 lévrier 1938 (à gauche)
et le 6 avril 1938 (à droite).
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